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histoire

  • Pastoureau en rose

    Après Bleu, Noir, Vert, Rouge, Jaune, et enfin Blanc pour terminer sa série « Histoire d’une couleur », Michel Pastoureau nous offre une suite, quelle bonne nouvelle ! Des traces anciennes à aujourd’hui, Rose. Histoire d’une couleur (2024) explore la présence d’abord discrète de cette couleur jusqu’au quatorzième siècle, avant qu’elle soit admirée, sans pourtant avoir de nom précis. Désignée enfin par un nom de fleur, le rose deviendra une couleur ambivalente, à présent adulée ou rejetée, écrit-il. 

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    Un rappel important : comme pour les précédents, lisez ce livre dans le format original (quasi carré) si possible. Avec ses très nombreuses illustrations (de qualité, souvent en pleine page, avec une légende explicative), bien choisies pour accompagner le texte, la découverte de l’album procure un plaisir raffiné, sans comparaison avec la lecture de l’essai en format de poche, à mon avis.

    « Le rose est-il une couleur à part entière ? » Cette question, Pastoureau la pose à  l’entame de son introduction. Le scientifique n’y voit qu’une nuance de rouge, l’historien note son absence dans le lexique des couleurs en grec et en latin. Ce n’est que vers le milieu du dix-huitième siècle que le mot « rose » va passer de la reine des fleurs à un adjectif de couleur ! L’auteur rappelle que son champ d’étude se limite aux sociétés européennes ; pour l’historien, « les problèmes de la couleur sont d’abord des problèmes de société ».

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    Hadès enlevant Perséphone. Peintures funéraires dans la tombe d'Eurydice,
    mère de Philippe II, roi de Macédoine, vers 340 avant J.-C. Nécropole de Vergina (Aigai), Thessalonique.

    Des origines au XIVe siècle, les traces visibles de rose n’en sont pas toujours, la patine du temps ayant fait son œuvre. Des découvertes récentes en Macédoine attestent l’emploi du rose pour peindre des vases ou des décors, obtenu tantôt par l’argile utilisée et son degré de cuisson, tantôt « soit par mélange de blanc de plomb, de blanc d’os et d’un peu d’ocre rouge, soit par la juxtaposition d’une petite touche de cinabre et d’une autre d’argile blanche. Le mélange des deux couleurs se fait alors dans l’œil du spectateur. »

    La plupart des peintres à l’œuvre en Macédoine « portent une attention particulière au rendu des chairs », aux carnations : plus claires pour les femmes, plus foncées voire orangées pour les hommes. Même observation sur les peintures murales de Pompéi ou d’autres cités vésuviennes, également sur les portraits funéraires du Fayoum.

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    Peinture murale provenant du triclinium de la villa de Publius Fannius Synistor, à Boscoreale (Campanie).
    New York, The Metropolitan Museum of Art

    Pastoureau, qui oriente ses recherches dans tous les domaines de la vie y compris les tissus décoratifs et les vêtements, a trouvé du rose parmi les couleurs liturgiques contemporaines (dimanches de Gaudete et Laetare), « un contresens » qui méconnaît l’histoire des couleurs, où le rose n’apparaît ni au Moyen Age ni sous l’Ancien Régime. Pas de rose non plus dans les blasons.

    Mais il est bien mentionné dans la Prammatica del Vestire (1343-1345) où l’on recense la garde-robe des grandes dames de Florence : les tons rouges dominent, avec toutes leurs nuances. Les contacts avec l’Orient, l’Inde et les conseils de leurs teinturiers vont provoquer une vogue nouvelle en Toscane pour les roses et les orangés, tirés du « bois de brésil » découvert par les Portugais en Amérique du Sud (bois qui a donné son nom au pays). Le rose devient à la mode en Italie, en France, en Angleterre, une couleur désirable pour les gens de cour et, dorénavant, une couleur admirée.

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    Terence, Comediae, Paris, vers 1410-1411,
    Paris, BnF, Bibliothèque de l'Arsenal, ms. 664, folio 75 verso

    Pastoureau raconte les hésitations du lexique pour la désigner, l’évolution de la culture des rosiers et des couleurs pour leurs fleurs, ainsi que le temps qu’il a fallu pour passer du terme « incarnat » (« plus près du rouge que de notre rose contemporain ») à l’adjectif « rose », apparu entre 1750 et 1780, quand la vogue des tons roses et la mode s’épanouissent dans les classes aisées. Les Anglais, eux, empruntent « pink » à l’œillet, qui portait ce nom bien avant que le mot désigne une couleur.

