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art ancien

  • A la Brafa (suite)

    Pourquoi pas un second billet sur la Brafa 2023 ? Vos commentaires enthousiastes m’y ont encouragée. De plus, Voyage d’un Européen dans le XXe siècle est une lecture au long cours, passionnante et éprouvante dans les pages terribles de notre histoire – ce sera une bonne manière de m’en extraire un peu.

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    Jean-Baptiste Monnoyer (1636-1699), Bouquet de fleurs sur un entablement,
    huile sur toile, 74 x 21 cm (Franck Anelli Fine Art)

    Commençons par le XVIIe siècle. Ce Bouquet de fleurs de Jean-Baptiste Monnoyer, dans son vase à l’antique, illustre bien l’art de la peinture de fleurs alors à son apogée. La description de la galerie incite à apprécier « le grand satiné du bouton de pavot à gauche, la trame hachurée et mouillée de lumière de la feuille d’acanthe » et « l’impalpable légèreté des rose pâle au centre ».

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    Quant à ce bénitier précieux en vermeil, dont le contour aux motifs végétaux pourrait évoquer (de loin) l’art nouveau, il date aussi du Grand siècle (Flandres, XVIIe). La scène sculptée représente « La purification de Naaman » dont le Livre des Rois dans la Bible raconte qu’il fut « guéri de la lèpre après s’être baigné sept fois dans le Jourdain sur le conseil du prophète Élisée » (Wikipedia). Un des trésors d’orfèvrerie présentés par Bernard de Leye.

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    Armand Guillaumin (1841–1927), Marguerite (fille de l’artiste), 1894,
    pastel sur papier, 35 x 27 cm (Galerie DR. NÖTH)

    Sans transition, comme à la Brafa, voici la bonne bouille de la petite Marguerite, un pastel sur papier signé « G. 94 » pour Armand Guillaumin, 1894. Troisième des quatre enfants de l’artiste, Marguerite est née en 1893, après Madeleine en 1888, Armand en 1891, et avant André en 1896. Le Portrait de petite fille du musée d’Orsay serait-il celui de sa sœur Madeleine, l’aînée ? J’imagine que dans ce cas la notice du musée l’indiquerait.

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    Edouard Vuillard, Madeline Descorps et son fils Bernard au jardin (détail), 1919-1920,
    peinture à la colle sur papier marouflé sur toile, 99 x 65 cm (galerie Taménaga)

    Madeline Descorps et son fils Bernard au jardin est une charmante étude d’Edouard Vuillard, datée de 1919-1920. En cherchant cette illustration complète (lien précédent), meilleure que ma photo en partie rognée, j’ai trouvé la première étude de cette scène, moins aboutie que celle-ci. Le nabi zouave (surnom de Vuillard dans le groupe) était un grand ami de Bonnard, le nabi japonard : « « Si je vous écrivais à chaque fois que je pense à vous, à notre passé, à la peinture, etc., vous auriez une bibliothèque à compulser. » (Vuillard à Bonnard, le 4 mai 1940)

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    Certains stands de la Brafa présentent des curiosités, comme ce lustre spectaculaire. Intriguée par des peintures sur des panneaux blancs, je suis allée les regarder de plus près. Des aquarelles italiennes, du XIXe, si j’ai bien retenu ce que m’a répondu le galeriste (je n’ai pas noté son nom). Cette trentaine de scènes de la vie quotidienne – des paysages, des bâtiments, des personnages à l’extérieur ou dans un intérieur – forment un ensemble très vivant et dans des couleurs harmonieuses. J’imagine le plaisir du collectionneur qui les a réunies de cette façon pour les observer tour à tour, selon l’inspiration du moment.

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    A droite : Edgar Degas, Danseuse, arabesque ouverte sur la jambe droite, bras gauche en avant,
    bronze réalisé à partir du modèle original en cire (1882-1895) par la fonderie Hébrard (1919-1973), 20,5 x 25 x 10,7 cm

    Quelques sculptures, pour terminer. Trois petites danseuses de Degas chez Hélène Bailly. La notice qui accompagne Danseuse, arabesque ouverte sur la jambe droite indique que ce bronze est une épreuve réalisée par le fondeur Hébrard à partir du modèle original en cire. Pour Degas, les modelages en cire étaient des exercices, il ne les destinait pas à la vente. L’occasion de s’interroger sur ce qui distingue l’œuvre originale des versions ou tirages ultérieurs.

