Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

culture - Page 342

  • Rencontrer Albertine

    Poursuivons A l’ombre des jeunes filles en fleurs. Lorsque Saint-Loup s’apprête à quitter Balbec pour la garnison, le Narrateur perçoit pour la première fois la « tache singulière » de cinq ou six « fillettes » d’allure différente, « une bande de mouettes », l’une poussant sa bicyclette, deux autres avec des clubs de golf. Un festival de métaphores décrit la petite bande où se focalise son désir d’un bonheur « inconnu et possible », « ces jeunes fleurs qui interrompaient en ce moment devant (lui) la ligne du flot de leur haie légère, pareille à un bosquet de roses de Pennsylvanie, ornement d’un jardin sur la falaise ».  

    proust,a la recherche du temps perdu,à l'ombre des jeunes filles en fleurs,noms de pays : le pays,balbec,grand-hôtel,saint-loup,elstir,albertine,roman,littérature française,relire la recherche,noms,lieux,culture
    James Abbott McNeill Whistler,  Bleu et argent : Trouville, 1865 (
    Freer Gallery of Art, Washington)

    Le nom de « la petite Simonet » lui vient aux oreilles, il ignore qui elle est. Au restaurant de Rivebelle où il se rend le soir avec Saint-Loup obsédé par sa maîtresse, il s’enivre de musique, de porto, du mélange de demi-mondaines et de gens du monde, voire d’un servant « très grand, emplumé de superbes cheveux noirs » qui fait penser à un grand ara.

    Un autre soir, ils aperçoivent là Elstir, le peintre ami de Swann, lui font remettre une lettre d’admiration. Quand Elstir s’en va, il s’arrête à leur table et invite à son atelier de Balbec – « Saint-Loup cherchait à plaire, Elstir aimait à donner, à se donner. » Mais obsédé par les jeunes filles, le jeune homme passe ses journées à les chercher, jusqu’à ce que sa grand-mère insiste pour qu’il aille rendre visite au peintre.

    L’atelier d’Elstir est loin de la digue, dans une nouvelle avenue. Le jeune homme y regarde des marines sans démarcation entre terre et mer, des toiles plus anciennes, découvre « les rares moments où l’on voit la nature telle qu’elle est, poétiquement. ». Quand il se dit déçu de l’église de Balbec, le peintre s’étonne et explique la beauté du porche sculpté. Soudain, de la fenêtre de l’atelier, son hôte aperçoit la jeune fille tant recherchée : Albertine Simonet. Elstir connaît la « petite tribu », des filles d’industriels, d’hommes d’affaires.

    Ensuite le Narrateur remarque une aquarelle : une jeune femme « aussi fraîchement peinte que la fourrure d’une chatte, les pétales d’un œillet, les plumes d’une colombe ». De sexe ambigu, elle porte le nom de « Miss Sacripant », et Elstir la dissimule à l’arrivée de sa femme.

    Albertine incarne désormais la figure la plus désirée, jamais la même – « impossible à atteindre ». Les « Albertines imaginées » et la réelle se succèdent dans ses pensées. Quand il demande à Elstir une photo de « Miss Sacripant », son intuition se confirme : c’est bien Odette avant son mariage, Elstir n’est autre que le « M. Biche » des Verdurin.

    Pour le départ de Saint-Loup, le Narrateur suggère à sa grand-mère un cadeau si bien choisi que son ami en devient « écarlate de reconnaissance ». Robert lui envoie bientôt une lettre très tendre – « ce second visage qu’un être montre quand il est absent ».

    C’est à l’atelier d’Elstir qu’il est enfin présenté à Albertine, « médiocre et touchante » par rapport à « la mystérieuse Albertine en face de la mer ». Ils se revoient sur la digue, elle lui présente Andrée, la grande aux yeux clairs, et le renseigne sur les gens qu’elle connaît. Il apprend que Saint-Loup est fiancé.