    En lisant Rose. Histoire d’une couleur, on découvre que les hommes portaient alors du rose comme les femmes ; Pastoureau nous le montre sur de beaux portraits du XVIIIe siècle. Comment le rose est-il devenu une couleur féminine (layette, rose Barbie) ? Pourquoi est-il mal aimé ou ambivalent ? Il a envahi le monde de l’hygiène avant d’être supplanté par le blanc, il a rendu populaire une célèbre panthère. Mais il reste ambigu : il y aurait un bon et un mauvais rose… (J’avoue ne pas souscrire pour autant à l’extrait qui suivra dans le prochain billet.)

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    Jean-Baptiste Greuze, Charles Claude de Flahaut, Comte d'Angiviller, 1763,
    New York, The Metropolitan Museum of Art

    J’imaginais trouver dans la dernière partie cette jolie palette du rose au mauve, des roses indiens, qui régnait dans les années 70, que ce soit pour les tissus, les couvertures de cahiers ou de livres (collection La Cosmopolite chez Stock, couvertures du Journal d’Anaïs Nin au Livre de Poche, par exemple). Mais l’histoire du rose s’arrête ici dans les années 60. Dans la conclusion, Pastoureau annonce que Rose inaugure une nouvelle série consacrée aux « demi-couleurs » : l’orangé, le gris, le violet et le brun. Il souligne « le caractère incertain du champ chromatique des cinq demi-couleurs ». On ne doute pas qu’il en tire de la belle matière.

  • Un défi

    Wulf Magnificent Rebels.jpg« Cette révolution de l’esprit a transformé non seulement la perception de qui nous sommes et de ce que nous pouvons faire, mais aussi de notre place dans le monde. Nous avons intériorisé le Moi de Fichte, même si nous n’avons pas entendu parler de l’écrivain. Nous pensons mener des vies autonomes – du moins, ceux d’entre nous qui ont la chance de vivre dans des Etats démocratiques. Pourtant cette liberté comporte des responsabilités et des dangers. C’est un défi que les amis d’Iéna ont affronté, tout comme nous l’affrontons de nos jours. »

    Andrea Wulf, Les rebelles magnifiques

  • Rebelles magnifiques

    Dans L’invention de la nature, Andrea Wulf a raconté les aventures d’Alexandre von Humboldt et sa vision du monde nourrie de sa curiosité et de ses voyages. Dans Les rebelles magnifiques (traduit de l’anglais par Marie-Odile Probst, 2024), elle nous emmène à Iéna, à la rencontre des « premiers romantiques » et de « l’invention du Moi », dans la dernière décennie du XVIIIe siècle.

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    L’autrice elle-même s’est inventée, en quelque sorte (Prologue). En révolte contre ses parents, elle a d’abord refusé d’étudier à l’université, lu beaucoup, travaillé, aimé, eu une fille à vingt-deux ans, puis s’est tournée vers une université allemande, attirée par les séminaires de philosophie. Ensuite elle a quitté l’Allemagne pour l’Angleterre et a trouvé sa voie – « ma voix. Littéralement. Je l’ai trouvée dans une langue qui n’était pas la mienne par la naissance. Et je suis devenue écrivaine. »

    Pour elle, nous sommes les héritiers de la façon d’appréhender le monde de ces « penseurs révolutionnaires » du cercle d’Iéna. Le goût profond de la liberté était leur quête obsessionnelle, à une époque où presque partout, des souverains décidaient de « maints aspects de la vie de leurs sujets ». Caroline Michaelis-Böhmer-Schlegel-Schelling, « une femme qui porta les noms de son père et de ses trois maris, mais qui refusa d’être cantonnée dans le rôle que la société réservait aux femmes » est au centre de leur histoire, où l’on rencontre Goethe, Schiller, Fichte, Hegel, les frères von Humboldt, Novalis, Schelling, les frères Schlegel, entre autres.

    Goethe, « le Zeus des cercles littéraires allemands », habitait Weimar mais aimait chevaucher jusqu’à Iéna, « nichée au creux d’une large vallée, dans le coude de la rivière Saale », pour y superviser l’aménagement d’un jardin et d’un institut botaniques. Il y logeait au vieux château. En 1794, on y parle beaucoup du jeune philosophe Fichte qui a proclamé le Moi « maître suprême du monde ». Goethe suit une conférence de Schiller à Iéna et les premiers échanges entre ce « réaliste têtu » et l’idéaliste qui le contredit sont « le début de l’amitié littéraire la plus féconde du siècle » entre ces deux hommes très différents.

