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Bruxelles - Page 41

  • Turi Kumwé

    Elle m’a donné la vie – et tant d’amour. Maman s’en est allée.

    Pendant ces jours où je n’ai pu ni lui tenir la main, ni rafraîchir son visage, ce texte de Gioia Kayaga fut un baume : merci aux poètes des « fleurs de funérailles ».

    Turi Kumwé. On est ensemble.

                            

    Gioia Kayaga : « Turi Kumwe (On est ensemble) »

     

    En Kirundi, pour se dire au revoir,
    quand on quitte quelqu’un,
    un ami ou un membre de la famille,
    on peut se dire « Turi kumwé ».
    Ça signifie « on est ensemble » :
    malgré l’éloignement physique,
    on est unis par des forces invisibles ;
    on reste connectés.

    « Turi kumwé », pour dire :
    les liens qui nous tissent sont solides et sincères,
    ils ne craignent pas les kilomètres,
    ne pourront jamais disparaître.
    « Turi kumwé », pour dire :
    les liens qui nous tissent sont le sang, la mémoire,
    ils se déploient bien au-delà des étoiles du soir,
    ils sont faits de tout ce qui filera toujours entre nos doigts.
    « Turi kumwé »
    Juste deux mots pour dire tout ça.

    J’ai perdu des proches là-bas,
    au Burundi, plusieurs fois :
    mon grand-père, ma cousine…
    je n’ai pas pu être présente aux funérailles.
    Alors avec les autres, on se parle
    puis on se dit au téléphone ou par message,
    « Turi kumwé »
    deux mots lancés comme une bouée de sauvetage.
    On est ensemble :
    ce soir, moi non plus, je ne dors pas
    à distance, je te serre fort dans mes bras.
    On est ensemble :
    notre douleur en partage
    à distance, je sèche les larmes sur ton visage.
    « Turi kumwé »
    Je te garde avec moi.
    Tu me gardes avec toi.
    Juste deux mots pour dire tout ça.

    J’espère que vous me pardonnerez de vous parler de moi,
    plutôt que de Dieu, du ciel,
    de la folie de ce moment précis
    et de l’abîme de votre chagrin.
    J’ai une seule règle en poésie :
    être sincère,
    parler uniquement
    de que de ce que je connais bien.
    Et je ne sais rien du destin,
    je ne sais rien de votre peine,
    rien de celle que vous pleurez ;
    je ne sais rien de son chemin,
    de qui elle a été
    ni de combien votre cœur saigne
    de la voir s’en aller.
    Je sais seulement l’impuissance,
    la solitude, l’éloignement, le silence
    quand on ne peut ni dire au revoir à celle qui s’en va,
    ni embrasser ceux qui restent.
    Je connais ce poids qui leste,
    qui rend lourd et acide l’estomac.

    « Turi kumwé »
    Je veux juste vous écrire, vous dire :
    je suis avec vous, aujourd’hui.
    A travers le temps et le monde,
    à chaque naissance, chaque perte, chaque seconde ;
    nous sommes ensemble
    dans notre humanité ;
    nous partageons l’expérience,
    l’épreuve commune de l’humilité.

    Je suis avec vous, aujourd’hui,
    et nous sommes des milliers,
    dans les villes, les campagnes :
    des milliers de cœurs qui vous accompagnent…
    Des cœurs abstraits.
    Physiquement, vous êtes seul.e.s
    dans cette tempête.
    Seul.e.s sur le seuil,
    seul.e.s face au deuil universel
    des exilés, des prisonniers
    seul.e face au deuil intemporel
    des réfugiés, des confinés.

    Le deuil est une expérience personnelle
    qui se réinvente à chaque perte.

    Vous êtes seul.e.s sur le seuil,
    et il faut apprendre :
    apprendre à raviver les gestes,
    les mémoires anciennes,
    les rites des ancêtres
    inscrits au creux de nos ADN ;
    apprendre à inventer ses propres règles,
    ses traditions nouvelles,
    ses rituels collectifs et individuels
    pour apaiser la peine.

