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Belgique - Page 42

  • Bien des ciels

    Bien des ciels au-dessus du septième (2013) est le premier roman de Griet Op de Beeck, née en 1973. Publié avec le concours du Fonds flamand des Lettres, il a été traduit du néerlandais par Isabelle Rosselin pour les éditions Héloïse d’Ormesson en 2017. Depuis qu’elle a osé passer des cours de théâtre et des chroniques dans la presse à l’écriture de romans, Griet Op de Beeck enchaîne les succès : prix, traductions, théâtre, film...

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    La seconde épigraphe du roman – « Peut-être que lorsque nous voulons tout avoir, c’est que nous sommes dangereusement près de ne rien vouloir » (Sylvia Plath) – me semble après lecture un avertissement à ne pas prendre à la légère ce récit à plusieurs voix. Eva, 36 ans, aime observer les autres et les écouter, mais n’a pas encore vraiment compris comment vivre, sinon d’espoir. En revanche, elle sait réconforter sa nièce, Lou, pour qui douze ans est un âge épouvantable.

    Lou se sent si peu de chose par rapport à Vanessa la blonde, fille de footballeur connu, admirée par tous au collège. « Eva dit que je dois chercher les armes pour me défendre contre le monde. Eva dit que nous nous ressemblons un peu. Qu’elle n’a pas trouvé, elle non plus, que c’était une partie de plaisir, ces années de collège, mais qu’après ça s’arrange. »

    C’est grâce à Eva que Casper, un ami peintre (46 ans, marié) rencontre lors d’un vernissage sa séduisante sœur Elsie (42 ans, mariée) qui l’accompagne. Longtemps un adolescent rebelle, Casper est tout de même arrivé à faire ce dont il a besoin pour supporter la vie, à savoir peindre. Son père s’y opposait, il a fait des études de psychologie, avant d’oser faire le pas et de travailler dans son atelier. Quand il a, contrairement à ses habitudes, demandé à Elsie ce qu’elle pensait de sa peinture, elle a dit qu’elle le lui écrirait. Une lettre a suivi, délicieuse et magnifique, qu’il trouve d’une « justesse » bouleversante.

    Elsie, qui travaille dans un théâtre, et Walter, néphrologue, ont deux enfants, Lou  et Jack. La sœur d’Eva trouve important d’être aussi belle que possible, elle confie ses cuisses à la chirurgie esthétique. Casper lui propose par sms de dîner ensemble ; elle est tentée, mais elle hésite. Jos, 71 ans, le père d’Elsie et d’Eva – Jeanne et lui ont aussi un fils, Ben, le chouchou de sa mère, qui habite loin et a « réussi » – est le cinquième protagoniste du roman.

    Un an plus tôt, Jos tenait encore un restaurant. Depuis toujours, il boit trop. Il vient d’une famille de treize enfants. Eva passe chaque semaine chez ses parents et joue les réconciliatrices entre eux. Ils préféreraient qu’elle se case comme les deux aînés, « mais bon, chacun ses choix ». La philosophie de Jos, c’est que « certaines choses surviennent d’elles-mêmes, et déterminent presque tout ce qui suit. »

    De séquence en séquence, on découvre la vie des personnages, leur situation, leurs problèmes, leur façon de réagir. Eva est toujours disponible quand on l’appelle. Elle travaille comme psychothérapeute en prison. Parmi ceux dont elle s’occupe, elle s’intéresse particulièrement à Henri, « un beau Congolais qui possède à lui seul le charisme de plusieurs leaders mondiaux ».

    La première « catastrophe », pour Lou, se produit un jour en revenant des toilettes : un ruban de sa jupe s’est coincée dans sa culotte et ses camarades découvrent qu’elle porte une culotte « Kitty », tous se moquent d’elle. Un jour, sans que Vanessa la voie, Lou la surprend à voler dans un magasin. Peut-être a-t-elle désormais de quoi l’affronter si nécessaire ; en attendant, elle garde ce secret pour elle.

    Toujours à se plaindre, la mère d’Eva ne cesse de lui faire des remarques sur ses kilos en trop, peu propices à la séduction. Les bonnes résolutions ne tiennent pas longtemps quand on a le blues. Les rendez-vous d’Eva tournent souvent au fiasco. En revanche, elle encourage Elsie à revoir Casper. Pour Eva, Walter, souvent absent et peu attentionné,  n’est pas à la hauteur du bonheur que mérite Elsie.

    Griet Op de Beeck n’a pas l’ampleur littéraire d’un Stefan Hertmans. Dans Bien des ciels au-dessus du septième (une réponse d’Eva à Lou), elle passe d’un personnage à l’autre et, sous la description du quotidien, laisse apparaître des failles, des drames. Elle raconte simplement leurs rencontres, leurs dialogues, leur rumination intérieure. A chacun va se poser la question d’un choix important à faire, un choix personnel qui aura forcément des répercussions sur les autres.

