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Culture - Page 195

  • Delvaux et les gares

    Delvaux, « L’homme qui aimait les trains », décuple la magie de Train World depuis un mois. Si vous avez déjà visité ce superbe univers du train inauguré en 2015 à la gare de Schaerbeek, retournez-y avant le 15 mars 2020 : l’exposition des peintures de Paul Delvaux (1897-1994) dans ce cadre est une expérience magnifique. Si vous ne connaissez pas encore Train World, c’est une occasion en or pour y aller.

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    Sur la place princesse Elisabeth, devant la gare de Schaerbeek

    Intitulée d’après le bel essai de Camille Brasseur sur la passion du peintre pour les trains et les gares, durant toute sa vie, l’exposition remporte un succès mérité. Sur la place devant la gare, on a installé un fourgon à marchandises décoré d’une jeune fille en rouge, deux motifs empruntés à son œuvre. Je signale le billet combiné de la SNCB : on sort du train à la gare de Schaerbeek, la porte à côté donne accès à Train World où la visite commence dans l’ancienne salle des guichets (petit plan disponible à l’entrée).

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    Aux éditions Snoeck (détail de Chrysis en couverture)

    Jeune, Delvaux hantait la gare du Luxembourg à Bruxelles ; par son père, il reçut un accès libre aux espaces réservés aux cheminots – il peindra quasi toujours les gares de l’intérieur, plutôt que leurs façades. L’exposition se décline en deux temps : on prend d’abord l’ascenseur pour découvrir à l’étage une trentaine de dessins, d’études préparatoires, d’encres de Chine aquarellées. Sur une vue de l’ancienne Gare du Midi, je découvre sa fière allure d’antan avec une sculpture monumentale au-dessus de l’horloge. La palette de Paul Delvaux et des objets témoignent de ses passions : ses petits trains, une maquette de son atelier dans le grenier de ses parents, le képi et le sifflet offerts en 1984 « lors de sa nomination de chef de gare d’honneur de la gare de Louvain-la-Neuve » (son rêve d’enfant).

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    Bannières dans la salle des pas perdus, en face des guichets

    Puis on redescend pour sortir vers les quais et entrer dans les grands halls de Train World, où une vingtaine d’œuvres majeures sont exposées tout au long du parcours. Dans le Hall 1, des vues de la gare du Luxembourg en 1922, pas loin d’où il habitait, montrent la circulation sur les voies, les cheminots au travail, les panaches des locomotives à vapeur et les maisons de part et d’autre. Ce sont des peintures d’atmosphère, encore impressionnistes, dans les tons bruns et gris, parfois rouille, que Delvaux utilise au début, avec des touches de blanc pour la lumière, les vapeurs, la neige. Il peint aussi des paysages mosans.

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    © Paul Delvaux, Les cheminots de la gare du Luxembourg, 1 - 1922,
    Bruxelles, Collection privée en dépôt au musée d'Ixelles

    Les trois lampes, une huile de 1964 (C.P., collection privée), illustre la prédilection du peintre pour « l’heure bleue », ce moment où la couleur du ciel fonce avant la nuit. Une jeune femme aux seins nus tend les bras vers deux enfants qui regardent le passage des trains. Tous les éléments du décor sont rendus avec précision : bâtiment éclairé de l’intérieur, quais, voies, locomotive et wagons, pylônes et fils électriques, signalisation…

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    © Paul Delvaux, Les trois lampes, 1 - 1964, Collection privée

    L’année suivante, il peint Les ombres (C.P.), une composition étonnante à l’entrée du Hall 2 : décor ferroviaire sur la gauche ; arbres aux branches dénudées au centre, projetant leurs ombres sur du sable ; jeune femme rêveuse en robe blanche décolletée sur la droite, assise sur une banquette sur un ponton en bois où une porte ouverte conduit le regard vers… la mer – étrange !