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    George Minne, L'extase maternelle, 1923, marbre

    Autre exemple, la galerie Oscar de Vos présente sur son stand trois versions de L’extase maternelle ou Maternité (Moeder in extase) de George Minne : une version en marbre plus grande que celle en bronze et une autre (un plâtre ?) posée sur une table. D’un point de vue esthétique, on mesure l’écart entre la recherche de la justesse dans le rendu de la posture chez Degas et la manière épurée d’un Minne pour exprimer un état d’âme.

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    Ossip Zadkine, Homo sapiens, 1933-1935,
    Plâtre original patiné exécuté en 1936, 210 x 141 x 110 cm (A&R Fleury)

    Enfin (bien qu’en réalité, ce soit la première sculpture devant laquelle je me suis arrêtée à la Brafa), une grande œuvre de Zadkine intitulée Homo sapiens, un plâtre original patiné de 1936. Le Centre Pompidou possède cette sculpture en bois d’orme, « deux figures assises dont les corps s’imbriquent dans un ensemble monumental », de plus de deux mètres de haut. 

    L’homme pose sa main gauche sur l’épaule de la femme qui penche la tête vers lui. De la main droite, il tient un parchemin déroulé. Sur ses genoux, on distingue différents instruments de mesure. Je lis sur le site du musée parisien que « Bernard Dorival appréciait cette œuvre, considérant que Zadkine « a donné à la fameuse Mélancolie d’Albrecht Dürer comme une sœur moderne » ».

    Il me reste une œuvre contemporaine à vous montrer. A bientôt.

  • Vases et lampes

    Une déception tout de même à la Brafa 2023 : ne pas y voir des œuvres annoncées, comme un petit Monet repéré dans la presse avant ma visite ou un rare vase en céramique de Gallé mis à l’honneur sur le site (retiré après quatre jours).

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    Verreries Art nouveau à la galerie Cento Anni

    Je m’en suis consolée en découvrant sur le stand de la galerie Cento Anni ce bel ensemble Art nouveau avec des vases en verre multicouche de Gallé, qui signe aussi la jolie lampe au chapeau chinois décorée de chrysanthèmes bleus.

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    Exceptionnelle lampe en verre multicouche signée Daum, vers 1925,
    d
    écor émaillé de fleurs de pêcher sur le pied et le chapeau, H 67 cm (Cento Anni)

    Si vous regardez l’émission Affaire conclue, vous connaissez l’autre grand nom de la verrerie Art nouveau. Coup de coeur pour cette très belle lampe au décor émaillé de fleurs de pêcher signée Daum qui date de 1925 environ. Comme celle de Gallé, elle est éclairée aussi dans le pied. Quelle merveille !

  • A la Brafa 2023

    La prestigieuse BRAFA a retrouvé sa place en début d’année dans le calendrier des foires européennes et se déploie désormais sur deux halls de Brussels Expo au Heysel. 2023 étant l’année de l’Art nouveau à Bruxelles, des objets Art nouveau sont mis à l’honneur (dont de somptueux bijoux). Le tapis de la foire est imprimé de dessins du grand architecte belge Victor Horta, ainsi que la couverture du catalogue.

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    L’aménagement d’un stand importe pour attirer les visiteurs. Trois exemples : très « déco », ce stand expose au mur une « destruction » de Tadashi Kamawata, à partir de bois de palette récupéré. Sous un Concert champêtre de Botero, voici de beaux oiseaux en bronze du sculpteur animalier Jonathan Knight. Francis Maere en expose d’autres sous deux aquarelles de Spilliaert (déjà montrées). Je ne connaissais pas Jivko, qui signe cette jolie console contemporaine au hibou, en bronze doré.

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    De grandes fleurs en papier mâché datant de 1900 ont attiré mon regard : des modèles pour étudiants en botanique, devenus objets décoratifs. Mon coup de cœur floral est signé Redon : un magnifique Vase de fleurs au pastel ! Vu aussi des anémones de Renoir, des hydrangéas dans un jardin de Claus ou cette Terrasse fleurie sous la pluie d’Henri Martin, charmante bien que de composition fort symétrique.

