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Belgique - Page 185

  • Bain de lumière

    Les matinées ensoleillées sont trop rares, cet hiver, pour résister à l’appel de la lumière en ce premier samedi de février. Le soleil encore bas manque de générosité sur les trottoirs, mais aux étages, les façades s'y réchauffent déjà.   

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    Une fois de plus, dans Schaerbeek au riche patrimoine architectural, je me réjouis en passant devant ses belles maisons du début du XXe siècle ou de l’entre-deux-guerres, soigneusement préservées par leurs propriétaires. Avenue Emile Verhaeren, une plaque commémorative rappelle où est née Andrée De Jongh, initiatrice du réseau d’évasion Comète.  

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    Non loin de la gare de Schaerbeek, certains immeubles d’angle ne manquent pas de cachet, ils arborent fièrement leur année de construction, leurs oriels. Nous descendons vers le canal, où le bain de lumière est assuré. 

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    Du pont Van Praet, la vue vers la gare et l’incinérateur sur l’autre rive manque de charme, et avec la circulation automobile incessante à cet endroit, même le week-end, il y a de quoi décourager les promeneurs. 

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    Mais de l’autre côté, les aménagements pour les piétons et pour les cyclistes attirent tout de même quelques passants. Entre le canal et la chaussée qui longe l’enceinte de briques du domaine royal, le soleil prend ses aises. 

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    Sur l’eau, deux avironneurs tracent des signes éphémères dans leur sillage. De grands nids dans les arbres du roi, juste derrière le mur : nous observons des hérons qui vont et viennent, affairés entre ciel et terre. 

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    Je rêve, en songeant aux bords de la Limmat à Zurich, à ce que pourrait devenir un tel endroit libéré du trafic. Un escalier, plus loin, descend sur le quai, invite au demi-tour. Voilà L’Espoir, une péniche dont le pilote répond sans façon à mon salut.

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    Nous remontons en zigzags vers le square Riga, le nez en l’air. Tant de détails à observer, d’une époque où les architectes ne craignaient pas les ornements ou n’en faisaient pas l’économie, c’est selon. J’ai manqué l’arbre à poèmes du parc Huart Hamoir, j’y retournerai pour relire Quand passent les poètes.

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    Mais je me suis arrêtée pour photographier ce tour de porte sculpté : le fer forgé en épouse parfaitement les motifs végétaux – où vont se nicher l’art et la vie. Une belle matinée, vous ne trouvez pas ?

     

  • Tu crois

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    Tu crois posséder, tu n'as rien.

    Tu crois avancer, tu n’as pas bougé.

    Tu crois appartenir, tu échappes.

    Tu crois habiter, tu traverses.

    Tu crois finir, tu commences.

     

     Liliane Wouters, Journal du scribe
    (in Francis Dannemark, Ici on parle flamand & français)

     

     

    * * *

     

    Un nouvel appel de Doulidelle à agir concrètement en faveur d'Haïti,
    avec un rappel historique :
    cliquer sur http://philippemailleux.blogs.lalibre.be/archive/2010/01/29/haiti-un-octogenaire-reveille-les-consciences.html

     

     
  • flamand & français

    La poésie est une respiration. Je n’ai pas dit une pause. Encore moins une pose – la poésie est sans affectation. Sur la page, le poème prend la place qu’il veut, il l’occupe comme lui seul peut le dire. Il ouvre un autre temps, il ne suit pas l’actualité. L’éternité ? Peut-être. 

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    Francis Dannemark a publié en 2005, « comme une boîte de chocolats, sans explication ni mode d’emploi », un recueil de poèmes belges sous le beau titre 
    Ici on parle flamand & français : « J’ai voulu rassembler ici un petit nombre de poèmes (et quelques aphorismes) parmi tous ceux qui ont été composés depuis un siècle dans le pays où je suis né et où je vis encore aujourd’hui. C’est un petit pays à la frontière de deux mondes (on dit deux pour faire simple, en réalité ils sont bien plus nombreux) et l’on y parle principalement le flamand et le français. » Dans une même anthologie en langue française se côtoient deux univers linguistiques, par la grâce de la traduction et de l’esperluette.

     

    Des poètes connus, méconnus. J’y ai glissé tant de signets qu’il m’est difficile de choisir. En citer plusieurs ? C’est tentant, mais non. J'écarte aujourd’hui les plus joyeux, les plus tristes. A chacun sa page, son heure, son jour – ou sa nuit. Place à Leonard Nolens (un Anversois né en 1947), traduit par Marnix Vincent.

     

    Vermoeidheid / Lassitude

     

    Quand nous, les grandes personnes, sommes las

    De causer les uns avec les autres,

    Quand nous sommes las de dormir

    Les uns avec les autres, de nous promener

    Et de commercer les uns avec les autres,

    De dîner et de guerroyer

     

    Les uns avec les autres, quand nous sommes si las

    Les uns des autres, de toute cette réciproquerie

    Des uns et des autres, alors nous posons le chat

    Sur notre épaule, entrons dans le jardin

    Et cherchons les voix enfantines derrière

    Les hautes haies et dans la cabane de l’arbre.