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    © Paul Delvaux, Petite place de gare, 1 - 1963, Saint-Idesbald, Fondation Paul Delvaux

    Trois peintures délicieuses sont accrochées à l’autre bout de ce hall : Faubourg (C.P.), Petite place de gare et La Gare forestière, en face de laquelle on peut s’asseoir sur un banc pour l’admirer à l’aise. Des scènes faussement silencieuses, pour Delvaux des décors sonores. Dans les années soixante, il maîtrise l’art de créer un « climat », comme il dit, une atmosphère mystérieuse, contemplative, malgré le réalisme avec lequel il peint. Comment fait-il ?

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    © Paul Delvaux, La gare forestière, 11 - 1960, Saint-Idesbald, Fondation Paul Delvaux

    Ses personnages vus de dos nous incitent à regarder, à nous engager avec eux, ils nous font entrer dans le tableau. Le jeu fantaisiste des lumières et des ombres, la composition très architecturée, tout nous donne l’impression d’être sur le seuil d’un autre monde, d’un ailleurs où l’on n’accède qu’en entrant dans la gare, qu’en montant dans le train, en laissant derrière nous le monde quotidien. Embarquement pour le rêve.

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    © Paul Delvaux, L'Age de fer, 2 - 1951, Ostende, MuZee

    L’Age de fer (1951) est très représentatif du réalisme magique de Delvaux, avec cette femme nue au grand chapeau dont la main conduit le regard vers le wagon en bout de voie. Dans sa jeunesse, le peintre fréquentait la foire du Midi et y avait visité le Musée Spitzner : la vision à l’entrée d’une Vénus endormie, une figure de cire qu’un mécanisme caché faisait doucement respirer, serait à l’origine de ces nombreuses femmes nues qui habitent ses peintures.

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    Photo de Paul Delvaux dans le train

    Ne manquez pas ce merveilleux voyage à Train World : voir ces Delvaux dans une telle atmosphère est une expérience forte et inoubliable. « Soudainement, ce musée est habité », dit François Schuiten, qui a œuvré à Train World avec deux architectes-scénographes belges, Véronique Carlier et Pascale Jeandrain (ExpoDuo). Vous y verrez aussi des photos d’un peintre qui se sentait si heureux quand il dessinait ou peignait qu’il rêvait de créer un tableau dans lequel il pourrait vivre.

  • Quelque chose cloche

    desarthe,la chance de leur vie,roman,littérature française,famille,états-unis,france,culture« « Tu as remarqué ? Du matin au soir, presque tous les jours, des catastrophes, des crimes. Ça me donne l’impression d’être criblée, en morceaux. On écope, on écope. Mais la plupart du temps, on reste assis à côté de la radio, devant l’ordinateur, complètement cons. »
    Elle éclate en sanglots et Lester la prend dans ses bras.
    « Le monde n’est pas pire qu’avant, murmure-t-il dans les cheveux de sa mère. Il se manifeste différemment. On peut pleurer pour des gens que l’on ne connaît pas. Il faut pleurer pour ceux que l’on ne connaît pas. » Puis il ajoute, plus bas encore : « Et prier. Prier pour eux.
    – Qu’est-ce que tu marmonnes ? demande Sylvie en reniflant. Tu te moques de moi ?
    – Non, je t’aime. »
    Sylvie s’écarte soudain de son fils. Elle le dévisage. Quelque chose ne va pas dans cette réplique. Elle pense : Je n’ai pas élevé un enfant pour qu’il me rassure. Je n’ai pas élevé un enfant pour qu’il me dise « je t’aime » avec bienveillance. Quelque chose cloche chez ce garçon. »

    Agnès Desarthe, La chance de leur vie

  • Une anti-héroïne

    La chance de leur vie d’Agnès Desarthe est un roman aux personnages étranges. Dès le début, pendant le vol qui emmène Hector et Sylvie avec leur fils Lester aux Etats-Unis, où Hector a été engagé comme professeur d’université pour un an, d’où le titre, le garçon de quatorze ans pense à leur mort possible et s’exerce à la sérénité. A l’hôtesse qui s’excuse d’avoir renversé de l’eau sur lui et s’enquiert de son nom, il répond « Absalom Absalom ». Hector, plongé dans un journal, n’a rien entendu. Sylvie s’en tient à la devise de sa belle-mère : « S’étonner toujours, se démonter jamais. »