    Allumer une bougie
    pour accompagner l’âme
    regarder danser la flamme,
    peut-être même danser avec elle.
    Écrire des lettres sur papier :
    écrire les mots qu’on n’a jamais dits,
    les mots qu’on n’a pas dits assez souvent,
    qu’on n’a pas dits assez fort,
    les mots qu’on n’a pas dits une dernière fois.
    Prendre un seul jour ou plusieurs mois,
    écrire ces mots et, toujours,
    les libérer en les lisant à haute voix.
    Dresser un hôtel,
    brûler l’encens
    Accepter la tristesse,
    sentir l’odeur,
    entendre la voix
    Accueillir les signes qu’elle nous envoie
    Témoigner du supplice,
    dénoncer l’injustice
    Chanter en boucle cette chanson qui fait du bien
    Habiter en paix avec son chagrin
    Dessiner un portrait,
    en chérissant chaque trait
    Fabriquer des écrins
    pour les images, les objets
    Écrire une oraison vitale
    Se rappeler que personne ne disparaît, jamais :
    des âmes rejoignent la Lumière,
    des âmes rejoignent l’Univers.
    Les êtres qu’on aime deviennent des comètes,
    deviennent des anges qui nous protègent.
    Écrire un carnet avec les larmes et les sourires,
    noter chaque détail, chaque souvenir
    Rendre un hommage intime
    Se reconnaître victime, ensemble.

    Et partager.

    Partager l’émotion avec l’autre,
    avec les autres,
    refuser de porter seul sa peine
    comme on porterait une faute.
    Trouver les mots pour partager les Adieux,
    avec l’âme, plus qu’avec le corps.
    Trouver le moyen d’être là, pour eux
    d’être présent, pour ceux qui restent, encore,
    encore un peu.
    Être là, au-delà de la peur ambiante,
    de l’incertitude, du confinement.
    Être là, malgré l’éloignement,
    Inventer ses propres « Turi Kumwé ».
    Être là avec courage et créativité.
    Être là et tout réinventer.

    Je vous reviens... quand je pourrai.

    Tania

  • Forêt imaginaire

    ue,2006,bruxelles,mrbab,art,peinture,culture« Léon Spilliaert n’a pas eu que l’obsession du vide (du vide métaphysique ?), il a aussi eu celle des arbres. Il en a peint, dessiné et lithographié des centaines, des milliers. Je verrais bien une rétrospective où ils seraient tous réunis et qui pourrait constituer une gigantesque forêt imaginaire sans doute unique dans l’histoire de l’art. »

    Jean-Baptiste Baronian, Dictionnaire amoureux de la Belgique

     

    Léon Spilliaert, Maison au crépuscule, 1921, Collection particulière
    (Gouache, huile sur carton, 740 x 490 mm)

  • Spilliaert aux MRBAB

    « L’inclassable et mystérieux Spilliaert » titrait La Libre le 13 mars dernier pour présenter l’exposition de la Royal Academy à Londres, prévue ensuite au Musée d’Orsay à partir du 15 juin prochain. Puisque le chemin des expositions nous est actuellement défendu, voici le premier catalogue que je rouvre ici pour vous, celui de la rétrospective « Léon Spilliaert, Un esprit libre » aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB) à Bruxelles, en 2006-2007.

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    En couverture du catalogue de 2006 (nl) : Spilliaert, Baigneuse, 1910, Bruxelles, MRBAB
    (Encre de Chine, pinceau, pastel sur papier, 649 x 504 mm)

    En 1925, Spilliaert (1881-1946) répond à un questionnaire : « Mon activité favorite : la promenade. Mon idée du bonheur : vivre dans les dunes. L’endroit où je voudrais habiter : les dunes entre Nieuport et La Panne. » Il nous a laissé une œuvre picturale d’une « grande diversité de style, de contenu et d’esprit » et de nombreux dessins d’illustration « en étroite relation avec la littérature », souligne Anne Adriaens-Pannier, la spécialiste du peintre d’Ostende et de la côte (pour toutes les citations).

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    Léon Spilliaert, Boîtes devant une glace, 1904
    (Pastel, fusain sur papier, 585 x 401 mm), MRBA, Bruxelles

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    Léon Spilliaert, Autoportrait à la lune, 1908, MRBAB, Bruxelles
    (Encre de Chine, lavis, pinceau, plume, crayon de couleur sur papier, 488 x 630 mm)

    « Spilliaert demeure libre de toute éducation théorique ou historique, et se construit en autodidacte un vocabulaire d’images tout à fait personnel, rebelle à tous les exemples d’un académisme traditionnel. » Sa période considérée comme la plus créative va de 1899 à 1912, mais jusqu’en 1946, il a peint « avec une inlassable ardeur », tout en se tenant au courant des courants littéraires, artistiques et philosophiques. Il se rendait régulièrement à Bruxelles et à Paris.

