Perle du patrimoine schaerbeekois, le square Riga ne manque pas de façades intéressantes. J’aimerais posséder un peu plus de vocabulaire architectural pour vous parler des éléments remarquables qui rendent ses maisons si particulières et si agréables à observer au passage. Voyez, par exemple, la Villa Regina, dont le nom se détache sur un cartouche à dominante bleue. « Maison bourgeoise de style éclectique », selon l’Inventaire du patrimoine architectural de la Région bruxelloise. Cliquez sur la notice : vous y découvrirez, aux mots soulignés, la définition des « coussinets », d’une « serlienne », des « aisseliers », d’un « brisis »…
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Villa Regina
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Mars qui rit
Ce samedi 8 mars, journée internationale des droits des femmes, les réseaux féministes ont rappelé les combats à mener encore et toujours pour plus de respect et d’égalité – merci à toutes celles qui s’activent, exposent, manifestent. A Bruxelles, l’appel du dehors était irrésistible par ce premier jour quasi printanier de l’année, assez doux pour s’asseoir en terrasse et se laisser caresser par le soleil, ou mieux encore se promener.
Allons au Moeraske ! Un décor original a pris place sur la clôture du jardin partagé, signé « Le cercle déchets d’œuvres » : cette asbl schaerbeekoise, dans le cadre d’un contrat de quartier durable, a organisé des ateliers axés sur la consommation de fruits et de légumes de saison, d’où la création d’une fresque collective sur le thème « nous sommes ce que nous mangeons ». Ces céramiques inspirées par le contenu de nos assiettes ont des couleurs réjouissantes.
Sur le chemin, des jardiniers avec une brouette. En me voyant prendre une photo, l’un des deux m’interpelle : « Vous voulez voir quelque chose de très rare ? » Bien sûr ! L’homme est spécialiste des mousses et nous annonce une hépatique dont quelques spécimens ont été observés dans la zone des potagers : la « Sphaerocarpos michelii ». Nous lui emboîtons le pas et il nous emmène devant un coin de terre presque nue, fort humide, puis me tend une loupe de botaniste. Très rare et… très petite, cette hépatique ressemble à un minuscule chou-fleur vert (au milieu de la photo). Encore merci, monsieur le jardinier.
La lumière toute neuve de ce jour de mars réveille la roselière du Moeraske, le marais alimenté par le Kerkebeek où des canards s’élancent sur les ondes et font trembler les reflets des arbres. Beaucoup de promeneurs profitent de cette belle journée et laissent leur chien en liberté – en voilà un si fasciné par l’eau qu’il s’y jette sans lâcher la balle qu’il tient dans sa gueule – juste envie de nager un peu, et il ressort.
Près d’un grand tronc couché envahi par le lierre et qui barre le chemin le long du chemin de fer, un avis de la Cebe-Mob – nous sommes dans un espace naturel protégé – explique les nouvelles balises du sentier de promenade. On l’a repoussé le long du talus boisé pour permettre la régénération de la pelouse sèche le long du chemin de fer.
En haut du talus, les cris des perruches vertes nous font lever les yeux vers leur nid, immense. Beaucoup s’activent dans les environs, elles se sont visiblement installées au Moeraske comme dans la plupart des parcs bruxellois. Ce ne sont pas ici les grandes perruches vertes, mais une espèce plus petite, les conures veuves (Myiopsitta monachus) ou perruches moines. « L'espèce a ceci de remarquable qu'elle est la seule parmi les perruches à construire de vastes nids collectifs à entrées multiples, faits de branches et brindilles, lesquels peuvent atteindre plusieurs mètres d'envergure. » (Wikipedia)
Le réveil printanier n’est pas encore très visible sur les arbres, mais leurs ramures semblent s’étirer sous le soleil de mars, comme les bras, la colonne et les jambes des pratiquants du yoga dans la posture… de l’arbre. Visiteurs bruxellois, savez-vous que vous pouvez participer jusqu’au 14 avril à l’enquête publique sur le « plan régional nature » ?
De retour dans les rues de Schaerbeek, en direction du square Riga, arrêt devant une jolie façade : sous un arc de briques rouges, entouré de feuilles, un ornement en faïence offre au regard son cœur bleu comme le ciel du jour.
« Tandis qu'à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps. »
Th. Gautier, Premier sourire du printemps -
Cheminée carrée
En photographiant cette cheminée, rue Metsys (près d’un bâtiment industriel transformé en lofts, il me semble), j’ignorais qu’elle était la dernière cheminée carrée en briques de la région bruxelloise depuis la démolition, l’an dernier, d’une autre cheminée carrée à Molenbeek. « Fin XIXe siècle, les cheminées ont évolué du carré au rond pour pouvoir monter plus haut, profiter d’un meilleur tirage et offrir moins de résistance au vent. C’est une briqueterie de la région de Vielsam qui fabriquait ces briques en trapèze, posées en rond par des maçons spécialisés. » (Bruxelles Fabriques)
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Côté rue
Même là où nous sommes déjà souvent passés, un jour ou l’autre, question de lumière ou d’humeur, un détail attire soudain l’attention. Cela m’arrive régulièrement quand je flâne dans ma commune au hasard des rues. Et chaque fois, excusez-moi de le répéter, Schaerbeek me fait de l’œil : il y a tant à voir quand on a le temps de s’attarder.
