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Passions - Page 6

  • Le parc Walckiers

    Quand nous allions vers le Moeraske en descendant la rue Walckiers, juste à côté de l’Institut de la Sainte Famille d’Helmet, nous jetions toujours un œil à notre gauche vers le parc bien clôturé derrière l’école, son actuel propriétaire. L’an dernier, le remplacement d’un portail annonçait des aménagements dans le bas du parc et bingo, après soixante ans de fermeture au public, revoilà le parc Walckiers accessible depuis ce mois d’octobre 2024.

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    En remarquant, dans le bas de l’avenue Zénobe Gramme, de l’autre côté du parc, la belle clôture qui le borde à présent, nous espérions trouver un portail ouvert et c’était bien le cas. Bruxelles environnement, qui gère l’endroit, affiche les heures d’ouverture : de 9h45 à 16h30 jusqu’en mars, puis de 8h15 à 18h15 en avril, etc.

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    Ce nouveau chemin balisé « situé à quelques coups de pédales de la gare de Schaerbeek » constitue « le dernier tronçon de la promenade verte, dernière pièce manquante de cette promenade très appréciée des flâneurs, flâneuses mais aussi d’un public actif en route vers le travail ou l’école ». Seuls deux des quatre hectares et demi sont ouverts au public, de manière à préserver la biodiversité dans le parc Walckiers, un parc classé (un des premiers jardins à l’anglaise d’Europe au XVIIIe siècle).

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    On y trouve des arbres remarquables, mais aussi, comme il est resté longtemps à l’abandon, des arbres fragiles. « Les zones à haute valeur biologique ont été clôturées afin de préserver la faune et la flore. Le lérot, ce petit rongeur masqué protégé en Région bruxelloise, y a notamment élu domicile depuis une douzaine d’années. » (Bruxelles environnement).

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    Cette première traversée nous a beaucoup plu. Nous aurons l’occasion de mieux découvrir les lieux à l’avenir, notamment près du chemin de fer. Ici de vieux troncs encore vigoureux, là des monticules de paille sans doute destinés à la faune locale… D’indécrottables tagueurs ont déjà laissé des traces sur le portail d’accès de l’autre côté – « des perles aux pourceaux », aurait dit une ancienne riveraine des lieux.

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    Cornouillers sanguins et aubépines colorent l’allée le long des potagers, bien jolie en automne ! Au bout, le marais complètement dégagé et la nouvelle clôture de châtaignier donnent une belle vue renouvelée du Moeraske dès l’entrée.

  • Aujourd'hui

    Murat en Poche.jpeg« Aujourd’hui, que peuvent bien signifier les codes du faubourg Saint-Germain pour des jeunes qui passent leur temps sur les réseaux sociaux ? Et quelle est leur capacité d’absorption de la phrase proustienne lorsque tout se tranche en cent quarante caractères ? Questions en réalité sans objet. Enseigner la Recherche à Los Angeles ou en Chine, c’est, pareillement, éprouver l’universalité d’un texte qui fait s’effriter tous les particularismes culturels, d’âge, de classe. Depuis vingt ans, un groupe se retrouve régulièrement dans un café de Buenos Aires  pour lire le même livre, indéfiniment : En busca del tiempo perdido. Ce book club d’un genre particulier a fait l’objet d’un documentaire, Le Temps perdu (2020), de Maria Alvarez. On y voit une dame élégante au regard vif déclarer : « Tout ce qui se passe dans ce roman, à un moment donné de ma vie, je l’ai ressenti. Tout. » Cette phrase, n’importe qui, dans le monde entier, peut la prononcer. »

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  • Proust révélateur

    Depuis la publication de Proust, roman familial (prix Médicis 2023) de Laure Murat, les éloges* se succèdent, mérités. L’entrée en matière va d’une scène de la série Downton Abbey à la spectatrice qui, à Los Angeles, réagit intensément à un détail, comme à « un signe lointain venu du passé, de l’enfance. » Il est soudain plus clair pour elle que l’aristocratie, le milieu où elle a grandi, « est un monde de pures formes ».

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    L’autrice travaillait alors à l’introduction d’un recueil d’articles sur Proust qu’elle souhaitait voir publiés, ce qui l’obligeait à évoquer ce monde « de gens titrés, de serviteurs et de gouvernantes, de privilèges, de hiérarchie et d’abondance » décrit dans A la recherche du temps perdu, un monde si proche de l’éducation familiale dont elle s’était radicalement éloignée : « Je n’ai pas d’enfants, je ne suis pas mariée, je vis avec une femme, je suis professeure d’université aux Etats-Unis, je vote à gauche et je suis féministe. »

    Pourquoi tant de lecteurs dans le monde entier, « toutes catégories sociales confondues » désignent-ils Proust comme le plus grand écrivain français du XXe siècle ? Réponse de Laure Murat : «  Car Proust, dans « ce roman qui n’arrête pas de penser » – le Temps, le moi, les arts, l’écriture, la jalousie, la phénoménologie –, à travers ce je du narrateur et personnage principal, nous restitue à nous-mêmes. » Lire la Recherche est pour elle un « retour aux sources d’une réalité par la fiction », c’est ce qu’elle raconte dans Proust, roman familial.