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    Léon Spilliaert, Deux novembre. Feuilles blanches, 1908
    (Lavis d'encre de Chine, pinceau, crayon de couleur sur papier, 499 x 650 mm), Gand, MSK.
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    Léon Spilliaert, La princesse Maleine, 1910 (Collection particulière)
    (Encre de Chine, lavis, pinceau, craie blanche sur papier, 63 x 48 cm)

    Il commence à créer quand le symbolisme domine encore, avec « l’arsenal du dessinateur » : encre de Chine, pinceau ou plume, crayon de couleur, aquarelle. Déjà la manière dont il illustre deux recueils poétiques de Verhaeren, puis les trois volumes du Théâtre de Maeterlinck, témoigne de son originalité. De 1904 à 1909, il explore son environnement quotidien et se confronte à sa propre image, dans une série d’autoportraits.

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    Léon Spilliaert, La verrière; 1909, Collection particulière
    (Encre de Chine, lavis, pinceau, crayon de couleur sur papier, 645 x 505 mm) spilliaert,exposition,catalogue,2006,bruxelles,mrbab,art,peinture,culture
    Léon Spilliaert, Printemps, 1911, MRBAB, Bruxelles
    (Encre de Chine, gouache, pastel sur carton,701 x 891 mm)

    Puis il se détourne de l’introspection pour décrire la société qui l’entoure : femmes de pêcheurs, vues d’Ostende, de la digue, baigneuses, dirigeable... « Il est toujours à la recherche de l’universel qui se cache derrière l’accidentel ». Ses compositions évoluent vers « une abstraction simplifiée », un renouveau formel non reconnu par ses contemporains.

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    Léon Spilliaert, Le nuage, 1902, Collection particulière
    (Crayon, encre de Chine, lavis, pinceau sur papier, 253 x 372 mm)

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    Léon Spilliaert, La buveuse d'absinthe, 1907, Fondation Roi Baudouin
    (Encre de Chine, pinceau, gouache, aquarelle, craie de couleur sur papier, 105 x 77 cm) 

    A partir de 1912, Spilliaert vit une succession d’expériences diverses : on le reconnaît dans le milieu artistique – il expose –, il se fait des amis, supporte difficilement la première guerre mondiale, se marie et s’installe près de Bruxelles, devient père. Moins angoissé, apaisé par le mariage et la vie du foyer, il réalise des lithographies et continue son travail d’illustrateur. Il peint un autre genre de femmes, d’élégantes citadines.

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    Léon Spilliaert, La dame dans le train, La veuve, 1908, MRBAB, Bruxelles
    (Encre de Chine, lavis, encre brune, pinceau, crayon de couleur sur papier, 518 x 415 mm)
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    Léon Spilliaert, Hindoustan, 1920, Collection particulière 
    (Crayon, aquarelle, encre de Chine, pinceau sur papier, 470 x 599 mm)

    En 1922, il retourne à Ostende. En plus du dessin et de l’aquarelle, il découvre la gouache et « explore la légèreté de fantaisies orientées vers la mer et vers les paysages imaginaires ». Créant des effets picturaux surprenants, il réalise aussi des portraits d’amis « qui trahissent une pénétrante connaissance de la psychologie du modèle ».

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    Léon Spilliaert, Paysage d'hiver au lierre, 1915, Musée des Beaux-Arts, Gand 
    (Crayon, aquarelle, gouache sur papier, 285 x 237 mm)spilliaert,exposition,catalogue,2006,bruxelles,mrbab,art,peinture,culture
    Léon Spilliaert, Arbre derrière un mur, 1936, Collection Johan A. H. van Rossum
    (Aquarelle, gouache, encre de Chine, plume sur papier, 350 x 520 mm)

    Après 1928, sa quête spirituelle personnelle prend le dessus, nourrie de son expérience de la musique et de la poésie. La dernière période de son œuvre, considérée comme moins puissante, fait écho à ses nombreuses promenades dans les bois, les parcs. La nature l’inspire, il peint beaucoup les arbres. Il me semble qu’on regarde ces paysages d’un œil neuf aujourd’hui, je leur trouve un grand charme dans leur stylisation, leur simplicité apparente.

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    Léon Spilliaert, Retour du bain, 1908, Collection particulière
    (Aquarelle, pastel, crayon de couleur, encre de Chine, pinceau sur papier, 520 x 420 mm)
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    Léon Spilliaert, Jeune homme à l'écharpe rouge, 1908, Collection particulière
    (Encre de Chine, lavis, pinceau, aquarelle, gouache, crayon de couleur, peinture argentée sur papier,
    502 x 652 mm)

    Pour ma part, si je suis fascinée par l’atmosphère puissante et souvent étrange des œuvres de Spilliaert, qui culmine dans des encres très sombres et spectaculaires, dans ses nocturnes, j’aime beaucoup la façon singulière dont il a peint dans ses marines les jeux du sable et de la mer, de l’eau et du ciel qui s’interpénètrent ou se confondent. (Taf Wallet , peut-être influencé par Spilliaert, a su montrer cela aussi, d’une autre manière.)