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    Odilon Redon, Vase de fleurs, Pastel, 50 x 43 cm (Galerie Taménaga)

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    Henri Martin, Jour de pluie sur la terrasse fleurie de Marquayrol, huile sur toile, 79 x 108 cm (Willow Gallery)

    Autre coup de cœur, ce paysage de neige de Bonnard (ci-dessous). Il me semble que je n’en avais jamais vu de lui : j’ai adoré ces jaunes lumineux auxquels répond le bleu d’un buisson et des vêtements du personnage sur la gauche. D’une facture très différente, aussi sous un ciel jaune, j’ai aimé ce paysage aux arbustes givrés de Fjaestad.

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    Pierre Bonnard, La neige au Grand-Lemps, 1910, huile sur toile, 50 x 65 cm (Galerie Hurtebize)
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    Gustaf Fjaestad, La neige, 1919, huile sur toile, 100,5 x 140,5 cm (Ary Jan)

    Univers du bronze montrait de belles réductions de Rodin et cette séduisante Femme de Tours ou Mélancolie de Volti (1915-1989), dans la même veine que Jouvence présentée en pleine page dans La gazette Drouot qui cite le sculpteur : « Ce qui m’enchante dans un corps de femme, ce sont les rythmes et les volumes. » Sur le site d’UBD, une vidéo vous permet de visiter ce stand. Du rythme abstrait dans Gate, une sculpture contemporaine en acier poli de Tony Cragg, à l’entrée de la Galerie von Vertes.

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    Antoniucci Volti, Mélancolie ou Femme de Tours, bronze, H 60 x W 160 x D 80 cm (Univers du bronze)
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    © Tony Cragg, Gate, 2019, acier inox poli, 56 x 62 x 55 cm (Galerie von Vertes)

    En explorant le catalogue de la Brafa et les suppléments de presse mis à la disposition du public, je découvre plein de choses admirables que je n’ai pas vues. 130 galeries, ça ne se visite pas in extenso. Les œuvres devant lesquelles je me suis arrêtée, je ne les oublierai pas. Que dites-vous de ce Déjeuner du petit Jean Gosset en Normandie (1911) de Vuillard ? de L’écuyère sur l’âne vert (1981), un petit Chagall merveilleux ? Connaissez-vous Elisabeth Sonrel (1874-1953) ? Sa belle Yseult (aquarelle et gouache) somptueusement encadrée, d’époque art nouveau, m’a rappelé les sujets préraphaélites.

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    Edouard Vuillard, Le déjeuner du petit Jean Gosset, 1911, huile sur toile, 81 x 102 cm (Galerie des modernes)
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    © Marc Chagall, L'Ecuyère sur l'âne vert, 1981, huile sur toile, 27x 22 cm, (Galerie Claes) 

    J’ai bien failli  ramener chez moi – je plaisante – une petite marine de Paul César Helleu, chez le même galeriste (Ary Jan). Comment choisir entre ces Nuages du soir, Cancale d’Amédée Julien Marcel-Clément ou sa Matinée aux Sables d’Olonne ? A moins que vous préfériez Port du Croisic, un petit format de Jean Metzinger ?

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    Paul César Helleu, Dieppe, les falaises, 1884, huile sur toile, 21 x 27 cm (Ary Jan)

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    Amédée Marcel-Clément, Nuages du soir, Cancale, s.d., huile sur panneau, 44,5 x 80 cm (Ary Jan)
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    Jean Metzinger, Port du Croisic, 1903, huile sur carton, 22 x 27 cm (Galerie des modernes)

    Raccourcir, raccourcir ce billet – comme c’est difficile après une visite de la Brafa ! J’avais pensé vous montrer un étonnant bénitier en vermeil du XVIIe siècle, une paire de chaussures en bronze d’un hyperréalisme saisissant, mais je préfère terminer cet aperçu avec de l’art belge : j’aime ce Gardien de vaches, Joueur de flûte de Malfait. On peut lire sa biographie sur le site de la galerie Oscar De Vos, qui propose son catalogue en ligne.

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    © Hubert Malfait, Gardien de vaches, joueur de flûte, 1930, huile sur toile, 85 x 75 cm (Francis Maere)

    La Fondation Roi Baudouin exposait un paravent art nouveau de Paul Hankar et, parmi d’autres pièces remarquables, un portrait par Memling, revenu d’Amérique à Bruges « où Memling l’a peint au XVe siècle ». Je n’ai pas réussi à m’en approcher. Le public nombreux d’une conférence occupait tout le stand. Je me suis tout de même glissée derrière le dernier rang pour voir de plus près le Théâtre de Maeterlinck en trois volumes illustré de dessins originaux par Spilliaert. La FRB vous montre tout cela sur son site, si cela vous intéresse.

