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maison - Page 4

  • Saisons

    shibasaki,tomoka,jardin de printemps,roman,littérature japonaise,maison,voisinage,nature,culture« Avant, elle croyait que les arbres, c’était juste au bord des routes, dans les parcs et dans les montagnes à l’horizon, alors de voir que les saisons existaient aussi dans une maison, ça l’avait étonnée. Surtout que ce jardin, on ne le voyait pas de la rue, il n’y avait que les propriétaires et les locataires qui profitaient des saisons. La vie, ce n’était pas juste vieillir, c’était aussi grandir, fleurir, et si l’hiver les branches se dessèchent, ensuite les bourgeons repartent. Elle n’avait jamais eu d’animal, alors ça l’avait surprise de s’apercevoir que, dans son espace de vie, d’autres êtres vivaient indépendamment de sa volonté à elle. »

    Tomoka Shibasaki, Jardin de printemps

  • Une maison bleue

    Des branches d’érable traversent la jolie couverture de Jardin de printemps, un roman de Tomoka Shibasaki (Haru No Niwa, 2014, traduit du japonais par Patrick Honnoré), romancière née à Osaka en 1973. Quasi pas d’intrigue dans ce récit : Tarô, un des derniers occupants d’un immeuble d’une trentaine d’années voué à la démolition, passe le plus clair de son temps libre à observer ce qu’il voit de chez lui.

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    Styrax japonica / Source : http://www.eggert-baumschulen.de/

    Une femme au balcon du premier étage, le lierre sur un mur de séparation en parpaings, au-dessus duquel un prunier et un érable « plus entretenus » étendent leurs branches, le ciel et les nuages… Tarô s’imagine marcher sur les nuages et de là, regarder la ville en bas, « comme une scène de dessin animé, parfaitement ». Cette femme aux lunettes de monture noire, qui a emménagé en février, tient un carnet de croquis, elle semble regarder quelque chose et il finit par voir quoi : « la maison d’à côté, plus vers chez lui. La maison bleu clair. »

    Le View Palace Saeki III compte quatre appartements au rez-de-chaussée, quatre à l’étage, « désignés chacun non par un numéro mais par un signe du zodiaque ». Comme le nom des locataires n’apparaît nulle part (« la norme de nos jours »), Tarô appelle la dame de l’appartement du Serpent Mme Serpent, lui habite celui du Sanglier. Un jour, celle-ci le guette à son retour du bureau : elle a trouvé une clé avec un petit personnage et pensé qu’elle lui appartenait, c’est le cas. Pour la remercier, il lui offre « des mamakari marinés au mirin », des poissons séchés qu’un collègue lui a rapportés – il sera souvent question de nourriture dans ce roman, et d’échanges de ce genre : dosettes de café, saumon, etc.

    L’occupante de l’appartement du Dragon l’intrigue, et un matin, en la voyant passer devant l’immeuble, il la suit qui se dirige vers la maison bleu clair, tend le cou pour regarder par-dessus le mur, « franchement l’air suspect » : « C’était une construction dans le style occidental. Les lattes horizontales de la façade étaient peintes dans un lumineux bleu clair. Une pointe de pique ornait le sommet du toit de tuiles brun-rouge à quatre pans comme une pyramide aplatie. » De son appartement, Tarô en voit l’arrière et le vitrail aux libellules rouges d’une petite fenêtre.

    C’est la maison des Morio (leur nom est indiqué près du portail). Près de l’entrée, un vélo d’enfant, un tricycle et une petite voiture bleu clair elle aussi. Dans le jardin privé, un lilas des Indes. Sa voisine rentrant chez elle, lui continue vers la gare. Avant son divorce, Tarô était coiffeur dans un salon géré par son ex-beau-père. Un mal de dos l’a fait choisir ensuite un boulot commercial plus stable.

    Il finit par faire connaissance avec « Mme Dragon » qui aimerait regarder la maison bleue de son balcon à lui, plus proche, parce qu’elle la trouve magnifique. Nishi est dessinatrice de mangas et, pour le remercier de son accueil, l’invite à dîner dans une brasserie – elle adore la bière. Là, elle lui montre un livre de photographies, « Jardin de printemps » : quatre ou six photos par page, presque toutes en noir et blanc, toutes de la maison bleue ou du jardin. Elle date de 1964, l’année des J. O. de Tokyo ; c’était le genre de maison que construisaient des gens cultivés avec le désir « d’en faire trop ». Nishi l’a découverte en visitant un site de locations immobilières et quand elle a vu le carrelage jaune-vert de sa salle de bain, elle a reconnu la maison de l’album, consacré à un couple qui l’habitait, un réalisateur de films publicitaires (qui s’appelle aussi Tarô) et une comédienne.