    L’essai d’Andrea Wulf commence avec l’arrivée des principaux protagonistes dans les années 1794-1796. Caroline Böhmer, veuve à 24 ans, et le critique August Wilhem Schlegel qui l’a épousée en 1796 s’installent à Iéna. Elle l’assiste dans la rédaction d’articles bien rémunérés pour la revue Les Heures de Schiller, corrige son travail, publie des comptes rendus sous son nom à lui, comme cela se faisait le plus souvent à l’époque.

    La présence d’Alexander von Humboldt stimule Goethe, qui s’intéresse aux sciences autant qu’aux lettres, et apporte encore plus d’énergie au Cercle d’Iéna. Ils se fréquentent tous les jours, passent des soirées en lectures et discussions, rivalisent dans leurs écrits. Ensemble, Caroline et August Schlegel traduisent Shakespeare, avec un immense succès qui fait redécouvrir le dramaturge anglais comme « l’esprit de la poésie romantique formulée de façon dramatique ».

    Leur mariage est basé sur le respect mutuel, leur intérêt commun pour la littérature, l’amitié – et la liberté amoureuse qu’ils s’accordent l’un à l’autre. Pour le groupe d’Iéna, la poésie romantique se doit d’être « indocile, vivante et en perpétuelle évolution ». En juillet 1798, tous se rendent en vacances à Dresde, y admirent la Madone Sixtine de Raphaël, discutent sur l’importance et la compréhension de l’art. Un nouveau venu, Schelling, séduit tout le monde.

    Ses idées renouvellent l’enseignement à Iéna, ses cours deviennent très populaires. Mais sa présence assidue auprès de Caroline dont il est amoureux fait jaser (il a douze ans de moins qu’elle). Le frère d’August, Friedrich Schlegel, fait scandale en s’affichant avec Dorothea Veit, au divorce prononcé par un tribunal juif de Berlin. Son mari y a consenti et lui a laissé la garde de leur plus jeune fils. Malgré sa disgrâce, Dorothea est heureuse de vivre librement en « amante, mère, muse, collaboratrice et amie » de Friedrich, comme Caroline auprès d’August.

    Couples libres et scandaleux, accusations d’athéisme ou de mensonge, rivalités, disputes, maladies, drames : Andrea Wulf mêle habilement à l’histoire des idées le récit du contexte historique et la description des modes de vie ; c’est très vivant. J’ai aimé sa façon assez romanesque de présenter les personnalités du cercle d’Iéna, depuis leurs premières rencontres jusqu’à son déclin.

    Au début du XIXe de Lagarde & Michard, on aborde le romantisme à travers des extraits du fameux essai de Mme de Staël, De l’Allemagne (1813). Elle apparaît dans Les Rebelles magnifiques quand, bannie par Napoléon, elle part à la rencontre des penseurs et écrivains allemands. August Willem Schlegel sera son guide. Ces « premiers romantiques » vont influencer toute l’Europe, en France, en Angleterre, puis aux Etats-Unis. « Le Cercle d’Iéna a transformé notre monde » en osant « mettre le Moi et le libre arbitre au centre de la scène. »

  • Semblables

    alice ferney,les bourgeois,roman,littérature française,xxe siècle,famille,bourgeoisie,histoire,photographies,temps,vie,mort,culture« Personne n’accepte de le considérer réellement : nous sommes exactement semblables aux fleurs. Ronsard l’a dit de la beauté d’une femme, on a galvaudé ses mots et l’analogie paraît niaise alors qu’elle est tragique. Il ne s’agit pas de splendeur éphémère mais d’apparition et de mortalité. Nous durons ce que durent les fleurs : un moment minuscule. Si importants (attachants) une fois que nous sommes nés, nous voilà aussi contingents que ces reines à corolles, pistils et pétales. Nous ne sommes pas plus nécessaires qu’éternels ou résistants. Comme elles, nous apparaissons par les hasards de fécondations invisibles. L’attraction universelle lovée dedans les corps nous pollinise. Nos tiges à nous s’allongent aussi et toutes nos formes se déploient, la floraison nous révèle. Notre épanouissement vient et avec lui notre fertilité. Notre être entier atteint sa maturité magnifiée, c’est l’apogée. Chacun croit qu’il s’y maintient, tendu vers cette perfection, mais le cycle est invincible et le déclin s’amorce. D’abord imperceptible, il prend les rênes. L’usure, la douleur, les flétrissures minuscules se dessinent les unes sur les autres. Nous devenons ce grimoire de notre vie. En vérité nous mourons sur pied, comme la rose dans le vase – que nous admirons puis jetons aux ordures. Nous sommes de passage dans le vase. Le temps de notre vie est compté. La nature a été plus généreuse avec nous qu’avec les fleurs. C’est que nous sommes plus complexes à fabriquer. Mieux vaut nous réparer que nous recréer, ainsi fait la nature. Nous nous auto-réparons jusqu’à la fin. »

    Alice Ferney, Les Bourgeois, pp. 346–347.

