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solitude - Page 11

  • Sa cabane en Sibérie

    Je préfère laisser passer du temps avant d’aborder un livre dont on a beaucoup parlé, et à lire Sylvain Tesson, je me découvre en phase avec un de ses principes : « Je pratique un exercice qui consiste à se plonger dans des lectures dont la couleur propulse aux exacts  antipodes de ma vie présente. » Dans les forêts de Sibérie, prix Médicis essai 2011, c’est l’expérience de la cabane, six mois de vie d’ermite au bord du lac Baïkal (de février à juillet 2010), l’ivresse de la solitude – avec ses gueules de bois, au sens littéral (vodka) et au sens figuré. 

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    © Olivier Desvaux, Sylvain Tesson dans sa cabane en Sibérie

    Sa cabane, un ancien abri de géologue dans une clairière de cèdres, mesure trois mètres sur trois. Pour parler avec un voisin, il faut marcher au moins cinq heures vers le nord (Volodia) ou vers le sud (un autre Volodia). Sept ans plus tôt, l’écrivain-voyageur avait découvert ces cabanes régulièrement espacées au bord du lac et avait rêvé d’y séjourner « seul, dans le silence » avant ses quarante ans.

    Avec la yourte et l’igloo, la cabane est « une des plus belles réponses humaines à l’adversité du milieu ». Un ami qui l’a accompagné jusque-là l’aide à arracher le lino, le coffrage en carton des murs, à mettre à nu les rondins et un parquet jaune pâle – Volodia en est consterné et voilà le Français surpris en flagrant délit d’esthétisme bourgeois. Après quelques jours, ses compagnons le quittent. Sylvain Tesson a beaucoup voyagé, dans l’immobilité il cherche à présent « la paix ». « Je vais enfin savoir si j’ai une vie intérieure. »

    « La moindre des choses quand on s’invite dans les bois est de connaître le nom de ses hôtes », d’où une série de guides naturalistes dans sa caisse de livres, en plus d’une soixantaine de « lectures idéales » d’après sa liste dressée à Paris (où ne figurent que trois écrivaines : Ingrid Astier (auteure de polars), Yourcenar et Blixen). Sur place, il regrettera de ne pas avoir emporté « un beau livre d’histoire de la peinture pour contempler, de temps en temps, un visage. » 

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    Photo Thomas Goisque / Le Figaro magazine

    La vie dans la nature et la vie en ville, la solitude et les contacts humains, le progrès et l’écologie, ce sont les principaux axes de réflexion qui reviennent dans les notes de Sylvain Tesson, mais il s’agit aussi d’une mise au point sur ses choix de vie : fuite ? jeu ? quête ? Il voit l’ermitage volontaire, la vie ralentie, comme un « champ expérimental ». Une expérience de liberté d’abord, puisque lui seul décide de ses activités, des heures attribuées à la lecture, à l’écriture, à l’entretien, à la promenade, à la contemplation, au sommeil, etc. « L’homme libre possède le temps. »

    En mars, il note ceci : « Pour parvenir au sentiment de liberté intérieure, il faut de l’espace à profusion et de la solitude. Il faut ajouter la maîtrise du temps, le silence total, l’âpreté de la vie et le côtoiement de la splendeur géographique. L’équation de ces conquêtes mène en cabane. » Vérité universelle ou personnelle ? Aurait-il dû écrire : « Il me faut… » ? En tout cas, il tient quotidiennement son journal intime, « supplétif à la mémoire ». Archiver les heures, tenir son journal « féconde l’existence. »

    Les autres, la famille, la femme aimée, les amis, ne sont pas oubliés. Une date rappelle un anniversaire. L’ennui ne l’effraie pas – « Il y a morsure plus douloureuse : le chagrin de ne pas partager avec un être aimé la beauté des moments vécus. » Mais certains jours, il s’accuse de lâcheté : « Le courage serait de regarder les choses en face : ma vie, mon époque et les autres. » 

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    Perov, Les chasseurs à la halte (toile commentée par Tesson) 

    "Les Russes ont le génie de créer dans l'instant les conditions d'un festin."

    Les intrusions de pêcheurs ou de voyageurs amènent un rituel immuable : couper du saucisson en lamelles, ouvrir une bouteille de vodka, se saouler ensemble. Rares sont ceux qui s’y refusent, comme Volodia T., qui s’est réveillé un jour sans sa femme ni ses enfants, partis – « La famille, c’est mieux que l’alcool. » Ses visiteurs traitent le Français d’«Allemand » à cause de la propreté dans sa cabane bien tenue. Tesson rencontre de temps à autre, chez eux ou chez lui, d’autres personnes qui ont fait le choix de vivre seules ou en couple au bord du lac.

