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Littérature - Page 465

  • Ethel par Le Clézio

    J.M.G. Le Clézio, né à Nice en 1940, a reçu le prix Nobel de littérature en 2008, l’année où paraît Ritournelle de la faim, un roman inspiré par l’histoire de sa mère. L’auteur ouvre le récit sur sa propre expérience de la faim, associée aux goûts nouveaux découverts à la fin de la guerre, quand les Américains lancent à la volée chewing-gum, chocolat, pain blanc surtout, « à la mie aussi blanche que le papier » sur lequel il écrit – « Et à l’écrire, je sens l’eau à ma bouche, comme si le temps n’était pas passé et que j’étais directement relié à ma petite enfance. » 

    Pavillon de l'Inde française à l'exposition coloniale de 1931 sur Wikimedia Commons.jpg

     

    L’histoire d’Ethel se raconte en trois temps : La maison mauve, La chute, Le silence. Ethel a dix ans lorsqu’elle visite avec son grand-oncle l’Exposition coloniale. Celui-ci est pressé de lui montrer le pavillon de l’Inde française, une maison « très simple, en bois clair, entourée d’une véranda à colonnes. » Au centre, un patio, avec un bassin circulaire. Monsieur Soliman l’a achetée pour l’installer sur son terrain planté d’arbres exotiques. Ethel, émerveillée par la couleur « légère, irréelle comme une fumée, couleur d’hortensia, couleur de crépuscule au-dessus de la mer » diffusée par des barres électriques dans des niches de bois, la baptise « la Maison mauve », sans savoir encore que son grand-oncle la lui destine.

     

    L’oncle Soliman tombe malade. Avec sa nouvelle amie Xénia dont elle a fait la connaissance à la rentrée des classes – Ethel admire ses yeux bleu pâle, son regard lointain (sa mère a fui la Russie après la Révolution) –, elle se rend au terrain de la rue de l’Armorique pour lui montrer les planches de la maison protégées sous une bâche, un peu mal à l’aise en devinant la pauvreté des Chavirov (la mère de Xénia, comtesse, travaille dans un atelier de couture). Ethel décide d’apprendre le russe, Xénia se moque d’elle et clame son désir de faire table rase du passé pour « changer de vie ».

     

    Le Clézio interrompt à plusieurs reprises la narration pour nous faire entendre les « conversations de salon » chez les parents d’Ethel, Alexandre et Justine Brun, qui reçoivent tous les dimanches. Les souvenirs de l’Ile Maurice font résonner des noms de lieux qui excluent les non-Mauriciens. Quand Ethel demande à Monsieur Soliman pourquoi il a quitté son île, celui-ci répond : « Petit pays, petites gens ». Parmi les invités de son père, elle fuit un financier aux mains frôleuses pour se réfugier auprès de Laurent Feld, un Anglais qu’elle aime comme un grand frère. Alexandre Brun aime partager ses marottes : le Grand Soir des anarchistes, les avions, les dirigeables. On parle beaucoup aussi de l’actualité, de la Révolution russe, du prix de la vie, d’Hitler. Les « instants musicaux » font partie du rituel dominical : Ethel au piano, son père à la flûte ou au chant. Parfois on écoute la belle Maude (la maîtresse de son père,
    devine Ethel).

     

    La mort de Monsieur Soliman en 1934 coupe court aux rêves. Son père l’emmène chez le notaire, elle ne comprend pas immédiatement qu’il s’approprie tout l’héritage, ce dont son grand-oncle avait voulu la préserver, connaissant ses imprudentes foucades. C’est le début de « La Chute ». Ethel en prendra conscience trop tard, le jour où Xénia lui parle avec un certain mépris du chantier de la rue de l’Armorique, où l’on a creusé un énorme trou pour bâtir un immeuble de rapport. Feignant d’être au courant, Ethel s’informe alors de tous les aspects de la construction, voit l’architecte, vérifie les comptes. « Il fallait quitter l’enfance, devenir adulte. Commencer à vivre. » Les projets fumeux d’Alexandre sont en train de les ruiner. Ethel conclut un arrangement avec le notaire pour vendre tout ce qui peut l’être, régler les dettes, sauvegarder l’appartement parisien.

     

    Puis la guerre éclate. En 1942, les Brun se réfugient à Nice et y découvrent le dénuement. « On mourait petit à petit, de ne pas manger, de ne pas respirer, de ne pas être libre, de ne pas rêver. » Même la mer, qu’Ethel aime tant, devient « juste un trait bleu dans le lointain, entre les palmes, par-dessus les toits rouges ». Dans le sous-sol de la Villa Sivodnia, Ethel retrouve Maude vieillie, affamée, mais tenant le coup par la force de son imaginaire, même si elle doit ramasser les restes du marché ou chanter de cour en cour pour se nourrir. A ses parents, elle n’a plus grand-chose à dire : Alexandre, malade, ne quitte plus son fauteuil, Justine ne songe qu’à lui. Ethel renonce aux questions qu’elle pensait leur poser un jour sur leur passé, découvre qu’elle ne les aime pas, mais qu’elle a pour eux une « faiblesse ».
    A la fin de la guerre revient Laurent Feld, qui n’a cessé de lui écrire des lettres et des poèmes. Dans Paris qui renaît, Ethel va découvrir sa guerre à lui et entrer dans une autre vie.