    Sa conviction : « ce qui se transmet vraiment ne s’enseigne pas ». Elle s’est imprégnée dans son milieu d’une atmosphère, de comportements observés, d’un « impérieux silence » : ne  jamais parler de soi, ne pas faire de vagues, éviter les sujets qui fâchent, mais « se tenir », à la fois une posture et une retenue, une manière de parler, avec de l’esprit et sans s’appesantir. D’où sa formule lapidaire pour définir le style aristocratique : « Rien, qui danse sur du vide. »

    Pour ceux qui pourraient trouver abusif de décalquer « le roman familial de la fresque proustienne » (elle est née en 1967), elle rappelle qui étaient ses parents, mariés en 1960 : la fille aînée du duc de Luynes, descendant du favori de Louis XIII, sa mère, et le prince Napoléon Murat, arrière-arrière-petit-neveu de l’empereur, son père. Même si les titres nobiliaires avaient été abolis en 1789, à la maison ils étaient « le Prince » et « la Princesse », et son grand-père maternel, « Monsieur le Duc ». Le titre princier n’étant transmissible qu’aux filles, elle-même a pour identité « Laure, Marie, Caroline, Princesse Murat ». L’autrice en fait un commentaire amusant.

    Pour les aristocrates chez qui il était reçu, Proust était considéré comme un « petit journaliste ». Laure Murat évoque quelques-uns d’entre eux et le salon de Madeleine Lemaire devenu dans la Recherche celui de Mme Verdurin. Remontant son propre arbre généalogique,  elle y voit quelques liens ténus entre ce monde et celui de ses ancêtres, des ingrédients communs : « les mariages d’argent, les tensions entre noblesse d’Ancien Régime et noblesse d’Empire, les croisements avec « le sang juif », les détours clandestins par Sodome… »

    Dans la Recherche, elle lit des noms qui lui sont familiers, des scènes plus vivantes que si elle les avait vécues. Les aristocrates sont toujours « en représentation » (Charlus en est l’exemple « superlatif ») dans un jeu de rôles permanent où il faut paraître « naturel ». Proust a écrit « la critique la plus cruelle et la plus subtile de l’aristocratie française à laquelle se soit jamais livrée la littérature. »

    Par exemple, sur la « vulgarité » des nobles, elle cite et analyse formidablement un extrait, « Les souliers rouges de la Princesse de Guermantes ». A l’erreur de jugement de certains critiques de Proust qui ne voient dans son roman qu’un monument élevé au prestige aristocratique, elle donne deux raisons : la hauteur de vue de l’écrivain qui décrit, raconte et « suspend jusqu’à la dernière extrémité le jugement moral » et le préjugé de ceux qui ne l’ont tout simplement pas ou trop peu lu, comme l’attestent les chiffres de vente.

    Pour Laure Murat, le fait que Proust prend « l’homosexualité au sérieux » a aussi été une délivrance. Elle a consacré une thèse sur ce sujet et ses recherches lui ont permis quelques découvertes sur l’auteur de la Recherche. Elle en rend compte, ainsi que des raisons pour lesquelles elle a quitté la maison à dix-neuf ans, devenant pour sa mère une « fille perdue ».

    Entre le texte proustien qu’elle cite abondamment à l’appui de sa réflexion et l’examen des causes de la rupture avec les siens, Laure Murat donne dans Proust, roman familial, une approche inédite d’A la recherche du temps perdu et un récit d’émancipation, formidable témoignage de ce que la littérature peut signifier dans la vie réelle. 

    *Sur les blogs aussi, chez Adrienne, Aifelle, Claudialucia, Dasola, Dominique, Keisha...

  • Demi-tons

    Les couleurs fauves de l’automne ne s’affichent pas encore franchement en ce début du mois d’octobre, un mois qui offre souvent une si belle lumière, mais elles s’annoncent.

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    Au parc Josaphat, la douceur de l’air et les demi-tons s’accordent, caressent les promeneurs, tout comme le bruissement des feuilles dans le vent.

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    Certains feuillages en dentelle préparent déjà le festival : jaune or, rouge, vert déploieront bientôt toute leur gamme. L’eau verdie de l’étang joue sa note dans ce tableau de saison.

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    Verticales, horizontales, droites et courbes, lignes, formes, couleurs – même guidée par les jardiniers, la nature est artiste à sa manière. Voilà une photo qui ferait un bon puzzle, pour les amateurs.

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    Peut-être aussi cet îlot avec ses abris pour la faune locale, qui n’y sera pas dérangée. Les feuillages et les reflets dans l’eau seraient ici les parties les moins faciles à assembler.

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    En haut de la pelouse qui longe l’avenue des Azalées, leurs oreilles signalent les lapins qui grignotent l’herbe sans se soucier des promeneurs – pourvu qu’ils ne s’approchent pas. S’arrêter, regarder tout ce que la lumière du jour nous montre, par une après-midi d’octobre.