Il ne faut pas nécessairement avoir un train à prendre – ou une voyageuse à aller chercher – pour descendre du square Riga vers la gare de Schaerbeek, place Princesse Elisabeth. C’est si agréable d’emprunter la belle avenue Huart Hamoir d’un côté et de la remonter de l’autre, ou d’emmener des enfants jouer là où « l’une des plus larges avenues-promenades de la capitale » s’arrondit pour faire place au parc et à la plaine de jeux du Hamoir (ils y sont invités à lire dehors tout l’été).
Le matin, ce sont les numéros impairs qui prennent le soleil, aussi c’est de ce côté que j’ai l’intention de prendre quelques clichés, et pour cela, mieux vaut longer le terre-plein central, à gauche du monument aux troupes africaines, d’où l’on voit mieux les maisons et les arbres.
J’ignore comment il se fait qu’on a planté le long du trottoir, en alternance avec des cerisiers du Japon, tant de ginkgos bilobas, plus fréquents dans les parcs – je vous ai déjà parlé, il me semble, des deux rares exemplaires femelles qui répandent ici en automne leurs fruits singulièrement nauséabonds (en ville, on ne plante plus que des ginkgos mâles aujourd’hui).
Sachez-le, je ne photographie ni les poubelles débordantes, ni les déchets abandonnés, ni les abris à vélos tagués, à quoi bon se lamenter une ixième fois de la malpropreté dans les espaces publics ? Passons.
A l’époque où les belles demeures de l’avenue Huart Hamoir (nom du bourgmestre d’alors) ont été construites, au début du XXe siècle, on n’y prévoyait pas de garage. Avec les voitures tout le long de la voirie aujourd’hui, ce n’est pas si simple de prendre une jolie vue d’ensemble, mais je vais essayer de vous montrer tout de même un peu de cette avenue schaerbeekoise pleine de charme.
Chaque façade diffère de ses voisines, mais en se succédant, leurs éléments – style éclectique, Beaux-Arts, Renaissance flamande, Art nouveau – forment des enfilades souvent harmonieuses. Les feuillages ignorent les limites des propriétés et ce continuum végétal contribue à la beauté des lieux. Des constructions plus récentes s’efforcent de respecter le rythme et le ton de la partition. ( Il y a des exceptions, comme cet immeuble « fonctionnel » aux étages heureusement masqués par un valeureux ginkgo).
Il faut lever les yeux pour apercevoir les ornements d’une toiture, de gracieux clochetons surmontés de fantasques paratonnerres, des fers forgés offerts au ciel pour le décorer, un sgraffite sous une corniche au-dessus d’un arc en pierre bleue qui achève de surligner une grande baie vitrée.
Sur le terre-plein de l’avenue se dressent notamment des frênes, des marronniers, des hêtres, des platanes à feuilles d'érable, des tilleuls, des houx. Certains sont à l’inventaire des arbres remarquables de la capitale.
C’est dimanche. Des enfants jouent à la plaine de jeux, un homme prend le soleil sur un banc. Tout est calme. Rien ne bouge dans les avenues avoisinantes, sauf une voiture de temps à autre.
Un drapeau belge près du toit attire mon attention sur une belle maison Art nouveau, haute et étroite. Le ginkgo biloba devant sa façade semble avoir fait régime pour s’y accorder. Quelle imagination de son architecte pour la toiture ! Deux fenêtres jumelles dont l’une est dotée d’un balconnet, à côté d’une lucarne originale en oblique.
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Quasi chaque façade appelle une lecture particulière, et selon le jour ou l’heure, je m’attarde à détailler l’une ou l’autre. Tiens, une coquille sur un fronton triangulaire, jamais remarquée encore – Schaerbeek fait le bonheur de tous ceux qui aiment l’architecture, le patrimoine, l’urbanisme au sens noble du terme. Voici l’occasion de vous rappeler que l’asbl PatriS organise à nouveau ses « Estivales », n’hésitez pas à écrire pour obtenir le programme, plein de nouveautés alléchantes.
Ça et là des pierres taillées retiennent le regard, ou les horizontales de ces garde-corps en fonte très travaillés sur toute la largeur d’une façade, aux deux étages. Et toujours, pour leur tenir compagnie, ces ginkgos à la silhouette si élancée. Dans le bas de l’avenue, en se rapprochant de la place et de la gare qui la terminent, des maisons et des immeubles ont parfois des décors plus simples, mais intéressent à leur manière par le jeu dans l’agencement des briques, des couleurs.
On restaure le bulbe principal de la jolie gare de Schaerbeek, qui accueillera bientôt un musée du train (ouverture prévue en septembre). Partout, en bas de l’avenue Huart Hamoir, des affiches annoncent la fête de la musique – ce sera au début de l’été. Il me reste à remonter l’avenue, côté pair – je le garde pour une prochaine fois, d’accord ?