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    Théâtre de Maurice Maeterlinck, recueil en 3 volumes,
    dessins originaux de Léon Spilliaert (1902/1903) (FRB)

    A la prochaine pour un complément – court, c’est promis.

  • Au KMSKA à Anvers

    Restauré et rénové, le KMSKA (Koninklijk Museum voor Schone Kunsten Antwerpen, Musée royal des Beaux-Arts d’Anvers) a  rouvert ses portes en septembre 2022, après un énorme chantier qui lui a fait retrouver « sa splendeur d’antan, avec au centre, un tout nouveau volume muséal pour une expérience époustouflante d’espace et de lumière » (Site du musée).

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    Façade principale du musée 

    Il fait le plein de visiteurs curieux de découvrir la présentation nouvelle des collections : les maîtres anciens dans les salles du XIXe siècle repeintes dans des couleurs profondes, les modernes dans de grands volumes blancs du sol au plafond. Les œuvres contemporaines s’invitent ici et là. Conception étonnante : « le nouveau musée ne se verra pas depuis l’ancien, et vice versa. Il s’agit de deux univers distincts au sein du même bâtiment. »

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    James Ensor, Mer grise, 1880, huile sur toile, KMSKA, Anvers

    Dans quel ordre le visiter ? Le plan étage par étage ne suffit pas pour organiser son parcours et, après coup, on se dira qu’il aurait fallu mieux se préparer et prévoir deux visites, comme conseillé dans La Libre. Par admiration pour James Ensor, dont le KMSKA possède le plus grand ensemble d’œuvres, nous commençons par là. Près de sa belle Marine au nuage blanc et Mer grise, on a placé une petite plage de Vogels : le jeune Ensor sait comme son aîné rendre l’atmosphère de la mer du Nord, le ciel nuageux au-dessus des toits d’Ostende.

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    James Ensor, La mangeuse d'huîtres, 1882, huile sur toile, KMSKA, Anvers

    Dans cette salle où sont accrochées aussi des natures mortes aux chinoiseries ou aux légumes, on expose le bel éventail en nacre du peintre qui lui inspirera des couleurs nacrées fascinantes. Et un chef-d’œuvre de lumière et de couleurs, récemment restauré : La mangeuse d’huîtres. Plaisir de découvrir des œuvres d’Ensor moins connues, comme un petit bateau dans la grisaille, une cabine de plage sur roues, le dos d’une chaise face à la fenêtre…

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    James Ensor, Dossier d'une chaise, huile sur toile, KMSKA, Anvers

    Une vidéo étonnante explique la composition de L’Intrigue, extraordinaire groupe de masques, un autre trésor du musée. Près du plafond, un grand nez sort d’un mur : c’est une des dix créations du parcours pour les enfants réalisées par Christophe Coppens – chaque fois un détail agrandi d’une œuvre exposée dans la pièce – surprise garantie, amusante ou effrayante parfois (dans le goût contemporain du « ludique »).

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    Devant James Ensor, L'intrigue, 1890, huile sur toile, KMSKA, Anvers

    Passé une porte, nous voilà dans les escaliers du « nouveau » musée autour d’un puits de lumière. Ils débouchent dans le cabinet bleu nuit des arts graphiques puis des petites sculptures signées Rik Wouters, Rodin (Rose Beuret), Maillol… Et nous voici devant un escalier vertigineux qui tente tous les photographes – spectaculaire (103 marches).

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    Le plus long escalier du musée

    Au 4e étage, un immense volume d'une blancheur éblouissante présente l’art moderne par catégories : forme, couleur, lumière… sous un plafond très haut et original. Tant d’espace capture le regard et rapetisse les œuvres, à première vue. On passe d’un artiste à l’autre, on s’arrête devant ce qui retient le regard – difficile de percevoir une cohérence dans l’accrochage. Peut-être une visite ultérieure permettra-t-elle d’échapper à une certaine impression de fourre-tout.

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    Salle du premier étage, "Maîtres modernes"

    J’admire Femme près de la fenêtre de Henry Van de Velde, une nature morte cubiste de Marthe Donas, Dimanche de Gustave De Smet, Perle fine d’Oscar Jespers (collection FRB), Seize septembre de René Magritte… Sur le côté, l’accès aux Conflict paintings (2022) de Boy & Erik Stappaerts est limité : un étonnant couloir étroit où se touchent, s’affrontent deux champs de rayures de toutes les couleurs.

