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Culture - Page 209

  • Comment c'est

    Abdourazzoqov huit-monologues-de-femmes.jpg« Excusez-moi, vous ne pourriez pas fermer les fenêtres et ne laisser entrer personne, le temps que je suis là ? J’ai demandé à mon chauffeur de me déposer dans une autre rue, pour qu’il ne devine pas où j’allais. Je lui ai dit que je visitais une parente malade. Bon, la porte est bien fermée ? Dieu soit loué ! Vous savez bien comment c’est, dans ce pays : les gens normaux, ils peuvent bien aller et venir comme bon leur semble, mais nous, les officiels, on a même peur d’un mot de travers au téléphone. Si, si, ne faites pas les étonnées, s’il vous plaît, vous me comprenez très bien. Ca y est, vous avez prévenu qu’on ne laisse entrer personne ? Oui ? Merci. »

    Barzou Abdourazzoqov, Huit monologues de femmes

  • Huit monologues

    Sous une jolie couverture bleu piscine assez trompeuse, Huit monologues de femmes de Barzou Abdourazzoqov (Ispoved’, traduit du russe (Tadjikistan) par Stéphane A. Dudoignon) sont de très réalistes confessions de femmes que la vie a désillusionnées. D’un écrivain et dramaturge né en 1959, ces monologues « ont rencontré un franc succès au Tadjikistan – et ailleurs » (note de l’éditeur).

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    Huit monologues de femmes de Barzou Abdourazzoqov par La Compagnie La Petite Grenade

    « Qui aurait dit que j’en arriverais là ? » Une femme mariée proche de la quarantaine, un fils, une fille – elle s’imagine bientôt grand-mère – se réjouit de ne pas avoir encore un seul cheveu blanc ; elle se souvient de ses grossesses qui la rendaient insupportable pour son mari. Devenu papa, celui-ci était « aux anges ». Une famille heureuse. « Le malheur arrive toujours quand on s’y attend le moins. » Une toute jeune fille a fait perdre la tête à son mari, détruit sa vie, ne leur laissant que la misère et la honte.

    Une épouse dont le mari parti en voyage d’affaires rentre à l’improviste, alors qu’elle a invité un autre homme chez elle, une mère indigne, une fille abusée et enceinte, une prof de fac, une conseillère officielle toujours en réunion, une prostituée, une mère à la recherche de sa fille disparue : toutes ces femmes interpellent le lecteur, prennent le monde à témoin de leur situation, de leur destin.

    J’ai pensé parfois, en lisant ces monologues, à La Chute de Camus. Abdourazzoqov condense en quelques pages ces tranches de vie contemporaine. « Beaucoup de verve et d’humour » dans ces récits de femmes, peut-on lire en quatrième de couverture. C’est plutôt brutal, sans rien d’enjolivé. L’alcool, la violence, l’infidélité… Le tableau n’est pas réjouissant.

    Huit monologues de femmes, autant de prises de conscience : on ne peut compter que sur soi-même. Certaines de ces femmes se reconstruisent, toutes s’acharnent, bon gré mal gré. « Le secret, il est là : quoi qu’il t’arrive, même si le destin s’est joué de toi, et quoi qu’en pensent les gens – crois en toi, et tout ira bien. »

  • Gourmandise

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    « Gourmandise, sensualité. Pierre Boncompain détaille l’épiderme d’un abricot, d’une pêche, d’une aubergine, d’un corps de femme, mais en même temps maintient une certaine distance, une certaine chasteté.

    © Pierre Boncompain, Nu aux fleurs bleues

     

     

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    Le peintre répertorie les beautés du monde, en fait le catalogue mais elles ne sont pas pour lui, pour nous.

    © Pierre Boncompain,
    La pastèque et les batiks

     

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    Un peu perversement il nous passe les plats sous le nez mais il n’est question que de les manger des yeux. »

    Jean Gilibert

    © Pierre Boncompain, La fougère et le tapis (tapisserie)

     

     

    Catalogue de la rétrospective Pierre Boncompain, Musée d’art contemporain Saint-Martin, Montélimar, 2013.

     

     

  • Lumineux Boncompain

    Un jour d’un peu de pluie entre les jours de lumière qu’a prodigués la première quinzaine de septembre en Drôme provençale, nous sommes allés à Montélimar à la rencontre de Pierre Boncompain, artiste drômois né à Valence en 1938. Trois expositions sous un titre : De Renoir à Picasso, Boncompain et les grands maîtres. Au Musée d’Art Contemporain Saint-Martin (MAC), qui avait déjà proposé en 2013 une belle rétrospective du peintre, sont présentées une importante donation de l’artiste (j’y reviendrai) puis ses peintures. Au château des Adhémar, des tapisseries d’après ses toiles et des céramiques.

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    Quand une amie a prononcé devant moi le nom de ce peintre exposé dans le monde entier – une importante rétrospective à Shanghaï a attiré trois cent mille visiteurs en 2002 – j’avoue que j’ignorais même son nom. Quel bonheur de découvrir son œuvre où les influences sont patentes, reconnues par Pierre Boncompain lui-même : « J’aime admirer. A chacune de mes acquisitions, il me semblait mettre un pied dans l’entrebâillement de la porte de l’atelier de Bonnard, Picasso, Matisse, Dufy. Chacun, avec des moyens si simples, un crayon ou un burin, parvient à créer un univers. »

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    © Pierre Boncompain, Baiser d'aubergines

    Après avoir regardé les œuvres des peintres qu’il admirait, j’ai eu l’impression, en entrant dans la première salle qui lui est consacrée au MAC, de pénétrer dans le royaume de la couleur. Deux tables, festins de rouges. Puis du bleu et du blanc pour deux femmes, allongées ; pour deux fenêtres, ouvertes. Collections particulières. La vision est frontale et ne vise pas à décrire mais à faire ressentir saveurs, textures, couleurs, atmosphère. La note jaune accompagne souvent les bleus de Pierre Boncompain, jusque dans le titre (La ceinture jaune).