    Par elle encore, il découvre « le goût sûr et sobre des choses de la toilette » d’Elstir – sa femme s’habille avec une simplicité coûteuse. Ils se voient tous les jours, il se fait beau pour la rencontrer. Andrée est plus fine et plus affectueuse qu’Albertine. A présent le Narrateur apprécie les jours ensoleillés, les yachts, les courses, les toilettes et les ombrelles.

    Il découvre ce qu’est du « linon blanc », comment la lumière et l’ombre architecturent les falaises en haut desquelles il pique-nique avec la petite bande, participe à leurs jeux. Charmé par leur compagnie, il renonce à rendre visite à Saint-Loup (il le justifie par un devoir en tant qu’artiste de vivre pour lui-même, contraire sans doute à l’amitié).

    Andrée l’enchante par sa culture. Albertine écrit au crayon : « Je vous aime bien. » Lui vibre « comme une ruche » : « c’était avec elle que j’aurais mon roman ». Elle est neuve à chaque apparition. Les mains d’Andrée sont plus belles, Albertine plus sensuelle. Elle le trouble tant qu’il se ridiculise au jeu du furet pour toucher sa main. « Je savais maintenant que j’aimais Albertine ; mais hélas ! je ne me souciais pas de lui apprendre. »

    Il feint même de préférer Andrée. Puis un soir, Albertine couche au Grand-Hôtel et lui donne rendez-vous dans sa chambre. Quand il se penche pour l’embrasser, elle tire la sonnette de toutes ses forces. « Mes rêves l’abandonnèrent dès qu’ils cessèrent d’être alimentés par l’espoir d’une possession. »

    Albertine ne lui en tient pas rancune et quand il lui dira ne pas comprendre sa réaction, protestera au nom de l’amitié. Il se tourne alors vers ses amies. Andrée est trop semblable à lui (intellectuelle, nerveuse, maladive) et il préfère finalement la compagnie de toute la petite bande. C’est la fin de la saison. Albertine part la première à Paris, l’hôtel est déserté.

    Lui aussi va rentrer, conscient d’avoir trop peu profité de Balbec, désireux d’y revenir dans cette même chambre où sa grand-mère, quand il n’a pas dormi, l’oblige à rester couché jusqu’à midi. Alors, c’est le beau moment du lever, des étoffes enfin détachées pour laisser passer le jour d’été, comme « une somptueuse et millénaire momie (…) embaumée dans sa robe d’or ». 

    Relire La Recherche (6) 

     

    Relire La Recherche (5)

     

    Relire La Recherche (4)

     

     Relire La Recherche (3)

     

     Relire La Recherche (2)

     

     Relire La Recherche (1)

     

  • Point de vue

    proust,a la recherche du temps perdu,à l'ombre des jeunes filles en fleurs,noms de pays : le pays,balbec,grand-hôtel,saint-loup,charlus,roman,littérature française,relire la recherche,noms,lieux,culture

     

     

     

     

    « On ne reçoit pas la sagesse, il faut la découvrir soi-même après un trajet que personne ne peut faire pour nous, ne peut nous épargner, car elle est un point de vue sur les choses. »

     

    Marcel Proust, A l’ombre des jeunes filles en fleurs

  • Rencontres à Balbec

    Après avoir longtemps rêvé de Balbec, c’est dans « Noms de pays : le pays » (A l’ombre des jeunes filles en fleurs, seconde partie) que nous y retrouvons le Narrateur, deux ans plus tard, en compagnie de sa grand-mère. Les séparations ne sont jamais pour lui sans douleur, sa mère a rejoint son père à Saint-Cloud : « Pour la première fois, je sentais qu’il était possible que ma mère vécût sans moi… » 

    proust,a la recherche du temps perdu,à l'ombre des jeunes filles en fleurs,noms de pays : le pays,roman,littérature française,relire la recherche,noms,lieux,culture
    http://proust-personnages.fr/

    Emporté de gare en gare, « d’un nom à un autre nom », il est l’objet de la sollicitude de sa grand-mère qui l’encourage à lire, en particulier Mme de Sévigné – « une grande artiste de la même famille qu’un peintre que j’allais rencontrer à Balbec et qui eut une influence si profonde sur ma vision des choses, Elstir. »

     

    Arrivé à Balbec, il lui faut voir d’abord l’église, dont le site, la réalité diffèrent absolument de ce qu’il avait imaginé. C’était bien plus, mais « moins aussi peut-être. » La Vierge métamorphosée en « petite vieille de pierre » achève de le décevoir. A Balbec-Plage, le Grand-Hôtel, le directeur, le lift, tout l’intimide et aussi la chambre inconnue, inhospitalière : sa grand-mère convient avec lui des trois petits coups contre la cloison pour communiquer entre eux.