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    © Edward Hopper, Matin à Cap Cod

    Quand ils arrivent à leur résidence, celle d’un professeur en année sabbatique à Aix-en-Provence, Lester s’obstine à vouloir qu’on l’appelle de son nouveau nom, déclare avoir été baptisé dans l’avion, son « baptême de l’air ». Il a un sens aigu de la repartie, ce n’est pas un adolescent comme les autres. Non seulement, il connaît Faulkner, mais il lit déjà Les confessions de Saint Augustin. En lui-même, il appelle Dieu « mon chéri » : « Protégez mes parents » est son mantra.

    D’emblée, Sylvie ressent sa singularité – « Personne ne me ressemble. » Contrairement à Hector, elle est timide, réservée, appréhende les nouvelles rencontres. Elle a toujours soutenu son mari et décidé de surmonter ses appréhensions ; elle s’inquiète pour son fils devenu adolescent, l’âge de tous les dangers. Un jour, dans le bus, quelqu’un l’avait prise pour la grand-mère de Lester ; ni lui ni elle n’ont protesté. Cela convient à Sylvie de « se contenter de l’observer sans se fatiguer à l’éduquer ».

    Mère et fils sont très proches, se devinent l’un l’autre. Elle s’intéresse à ce qu’il lit, à ses jeux, à ce qu’il fait, se contente de ses réponses. Quand il l’appelle « Sylvie », elle lui demande de l’appeler « maman ». Elle s’étonne de le voir depuis l’enfance frayer avec une troupe de « bras cassés, d’idiots du village ». A présent, elle redoute qu’au collège, on s’en prenne au petit Français qui porte des espadrilles et non des baskets. Agnès Desarthe a l’art de révéler ses personnages à travers des détails concrets et surtout à travers des gestes, des attitudes.

    Hector trouve dans le dépaysement une légèreté nouvelle : « On est bien ici. On est mieux ici. » Il suggère à sa femme de se rendre à l’Alliance française, d’en ramener des brochures qui lui donneront des idées d’activités possibles, puisqu’elle ne travaille pas. Sylvie ne se sent à l’aise nulle part, ne sait jamais que dire ou comment se comporter en société, même pas chez Farah Asmantou, la directrice du département de langues romanes, qui les reçoit gentiment chez elle. Zlatan lui manque, le beau Yougoslave que sa belle-mère lui a envoyé quand elle a su qu’elle était enceinte, quinze ans plus tôt, si serviable et attentionné. Il baragouinait, elle lui avait appris à parler un français correct. Hector, lui, le tenait à distance ; dans sa famille, on ne fraie pas avec les domestiques.

    Sylvie s’inscrit à un atelier de poterie. Pétrir la terre, en faire sortir les bulles d’air exige de la force, c’est comme un combat. Lauren, qui anime l’atelier, l’encourage et s’accommode de ses silences. A la première soirée avec Hector et ses collègues, elle observe les minauderies des femmes qui trouvent son mari très séduisant. Au professeur de littérature espagnole venu faire connaissance, elle se présente comme « la femme d’Hector » ; il lui répond « Andromaque, la fidèle ». Elle ajoute, quand il l’interroge sur sa profession, « Je ne suis rien. » « « Je ne suis rien », se répète-t-elle en silence et cette phrase l’apaise, l’isole et la protège. »

    Dans sa chambre, pendant ce temps-là, Lester continue son dialogue avec Dieu, ses prières obsessionnelles. Il entraîne ses camarades dans des rituels fantasques. La situation de cette famille est banale, la suite en partie prévisible : Hector aime son épouse, mais ce séjour à l’étranger, comme une parenthèse, lui donne l’occasion de laisser libre cours à ses désirs. Une bonne âme se chargera d’en informer Sylvie, qui n’en dira mot. Lester, que sa mère croyait connaître, va s’attirer des ennuis. C’est lui qui va secouer ses parents si préoccupés d’eux-mêmes qu’ils ne remarquent pas ses dérives.

