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littérature - Page 6

  • Flirter en ligne

    Ca alors, je viens de flirter pour la première fois en ligne, qui l’eût cru ? « Flirt flamand » est proposé par la Foire du Livre de Bruxelles (flb.be), édition virtuelle, du 6 au 16 mai 2021. Si vous fréquentez le blog d’Adrienne, vous en avez déjà vu l’annonce.

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    Flirt Flamand 2021 | Flirt Flamand

    Le premier flirt au programme a eu lieu jeudi dans un endroit que je vous ai présenté en octobre dernier, la friche Josaphat à Schaerbeek. C’est là que se sont rencontrés Caroline Lamarche et David Van Reybrouck pour se dire ce qu’ils aiment l’un chez l’autre. Et se parler de leurs derniers livres : Odes, 2021, pour l’écrivain du Nord ; Nous sommes à la lisière, prix Goncourt de la nouvelle 2019, pour l’écrivaine du Sud.

    Vous trouverez sur le site de « Flirt flamand » toutes les vidéos de ces flirts à deux ou à trois, entre néerlandophones et francophones, programmés chaque midi de cette Foire du Livre 2021. L’objectif de faire découvrir des écrivains mieux connus de l’autre côté de la frontière linguistique est déjà atteint pour moi avec le second rendez-vous : Carl Norac et Bart Moeyaert échangent avec une artiste illustratrice, Gerda Dendooven (pas encore en français sur Wikipedia, contrairement à Bart M., présenté en détail sur le site Flandres-Hollande) à propos du rôle de l’illustration et des lecteurs pour qui ils écrivent ou dessinent.

    Mais ce n’est pas tout ! Défi est aussi lancé aux lectrices / lecteurs / lezeressen / lezers qui aimeraient rencontrer leur âme sœur – c’est là que je me suis lancée... « À partir de quelques questions pointues, notre MATCHMAKER recherche votre âme sœur dans l’autre moitié du pays. Qui sait, vous allez peut-être découvrir l’amour de votre vie et votre futur livre préféré ! Dans le pire des cas, vous devrez vous contenter d’une conversation sympathique avec un robot en ligne. » Choisissez un pseudo et entrez, on vous répondra. Ha ha ! J’ai joué le jeu et, au bout du compte, mon âme sœur m’a été révélée, qu’une mauvaise manœuvre – l’émotion ?  – a fait disparaître aussitôt, zut alors !

    Certains poussent le bouchon plus loin : le 5 mai, pour l’ouverture, Lize Spit et Thomas Gunzig se sont mariés (symboliquement) dans la chapelle de la Bibliothèque royale, au Mont des Arts à Bruxelles, bénis par deux poètes, Carl Norac et Mustafa Kör. « Flirt flamand » invite aussi à se créer un profil et de proposer trois titres qu’on aimerait faire découvrir de l’autre côté de la frontière linguistique, bref, d’engager un dialogue plus poussé, littérairement parlant. A vos marques ? Prêts ? Cliquez.



    Il y a quarante ans, on chantait ça...

    Slam ou rap, ils ont « l’amour des mots », comme le dit la poète et slameuse liégeoise Lisette Lombé à Seckou Ouologuem, acteur et slameur anversois. A vous de voir. Vous trouverez l’agenda et l’horaire de la Foire sur son site. Pour les dédicaces, le rendez-vous est donné en librairie. Cliquez sur le chapeau d’Amélie Nothomb si vous souhaitez tout savoir ou voir, du matin au soir ou à l’heure qui vous convient. Il y a même des expos en ville, du côté des Galeries royales Saint-Hubert, du Mont des Arts et ailleurs. La Foire du Livre de Bruxelles bat son plein, les librairies sont ouvertes, les bibliothèques aussi. C’est le printemps, profitons-en. 

  • Dans Le Carnet

    Le Carnet & les Instants, la revue des Lettres belges de langue française (présentée ici il y a dix ans déjà) offre dans son numéro 206 du premier trimestre 2021 quelques sujets que j’ai envie de partager avec vous : un nouveau portail littéraire, un secteur de l’édition belge et un bel article sur Dominique Rolin. 

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    Nausicaa Dewez, rédactrice en chef du Carnet, présente Objectif plumes : « le portail des littératures belges » rassemble différents sites existants qui couvrent aussi bien la littérature générale que la littérature jeunesse, la bande dessinée, les littératures régionales. « Une diversité qui s’inscrit dans le nom même du portail. Objectif plumes renvoie en effet à la fois à Objectif lune, album emblématique des aventures de Tintin, et à Plume, personnage d’Henri Michaux. Le pluriel choisi pour le mot « plumes » insiste si besoin sur cette diversité. Laquelle sera donc désormais accessible à partir d’un lieu unique – d’où le singulier d’« Objectif ». (Le Carnet & les Instants, blog)