    Un ermite se retire, prend congé de ses semblables – les sociétés n’aiment pas ce qui « souille le contrat social ». Sans contacts avec les autres, l’esprit ralentit, perd la vivacité des conversations mondaines, il n’est plus nécessaire de trouver toujours quelque chose à dire. « Il gagne en poésie ce qu’il perd en agilité. »  L’écrivain allume une bougie devant l’icône de Séraphin de Sarov qu’il emporte partout, il porte au cou une petite croix orthodoxe, par amour du Christ, non de la religion, « tripatouillage de la parole évangélique ».

    Bien à l’abri du froid, Sylvain Tesson redécouvre des choses simples : comment les objets familiers deviennent chers – le couteau, la théière, la lampe – et comme une fenêtre ouvre à la beauté du monde. Les mésanges lui offrent bientôt leur amitié : « Au carreau ce soir, la mésange, mon ange. » Le matin, leurs coups de bec contre la vitre le réveillent. « Côtoyer les bêtes est une jouvence. » Le 28 avril, de passage à Zavarotnoe au retour d’un déplacement pour raisons administratives (extension de visa), il se voit confier deux chiots de quatre mois, Aïka et Bêk, qui aboieront si un ours approche de sa cabane. Leur compagnie, sur place ou en randonnée, lui sera précieuse, voire salvatrice. 

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    A feuilleter sur le site de Gallimard

    La peinture revient sous sa plume pour dire la beauté des choses : « L’or des branches, le bleu du lac, le blanc des fractures de glace : palette d’Hokusai. » (3 mars) « Au matin, l’air est aussi joyeux qu’un tableau de Dufy. » (6 juin) Il a tenté un soir de photographier l’éclat de la neige quand le soleil perce, « mais l’image ne rend rien du rayonnement » : « Aucun objectif photographique ne captera les réminiscences qu’un paysage déploie dans nos cœurs. » (17 mars) « Penser qu’il faudrait le prendre en photo est le meilleur moyen de tuer l’intensité d’un moment. » (15 mai) Paradoxe : Sylvain Tesson a filmé son séjour et en a tiré un documentaire co-réalisé avec Florence Tran : « Six mois de cabane au Baïkal ».

    « Habiter l’instant » est nécessaire à la santé mentale d’un anachorète – « Le présent, camisole de protection contre les sirènes de l’avenir. » Mi-juin, « tout s’écroule » à cause de cinq lignes sur le téléphone satellite qu’il réserve aux urgences : « La femme que j’aime me signifie mon congé. » L’arrivée de deux amis peintres quelques jours plus tard l’aide à « rester en vie ». Le 25 juillet, peu avant de se séparer des chiens, l’auteur dresse le bilan de ces six mois de vie, « pas trop loin du bonheur de vivre ». C’est l’adieu au lac : « Ici, j’ai demandé au génie d’un lieu de m’aider à faire la paix avec le temps. »

    Bien qu’à l’opposé de Rumiz et de ses déplacements le long de la frontière européenne, Dans les forêts de Sibérie, expérience d’immobilité, tient aussi ses promesses de dépaysement : de nombreuses pages racontent l’exploration des environs, les conditions climatiques, le passage des saisons. Au contact des Russes, Tesson prend quelques leçons de philosophie, ce qui ne l’empêche pas d’être critique devant l’arrogance ou la destruction gratuite comme l’abandon des déchets ou la chasse par plaisir. Mais à ces aventures du dehors, à ces conversations passagères, l’exploration du dedans se mêle sans cesse, et donne au récit sa part d’humanité.

  • Reflet

    « Dans le reflet de la vitrine, Laure n’était pas triste, elle avançait calmement, elle avait retrouvé sa mère. Son regard et son sourire ne trahissaient pas la peur qu’elle avait éprouvée seule là-haut. Elle avait tâché de les rendre naturels, inexpressifs, ordinaires, mais sa mère n’avait pas été dupe. Quand elle était enfant, Catherine avait posé les mêmes yeux sur sa mère. Elle s’était reconnue, mais cette fois c’était elle la mère lointaine, secrète, malheureuse. »

    Anne-Sophie Stefanini, Vers la mer

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  • Sur le départ

    Le titre du premier roman dAnne-Sophie Stefanini, Vers la mer (2011), pourrait induire en erreur, le paradis nest pas garanti au bout du conte. C’est l’histoire douloureuse d’une mère, Catherine, et de sa fille, Laure, bientôt dix-neuf ans. A la fin de sa première année d’université, celle-ci vient de rompre une liaison, décidée à entreprendre seule un long voyage en Afrique – Le Livre des Voyageurs, reçu pour ses six ans, est devenu son livre de chevet, Isabelle Eberhardt son modèle – comme sa propre mère qui a quitté la sienne au même âge pour un voyage à Rome, où Laure a été conçue. 