    La chance de leur vie raconte l’histoire d’une famille transplantée dans une culture étrangère. Ce n’est pas une comédie à la David Lodge, même si l’ironie est présente, les remarques sur le langage savoureuses – plutôt un drame du quotidien. Si Hector l’égocentrique s’épanouit, il n’en va pas de même pour Sylvie, toujours en retrait des autres, aux réactions déroutantes. Pendant leur séjour, le terrorisme frappe au Bataclan et ils s’inquiètent pour leurs amis parisiens. Le roman d’Agnès Desarthe délivre peu à peu leurs « errements intimes » comme l’écrit Claire Julliard dans l’Obs. Le silence ou la passivité de son anti-héroïne semble délétère. Quant à Lester, aussi solitaire qu’elle dans le fond, c’est le personnage le plus émouvant de cette histoire au goût amer.

  • Postérité

    Dali Magritte (93).jpg« La postérité a donné raison à Magritte même si de leur vivant, Dalí fut la star jusqu’à New York alors que la reconnaissance de Magritte n’arriva que très tard. Mais Dali n’a pas eu de suivants en art, alors que Magritte reste très contemporain. Toute sa vie, il a peint la pensée et le mystère. Son interrogation sur la dissociation entre le mot et la chose, entre l’image et la réalité, entre nos sens et le monde reste d’une stupéfiante modernité. C’est d’ailleurs ce Magritte-là, conceptuel, qui séduisit après-guerre, les grands peintres américains comme Jasper Johns, Warhol, Rauschenberg qui achetèrent Magritte. Aux Etats-Unis, il est d’abord un conceptuel dans la continuité de la peinture comme « cosa mentale » disait Léonard de Vinci. »

    Guy Duplat, Magritte et Dali : le choc de deux icônes à Bruxelles, La Libre Belgique, 10/10/2019.

    Exposition Dalí & Magritte, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles > 9/2/2020

    © Magritte, Le beau langage, 1952 (Collection privée)

     

  • Dalí & Magritte

    « A l’occasion des dix ans du Musée Magritte, les Musées royaux des Beaux-Arts ont réuni une centaine d’œuvres qui invitent à la fois à voyager dans l’univers de Salvador Dalí et à creuser le dialogue avec le travail de René Magritte. L’un et l’autre ancrent le surréalisme dans une recherche fondée sur l’exploration de la représentation mimétique. » (Michel Draguet)

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    Entrée des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (au bout de la rue, le Palais de Justice)

    Ainsi s’exprime le conservateur des MRBAB dans le Guide du visiteur disponible à l’entrée de l’exposition Dalí & Magritte. Cette brochure d’une trentaine de pages (à télécharger) reprend toutes les étapes du parcours bien conçu autour de points de rapprochement ou d’opposition entre les deux peintres : « œil & avant-garde, portraits & choses, dedans & au-delà… »

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     © Dalí /  © Magritte, Le conquérant, 1926 (Leslee & David Rogath)

    A l’entrée, La lunette d’approche de Magritte (1898-1967) introduit avec humour au brouillage logique des surréalistes. Une ligne du temps relate les relations entre Magritte et Dalí : en 1925, Magritte peint à Bruxelles ses premières œuvres surréalistes et Dalí (1904-1989) a sa première exposition personnelle à Barcelone. Ils se rencontrent à Paris en 1929. Invité à Cadaquès, Magritte y peint Le Temps menaçant : il faut entrer dans le cube où une projection s’en inspire, à 360°. En plus du mouvement des nuages dans le ciel, on y verra lentement apparaître puis disparaître les motifs du tableau (resté en Ecosse).

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    Expérience immersive 360° à partir du Temps menaçant de Magritte

    Chez les deux peintres, l’œil joue un rôle central ; l’un et l’autre sont attachés au rendu réaliste des figures reconnaissables dans leurs toiles, bien que celles-ci ne visent pas à la représentation pure et simple. Magritte cherche à rendre les idées visibles, Dalí peint avec réalisme des visions fantasques. Ses premières toiles comme le Portrait de Maria Carbona révèlent une technique formidable, on verra plus loin un ravissant petit portrait de Gala (1932).