     

    « Mais le lendemain matin ! » Joie d’avoir sous les yeux la mer changeante, d’observer les gens. Les habitués appellent le maître d’hôtel par son prénom, Aimé ; les bourgeois restent entre eux ; une vieille dame ne se montre qu’en compagnie de sa femme de chambre et d’un valet de pied. Mlle de Stermaria l’attire, mais chacun ici limite ses relations à sa classe sociale.

     

    L’apparition miraculeuse de la marquise de Villeparisis, amie de sa grand-mère, améliore leur statut au Grand-Hôtel, « théâtre social ». La visite de la princesse du Luxembourg à la marquise et son amabilité à leur égard parachèvent leur bonne réputation. Invité aux excursions de Mme de Villeparisis, il l’écoute parler des églises, des écrivains qu’elle a connus. En revenant de Carqueville où elle lui a montré l’église couverte de lierre, il ressent soudain, en apercevant trois vieux arbres, ce « bonheur profond » ressenti à Combray avec les clochers de Martinville.

     

    Le Grand-Hôtel, la chambre, deviennent un foyer familier. Mme de Villeparisis, très aimable, leur offre roses, melons, livres, promenades et effusions verbales. Il goûte ses mots d’esprit. A sa grand-mère, il confie un soir qu’il ne pourrait vivre sans elle – troublée, elle tâche de le raisonner.

     

    Le jeune neveu de la marquise, qui prépare Saumur, fascine le Narrateur dès son arrivée : « grand, mince, le cou dégagé, la tête haute et fièrement portée », la peau « aussi blonde et les cheveux aussi dorés que s’ils avaient absorbé tous les rayons du soleil ». « Vêtu d’une étoffe souple et blanchâtre comme je n’aurais jamais cru qu’un homme eût osé en porter », des yeux « de la couleur de la mer » quand son monocle en tombe, il attire tous les regards : « on savait que ce jeune marquis de Saint-Loup-en-Bray était célèbre pour son élégance. » 

     

    L’air hautain de Saint-Loup se mue, une fois les présentations faites, en une grande aisance à parler de littérature, et, « les premiers rites d’exorcisme une fois accomplis », en amitié véritable : le jeune homme se révèle un intellectuel aux idées socialistes, il conquiert sa grand-mère par son « naturel » et ses attentions pour son petit-fils. Très vite, ils sont « de grands amis pour toujours ». Le Narrateur en est aussi touché qu’embarrassé, il sait n’être lui-même que dans la solitude et malgré lui, il observe en Robert de Saint-Loup le « noble »« comme une œuvre d’art ».

     

    Bloch, croisé sur la plage, où il s’affiche avec sœurs, parents et amis, soupçonne son ami de snobisme en le voyant fréquenter Saint-Loup, alors que c’est lui qui est « mal élevé, névropathe, snob ». Il les invite tous deux chez lui, mais Saint-Loup attend son oncle Palamède, autrement dit le baron de Charlus – autre portrait d’anthologie.

     

    Lors des présentations, le Narrateur est impressionné par le « terrible regard en coup de sonde » de « Palamède de Guermantes ». C’est la révélation soudaine d’une appartenance qui lui avait échappé : Mme de Villeparisis est liée aux Guermantes ! Grand ami de Swann, le baron de Charlus a des manières très libres sous son masque de bel aristocrate, un « parti-pris de virilité » conjugué à une « sensibilité des plus fines », une voix où se glisse parfois « une douceur imprévue ». Il l’étonne en lui apportant un soir un livre de Bergotte, informé de ses insomnies, et le lendemain, en lui assénant une « petite douche » verbale pour lui apprendre à exprimer ses sentiments avec plus de réserve.