     

    Et silencieux, nous couchons notre lassitude

    Dans l’herbe, et les années qui, lourdes

    Et sombres, dormaient dans l’ourlet

    De notre manteau se dénudent là-haut

    Dans un gosier de gamin et dansent en

    Sautillant dans une bouche humide de fillette.

     

    Quand nous, les grandes personnes, sommes las

    De causer,

    De causer,

    De causer les uns avec les autres,

    Nous entrons dans le jardin et nous nous passons sous silence

    Dans le chat, dans l’herbe, dans l’enfant.

     

     (Laat alle deuren op een kier / Laissez toutes les portes entrouvertes, 2004) 

  • Première

    « Le vœu que l’on adresse à l’étoile filante, à la nouvelle lune que l’on voit pour la première fois en plein air, au premier légume et au premier fruit de la saison, est toujours exaucé. »

    Georges Willame, Folklore. Traditions populaires sur l’amour (L’Aclot, 21 septembre 1890)

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  • Mon arrière-grand-père / Colo

    En 2006, s’échappant sans avion ni bateau de l’île de Majorque/Mallorca, Colo ouvre une première fenêtre sur la Toile, son “espacio”. En juillet dernier, son blog émigre au Courrier International. Sur “Espaces, instants”, elle nous emmène dans ses balades mallorquines ou autres, photos à l’appui, aussi pour saisir la grâce des saisons dans son jardin ou au potager. L’Espagne, son pays d’adoption, elle nous la fait découvrir
    à travers ses artistes et ses réalités quotidiennes. Le regard de Colo sur notre ordinaire, sur nos rapports avec les autres ou avec les choses, comme avec le temps qu’il fait ou le temps qui passe, est toujours original.

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    Après avoir regardé la mer, écouté le vent, deviné le ciel, elle parle de ses découvertes culturelles ou nous salue en vers et en chansons. Pour partager ses lectures, elle en offre de larges extraits. Cette e-Colo aime rire et faire rire, dire et traduire – les langues sont son domaine. Pour notre plus grand plaisir – admiration –, ses billets sont bilingues, Colo la polyglotte les traduit du français vers l’espagnol, du catalan vers le français, avec parfois une touche d’anglais. Voilà qui singularise cette femme plurielle.

    “Primera voz” sur Textes & Prétextes, elle m’a montré le chemin des blogs. Pour
    tout ce qui nous lie à jamais, je suis heureuse de lui offrir cette page.

    * * * 

    J’ai perdu la trace de la statue de mon arrière-grand-père maternel.

    Ceci est peut-être courant dans les familles éparpillées, mais le cas est étrange car la dernière fois que je l’avais vue, il y a une trentaine d’années, elle se trouvait sur la Grand-Place de Nivelles ; et puis, quinze ans plus tard, disparue. Ce n’est pas rien de perdre son arrière-grand-père !

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    Georges Willame 1863-1917 (cliché de la revue La vie wallonne)

    Alors quand Tania m’a invitée à gribouiller un mot ici, l’idée m’est venue de lancer un appel à ses nombreux lecteurs pour m’aider à la retrouver. J’ignore si mon amie connaît l’existence de ce poète, écrivain, dramaturge qu’était Georges Willame, sans doute, et par modestie, lui ai-je caché l’existence de cet artiste familial … Né à Nivelles en 1863 et décédé en 1917, il a écrit des livres historiques (Causeries nivelloises, par exemple), deux romans (Le Puison, dont je possède une édition datant de 1908, et Monsieur Romain), et une pièce (Èl roûse dè sinte Èrnèle). Et puis on lui doit les paroles de la chanson : Vive Djan Djan, chanson traditionnelle de Nivelles, - que ma grand-mère nous a bien entendu serinée.

    Il avait fondé L’Aclot qui, pour les extraits que j’en vois dans l’Anthologie éditée par la Bibliothèque Principale de Brabant Wallon qui m’a été offerte, était un journal hebdomadaire nivellois publié dans les années 1889-1890. Il écrivait en wallon et en français. J’ai lu sur la toile, peut-être est-ce vrai ? qu’à cette époque la grammaire wallonne n’était pas encore fixée.

    Voici un poème qui me touche beaucoup : 

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    Ce qui donne ceci en français :  

    Le vieux

    Maintenant, c'est son fils qui a repris la ferme / Et lui, tout recourbé / Dans
    son fauteuil, il pense, il repense / Il songe à la côte qu'il  a montée.

    Que le valet aille jeter les semences / Ou bien qu'on soit aux longs jours d'été, / Toujours plus jaune, plus sec, plus mince, / Il reste là seul sur le côté.

    Les heures, les jours, les ans, ça passe ! / Il a vu son père à la même place, / Quand lui-même est devenu fermier. 

    Et lui, le vaillant, lui, l'homme fort, / Lui, le maître, il attend son dernier sommeil.... / Et une larme lui tombe doucement des yeux.

    (Traduction : http://ephrem.skynetblogs.be/post/6408792/el-vi

    Merci Tania de m’avoir prêté ton espace personnel.

    Oh, mon aïeul, réapparaîtras-tu ?