    spilliaert,exposition,catalogue,2006,bruxelles,mrbab,art,peinture,cultureLéon Spilliaert, Marine jaune et mauve, 1923, MRBAB, Bruxelles
    (Aquarelle, gouache, pastel sur papier, 523 x 601 mm)
    spilliaert,exposition,catalogue,2006,bruxelles,mrbab,art,peinture,culture
    Léon Spilliaert, Marine bleue et jaune, 1934, Collection Johan A. H. van Rossum
    (Aquarelle, gouache sur papier, 493 x 683 mm)

    J’espère qu’après Londres, on pourra faire plus ample connaissance avec ce peintre belge très original et si personnel à Paris, l’été prochain, comme prévu. Sinon, bienvenue dans nos musées quand ils rouvriront. On peut admirer un très bel ensemble de Spilliaert dans les collections permanentes des MRBAB à Bruxelles et, à Ostende, au Mu.Zee (où il partage un espace privilégié avec Ensor) et à la Spilliaert Huis.

  • James Ensor

    Réunir à la Brafa treize peintures et plus de vingt dessins de James Ensor (1860-1949) ! Cet ensemble était présenté par Samuel Vanhoegaerden, un antiquaire de Knokke. Une belle façon de mettre à l’honneur ce grand peintre belge (un Ostendais, comme Spilliaert), méconnu des Français comme je l’ai remarqué un jour à l’émission Affaire conclue.

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    James Ensor, La rencontre, 1912, huile sur toile, 46,3 x 65,4 cm (Galerie Samuel Van Hoegaerden)

    Un article de Collect proposé sur le site de la Brafa commente une œuvre en particulier, Les Vents, une huile sur toile amusante de 1940. Voici quelques autres œuvres d’Ensor exposées par ce galeriste à Tour & Taxis (cliquer sur les photos pour les agrandir). 

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    James Ensor, Théâtre de masques, 1920-1925,
    crayons de couleur sur papier, 17,5 x 12 cm
    (Galerie Samuel Van Hoegaerden)

     

     

     

     

     

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    James Ensor, Vase, statuette, masques et coquillages, 1935,
    huile sur panneau, 21 x 27 cm
    (Galerie Samuel Van Hoegaerden)

     

     

     

     

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    James Ensor, La belle assiette, 1938,
    huile sur panneau, 23 x 33 cm
    (Galerie Samuel Van Hoegaerden)

     

     

     

    Quant à cette Sorcière, connue sous plusieurs titres, elle était présentée au stand de la galerie Douwes Fine Art (Amsterdam et Londres). Son personnage est fascinant et vous verrez, si vous ouvrez le grand format disponible sur le site, que le petit chien qui l’accompagne ne l’est pas moins !

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    James Ensor, Le Pèlerin, précédemment La Sorcière ou La Femme errante, vers 1925,
    huile sur panneau, 51 x 34 cm (Douwes Fine Art)

    Si vous les avez manqués, je vous signale pour terminer quelques extraits illustrés de Sur James Ensor par Verhaeren sur ce blog.

  • A la Brafa 2020

    La presse internationale traite la BRAFA de « petite sœur » de la TEFAF, la Foire des antiquaires de Belgique monte en grade depuis quelques années. On y voit, on y vend de très belles choses de qualité irréprochable (l’annonce d’une « saisie conservatoire d’une trentaine d’objets archéologiques et d’art » chez quatre exposants par l’inspection économique a jeté un froid, affaire (de provenance ?) à suivre). Cette année, l’invité d’honneur est devant la porte : cinq éléments du Mur de Berlin sont mis en vente aux enchères au profit d’associations caritatives et du Musée Art & Histoire au Cinquantenaire.

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    Brafa 2020

    Les rubans multicolores de la luxueuse moquette 2020 invitent à flâner dans les allées en se laissant attirer à gauche, à droite : 133 galeries y participent, dont 60 % de galeries étrangères. Je ne vous montrerai qu’une infime partie de ce que j’y ai admiré. D’abord, cette toile charmante de Van Dongen à l’entrée d’une galerie londonienne, où le peintre mondain a représenté sa fille. Plus loin, un petit cheval grec en terre cuite blanchie – dire qu’il date, malgré son matériau fragile, du troisième siècle avant J.-C. !

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    © Kees Van Dongen, L’ânier de Scheveningen, huile sur toile, 1912 (Omer Tiroche Gallery)

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    Cheval, Grande Grèce, 3e siècle avant J.-C.