    Bien que je prise peu cette construction du récit en très courtes séquences qui ressemble à celle de certains feuilletons télévisés, je me suis laissé captiver par le suivi de ces personnages, des relations entre les uns et les autres. La douceur des dessins de couverture (en français) est à la fois juste et trompeuse : au sein d’une famille, on peut se sentir très seul. Et encore davantage quand on ne se parle pas vraiment et qu’on fait semblant.

  • Invite

    Peroi CFC.jpeg« Au-delà de traduire le souffle, auquel renvoie la pièce [Diem], cet espace vide, ce non tissé m’est apparu comme autant de promesses, de gestes à poursuivre. La possibilité de continuer l’œuvre, à laquelle la tension et l’invisible renvoient, amène à penser une forme de présence dans l’absence. Le vide n’est en rien une absence, il invite au prolongement, à la respiration. Pour permettre aux gestes de se poursuivre, ou tout au moins de favoriser cette potentialité, il me fallait repenser la structure de l’outil, l’atelier mobile. »

    Elise Peroi, Absence/Présence in Ce qu'il reste de gestes, CFC Editions, Bruxelles, 2021

    En couverture : Elise Peroi, Assemblée, 2017,
    coton, soie peinte, 130 x 90 x 40 cm

  • Elise Peroi au Bota

    Depuis que j’avais vu son Sous-Bois, je me réjouissais à l’idée de découvrir d’autres œuvres textiles d’Elise Peroi. Là où se trouve la forêt, le titre de son exposition au Botanique, est prometteur. Cela vaut la peine de la visiter, bien que l’espace qui y est dédié m’ait déçue, à l’opposé du grand salon ensoleillé de la Maison des Arts de Schaerbeek.

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    © Elise Peroi, Semer (détail), 2021, lin, soie peinte, bois
    (désolée pour le jaunissement des couleurs, photo prise sans flash)

    Le Botanique : l’endroit paraissait idéal pour cette artiste. Mes beaux souvenirs de l’orangerie qui s’étire au-dessus des jardins ne m’avaient pas préparée au choc du chantier de restauration en cours. Effacée, la carte postale. C’est une forêt d’échafaudages qu’il faut traverser dans un long couloir puis autour de la rotonde, avant de monter à la « galerie » où n’arrive pas une goutte de lumière naturelle.

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    Restauration en cours au Botanique

    Mais l’exposition nous la rend, la lumière, celle des jardins, des bois, et l’ombre bienfaisante des arbres. Au centre de la salle, Forêt, une enfilade de quatre panneaux, aimante le regard. Près des murs, d’autres œuvres et je commence par celle que j’ai mise en premier, Semer, où l’artiste même semble nous accueillir : une femme se penche vers la terre. Les jeux des fils dans la double chaîne donnent du relief à cette apparition et l’œil s’attarde entre feuillages et fleurs, entre vides et pleins. On retrouvera cette figure dans Clairière, plus loin.

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    © Elise Peroi, Forêt (détail), 2021, lin, soie peinte, bois

    Le premier élément de Forêt – si c’étaient les quatre saisons, ce serait l’hiver – est en noir & blanc, ce qui donne toute une gamme de gris et accentue le contraste entre fils tendus et parties tissées. Dans Ce qu’il reste de gestes, la belle monographie très bien illustrée qui vient de paraître aux éditions CFC, le texte central d’Elise Peroi, « Absence/Présence », s’articule comme ses œuvres dans la dualité : « Pièce et processus », « Corps et outil », « Tisseur et jardinier », « Corps et décor ». Elle y cite entre autres François Cheng et Gilles Clément.

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    © Photo Thomas Jean Henri / Elise Peroi, Vue d’atelier pour Assemblée, 2017

    Je ne vous montre que des détails de cette grande œuvre installée au milieu de la salle – ma photo d’ensemble ne donne pas grand-chose. Le soleil se fraie un chemin entre les feuilles, éclaire un tronc, des branches, l’œuvre invite à se promener dans les quatre temps de ce paysage évoqué avec douceur. Non pas des couleurs passées mais des couleurs, des espaces où l’on passe.