Une énigme, pour commencer : ce « door ons, voor ons » (par nous, pour nous) inscrit dans la pierre en haut d’un pilastre, rue d’Anethan, derrière l’église Sainte Elisabeth. Cette maison rénovée abrite aujourd’hui une asbl d’aide à l’enfant, gérée par la communauté flamande. Je serais curieuse de connaître l’ancienne affectation de ce bâtiment et son histoire.
Dans une autre artère qui part de la Cage aux Ours (nom populaire mieux connu à Bruxelles que celui de la place Verboekhoven) – je vous parlerai une autre fois de sa métamorphose en cours, l’installation récente d’une passerelle métallique au-dessus du chemin de fer commence à faire jaser, pour des raisons esthétiques autant que budgétaires, le retard apporté aux finitions du site n’arrangeant rien –, la commune a placé sous la plaque de rue une brève notice sur l’artiste dont elle porte le nom, ici Jean-François Portaels, un peintre belge. Tout près, ce bel encadrement sculpté dans la pierre bleue, de style art nouveau, garde aussi son mystère qu’une photo trouvée sur Wikimedia n’éclaire pas. Tout renseignement vous vaudra ma gratitude.
Les Schaerbeekois qui passent par là – ne disons pas où, il ne faudrait pas attirer les coquins – ont déjà tous repéré ce nouveau membre de la Cité des Anes, qui décore joliment la cour d’une maison (la photo date de l'été dernier). Un clin d’œil à Camille et Gribouille, nos chères mascottes du parc Josaphat, qui ont de nouvelles attributions « au secours de l’environnement », ai-je lu dans Info Schaerbeek : les souffleuses de feuilles y ont été bannies, pour le confort des promeneurs et l’économie, je suppose.
De temps en temps, je photographie des arbres par-ci par-là. En automne, certains sont encore plus remarquables, mais ce sera pour un autre billet que je projette d’écrire. Voici tout de même un feuillage de saison, n’est-ce pas que la rue en est enchantée ?
Les portes et les fenêtres dessinent le visage d’une façade, j’aime les observer. Ici un splendide auvent de pierre surmonté d’un sgraffite, commande d’un franc-maçon, comme l’indiquent l’équerre et le compas. Là les courbes du fer forgé dessinent un panier fleuri au-dessus d’une porte ; les grilles décoratives qui protègent les vitrages ou entourent les cours et jardinets font parfois le cachet d’une rue.
Des campagnes de sensibilisation attirent de temps à autre l’attention sur ce petit patrimoine qui embellit un bâtiment, riche ou modeste. Bien l’entretenir est la meilleure façon de le préserver d’une restauration coûteuse ou pire, d’une disparition pure et simple. Certains propriétaires le négligent. Heureusement, d’autres bichonnent ces détails décoratifs. La Région bruxelloise offre une aide aux particuliers, qui l’ignorent trop souvent.
C’est parfois tout en haut que résident les plus beaux atours d’une façade. Que dites-vous de ces superbes sgraffites art nouveau, ces femmes des quatre saisons, sans doute de Paul Cauchie ? Si vous ne le connaissez pas, je vous conseille de visiter un jour la maison du plus célèbre des sgraffiteurs bruxellois, à Etterbeek.
Enfin, à hauteur des passants, s’ils ne sont pas perdus dans leurs pensées ou trop pressés, de belles choses se présentent qui méritent un regard, un sourire, comme ces corbeilles de roses qui nous charment à toutes les saisons. Peut-être voulaient-elles signifier à l’origine que le commanditaire avait les moyens, ou du goût pour l’artisanat. Qu’importe aujourd’hui : ces fleurs de pierre nous offrent, à chaque passage, un certain parfum d’autrefois.
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Vous m'avez dit
Vous m'avez dit, tel soir, des paroles si belles
Que sans doute les fleurs, qui se penchaient vers nous,
Soudain nous ont aimés et que l'une d'entre elles,
Pour nous toucher tous deux, tomba sur nos genoux.
Vous me parliez des temps prochains où nos années,
Comme des fruits trop mûrs, se laisseraient cueillir ;
Comment éclaterait le glas des destinées,
Comment on s'aimerait, en se sentant vieillir.
Votre voix m'enlaçait comme une chère étreinte,
Et votre cœur brûlait si tranquillement beau
Qu'en ce moment, j'aurais pu voir s'ouvrir sans crainte
Les tortueux chemins qui vont vers le tombeau.
Emile Verhaeren, Les heures d'après-midi