    Jardin de printemps tourne autour de cette fascination pour la maison bleue, celle de Nishi puis celle de Tarô à sa suite. Sa voisine va tout faire pour y pénétrer en se mêlant à la vie des Morio. Tarô observe alors avec encore plus d’attention les logements des environs, les coquilles vides ou habitées de leur quartier. Et aussi les arbres, les oiseaux, les insectes, comme la gale du styrax japonica qui inquiète Mme Serpent ou la petite urne de guêpe potière qu’il trouve dans le rail de sa fenêtre coulissante.

    Prix Akutagawa 2014, ce roman court (140 pages) gentiment envoyé par Lewerentz qui l’a trouvé trop contemplatif à son goût, est un roman de petits riens, en effet. Le narrateur, qui préfère à tout se vautrer sur un canapé, est incité par ses voisines, et surtout par l’audacieuse Nishi, à s’intéresser davantage aux autres et à leur histoire, et pas seulement via internet ou les réseaux sociaux.  

    Tomoka Shibasaki écrit dans un style minimaliste plutôt familier. Il me semble que si, sans m’y être vraiment ennuyée, la lecture de ce roman me laisse un goût de trop peu, c’est dû et à cette écriture peu travaillée et au caractère passif du personnage (à l’opposé du héros de La compagnie des artistes, attaché à la résidence Cairo ; Melbourne, il est vrai, n’est pas Tokyo, mais j’ai pensé quelquefois pendant ma lecture au roman de Chris Womersley). J’ai pourtant apprécié la description des petits gestes entre voisins, à la japonaise, et surtout l’attention portée à cette maison, à ses détails, à son jardin, qui en fait un espace dédié à la recherche du beau et de la lumière, un rêve de vie heureuse.

  • Avec jardin

    Reyers et Diamant (71).JPG

     

    Avenue de l’Opale, une maison Art Déco est à vendre, avec jardin : en prime, une jolie fontaine en vitrail d’imposte et d’autres vitraux à l’intérieur.

    L’architecte est le fils d’Henri Jacobs qui a conçu des écoles Art nouveau à Schaerbeek.

     

     

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    Bientôt une pause-vacances pour moi ;
    pour vous, quelques extraits choisis.
    Bonne lecture.

    Tania

  • Maison Art Déco

    Pour la dernière des Estivales auxquelles je me suis inscrite cet été, Cécile Dubois nous a fait visiter une « maison Art Déco à tendance moderniste » au 59, boulevard Reyers, juste en face de la RTBF, un boulevard qui a beaucoup gagné avec la démolition du viaduc cette année, encore en travaux. Un atelier d’architecture occupe cette maison de 1932, signée Paul Aernaut.

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    Je reprends à l’Inventaire du Patrimoine architectural cette définition : « Le modernisme (à partir des années 1920) est un courant international prônant la suprématie de la fonction sur la forme. Il se caractérise par l’emploi de volumes géométriques élémentaires, de la toiture plate, des fenêtres en bandeau et des matériaux modernes comme le béton armé. »

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    C’est à la fin du XIXe siècle qu’on a décidé le tracé des grands boulevards bruxellois, celui-ci s’est appelé d’abord « Boulevard militaire » avant de prendre le nom d’Auguste Reyers, bourgmestre de Schaerbeek de 1909 à 1921. Le Tir National, juste en face, disposait de terrains vallonnés pour l’entraînement. Après sa destruction, ce sont les radios-télévisions belges qui s’installent là dans les années 60-80 ; aujourd’hui cachées par des immeubles de bureaux, elles vont faire place au futur Mediapark. 

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    L’architecte Paul Aernaut a construit cette maison pour deux Verviétois, des fabricants de matériel électrique qui par la suite vendront aussi des radios. Puis un salon de coiffure s’y est installé, fréquenté par des gens de la RTBF. L’urbanisme a refusé l’ajout d’un étage supplémentaire, puis la conversion de la maison en bureaux. Enfin, le propriétaire actuel l’a restaurée. Au-dessus de l’atelier d’architecture se trouvent une salle à manger et un salon que nous pourrons visiter, mais pas le dernier niveau tout à fait privé.

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    Les pièces en enfilade sont éclairées par de grandes baies vitrées permises par une structure en béton et dotées par-dessus d’un vitrage aux motifs géométriques que nous retrouverons partout dans la maison, en particulier dans les portes. Les suspensions contemporaines des bureaux s’y intègrent bien. Les cheminées d’angle en marbre ont été maintenues.

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    Nous suivons notre guide au jardin, où une surprise nous attend : une œuvre de Willy Anthoons, élève d’Oscar Jespers, passé du figuratif à l’abstrait (œuvres au Middelheim et au Kroller-Muller). Ici, derrière un petit bassin circulaire, sous une pergola en béton, trois bas-reliefs (1933) illustrent le thème du sport, en vogue à cette époque favorable à l’hygiénisme.