    Sous le bandeau, il suffit de saisir le nom d’un auteur ou le titre d’une œuvre pour se voir proposer du contenu en relation. J’ai testé la recherche : voici les résultats pour « Nys-Mazure » et pour « Chaque aurore… », c’est très clair. Les utilisateurs peuvent même y déposer un commentaire, à condition d’ouvrir un compte (gratuit) et de s’y connecter. Peut-être à faire désormais chaque fois que j’aborderai une œuvre d’un écrivain belge ? Annuaire, dossiers pédagogiques, Objectif plumes est un riche outil de référence pour tous, sans inscription préalable.

    le carnet & les instants,n° 206,objectif plumes,littératures belges,littérature,édition,poche,rolin,cultureLe Livre de poche français est né en 1953. Dans « Le Poche en Belgique : des territoires encore à explorer », Anne-Lise Remacle examine comment les éditeurs belges se sont intéressés à ce format, poche ou semi-poche. Le pionnier, dès 1949, c’est Marabout, inspiré par les Penguin books, avec des collections littéraires et des livres pratiques, puis des livres pour adolescents (dont les Bob Morane de Henri Vernes et les Sylvie de René Philippe que je dévorais l’un après l’autre dans les années soixante).

    Espace Nord, la collection phare de notre patrimoine littéraire belge, née en 1983 aux éditions Labor, a été rachetée par la Fédération Wallonie-Bruxelles. Elle donne à tous et aux élèves en particulier un accès aux classiques belges en langue française, avec chaque fois un précieux dossier critique à la fin du livre. L’article du Carnet m’a fait découvrir des éditions plus récentes : Les Poches belges (Genèse), Alice jeunesse et sa collection Poche, Onlit éditions... Pour info, Anne (Des mots et des notes) en cite beaucoup d’autres pour lancer le « Mois belge » en avril prochain.

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    Enfin, je vous invite au plaisir de lire en ligne le délicieux article de Christophe Meurée et Maxime Thiry à propos de Dominique Rolin et de ses cartes postales conservées dans une boîte à chaussures (taille 38) : celle-ci fait partie des objets de son bureau reconstitué aux Archives & Musée de la littérature et que je ne suis pas encore allée voir. En lui rendant hommage ici, je m’étais engagée à la relire, ce que je n’ai pas encore fait, le goût de la nouveauté (non de l’actualité littéraire mais d’un titre jamais lu) l’emportant le plus souvent.

    Le Carnet et les Instants remplit bien sa mission au service des Lettres belges. Savez-vous qu’en plus des ressources du blog de la revue, vous pouvez aussi feuilleter d’anciens numéros (2011-2019) en ligne ?

  • Vous et moi

    Lettre à ce prof.jpgL’ancienne élève : « Je crois que ce texte-là, ce texte né pour soutenir la liberté nous fait nous rencontrer une nouvelle fois, c’est tellement merveilleux. Cette tragédie qui nous rassemble ici met en lumière à quel point un professeur peut faire basculer une personne en devenir en une personne qui est.

    Anouilh Antigone.jpgAntigone étymologiquement est « celle qui s’oppose » mais pas pour rien, elle veut simplement ensevelir son frère, disposée à en payer les conséquences d’une manière juste et équitable. C’est le plus beau personnage de la littérature que j’ai jamais croisé et ça encore je vous le dois. J’avais quinze ans lorsque vous m’avez donné ce livre, et il est là sous mes yeux. Il est abîmé, j’ai souligné des phrases qui résonnent toujours et encore en moi maintenant. Sur la couverture orange, on y voit deux silhouettes. Une jeune fille et une grande personne à côté d’elle qui lui tend la main. Antigone et Créon. Mais non, en vérité, c’était vous et moi. »

    Héloïse Guay De Bellissen

     

  • Enseigner la liberté

    Quarante personnalités s’expriment dans Lettre à ce prof qui a changé ma vie, Enseigner la liberté, un ouvrage conçu en hommage à Samuel Paty publié en format Pocket (5 €) chez Laffont, avec l’engagement de reverser une part des bénéfices à Bibliothèques sans frontières. Marie Gillet me l’a fait connaître ; elle y a participé « par ricochet », sollicitée par une ancienne élève, la romancière Héloïse Guay De Bellissen dont j’avais présenté ici Le ventre du loup. Son roman Le dernier inventeur a paru l’été dernier.

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    Aussi ai-je commencé par lire leur intervention, la seule du livre qui se présente sous la forme d’un échange entre elles deux  et intitulée « Les Antigones »  (extrait dans le prochain billet). L’ancienne élève : « vous me l’avez offerte cette liberté, alors que j’étais une élève insolente et absolument paumée, vous qui m’avez tendu la main et un livre, Antigone. » La professeur : « Je n’ai pas fait grand-chose à part mon travail de professeur. » Et pourtant, chacun des intervenants en témoigne, même si au long d’une scolarité, divers enseignants apportent à l’élève de quoi se construire (le dessinateur Jul déroule toute la « cohorte des professeurs » à qui va sa reconnaissance), souvent un ou une prof en particulier peut ouvrir une perspective vitale.