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    Mère et fille forment depuis toujours une cellule-refuge. Laure ne connaît pas son père, sa mère est toujours restée évasive à son sujet. Comme Catherine, professeur d’histoire romaine à l’université, perpétuellement plongée dans les livres, Laure a choisi d’étudier un pan lointain du passé et de préférer la solitude tranquille du cocon familial. Avec le garçon rencontré à l’université, « elle était devenue une fille agréable (…), sortait, dansait, aimait. Mais c’était un mensonge. » Sans même parler de son départ le lendemain, elle a rompu, il n'a pas cherché à la retenir.

    Catherine « avait pensé que Laure partirait sans bruit, pas même un mot sur la console du couloir », mais sa fille lui a proposé de l’accompagner jusqu’à la mer et elles ont décidé d’aller ensemble jusqu’à Nice, dans la vieille voiture dont elles ne se servent jamais à Paris. Une voiture ramenée de Rome, dont Catherine n’a même pas les papiers, « mais cela n’avait aucune importance. » D’habitude, elles préfèrent le train, les transports en commun, mais cette fois ce sera comme une aventure de prendre la route à elles deux.

    Leur voyage commence gaiement, plein de rires et de paroles, et puis Laure, qui ne sait pas conduire, s’endort. Après Auxerre, Catherine s’arrête sur une petite aire d’autoroute, fatiguée. Sa discipline quotidienne lui a permis jusqu’alors d’endurer ses angoisses – « elle connaissait le mal dont elle souffrait » - mais à présent elle ne ressent plus ni peurs ni désirs, « il ne restait qu’un grand vide. » Quand Laure se réveille, elle va chercher deux cafés au distributeur, puis elles repartent dans la nuit.

    Chez Catherine, tout déborde : son bureau, ses placards, ses bibliothèques. Elle ne range pas, ne se soucie de rien, paye ses impôts sans vérifier. Ni papiers, ni contrat d’assurance. Ses souvenirs de Nice affluent malgré elle : sa mère y est morte, devenue incapable de compter, de retenir son âge ou celui de sa fille. Sa maladie avait été prise en charge à un âge trop avancé, selon les médecins, qui s’étaient également enquis de sa santé à elle. Elle n’en a jamais parlé à Laure, « pour la protéger de cette peur, de cette souffrance ». Ni des premiers symptômes de la maladie d’Alzheimer reconnus chez elle-même.

    L’éclatement du pneu avant gauche sonne un retour désagréable au présent et à la réalité. Catherine et Laure n’arrivent pas à changer la roue. Le garagiste qui les dépanne s’inquiète de l’état de leur véhicule, qui serait à vérifier avant de continuer. Il envisage de l’immobiliser, de prévenir la police, mais je ne sais quoi dans le regard de ces deux femmes l’en dissuade, et chacun repart de son côté.

    Vers cinq heures du matin, mère et fille décident de faire une étape – Nice est encore loin et elles étouffent un peu. Elles s’arrêtent à Vienne, près de la gare où un bar-tabac vient d’ouvrir. « Vienna, la ville au bord de l’eau » : elles vont marcher le long du fleuve, puis s’aventurent dans les ruelles de cette ville modeste autrefois « cité romaine importante ». Les souvenirs de Rome affluent, mais Catherine n’explique rien, ne dit rien, laisse Laure la précéder sur le chemin archéologique.

    Chacune rumine de son côté. Catherine pense à sa mère, à Rome. Laure comprend soudain qu’elle ne veut pas vivre comme sa mère, que leur séparation marquera la déchirure : « j’irai à Alger, à Annaba, à Tunis, à El Oued, à Cagliari aussi et puis je retrouverai l’Afrique, Ouergla et Aïn Sefra. » Un intrus habillé de gris s’incruste, insiste pour leur faire visiter le site du théâtre, elles n’arrivent pas à s’en défaire. 

    Au bout de cette journée, elles ne retrouvent plus la voiture. Arriveront-elles un jour à Nice ? Arriveront-elles à se parler ? à se séparer ? Vers la mer est une dérive lente hantée par les non-dits, les désirs et les peurs. Une quête émouvante, angoissante aussi, de sa propre vérité, difficile à partager. « Je voulais que ce soit un livre sur le voyage, et comprendre ce qui pousse à partir », a confié Anne-Sophie Stefanini dans un entretien. Récit d’un voyage ou d’une fuite ? L’étranger, c’est parfois le plus proche, et non le plus lointain.

