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Culture - Page 48

  • Poussière d’oubli

    goffette,l'oiseau de craie,anthologie,poésie,littérature française,littérature française de belgique,écrivain belge,cultureCe que j’ai vu, je l’ai écrit
    comme la pluie sur les vitres
    et les larmes des roses, et tout
    ce que j’ai oublié demeure

    là, dans ce grand sac de voyelles
    posé contre le pied de la table
    où le temps passe entre ma vie
    et moi sans blesser personne.

    Quand plus rien ne chante au-dehors
    je puise dans le sac et sème
    sur la page un peu de poussière
    d’oubli et le jour paraît comme

    un musicien qui tend son chapeau.

    Guy Goffette, Petits riens pour jours absolus (2016)
    in L’Oiseau de craie (2023)

  • L'Oiseau de craie

    « Espace Nord consacre une admirable anthologie à l’œuvre du grand poète gaumais. Il était temps. Quel régal ! » a écrit Nicolas Crousse dans Le Soir. L’Oiseau de craie est le beau titre de cette anthologie qui va de 1971 à 2021 – cinquante ans de poésie, ça se fête. Serait-ce Guy Goffette lui-même cet « oiseau de craie » qui « persiste à crier terre / dans la courbe des mots » (Arrière-saison) ?

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    Rossano Rosi qui a choisi les textes donne une clé dans la postface, en remarquant que « craie » est l’anagramme d’« Icare », présent comme un leitmotiv dans la poésie de Guy Goffette. La figure mythologique d’Icare « rassemble sous son aile, si on peut dire, des motifs puissants : emprisonnement, appel de la liberté, univers des oiseaux, tentation de l’envol, inanité pour l’Homme de toute tentative d’envol, chute, mort… » (R. R.)

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    A travers le feuillage des jours
    le soleil passe la main
    et lance sur le carrelage
    la monnaie de notre pièce
    Solo d’ombres et de voix
    pour que nous y trouvions
    la force de prendre
    le présent par l’avenir
    comme un enfant par ses yeux
    et rassemblions assez d’oiseaux
    pour croire en l’arbre fraternel
    qu’ensemble nous portons

    Guy Goffette, Solo d’ombres (1983)

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    Un voile d’éther

    Nous avons beau savoir que le ciel n’est rien
    qu’une illusion pareille au bonheur quand tout va :
    les p’tits bateaux au fil du temps, l’horizon
    comme un archet ou comme

    la hanche d’une femme dans les bras du sommeil,
    tout, tout s’aigrit à la moindre occasion :
    la vue d’une chambre étroite, d’une rangée
    de peupliers sous la fenêtre

    – les mêmes peupliers, la même fenêtre,
    forme et fond de l’insupportable absence –
    beau savoir, oui, que ce n’est qu’un voile d’éther
    sur nos yeux blessés, c’est encore pour lui

    que nous bradons l’espace et toutes les couleurs.

    Guy Goffette, Le Pêcheur d’eau (1995)

  • Amoindrir

    catherine demaiffe,jusqu'au lever du jour,roman,littérature française de belgique,écrivain belge,famille,couple,drame,amour,culture,violence,pédophilie,alcoolismePendant ce séjour forcé chez ses amis
    Victor aurait presque apprécié
    passer du temps avec ses enfants
    ceux-ci auraient presque renoué avec leur père
    si ce dernier n’avait pas décidé
    de mettre toute son énergie
    à amoindrir la gravité de la situation
    auprès de ses hôtes
    il ne fallait surtout pas que cela s’ébruite
    sa femme
    alcoolique
    cela pourrait entacher sa réputation
    il ne pouvait pas la laisser tout ruiner.

    Catherine Demaiffe, Jusqu’au lever du jour

  • Jusqu'au lever

    C’est un récit étonnant qui se déroule sous la couverture de Jusqu’au lever du jour, le premier roman de l’actrice Catherine Demaiffe. L’histoire commence en 1957 à Messancy, en province de Luxembourg : le « Vive Jésus Vive Jésus » de la sœur dans le dortoir à l’aube réveille la Petite et les autres internes pour la prière du matin, avant de s’habiller et d’aller assister à la messe. La vie des « pupilles » des Religieuses de la Doctrine chrétienne est réglée en tous points.