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    © Pierre Boncompain, La ceinture jaune, La nuit dans la fenêtre et Nuit en Provence

    La nuit dans la fenêtre : un paysage de champs et de montagnes découpé par le cadre blanc. A la gamme des bleus nocturnes répond le jaune paille du sol. D’emblée, l’émotion m’a prise devant ces quelques paysages, ces figures surtout, ces compositions qui rendent hommage à la vie, à la beauté du monde.

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    Dans ses pastels consacrés au Cantique des Cantiques (vue de la première salle ci-dessus), Pierre Boncompain illustre dans la joie les vers bibliques : Tes seins sont deux colombes, Ne réveillez pas ma bien-aimée, Tellement svelte comme un palmier… Feuillages, chèvres, colombes y accompagnent le couple amoureux.

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    Dans la seconde salle dansent des filles de Jérusalem en robe jaune. Là se trouve La montée de la sève, symbole de vie et d’amour : un homme allongé au pied de l’arbre, une colombe posée dans le feuillage où une femme est assise. Devant L’offrande aussi, j’éprouve un sentiment de plénitude. L’artiste a fait don au musée de Montélimar de la suite complète des pastels sur le thème du Cantique des Cantiques.

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    © Pierre Boncompain, La montée de la sève (pastel)

    Une vidéo permet de voir et d’écouter Boncompain, qui explique en compagnie des lissiers (Atelier 3) la manière de réaliser des tapisseries à partir de ses œuvres : matières, couleurs, rendu de la lumière. C’est une bonne introduction à la seconde partie de l’exposition, dans le cadre somptueux du château des Adhémar.

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    Je visitais pour la première fois ce château du XIIe siècle et ses extensions. Les grandes tapisseries colorées sont mises en valeur sur les murs de pierre blonde : bouquets, natures mortes dans la salle du bas, près d’un grand paysage du Nyonsais. « Je suis né dans la Drôme. Je porte sa lumière en moi. J’ai sillonné sa campagne. J’y ai planté mon chevalet, m’imprégnant de son silence et de sa beauté. » (Pierre Boncompain)

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    Un escalier mène à la grande salle supérieure où un trio de tapisseries – des intérieurs où le rouge et le rose dominent – dispute la vedette à trois naïades (silhouettes noires soulignées d’ocre sur fond bleu). Au centre de la pièce, des céramiques dont le corps féminin épouse les formes ; entre les fenêtres surmontées d’arcs romans et dotées de « coussièges », des portraits de femmes sur des céramiques rondes. Dans la loggia, où la vue sur la ville, le paysage et le château est irrésistible, la présentation des œuvres est de la même qualité.

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    L’exposition se termine dans la chapelle, toiles et dessins. C’est une sorte de miracle que cet accord entre l’art contemporain et l’esprit d’un tel lieu, par-delà les siècles qui les séparent. Pierre Boncompain est à l’honneur au MAC et au château des Adhémar à Montélimar jusqu’au 31 décembre 2018.

  • Au soleil de Provence

    Faire d’une pierre deux coups

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    La montée caillouteuse vers la chapelle Notre-Dame de Beauvoir, au-dessus de Rousset-les-Vignes, permet de découvrir un superbe panorama vers la montagne de la Lance d’un côté, vers la plaine de Valréas de l’autre.

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    Des bois de lumière. Au début de cette promenade, nous avons vu des accrobranchés dans les arbres – sur une partie du parcours des Barons perchés (clin d’œil à Italo Calvino). Le sentier de découverte forme une boucle dans la forêt de Garde Grosse. Sur les panneaux explicatifs, j’ai appris les mots « samare », « affouage », « cépée » et aussi « pâquerage » et « bûcherage » (non trouvés dans le TLF).

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    Au retour d’une autre balade, entre vignes et oliviers, un roi : ce pin majestueux.

    Tenir le coup

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    La petite bande féline près des poubelles publiques
    s’est renouvelée en partie autour de cette belle siamoise.
    Des amis des chats les aident à tenir le coup.

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    A chaque passage, les chatons fuient ; les autres, prudents, observent.
    Puis ils approchent, intéressés par ce qu’on pourrait leur apporter.

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    Bien des regards s’échangent, la confiance s’installe, mais pas touche !

    Les trois coups

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    Première visite d’Orange. A l’entrée nord de la ville, le superbe Arc de Triomphe.

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    En traversant la ville, une porte ouverte invite à la curiosité, mène à une cour intérieure : cela valait la peine d’entrer.

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    Au Théâtre antique d’Orange : un lieu époustouflant à découvrir d’en bas – grandiose mur de scène, où on commençait à dresser des échafaudages –, puis du haut des gradins et enfin à travers les vidéos du déambulatoire. Magnifique. On rêve d’y entendre un soir, dans l’air tiède, frapper les trois coups.