     

    (A suivre)

     

    Relire La Recherche (5)

    Relire La Recherche (4)

     Relire La Recherche (3)

     Relire La Recherche (2)

     Relire La Recherche (1)

     

     

     

  • Nasreddin Hodja

    Petite Anatolie Nasreddin.jpg

    « Les élèves interrogent Nasreddin Hodja, leur instituteur :

    – Maître, quel homme a plus de valeur : celui qui conquiert un empire par la force, celui qui peut le conquérir, mais qui se l’interdit ou celui qui empêche un autre de s’emparer d'un tel empire ?

    Perplexe, Hodja répond :

    – Je n’en sais rien. Mais je sais quelle est la tâche la plus difficile au monde.

    – Laquelle ? demandent les élèves.

    – Vous apprendre à voir les choses comme elles sont réellement. »

     

    D’autres contes délicieux à lire sur le site : http://nasreddinhodja.blogspot.be/

     

     

     

  • La petite Anatolie

    A Bruxelles, « la petite Anatolie » est le surnom d’un quartier à cheval sur deux communes, Schaerbeek et Saint-Josse-ten-Noode. Dimanche dernier, c’était le but de la promenade guidée proposée par PatriS en « prélude à Europalia Turquie ». Le rendez-vous était donné sous le porche de l’église royale Sainte-Marie, paroisse autrefois aristocratique, située entre le Palais de Bruxelles et le château de Laeken 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture
    Colonnes du porche de l'église royale Sainte-Marie

    Yves Jacqmin nous y a présenté le quartier et la communauté belgo-turque qui l’habite aujourd’hui avec un grand souci d’objectivité et de nuances, à rebours des clichés. Nous irons donc cette fois non pas à la découverte du patrimoine, mais de lieux liés à cette communauté très attachée à son pays d’origine. 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    En 1964, comme on l’a rappelé l’an dernier pour les cinquante ans de l’immigration marocaine et turque, l’Etat belge a fait appel aux travailleurs étrangers pour ses industries et ses gros chantiers, la main-d’œuvre manquait. Ensuite, avec le regroupement familial et les familles nombreuses, la communauté belgo-turque s’est accrue en Belgique, on l’estime aujourd’hui à environ 150000 personnes. Parmi les Bruxellois d’origine étrangère, un dixième est d’origine turque (derrière la France, l’Italie, le Maroc, la Pologne et le Portugal, entre autres).

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture
    Bruxelles multiculturelle

    Les habitants du quartier sont pour la plupart originaires d’Emirdağ, une petite ville au cœur de l’Anatolie, d’où son surnom. D’abord locataires, ils sont devenus propriétaires, et c’est grâce à eux que le quartier se maintient et se développe, après avoir échappé au grand projet du quartier de la Gare du Nord qui prévoyait de le faire traverser, près de l’église royale, par une nouvelle « autoroute urbaine ». 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    En haut de la rue des Palais, le guide nous montre une enfilade d’hôtels de maître où on reconnaît la signature de Frans d’Ours et Charles Neyrinck (1910), des architectes qui œuvraient à la même époque dans la prestigieuse avenue de Tervueren. Un peu plus bas, nous passons devant l’IFSFC, une haute école, puis nous nous arrêtons en face d’un grand immeuble récent. 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    Trois étages y sont occupés par Fedactio, un groupe d’associations turques sous l’égide de Fethullah Gülen. Originaire d’Anatolie, émigré aux Etats-Unis, ce leader religieux promeut l’étude des sciences, l’engagement dans la société civile et l’ouverture aux autres « religions du Livre ». Il s’oppose à la politique actuelle du gouvernement turc. Certains le comparent à Calvin. « Fédération des associations actives de Belgique » : pas d’allusion à la Turquie sur la plaque de Fedactio, ni sur celle du centre culturel « Sema », rue de la Poste. C’est la même volonté de se fondre dans le pays d’accueil et aussi un signe d’indépendance par rapport aux organismes officiels turcs présents dans le quartier. 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    Par la rue de la Constitution, nous rejoignons la chaussée de Haecht pour nous arrêter devant la grille verte de la Maison des Arts, juste en face de l’APAJ. Cette « Association Pédagogique d'Accueil aux Jeunes » vise la formation par le travail dans le domaine du bâtiment, il est dommage que la presse n’en parle que lors de problèmes liés à la délinquance (un tiers des places y est réservé à des personnes en semi-détention ou en surveillance électronique). 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    En septembre s’ouvrira un peu plus loin la première école secondaire islamique en Fédération Wallonie-Bruxelles, dans la continuation de l’école primaire : « La Vertu » s’implante au cœur de la petite Anatolie, entre deux grandes écoles catholiques depuis longtemps ouvertes aux enfants du quartier : le Centre scolaire des Dames de Marie (CSDM), où flottent encore les bannières des 150 ans, et le Centre scolaire Sainte-Marie La Sagesse(L’ouverture de cette école confessionnelle a donc été autorisée finalement, bien qu’il ne manque pas d’écoles secondaires dans le quartier.)