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    © Elise Peroi, Pour faire une prairie (détail), 2020, lin, graminées

    Sur de petites étagères, Elise Peroi a déposé des graines glanées au Jardin Botanique. Des graminées sèches entrent dans le tissage de Pour faire une prairie, créent une bordure naturelle accordée aux fils de lin. C’est beau. Sa pratique artistique établit des liens subtils. On aurait envie de toucher, en plus de regarder. 
    Là où se trouve la forêt, l’exposition aussi se dédouble : Faire sillons est présenté en parallèle au Centre culturel de La Tour à Plomb. « Exposition miroir en deux lieux distincts », écrit Coline Franceschetto sur le feuillet du Botanique : « visant à mettre en exergue ce paysage dans la mise en perspective de notre système de représentation basé sur la verticalité et l’horizontalité. Une forêt levée, un champ sillonné. »

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    Awful Things, 2018 © memymom

    La grande salle du musée du Botanique accueille l’exposition Home Game de memymom, un duo bruxellois, Marilène Coolens et Lisa De Boeck, mère et fille. Cette rétrospective de plus de de 220 œuvres, de 1990 à aujourd’hui, permet de découvrir le « langage visuel post-moderne attrayant et haut en couleur » de ces autodidactes qui font tout elles-mêmes : « photographie, recherche des décors et des lieux, casting, éclairage et postproduction » (Botanique). Pas d’autoportraits mais des mises en scène. Un univers décalé en guise de « mémoires ». La vidéo proposée sur le site du Botanique présente très bien leur démarche.

  • En balade

    printemps,2021,coquelicots,moutons de soay,parc josaphat,noms de rue,féminisme,léonie keingiaert de gheluvelt,première femme bourgmestre,belgique,schaerbeekLe beau temps de ces derniers jours incite à prolonger la balade, enfin sans veste – la belle saison a véritablement commencé (même s’il n’y en a pas de vilaines, je vous le concède). Les coquelicots n’attendaient que cela et j’ai l’impression qu’ils ont tous choisi le même jour pour sortir leurs premiers jupons, comme ceux-ci au pied d’un tilleul de l’avenue Demolder.  

     

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    Au parc Josaphat, la faune locale se porte bien : ce petit lapin semble déjà habitué aux promeneurs, il ne s’encourt pas et me laisse gentiment le temps de le photographier.

     

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    Le couple de moutons de la race Soay, nés en 2019, qui ont emménagé au parc cette année, semble très uni. En général, leur laine brune tombe naturellement au printemps – à vérifier la prochaine fois.

     

     

     

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    Enfin, bien que ce collage ne soit pas récent, j’ai remarqué sous la plaque de l’avenue Huart Hamoir une nouvelle appellation : « rue Léonie Keingiart de Gheluvelt ». Cette féministe a été la première femme bourgmestre de Belgique, en 1921.

    A peine 6 % des rues bruxelloises – seulement 4 à Schaerbeek – portent des noms de femmes, comme on peut le voir sur une carte interactive. D’où cette action féministe pour « inciter les communes à donner des noms féminins aux futures nouvelles rues » (Elisabeth Groutars, RTBF Info).

  • Jeudi en vrac

    Le beau temps – hier soir l’orage a chassé le ciel bleu – et divers rendez-vous m’ont invitée au dehors ces derniers jours. Je vous parlerai donc lundi de ma dernière lecture. En vrac pour ce jeudi, quelques nouvelles du temps comme il va. La réouverture des terrasses qui avait commencé pianissimo va désormais allegro. Les températures quasi automnales de ce mois de mai 2021 ont fait place à une chaleur quasi estivale et cela fait du bien.

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    Hier soir avant l'orage

    Samedi dernier, avant la proclamation des lauréats du concours Reine Elisabeth 2021, nous avons découvert le centième « Je Sais Pas Vous », une « Histoire de la musique écrite » rondement résumée. La semaine avait révélé six excellents pianistes et moins de bons « musiciens », comme a dit Jean-Claude Vanden Eynde qui faisait partie du jury. L’épreuve finale m’a paru beaucoup plus bizarre que les précédentes : l’absence du public dans la grande salle du Palais des Beaux-Arts et donc des applaudissements nourris qui permettent de ressentir les modulations de l’enthousiasme, les distances, la soirée raccourcie… C’était moins chaleureux, magnifique tout de même, bravo !

    De jour en jour, je me demandais pour qui voter samedi soir et la dernière prestation, celle du pianiste français Jonathan Fournel, a levé toutes les hésitations : le prix du public de Musiq3 lui a été attribué, complétant son prestigieux Premier Prix de piano annoncé vers 23 heures. Installé à Bruxelles depuis 2016, Jonathan Fournel est artiste en résidence à la Chapelle Musicale Reine Elisabeth, sous la direction de Louis Lortie. Le classement complet est indiqué sur le site du Concours.

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    Pour vous laisser vous aussi en tête à tête avec le printemps, maintenant que le grand nettoyage de ma terrasse est quasi terminé, voici la liste de ce qui fleurit en ce moment : ancolie, bidens, campanule, clématite, cosmos, coquelicot (une première ici, j’en ai semé l’an dernier), géranium sauvage et géranium zonal, lavande, lychnis, nepeta, œillet, osteospermum, pélargonium, ruine de Rome, trèfle rose. Les lupins suisses se portent mieux depuis que j’ai mis leur pot à l’ombre d’un arbuste et trois épis s’y dressent déjà, chouette.