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    Henry Van de Velde, Femme assise près de la fenêtre, 1889, KMSKA, Anvers

    Un autre grand ensemble fait la fierté du KMSKA : plus de cent peintures, sculptures et dessins de Rik Wouters. Bonheur de revoir la lectrice au corsage rayé ou Nel en noir qui lit le journal. 
    « Couleur ». Les bleus magnifiques de la Table d’aquafortiste mènent à d’autres : une composition abstraite de Marc Mendelson, un autoportrait de Vantongerloo, Ciel de René Guiette, le vitrail d’une Pieta du XVIe siècle. Place au rouge : Fraises et champagne du grand peintre anversois Henri De Braekeleer, une nature morte de Jan Sluijters, La loge d’Evenepoel près des Deux printemps de Van de Woestyne…

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    Jan Sluijters, Nature morte avec fleurs, 1921, KMSKA, Anvers

    Il est temps de descendre au deuxième étage où règne Rubens. Une belle Epitaphe montre deux riches donateurs sur les panneaux latéraux autour d’un Christ montrant ses stigmates à trois apôtres. Des percussions incongrues me gênent dans les salles du grand maître, je les fuis pour m’arrêter devant Le Dauphin François de Jean Clouet, au visage pâle dans ses vêtements colorés, un petit format au cadre somptueux.

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    Jean Clouet, Le Dauphin François, fils du roi François Ier, 1520-1525,
    huile sur bois, 16 × 13 cm, KMSKA, Anvers

    Et voilà Dieu le Père entre des anges chanteurs et musiciens, chef-d’œuvre de Hans Memling. Madone entourée de séraphins (rouges) et de chérubins (bleus) de Jean Fouquet (Diptyque de Melun). Les œuvres phares des maîtres anciens du KMSKA sont superbement mises en valeur sur un grand mur où elles rayonnent. Schmerzensmann de Berlinde de Bruyckere (inspirée par Vlad L’Empaleur, 2006), entre en résonance avec les œuvres autour.

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    Hans Memling, Dieu le Père entouré d’anges chanteurs et musiciens, 1489, huile sur panneau, KMSKA, Anvers

    Je ne suis pas friande de ce qui distrait les visiteurs dans un musée (finira-t-on  par ne plus supporter de regarder des œuvres silencieuses et immobiles ?), mais on ne peut ignorer les musiciens et danseurs en résidence au KMSKA. Pendant cinq ans, ils se sont inspirés des maîtres anciens de la collection. On observe comment une posture, un geste attire l’attention vers telle ou telle figure d’un tableau. Parfois avec tant d’expressivité que nous applaudissons spontanément une danseuse qui évoluait au son d’une contrebasse.

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    Danse-performance devant Ferdinand de Braekeleer, Furie espagnole à Anvers

    Parmi les œuvres du XIXe, je suis attirée par un bel ensemble de Constantin Meunier : de petits bronzes (Puddler, Faucheur, Pêcheur) et une belle Maternité. Une ramasseuse de pommes de terre de Van Gogh. Comme dans les Salons de l’époque, on a superposé dans la salle suivante des toiles sur trois hauteurs, ce qui dessert celles du haut. Remarquable Sphynx parisien d’Alfred Stevens, charmants enfants de Jan Verhas, chats turbulents d’Henriette Ronner-Knip… C’est très varié.

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    Salle du "Salon", œuvres du XIXe siècle

    J’admire Visite d’Albrecht Dürer à Anvers en 1520  du peintre belge Henri Leys, dont on verra plus loin le portrait de sa fille Lucie Leys en robe verte. L’émouvant Michel-Ange au chevet de son amie morte Vittoria Colonna par Nicaise De Keyser. Je termine cette approche désordonnée et forcément incomplète en vous incitant à visiter un jour le KMSKA. La belle ville d’Anvers/Antwerpen vaut le voyage, toujours très animée et déjà parée pour Noël. (Merci, Ch. !)

  • A la Brafa 2022

    En visitant la Brafa au début de l’année 2020, nous ignorions les perturbations qui allaient suivre et aussi que ce serait la dernière « Brussels Art Fair » à Tour & Taxis. Après l’édition 2021 en ligne et dans les galeries, la Brafa 2022 a rouvert ses portes en changeant de lieu et de saison. Elle s’est tenue à Brussels Expo (au Heysel) du 19 au 26 juin.