    La liste des quarante signataires figure sur le site de l’éditeur. Plantu contribue par quelques dessins, les autres par des textes d’hommage à ce ou cette prof à qui l’on doit d’avoir été « arraché progressivement à l’ignorance et à la bêtise » (Abd Al Malik), d’avoir participé à un atelier théâtre, visité une usine, d’avoir découvert un écrivain, une actrice, un film, d’avoir pu s’exprimer sur un sujet choisi ou dû écrire sur un thème improbable, ou même d’avoir reçu une sanction si bien ajustée qu’elle a marqué un nouveau départ.

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    © Plantu (Le Monde, 20/10/2020)

    C’est souvent avec une personnalité perçue comme différente des autres que quelque chose se passe : le prof de musique qui propose à sa classe d’écouter les Beatles, la prof de français qui pose délicatement son manteau de fourrure sur son bureau puis « de sa voix douce » impose une attention particulière et a l’art de faire découvrir les écrivains et leurs œuvres « comme s’il s’agissait d’amis proches » (Charles Berling). Amusant comme le souvenir d’un prof reste parfois lié à un détail vestimentaire, à une allure.

    Pour Marie Darrieussecq, « un bon professeur est quelqu’un qui vous apprend à ne jamais cesser de vous poser des questions ». Elle n’écrit sur aucun de ceux qui l’ont influencée, mais raconte que si elle est « née entourée de livres », ce ne fut le cas ni de sa mère ni de son père. Celui-ci, en première au lycée technique, a eu une prof de français qui a l’a guidé dans ses lectures. « Et si j’écris, c’est grâce à ses lectures, c’est grâce à cet homme-là, et c’est grâce à cette enseignante que je n’ai jamais connue. »

    L’entrée en matière d’Irène Frain est une déclaration d’amour : « Je l’ai aimée. Je l’aime toujours. » En première, « la nouvelle » prof annoncée pour l’histoire-géo n’est pas toute jeune, « juste une femme d’une quarantaine d’années, toute simple, souriante, ni belle ni moche ». Avec elle deux ans d’affilée, son goût de l’histoire devient une passion. Puis le bac, la fac, l’enseignement qu’elle quitte pour écrire à plein temps. Son ancienne prof, revue à ce moment de sa vie, comprend, encourage – « Ni trop, ni trop peu. Juste de quoi me rendre confiance. » Après sa mort, l’ancienne élève saura qu’elle aussi était aimée en silence. Et le matin de l’assassinat de Samuel Paty, « c’est aussi sur madame Fichou que j’ai pleuré. »

    Marc Levy se souvient de celle qui a fait ranger les cahiers, tiré les voilages pour tamiser la lumière et, droite au milieu de la classe, a raconté l’histoire de Cléopâtre. Tatiana de Rosnay de madame B., « souvent l’air fatigué », qui se métamorphose, « méconnaissable », le temps d’une lecture à voix haute de la dispute entre la grande Virginie et Gervaise, dans L’Assommoir. Un professeur, c’est aussi une voix.

    Du texte de Christiane Taubira, voici le début et la fin. « Je l’ai d’abord pressenti, puis je l’ai supposé, ensuite je l’ai pensé, enfin j’ai compris : ces gens-là sont des gens à part. Non, pas à part. Ce sont des gens d’une sorte. Déjà, souvent ils ne ressemblent pas à ce qu’ils sont. » – « J’ai su que le grand Platon omettait. Pourtant lui-même enseignait. A la mode de son temps. Il n’a pas vu que les enseignants sont une autre sorte d’humains, qui voguent sur le savoir et éveillent les consciences. »

  • Grandeur

    hustvedt,siri,vivre,penser,regarder,essai,littérature anglaise,etats-unis,philosophie,psychologie,littérature,culture,lecture,écriture,art« Nous naissons au sein de significations et d’idées qui façonnent la manière dont nos esprits incarnés affrontent le monde. Dès l’instant où je franchis les portes du Prado ou du Louvre, par exemple, je pénètre dans un espace culturellement sanctifié. A moins d’être une alien venue d’une autre galaxie, je me sentirai envahie par le silence de la grandeur, par l’idée que ce que je vais voir a reçu l’imprimatur de ceux qui savent, les experts, les conservateurs, les faiseurs de culture. Cette idée de grandeur, matérialisée par les dimensions des salles et les rangées de peintures et de sculptures, affecte ma perception de ce que je vais voir. L’attente de la grandeur est susceptible de jouer un rôle dans ma perception, même si je me considère comme dépourvue de préjugé et ne me rends pas compte que ma façon de voir a été subtilement altérée par l’endroit où elle se trouve. »

    Siri Hustvedt, Visions incarnées (Vivre, Penser, Regarder)