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    La Petite n’a plus de famille à part sa tante Maria, qu’elle appelle Yaya. La sœur de son père, très bigote, l’a sauvée de l’orphelinat après l’accident d’avion qui a coûté la vie à ses parents, à son frère et à sa sœur cinq ans plus tôt, « quelque part dans le ciel au-dessus d’Idiofa, province du Kivu, Congo belge ». A la même époque, Louise, qui vit à Lambusart, dans le Hainaut, reçoit une lettre du père de son fils, il s’est marié à Porto Rico :

    Louise ferait croire à son petit garçon
    le plus longtemps possible
    que son père reviendrait

    Voilà comment le texte se présente tout du long (je mets des italiques pour citer ce passage imprimé en caractères droits, les italiques y sont réservées aux paroles), seul l’épilogue comporte des paragraphes. Aucune ponctuation, à part un point et un blanc à la fin de chaque séquence. Cela ne gêne en rien la lecture, le rythme est donné par le découpage de la phrase.

    Un jour, Victor trouve cette lettre de son père dans les affaires de sa mère et comprend pourquoi, bien qu’il soit « studieux et appliqué », les écoliers le traitent de « sale bâtard » ou de « fils de pute ». Quand Louise le découvre avec la lettre prise dans son tiroir, elle hurle avant de s’emparer du martinet suspendu au mur pour le châtier. A l’usine textile, elle-même reçoit les insultes réservées aux filles-mères.

    L’abbé Minot, qui s’occupe des scouts de Lambusart, jette son dévolu sur Victor. D’abord fier d’être son préféré, le garçon n’ose résister aux gestes déplacés du « saint homme ». Victor a une belle voix, l’abbé propose à sa mère de faire son éducation musicale, de le faire chanter dans la chorale, puis de le faire entrer au Collège de Bonne-Espérance. Comme planifié, son protégé entre au Grand Séminaire. Mais on l’y juge trop peu équilibré pour devenir prêtre et Victor est renvoyé à la vie de laïc. Bouleversée, sa mère qui était si fière de lui avale des barbituriques.

    De son côté, la Petite a dû encaisser, elle aussi. Quand après une enfance minée, Victor et Alexandra, se rencontrent en 1968 à l’université, le rapprochement est facile. « Alexandra crevait d’amour / autant que la Petite avait crevé d’ennui / elle  crevait de vivre / autant que la Petite avait crevé de mort / alors elle arrêta ses études de droit / qui la faisaient chier / elle prit son héritage d’orpheline / et elle partit avec Victor / vers un avenir chargé de promesses. »

    On se doute qu’ils ne vivront pas heureux même s’ils auront trois enfants. Victor, en père intransigeant et narcissique, frappe ses enfants et méprise sa femme. Seule compte pour lui sa carrière de chanteur : reçu au Conservatoire, engagé dans les chœurs de la Monnaie, il va devenir un excellent soliste. Pour Alexandra, qui s’est mise comme entre parenthèses dans cette famille, la vie est un enfer.

    En lisant cette histoire dramatique, on se demande bien qui, des parents ou des enfants, réussira à s’en sortir et comment. Quand les malheurs cascadent ainsi, peut-on rebondir ou du moins s’apaiser ? L’heure d’une prise de conscience, bon gré mal gré, arrivera pourtant, et de nouveaux choix. Catherine Demaiffe ouvre une fenêtre sur l’espoir, l’appel d’air est irrésistible – comme un saut dans l’inconnu. On veut y croire.

  • Détails

    AN 6 mai (17) bis.jpgDans la rue Joseph Brand, voici deux maisons modestes en face desquelles la guide nous arrête : datées de 1906, elles sont dotées chacune de deux portes d’entrée, une pour le rez-de-chaussée commercial, une autre pour accéder aux étages.

    L'architecte François Hemelsoet a dessiné des détails originaux pour ces unifamiliales en briques, comme les pilastres ou les balconnets « avec éperon » aux portes fenêtres latérales. 


    148-152, rue Joseph Brand : pour mieux voir les détails art nouveau,
    ouvrir ce lien vers l'Inventaire du patrimoine architectural.