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    © Dalí, Portrait de Maria Carbona, 1925 (Musée des Beaux-Arts de Montréal)

    Dalí cherche à séduire ; Magritte ne cherche pas à plaire et opte pour l’artifice afin de susciter, par un sentiment d’étrangeté, l’interrogation sur les images. De nombreuses œuvres exposées viennent de musées étrangers (américains surtout) et de collections particulières. On connaît bien La magie noire (1945) du Musée Magritte, où le corps d’une femme (Georgette M.) bleuit au-dessus de la taille sur fond d’azur et de nuages, on s’amuse à la comparer avec La magie noire (1934) d’une collection privée, un autre nu avec une colombe sur l’épaule.

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    © Magritte, La magie noire, 1934 (Collection privée)

    Le motif du feu, qui apparaît déjà en 1925 dans une toile de Magritte où une maison brûle (tableau dans le tableau Nocturne), est particulièrement spectaculaire dans La découverte du feu, un tuba enflammé qu’on pourrait associer à la crinière en feu d’une tête de cheval (en réalité il fondrait). Dalí, en pleine guerre d’Espagne, s’en est-il inspiré pour ses girafes en feu qui éclairent un dîner dans le désert (dessin au fusain de 1937) ? La girafe apparaît aussi chez Magritte, qui lui fait prendre un bain de cristal (gouache de 1946).

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    © Dalí, Dîner dans le désert éclairé par les girafes en feu, 1937, fusain sur papier
    (Dalí Museum, St Petersburg, Floride, USA)

    Quand l’heure sonnera, ou la rencontre d’une statue et d’une montgolfière, a trouvé place dans une salle sur les « détournements et célébrations ». Les deux surréalistes ont transformé  une petite Vénus de Milo : Magritte lui donne des couleurs, Dalí y ouvre des tiroirs ! Tous deux, comme Arp ou Max Ernst, utilisent des formes biomorphes (Magritte, Le sang du monde) ou molles. Par exemple dans les paysages imaginaires de Dalí : La mémoire de la femme-enfant, L’énigme du désir ou Ma mère, ma mère, ma mère. Dans Les idées de l’acrobate, Magritte relie différentes contorsions avec un fusil et un tuba.

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    © Magritte, Le sang du monde, 1927 (Collection privée)

    Tout un mur pour le Couple aux têtes pleines de nuages de Dalí : les panneaux reprennent en silhouette les formes du couple dans L’Angélus de Millet, tableau culte de Dalí. La tête de la femme, à gauche de l’homme, s’incline vers lui. Les paysages désertiques avec une table à l’avant-plan sont typiques du peintre espagnol, avec une précision incroyable dans les détails de l’arrière-plan. Il partage avec Magritte le goût de peindre des nuages dans un ciel bleu, de jouer sur intériorité et extériorité, entre autres.

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    © Dalí, Couple aux têtes pleines de nuages, 1936
    (Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam)

    L’exposition se termine sur des toiles tardives, comme ce Magritte représentant deux jeunes filles qui se promènent en ville, l’une habillée, l’autre nue. A la fin de leur vie, les deux peintres étaient sollicités pour des portraits. Une photographe professionnelle capturait les détails du fascinant portrait d’Enid Haldorn. Dalí a aussi peint Mme Isabel Styler-Tas (Mélancolie), une composition inspirée par Piero della Francesca : l’étonnante combinaison de formes humaines, minérales et végétales y est assez fascinante.

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    Affiche à l'entrée de l'exposition (au-dessus de la Diane d'Ossip Zadkine, 1937)

    « Flirts surréalistes », titre L’Echo. Bien plus passionnante que je ne l’imaginais, l’exposition Dalí & Magritte réussit à associer ces deux « monstres sacrés » de manière convaincante. Le parcours bien balisé et le petit Guide aident les visiteurs (nombreux) à regarder et à comparer leurs oeuvres. A voir aux Musées royaux des Beaux-Arts jusqu’au 9 février 2020.