  • Comme un voyage

    Ce matin, j’ai pris un bus très tôt, beaucoup trop tôt pour me rendre à la gare. Peu importait, je comptais sur le mouvement pour me distraire de l’attente. Je me disais, c’est comme un voyage, même s’il ne s’agissait que de traverser la ville. Tous les débuts de voyage se ressemblent, petits ou grands, on passe une porte et tout commence, ou recommence. Et puis la neige me mettait dans un drôle d’état. 

    Michèle Lesbre, Un lac immense et blanc 

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    Découvrez « les quatre saisons du ciel » au-dessus de Bruxelles
    en visitant la seconde exposition de Philippe Massart
    à la bibliothèque Sésame (Schaerbeek, jusqu’au 18 juin).



  • La neige en juin

    Non, ce ne sont pas les caprices de la météo, c’est une lecture étrange, un beau soir de juin sur la terrasse au soleil couchant, sous un ballet d’hirondelles : Un lac immense et blanc de Michèle Lesbre. 

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    70 pages précédées d’une citation de Pavese : « Seul l’hiver est la saison de l’âme… » Une femme qui n’est plus jeune a gardé l’habitude du café brûlant pris sur le zinc, rituel de passage entre ses nuits et ses jours. Au Café lunaire, elle ne parle avec personne, elle observe. Les mains déjà fripées d’un jeune homme. Les gestes du serveur au rythme de la musique en sourdine.

    Ce matin, Edith Arnaud, « assistante », a cédé à une impulsion : au lieu d’aller au bureau, attendre le train de 8h15, celui que prend chaque mercredi un Italien qu’elle écoute mine de rien, à chacun de ses passages, parler de Ferrare avec le serveur – mais il n’y était pas. Raté aussi le rendez-vous avec le corbeau du Jardin des Plantes, fermé. Au jeune gars qui lui demande ce qu’elle fait dans la vie, elle ne répond pas, se demande si ôter le bonnet qui cache ses cheveux blancs suffirait, mais il insiste et elle finit par évoquer ses habitudes chamboulées – « alors je tente de m’adapter », ce qui le fait éclater de rire.

    Trottoir gelé, flocons. Elle a oublié ses gants quelque part, dans le bus ou sur le comptoir, garde les mains en poche. Dans tout ce blanc surgit le souvenir d’Antoine, de sa voix disant « Un lac immense et blanc ! Un lac immense et blanc ! » A peine sortis de l’adolescence (il y a des dizaines d’années), ils étaient quatre inséparables : Lise, Jean, Antoine et elle. « Je divague entre le présent provisoire et tout ce blanc atemporel. »

    Elle aime depuis toujours la complicité apparente des bars, et ce qui l’a touchée, dans les conversations en italien au Café lunaire qu’elle a suivies sans intervenir, c’est d’y retrouver « Ferrara » où elle a vécu. Quand elle écoute lItalien en parler, elle y est. Dehors, dans la neige, un autre souvenir s’impose, celui de la ferme où on l’avait mise en pension pour se refaire une santé, et cette nuit où elle avait rouvert les volets, enjambé la fenêtre et couru dans les champs tout blancs. « Je crois en la force des lieux », a dit Michèle Lesbre dans un entretien.

    Le corbeau du Jardin des Plantes, qui s’est posé un jour sur le dossier du banc  où elle était assise, est revenu un autre jour, elle lui a donné à manger. Il neigeait aussi quand elle a pris le train de Milan à Ferrare pour chercher les traces d’un cinéaste, Bassani. Elle y a résidé dans un vieux couvent, par économie.

    « Je réinvente ma vie dans le désordre en mélangeant les temps, les lieux, les êtres chers, mais c’est tout de même ma vraie vie. » Antoine, « tout de suite aimé » pour sa fougue et son désir de justice, dans les années soixante, disparu dans la décennie suivante, sans explication. La mobilisation, les tracts, les événements, les changements… Et puis le silence.

    Quelques notes au piano, dans un immeuble : elle reconnaît la sonatine de Diabelli, revoit des images de Moderato Cantabile avec Jeanne Moreau. Sur un quai, elle ouvre C’est corbeau de Jean-Pascal Dubost. Il n’y a presque rien dans Un lac immense et blanc. Avec ces riens, Michèle Lesbre livre la journée d’une femme qui se souvient, qui regarde, qui écoute – sa solitude habitée. Encore une de ses femmes qui marchent sans renoncer à voir, à vivre.