    Les peintres belges sont mis à l’honneur à Bruxelles et j’ai aimé, chez deux exposants différents, ces paysages de Degouve de Nuncques, un peintre symboliste dont je vous ai déjà parlé. Ce crépuscule sur les étangs de Boisfort est proposé par une galerie néerlandaise (sur son site, vous trouverez d’autres peintures de lui et aussi un Intérieur de Jan Toorop, une nature morte de fleurs et de fruits signée Léon De Smet qui m’ont retenue un moment). Paysage enneigé aux oiseaux, lumineux et graphique, vient également des Pays-Bas. (Il faudra, bien sûr, que je vous parle d’un formidable ensemble d’un autre Belge fameux, j’y consacrerai mon prochain billet.)

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    William Degouve de Nuncques (1867-1935), Etang de Boitsfort, 1908,
    huile sur carton marouflée sur toile, 52 x 77 cm (Studio 2000 Art Gallery)

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    William Degouve de Nuncques (1867-1935), Paysage de neige avec oiseaux, 1918,
    huile sur toile, 49 x 60 cm (Rueb Modern and Contemporary Art, Amsterdam)

    Du côté des bronzes, voici deux sculptures très différentes. Tête de dieu fleuve, une « étude pour Le passage du Rhin », est signée Aimé Jules Dalou (dont Rodin a sculpté le buste) : expressivité, belle patine « verte et noire nuancée à l’antique » – vous en trouverez l’analyse bien documentée sur le site de la galerie Alexis Bordes. Quel contraste avec Les dormeurs de Georges Jeanclos, un artiste dont j’avais découvert à Lille la singularité émouvante. (Jeune femme endormie, un petit Bonnard de toute beauté, est visible à la galerie Pentcheff de Marseille.)

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    Aimé-Jules Dalou (1838-1902), Tête de dieu fleuve, vers 1906,
    fonte à cire perdue, H. 42, L. 25, P. 20 cm (Galerie Alexis Bordes)

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    © Georges Jeanclos, Les dormeurs, sans date,
    fonte à cire perdue, 20 x 50 x 34 cm (Galerie Patrice Trigano)

    Une galerie parisienne expose Devant la fenêtre du quai d’Anjou, une œuvre sur papier de Marc Chagall. La galerie Boulakia, également à Paris, pour qui Chagall est « Celui qui dit les choses sans rien dire… », présente une peinture à l’huile antérieure, Village noir et ciel rouge, réminiscence du shtetl natal où un cheval bleu tire une carriole. Une nature morte à l’avant-plan, avec un bouquet de fleurs – fenêtre et fleurs sont des motifs de prédilection dans son œuvre.

    7 Brafa 2020 Chagall Devant la fenêtre.jpg
    © Marc Chagall, Devant la fenêtre du quai d’Anjou, lavis d’encre de Chine,
    encre, crayons de couleur, pastel, crayon noir et gouache sur papier, 1962 (Galerie des Modernes)

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    © Marc Chagall, Village noir au ciel rouge, 1951, huile sur toile, 75 x 64 cm (Galerie Boulakia)

    Les peintures voyagent, les peintres aussi. D’Eugène Boudin, une petite vue de Venise a tout pour séduire. Une galerie londonienne expose une Vue de Paris signée Jean Dufy (frère de Raoul Dufy) : la Seine et ses ponts, le pont Alexandre III vers le Grand et le Petit Palais entourés de verdure, la claire place de la Concorde, la Madeleine, le Sacré-Cœur… Etonnante, non ? Remarquez que cette peinture provient de Chicago puis d’une collection privée.

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    Eugène Boudin, Venise, Le Mole à l’entrée du grand canal et la Salute, 1895,
    huile sur toile, 28,5 x 41,5 cm (Galerie de la Présidence)

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    © Jean Dufy, Vue de Paris, sans date, huile sur toile, 51 x 66 cm (Willow Gallery)

    Il vous reste un peu de curiosité ou de patience ? L’or poudroie sur un vase art déco de Camille Fauré aux couleurs nacrées, présenté par la galerie Cento Anni (Sablon) qui en propose plusieurs autres sur son site. Camille Fauré (1874-1956) avait un atelier spécialisé dans l’émaillage d’art. Enfin, de notre cher Léon Spilliaert, voici deux vues hivernales très bien encadrées ; ces aquarelles datent de 1915 et ont été exposées l’an dernier à la SpilliaertHuis d’Ostende. L’art de transformer le paysage en jardin zen. 

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    Camille Fauré, Vase Primerose, vers 1930,
    H. 30 cm (Cento Anni)

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    Léon Spilliaert, Dessins d’hiver, aquarelle, 24 x 24, 26 x 26, 1915 (Francis Maere)