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    En rentrant dans la maison, dotée d’un toit terrasse, nous traversons la cuisine au sol noir et blanc (comme à la Villa Cavrois) pour aller admirer le hall et la cage d’escalier. La rampe a été poncée, elle était du même bois noirci que le reste. L’enduit au mur est nouveau, à l’origine il était à la feuille d’or. Les marbres du hall et du vestibule sont conservés. 

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    A l’étage, nous retrouvons les mêmes baies vitrées, avec une jolie vue arborée côté boulevard, et en plus, au salon, une alcôve dotée du même éclairage par le haut. Idem, plus étonnant encore, pour l’alcôve de la belle salle de bain en marbre strié de noir où est placée la baignoire, avec de part et d’autre de petites portes au vitrage identique. Les grilles de rue originales mériteraient une restauration.

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    Un peu plus loin sur le boulevard Reyers, la guide nous arrête devant une maison de la même époque, transformée en appartements, dont les châssis originaux ont été remplacés – et cela modifie beaucoup son allure. Paul Aernaut ayant aussi construit une maison pour le père de Jacques Brel, Cécile Dubois nous montre, en plus de photos anciennes et d’une monographie sur Anthoons, une biographie du chanteur avec des photos de ses multiples domiciles à Bruxelles.

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    Nous verrons sa maison natale au cours de la promenade dans les rues « des pierres précieuses » (saphir, émeraude, diamant…) mais nous commençons par l’avenue Emile Max, une avenue aérée aux larges trottoirs, pour admirer une belle maison d’inspirations Beaux-Arts et Art Déco occupée à présent par l’Ecole anglaise, au 163 (ci-dessus) : Jules Libois y a apposé une signature très explicite sur sa profession et son origine.  

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    Bâtie pour un haut fonctionnaire, cette maison de 1930 possède dans sa large façade (14m90) une deuxième porte pour l’entrée de service, à côté de la porte de garage. Un seul étage pour cette demeure dotée d’une véranda à l’arrière, d’un grand palier servant de salle de billard et de vastes réceptions. Le terrain continuant à l’arrière jusqu’à l’avenue de l’Opale, son propriétaire y fera construire deux maisons pour ses enfants. L’éclectisme du 163 contraste avec la maison moderniste juste à côté (1928), d’un style plus radical, en blanc et noir (ci-dessous).

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    Que de choses à regarder ! La hauteur de porte, au numéro suivant, semble conçue pour un géant. Et voici un endroit particulier : Albert Delcorde a construit ici une école catholique avec un local pour les scouts à l’arrière – l’unité scoute de Jacques Brel dans son quartier natal – et l’entrée du plus vieux cabaret bruxellois, L’os à moelle.

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    De l’autre côté de la rue, Cécile Dubois commente à la demande d’une participante une belle façade de style Beaux-Arts, au 142 (ci-dessous, à gauche), aux matériaux coûteux, en plus des sculptures ornementales, un style qui « a chevauché » la première guerre mondiale, contrairement à l’Art nouveau qui a laissé la place à l’Art Déco. Celui-ci caractérise les deux immeubles à appartement aux numéros 141 et 143, « identiques en miroir » (1933). 

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    Le site du comité Opale-Opaal, tenu par des Opaliens attachés à leur quartier, propose un index des maisons intéressantes rue par rue, dont la rue d’Opale, forcément, et aussi l’avenue du Diamant où je choisis, pour terminer ce billet, de vous montrer la maison natale de Jacques Brel, aujourd’hui celle d’un notaire, au 138.

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    L’architecte René Doom,  déjà primé au concours de façades de Schaerbeek de 1913 pour les numéros 130 et 132, a remporté la médaille d’or au concours de 1914 pour sa propre maison, au 143, de style éclectique, avec le même motif de vigne qu’il a souvent choisi pour l’ornementation.

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    (Ne manquez pas de cliquer sur les liens vers l’IPA dont les notices comportent souvent plusieurs photos.)

     

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  • Ses parents

    geiger,arno,tout va bien,roman,littérature allemande,autriche,vienne,maison,famille,générations,culture« Ingrid observe ses parents (à la dérobée ?) : D’un côté l’incarnation du parfait patriote, à qui des puissances contraires rendent la vie dure et qui ne peut s’empêcher de craindre que l’esprit impur, par des interstices et des sutures éclatées, ne s’insinue dans l’âme autrichienne. De l’autre la femme au foyer déjà concassée par le moulin du mariage, arêtes un peu émoussées, flûtiste et apicultrice, qui se tient soigneusement à l’écart de tous les conflits, ou plutôt non, attendez, qui fait seulement semblant de se tenir à l’écart, mais cherche en même temps à arrondir les angles, à l’arrière-plan, et dont on peut dire au bout du compte, pour être juste, qu’elle obtient davantage de son mari comme ça, sans y toucher, qu’Ingrid avec sa franche révolte. »

     

    Arno Geiger, Tout va bien