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Bruxelles - Page 119

  • Cité de verre

    « En marge de l’Art nouveau triomphant, l’éclectisme poursuit son chemin et trouve dans l’architecture de verre un de ses lieux d’intense réussite. En 1868, le roi avait pris la décision de faire construire à Laeken un jardin d’hiver dont Balat avait soumis les premiers plans en 1874. L’inauguration n’eut lieu qu’en mai 1880.

     

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    Confronté à un type de bâtiment propre au XIXe siècle, l’architecte utilise toutes les ressources de sa formation classique tout en s’appuyant sur les conceptions rationnelles prévalant dans l’architecture métallique : il fait reposer la corolle de fer et de verre, surmontée d’un lanterneau coiffé de la couronne royale, sur une colonnade dorique. Comme Viollet-le-Duc le recommandait, il emprunte l’ornementation des parties métalliques au style gothique, tout comme la structure d’arcs-boutants qui jaillissent de la coupole et prolongent à l’air libre l’arrondi des trente-six arcs la soutenant.

     

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    Au cours des ans, l’ensemble se développe pour faire des serres de Laeken un des édifices de verre les plus célèbres d’Europe : en 1880, Balat y construit la serre du Congo. Rappelant la silhouette d’une église byzantine, celle-ci est destinée à conserver des spécimens de ce territoire dont Léopold II était devenu le souverain l’année précédente. En 1902, Maquet, jouissant de l’appui du roi pour son projet du Mont des Arts, ajoute une serre au complexe : le parc est ainsi une véritable cité de verre que Girault embellira encore avec sa  nouvelle serre de palmiers. »

     

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    Bruxelles fin de siècle, sous la direction de Philippe Roberts-Jones, Flammarion, Paris, 1994.

  • Serres Royales

    P1070594.JPGMardi 19 avril, Bruxelles : une journée de printemps qui ressemble à l’été. J'en ai profité pour revoir un haut lieu de notre patrimoine, les Serres Royales de Laeken. Chaque fois, les visiteurs belges et étrangers sont au rendez-vous lors de la semaine d’ouverture du domaine royal au grand public, cette année du 15 avril au 8 mai. On entre face au Palais (2,50 € par adulte) puis l’on se dirige à gauche vers les fameuses serres commandées par Léopold II à l’architecte Balat, chef-d’œuvre de fer et de verre qui fait la fierté des Belges depuis plus d’un siècle.

    Cette journée était consacrée en particulier aux personnes non valides, des policiers (à l'occasion photographes) et des militaires étaient là pour les aider – en particulier dans les escaliers munis de planches pour le passage des fauteuils roulants.

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    P1070475.JPGL’orangerie immense, avec ses camélias splendides, donne accès à la première serre. Là, les fougères arborescentes et la profusion végétale créent un décor fabuleux. A leurs pieds, des parterres vert tendre accueillent des plantes que l’on reconnaît, mais dans des tons rares éclatants dans cette verdure surabondante.
     
     
    Le parcours permet d’admirer les serres de l’extérieur aussi, dans une partie du superbe parc – royal comme le signale la couronne au-dessus de la serre ronde.
     
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    P1070572.JPGLa vue sur le côté du palais vers la ville en arrière-plan est de toute beauté. Et que dire du panorama vers la Tour Japonaise, héritée de l’exposition universelle de 1900 à Paris ? On resterait des heures à le contempler du plan d’eau où se reflètent toutes les nuances du vert et du rouge des arbres, de la tour, des arbustes.

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    P1070577.JPGPassé la charmante petite maison au toit de chaume (atelier de sculpture de la reine Elisabeth), on accède au couloir-galerie de verre - "L'Embarcadère" - où des fuschias suspendus d’une grande variété font merveille au-dessus des têtes et des pélargoniums aux couleurs intenses le long des parois.

     

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    P1070554.JPGLes Serres Royales de Laeken s’ouvrent chaque année au grand public à la saison où fleurissent azalées et rhododendrons. Du blanc jusqu’au rose le plus vif, ceux-ci composent un tableau inoubliable, que souligne çà et là une plante jaune ou orange, c’est une véritable féerie. Plus loin, le bleu apporte une note de fraîcheur. Une vasque d’hydrangeas prend la lumière à l’entrée de la grande serre, la plus impressionnante, avec ses paniers suspendus et ses volutes de fer dessinant la corolle du Jardin d’hiver.

     

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  • Des fauves

    « Nous avons aussi nos fauves tout comme Paris a les siens. Et s’ils sont moins ingénieux, moins âpres, moins individualistes, plus portés vers les concessions que leur collègues parisiens, ce n’en sont pas moins des fauves. »

    Dezső Rózsaffy, peintre et critique d’art, à propos d’une exposition en 1911 du Groupe des Huit.

     

    Dialogue de fauves - Fauvisme hongrois (1904-1914), Hôtel de Ville, Bruxelles

     

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    Odön Márffy, Autoportrait

  • Fauvisme hongrois

    Besoin de couleurs ? Vous en trouverez à l’Hôtel de Ville de Bruxelles (Grand-Place) à l’exposition « Dialogue de fauves – Fauvisme hongrois (1904-1914) » jusqu’au 20 mars prochain. L’occasion de découvrir des peintres dont les noms ne sont guère connus du grand public hors de Hongrie, quelque cinquante tableaux d’inspiration parisienne puis belge dans la première salle, hongroise dans la seconde.

     

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    De jeunes artistes hongrois séjournent à Paris au début du XXe siècle et fréquentent entre autres l’académie Julian et l’atelier de Matisse. Les premières toiles exposées montrent des rues, des places de Paris aux couleurs vives, avec leurs passants. Des intérieurs aussi, comme La chambre verte. Sur les nus de ces peintres, la chair prend tous les tons que produit la lumière ou l’ombre, comme on peut le voir sur l’affiche de l’exposition. Quelques autoportraits complètent cette série, et une scène d’atelier, Ecole des peintres, des jeunes gens et des jeunes femmes face au modèle.