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    On marche toujours beaucoup à la Brafa, forcément, si l’on veut voir un maximum de stands. Ici, du parking C jusqu’à l’entrée, on fait déjà une petite marche d’entraînement (si on ne recourt pas au service de navette automobile). Une fois passé le portail de sécurité (utile – voir le vol à la Tefaf récemment), on retrouve de belles allées couvertes de moquette et parées de verdure.

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    © François -Xavier LALANNE (1927- 2008), Tortue Topiaire II, 1992, Bronze

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    A la galerie Mathivet, miroirs et tables en bronze doré de Franck Evennou

    Art ancien et art moderne, de plus en plus d’art contemporain, le mélange des genres et des époques fait les délices des curieux. Cela dit, ce qu’on apprécie en découvrant un stand, c’est la cohérence et l’harmonie. Deux exemples très réussis : la galerie Mathivet (Paris), où on était accueilli par une grande tortue « topiaire » (1992) de François-Xavier Lalanne, exposait de beaux meubles et miroirs en bronze doré de Franck Evennou (°1958) ; le marchand d’art viennois Florian Kolhammer avait réuni des objets autour de 1900 et présentait une fascinante Forêt de bouleaux (1894) du peintre Karl Mediz.

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    Karl Mediz (Vienna 1868-1945 Dresden), The Birch Forest, oil on canvas, 1894

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    Otto Prutscher, Service à café pour 12 personnes, Ernst Wahliss Wien, vers 1910,
    sur une table "Elefantenrüsseltisch" d'Adolf Loos, vers 1900

    Sculpture phare de la Brafa cette année, malgré sa petitesse, une terre cuite de Maillol, Léda, à la galerie Dina Vierny (fondée par le dernier modèle du sculpteur en 1947). Sa version en bronze est au Metropolitan de New York. Quant au Belge Francis Maere, il présentait un spectaculaire « Atelier Eugène Dodeigne » (portraits et sculptures) en prolongement de son stand (tour virtuel proposé en ligne).

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    Aristide Maillol (1861-1944), Léda, 1900, White terracotta
    H 27.5 x W 12.8 x D 12.5 cm

    En juin 1902, Maillol fait sa première exposition individuelle à la galerie de Vollard. Trente-trois œuvres, dont des sculptures, des céramiques, des tapisseries et des meubles, ont été exposées. Octave Mirbeau, écrivain de renom âgé de 56 ans, a trouvé Maillol à l’exposition et a acheté « Leda ». Mirbeau l’a montrée à Rodin, et a écrit sur la réaction de Rodin dans sa lettre à Maillol :
    « Il a pris votre Leda, comme je l’avais fait, et l’a regardée attentivement, l’examinant sous tous les angles, la tournant dans toutes les directions. C’est très beau, dit-il, quel artiste! Il l’a regardée de nouveau et a ajouté : « Savez-vous pourquoi elle est si belle et pourquoi on peut passer des heures à la regarder ? » C’est parce qu’il ne cherche pas à éveiller la curiosité. » Et il y avait un regard mélancolique dans ses yeux. Je ne sais pas, je jure que je ne connais aucune sculpture moderne qui soit d’une telle beauté absolue, et d’une pureté absolue, si évidemment un chef-d’œuvre. (Rewald 1939, p. 13)
    Source : Aristide Maillol, Léda (ledamaillol.blogspot.com)
     / traduction Reverso

    Le décor floral, toujours remarquable, était magnifié par les éclairages. Quant aux installations d’Arne Quinze, artiste belge inspiré par la nature, l’invité d'honneur de cette édition 2022,  elles étaient spectaculairesChez Meessen-De Clercq, deux peintures très décoratives, d’inspiration végétale sur des fonds lumineux, un peu japonisantes, m’ont fait découvrir un autre artiste belge, Benoît Platéus (°1972, Liège). Surprise, elles sont datées de 2022 ! Comme les portraits de dormeuses de Khalif Thompson, un jeune peintre new-yorkais (°1995) à la galerie Zidoun Bossuyt.