  • Vivre son temps

    Pour revenir doucement à mes Textes & prétextes, voici quelques extraits de ma dernière lecture de mars : Les Bourgeois d’Alice Ferney (Actes Sud, 2017, début à lire ici). Ce roman raconte l’histoire d’une famille dont « Bourgeois » est le patronyme. A travers des séquences datées de 1897 à 2017, sans suivre l’ordre chronologique, Alice Ferney nous replonge aussi dans l’histoire du siècle dernier, tout en réfléchissant sur la manière dont nous vivons notre temps. Cela m’a beaucoup parlé.

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    « Il y a trois façons de vivre avec le passé : le contempler à l’instant où il est le présent, l’oublier quand il est perdu, en conserver à jamais le souvenir. » p. 90

    « Ils étaient tous les enfants de leur époque, éclairés par le passé, contemporains des idéologies qu’il aurait fallu combattre et qu’on avait laissées s’épanouir, ils avaient grandi pendant qu’elles grandissaient. Sous leurs yeux les idées les plus répugnantes avaient droit de cité et s’alliaient parfois aux valeurs les plus sacrées. La famille, la Patrie, le drapeau, même la terre et le travail, n’auraient plus après eux la même virginité. Qui nous garantit cependant, nous qui souvent jugeons, que nous ne prenons pas aujourd’hui des décisions qui mèneront à des violences et à des crimes encore bien pires que ceux dont nous les accusons, non pas de les avoir commis ou approuvés, mais de ne pas les avoir vus arriver. Le présent est lourd et opaque, la teneur des jours n’est pas historique. » p. 134

    « De la tenue ! Voilà à quoi avaient été éduqués les Bourgeois. La tenue exigeait discrétion et silence. Se tenir, c’était d’abord garder pour soi sa peine, sa souffrance, sa fureur, son inquiétude ou son effroi. Eviter d’exposer son émotion ou même sa joie. Tous vécurent ce temps des muets, raides et figés, clos au cœur même de leur famille. Il ne suffisait pas qu’une chose fût vraie pour être dite. Car ce qui est vrai n’en est pas moins vulgaire parfois. Se livrer est vulgaire. Le mot inconvenant était maître. On ne raconte pas sa vie. On ne déballe pas ses états d’âme. On ne pleure pas en public. On ne se donne pas en spectacle. Tout cela est proprement inconvenant. » p. 191

    « Notre psychisme est ainsi fait que nous oublions. Nous oublions les événements, la forme des journées que nous avons vécues, les pensées que nous avons eues, les sentiments et les humeurs qui nous ont envahis. Ne restent que des impressions sommaires. Le passé devient un grand résumé indistinct. Les dates s’emmêlent, des pans entiers s’engloutissent, et nous ignorons même ce que nous avons oublié. C’est merveille. Sans cette machine à estomper, sans cette sorte de gomme intérieure, nous serions éternellement dans le deuil, le chagrin et l’angoisse. Jamais nous n’oublierons ceux que nous avons perdus, ni la détresse que leur perte fit lever en nous, ni l’horreur de leur mort et de leur agonie. Nous oublions et c’est une grâce. Le présent nous capte. La vie nous entraîne. » p. 220

    « Et j’ai maintenant la loupe à la main. Je scrute les clichés qui ont donné l’éternité de l’image à des instants. Instants fêtés : les vacances d’été, les anniversaires, les épousailles qui sont des rencontres et les naissances qui sont des apparitions. Instants quotidiens : des enfants qui jouent sur la plage, une femme qui sourit au photographe (son époux), un chemin de randonnée où l’on marche le nez au vent, la rue à Paris où circulent des voitures de plus en plus diverses, une famille entière réunie. Chaque photographie a figé la rivière des moments mais les moments sont passés à jamais. Celui qui contemple l’image contemple le passé perdu et mesure la durée qui l’en sépare. Il traverse l’écoulement compressé dans sa mémoire, la rivière l’enveloppe. Il tombe dans un puits, il a le vertige, refuse de regarder. La mélancolie l’envahit et le sentiment qu’une tragédie se joue dans son dos. Car il n’a rien vu. Pendant qu’il était occupé à vivre, le temps était invisible, son passage lui échappait, il baignait en lui sans le penser et en ignorant l’avenir. Et maintenant l’avenir semble contenu dans le passé, en regardant le vieux cliché on le croit. Quoi de plus vrai lorsqu’il s’agit de la mort ? me dis-je. La photographie dit la vérité de la vie : tous mourront. » p. 321