     

    La première signature qui a vraiment capté mon attention est celle de Béla Czobel avec Détail d’un parc, une belle composition tout en courbes autour du tronc bleu sombre d’un vieil arbre au milieu d’un parterre. En glissant le regard sous son feuillage, on découvre les allées du parc, des gens assis sur les bancs, des promeneurs. Accroché un peu plus loin, Dans le parc de Vilmos Perlrott-Csaba permet d’apprécier le contraste entre un paysage « animé » et un paysage sans personnages. Czobel a exposé en compagnie de Matisse, Braque, Derain. Louis Vauxcelles (le critique qui a donné leur nom aux fauves) le surnommait le « fauve inculte ».

     

    Après ce parcours « parisien », on a regroupé quelques toiles peintes en Belgique, à Bruges en particulier. Il y a là des vues de rues ou de marchés, et bien sûr des quais, des bateaux multicolores. Deux portraits intéressants, côte à côte : une Fillette en robe rose, de face ; une vieille femme assoupie, de profil, dans des tons sombres.

     

    La deuxième salle nous emmène en Hongrie, avec de nombreux paysages dont un Paysage de Nagybánya avec meules de foin signé Sándor Ziffer. Cette ville roumaine fut le « Barbizon » des peintres hongrois. Dans Le jardin d’un mineur, des vêtements mis à sécher sur la barrière d’un jardin, à l’avant plan, sont autant d’aplats de couleur pure.

     

    Deuxième nom que je m’efforcerai de retenir, celui de Géza Bornemisza. Ses deux paysages encadrés de noir valent la visite à eux seuls, leurs couleurs flamboient. Dans le premier, un chemin rouge serpente dans l’herbe et guide le regard vers la montagne à l’arrière-plan. Des arbres occupent presque tout le second intitulé Rue du Village. De part et d’autre d’un terre-plein, repoussée sur les côtés de la toile, la rue d’un bel orange corail crée une atmosphère magique.

     

    De Rippl-Ronaï, le « Nabi » hongrois, j’ai aimé L’atelier de Kapozvar (1911) avec sa grande fenêtre carrée, ses couleurs vives. Ce coin près de la fenêtre, Sándor Galimberti l’a peint à sa façon et la confrontation des deux toiles permet de comparer les rouges, les jaunes, aux accents différents même s’il s’agit de la même pièce.

     

    Il faudrait aussi mentionner les natures mortes, dont une étonnante avec une chaise Thonet en premier rôle, les Nus de Lajos Tihanyi (inspirés par La Danse de Matisse). En plus des vues campagnardes, des jardins clôturés de bois avec les habitants qui s’y croisent (Vilmos Huszár), la ville est représentée par deux grandes toiles carrées : un marché, une place. La Place du Marché de Tibor Bornemisza est magnifique avec ses hauts immeubles bordant la place où les auvents des échoppes se serrent les uns contre les autres ; les silhouettes des passants dans les allées, d'un noir d'encre de Chine, animent la partition.

     

    Peu familière des prénoms hongrois, je me suis renseignée auprès d’un gardien : ce peintre était-il une femme ? Le plus sérieusement du monde, il m’a répondu que « ça n’existait pas, des femmes qui peignaient » ! Au comptoir d’accueil, ce ne fut guère mieux : oui, il y avait une peintre parmi les artistes exposés, mais son nom ? J’ai retrouvé sur la Toile cette Nature morte aux fleurs – et au livre – de Valéria Denes, la deuxième épouse de Galimberti. Par ce "Dialogue de Fauves", la Ville de Bruxelles rend hommage à la peinture hongroise dans le cadre de la présidence tournante européenne. Il reste beaucoup à découvrir, par exemple sur le site Fine arts in Hungary, pour connaître un peu mieux ces peintres dont les œuvres ont été prêtées par de grands musées hongrois et des collections particulières.

  • Quelle vérité ?

    Trofimov - Que la propriété soit vendue aujourd’hui ou non, quelle importance ? Il y a longtemps que tout cela est mort, on ne revient pas en arrière, les herbes ont envahi le sentier. Calmez-vous, chère amie. Il ne faut plus vous leurrer. Il faut, une fois au moins dans votre vie, regarder la vérité bien en face.

     

    Lioubov Andréevna - Quelle vérité ? Vous savez distinguer la vérité du mensonge, vous, mais moi, je ne vois rien, c’est comme si j’étais devenue aveugle. Toutes les questions importantes, vous n’en faites qu’une bouchée, mais, mon petit, c’est parce que vous êtes jeune, et qu’aucune de ces questions ne vous a encore fait mal. Vous regardez devant vous, sans crainte, mais vous ne voyez, vous n’attendez rien d’effrayant. Vos jeunes yeux n’ont pas encore découvert la vie. Vous êtes plus hardi, plus honnête, moins superficiel que nous autres, c’est vrai, mais réfléchissez, soyez un peu généreux, ayez pitié de moi. Pensez ! Je suis née ici, moi, c’est ici qu’ont vécu mes parents, mon grand-père, j’aime cette maison, ma vie n’a plus de sens sans la Cerisaie, et s’il faut vraiment la vendre, alors qu’on me vende, moi aussi, avec le jardin… (Elle étreint Trofimov et l’embrasse sur le front.) Rappelez-vous, mon fils s’est noyé ici… (Elle pleure.) Ayez pitié de moi, vous qui êtes bon et charitable… »

     

    Tchekhov, La Cerisaie, acte III