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    Nous abordons ensuite un tronçon de la chaussée de Haecht très fréquenté pour ses restaurants turcs typiques, de plus en plus soignés (souvent de simples snacks à l’origine, comme ce « Snack anadolu » explicitement anatolien). Cet été, les terrasses ont envahi les trottoirs et remportent un joli succès, même par ce temps pluvieux. Les enseignes colorées sont nombreuses. Mes photos ne donnent pas grand-chose sous le ciel nuageux et la bruine qui nous accompagne. Certaines affichent leur lien avec la culture et la cuisine turques, d’autres la gomment, mais ici une « pizzeria » sert en réalité des pide, des barquettes à la turque. 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    La communauté musulmane est représentée dans le quartier par différentes associations, parfois en désaccord : la BIF, Fédération islamique de Belgique, a pris ses distances par rapport à la puissante BTI Diyanet Vakfi, organe religieux officiel du gouvernement turc, en face du CSDM, où M. Erdogan ne manque pas de passer quand il vient à Bruxelles. Entre les deux, la mosquée Fatih a fait couler beaucoup d’encre lors de sa demande d’installation d’un minaret – non pour l’appel à la prière, mais pour plus de visibilité. L’autorisation lui a été finalement accordée, à condition d’en réduire la hauteur, via la législation existante sur les enseignes, une solution de compromis typiquement belge. 

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    En revenant sur nos pas, je remarque de nouvelles enseignes plus sobres, comme celle d’une boulangerie pâtisserie en cours d’installation, et l’affichage fréquent des trois langues locales : français, néerlandais et turc. Yves Jacqmin nous a cité des mots turcs très proches du français par leurs sonorités et expliqué quelques caractéristiques du turc qui facilitent l’apprentissage du néerlandais aux turcophones. Parmi les nombreux chiffres fournis, que je n’ai pas notés – le parapluie à la main, c’était difficile –, il y avait le faible pourcentage d’élèves bruxellois qui parlent le français quand ils rentrent chez eux.  

    schaerbeek,saint-josse-ten-noode,quartier turc,bruxelles,visite guidée,patris,estivales 2015,turquie,communauté belgo-turque,islam,organisations,commerces,culture

    J’ignorais un autre aspect de la double nationalité : l’obligation du service militaire pour les Belgo-Turcs, réduit à trois semaines moyennant le paiement d’une somme importante et obligatoire pour conserver la nationalité turque. Mehmet Koksal, journaliste belge d’origine turque qui ne craint pas d’aborder les sujets tabous, s’est interrogé sur le cas des élus belgo-turcs qui ont prêté en Turquie un serment de fidélité qui pourrait mettre en conflit leurs deux appartenances. En tout cas, cette visite nous a montré une communauté belgo-turque plus diverse qu’on ne le pense.