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    © Thompson, Red Velvet, 2022,
    oil on canvas, handmade paper, papyrus, velvet, fabric, leather on canvas, 198,1 x 167, 6 cm

    En comparaison, Geer Van Velde fait figure d’ancien. Il était représenté chez divers exposants avec des toiles d’une même période, m’a-t-il semblé, dans le style de cette Composition de 1957 exposée chez Brame & Lorenceau. Dans sa peinture abstraite, « la pâte, légère, se fond en lumières d’aube, un peu comme si l'on était au début de toute couleur et qu’on la saisissait avant qu’elle ne s’épanouisse vraiment » (Wikipedia).

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    © Geer Van Velde, Composition, 1957, huile sur toile, 135 x 123 cm

    Encres de Rik Wouters, miniatures persanes et indiennes, sièges design, que de belles choses à admirer à la Brafa ! Je reviens à la sculpture avec trois noms, un connu et deux inconnus pour moi. D’abord Diego Giacometti (sculpteur-décorateur, le frère de Giacometti) avec son charmant Chat maître d’hôtel et un tapis qui s’intitule joliment La Rencontre, à la Galerie Berès. Je ne sais plus qui exposait la Diane de Reinhold Kuebart (1879-1937) dans sa course, toute en mouvement.

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    © Diego Giacometti, La rencontre, 1984, Ed.16/100,
    tissé au métier, au point et à l'aiguille, à la main, laine et trame coton, 275 - 175 cm

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    Reinhold Kuebart, Sculpture monumentale de Diane, 1920, bronze à patine verte, H. 213 cm

    Et puis, après avoir remarqué d’abord chez Douwes Fine Art une sculpture originale près d’une magnifique gravure de Rembrandt (La résurrection de Lazare), je retrouve à la galerie Boon plusieurs autres œuvres de Pablo Atchugarry. Cette belle série de « White Composition » en marbre de Carrare m’a fait chercher plus de renseignements sur ce grand sculpteur uruguayen, né à Montevideo en 1954. Son parcours est bien résumé sur le site de la galerie monégasque Adriano Ribolzi.

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    © Pablo Atchugarry, White Composition III, 2022, marbre blanc de Carrare, 44 x 25,5 x 18 cm

    Pas encore d’artiste femme dans cet aperçu ! J’ai aimé la sérénité yogique de Birth Bath (vers 1921), signé Janet Scudder (1869-1940), une sculptrice américaine connue pour ses œuvres destinées à décorer les jardins, selon le Metropolitan Museum. Je ne me souviens plus à quel stand, désolée.

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    Janet Scudder, Birth Bath, vers 1921, pierre marbrière, 88 x 73 x 36 cm

    Chez Kálmán Makláry Fine Arts, j’ai découvert l’étonnant « univers de graines » d’Ilwha Kim, une artiste sud-coréenne (°1967) qui travaille le papier de mûrier séché, puis l’enroule de façon à créer une graine rigide. En assemblant ces « graines », elle compose ensuite « des paysages entre peinture et sculpture ». Trois quarts de siècle après ce Parc peint par Utrillo, exposé à la galerie Willow.

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    © Ilhwa Kim, Piano song, 2015, hand dyed hanji, 164 x 132 x 13 cm

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    Maurice Utrillo, Le Parc de M. et Mme Utrillo au Vésinet, 1940,
    huile sur toile, 97 x 131 cm

    Luxembourgeoise, Su-Mei Tse (°1972) photographie une plante qui se presse contre la vitre pour recevoir un maximum de lumière. Attentive au « toucher » des plantes, elle « visualise la poésie de l’existence quotidienne », comme lu sur une notice de la galerie Nosbaum Reding, qui expose deux de ses Plants and shades (2017), où le flou modifie la perception. Ce n’est pas comparable, mais je l’associe pour terminer à un coup de cœur, chez Alexis Pentcheff : La petite fenêtre de Bonnard, ouverte sur son jardin du Cannet.

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    © Su-Mei Tse, Plants and shades, 2017, photographies couleur sur dibond

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    Pierre Bonnard, La petite fenêtre, 1946, huile sur toile, 58 x 45 cm

    Ce que je vous montre ici de la Brafa 2022 est très peu de chose, vous vous en doutez, parmi tant de pièces remarquables et de chefs-d’œuvre que vous pouvez découvrir dans le catalogue en ligne. Une question pour conclure, basée sur ma propre perception : tant d’art actuel ne risque-t-il pas d’y faire de l’ombre aux anciens et même aux modernes ?