    Roman un peu disparate, Ritournelle de la faim ne tient pas toujours la note. Tableau d’une société en perdition, d’une époque, d’une famille, c’est quand il explore les sentiments d’Ethel qu’il prend le plus de force, bien que les attaches profondes de la jeune fille, comme ses rêves, semblent parfois muselées. Peut-être, après tout, par la colère.

  • Ames sensibles

    « Cependant, je songe soudain que c’est sans doute en cela que réside, au-delà de toute emphase, la vocation profonde et limitée de la littérature : constituer
    au fil du temps une société idéale d’
    âmes sensibles (selon l’expression de Stendhal), lesquelles, jusqu’au cœur des plus éprouvantes circonstances et des pires tribulations – réelles ou imaginaires -, prennent le temps de consigner sur des carnets leurs émois, leurs observations et leurs pensées, afin de les communiquer à d’autres – fraternelles et compréhensives dans les lointains
    de l’espace et du temps – au sein de ce monde perpétuellement ravagé par l’activisme renaissant des médiocres et des brutaux. »

    Denis Grozdanovitch, Petite confrérie d’âmes sensibles in Petit traité de désinvolture

    Wouters Rik, Femme écrivant.jpg
  • Amis du temps perdu

    J’avais capté ici ou là ce nom sonore, Grozdanovitch, et j’avoue avoir été séduite, d’emblée, par son Petit traité de désinvolture (2002). En regard d’une illustration de Zhang Sheng, Rivière en automne au milieu des montagnes, la page de titre comporte un sous-titre – « Où il est question du dilettantisme et de la désinvolture, du temps et de la vitesse, des îles et du bonheur, du sport et de la mélancolie… mais aussi des chats, des tortues et des Chinois. » – et une citation de Cingria : « Il n’y a rien de plus fructueux ni de plus amusant que d’être distrait d’une chose par une autre chose » (les internautes la reprendront volontiers à leur compte). 

    Chagall, Le poète, trois heures et demie (Musée d'art de Philadelphie).jpg

     

    Il y a d’abord le style, sa musique : « Un violent orage d’arrière-saison s’abat à l’instant sur la Porte de Saint-Cloud. Le tonnerre ébranle, des éclairs zèbrent l’habituelle grisaille parisienne de novembre. Enfin, une volée de gros grêlons vient gifler la façade. » C’est l’incipit de L’infiniment singulier. Une longue plume qui descend paisiblement « au milieu du maelström des airs tourbillonnants » crée « l’Insolite » du jour, « minuscule prodige » contemplé à la fenêtre, une tasse de thé à la main « tandis que dans mon dos les livres sagement rangés sur les rayons creusent la tranquille impunité de mon microcosme privé ».

     

    Denis Grozdanovitch, poète philosophe, cultive l’art de « jouir au jour le jour des petits plaisirs (…) à l’écart du train du monde » comme ces « tueurs de temps » (Restif de la Bretonne) qui se réunissent à la cinémathèque de Chaillot à la séance de l’après-midi, de vieux cinéphiles, comme ces joueurs d’échecs ou de pétanque ou encore ces « inactifs »  assis des heures dans les cafés. Il existe, écrit Grozdanovitch, une association de « Banalyse », dont les membres se retrouvent à l’endroit et au moment convenus « sans avoir aucun motif précis pour se rencontrer ni rien de spécial à se dire » (Les Tueurs de temps).

     

    « Dis-toi bien, fiston, qu’au cours de toutes les circonstances de l’histoire, il y a toujours eu des pêcheurs à la ligne » lui répétait son père quand il le voyait, adolescent, préoccupé par la tournure des événements. Leitmotiv que l’auteur associe à cette peinture chinoise ancienne où l’on découvre, à l’écart des scènes de bataille, « dans un coin du rouleau, généralement dissimulé derrière un rideau d’arbres, un étang à moitié couvert de nénuphars », une barque « dans laquelle un petit personnage coiffé d’un chapeau de paille pêche sans se soucier de rien » « le plus parfait symbole de la sagesse ».

     

    Je me garderai de citer les plus merveilleux exemples de « l’amateurisme désinvolte » que Grozdanovitch raconte avec délectation ; ils sont, de texte en texte, les perles de rosée que le lecteur peut toucher du doigt, le sourire aux lèvres. La mort de Perdita, chat parisien, ravive le souvenir d’une après-midi au musée d’art de Philadelphie devant un Chagall, Trois heures et demie, le poète (ci-dessus) : à la tête verte posée à l’envers sur le buste du poète correspond le chat vert qui lui lèche la main. « Les poètes : ces êtres qui n’ont rien de mieux à faire à trois heures et demie de l’après-midi que de noter leurs précieuses émotions dans de petits carnets, tout en buvant du thé, la tête perdue dans les nuages, et à qui les chats tiennent compagnie !… », consigne-t-il dans son carnet tandis que Perdita, roulée en boule, dort profondément sur le sofa près de sa table.

     

    « Rien n’est plus drôle que le malheur » (Beckett) : cela vaut pour l’histoire de Titi, la marionnette au sourire espiègle offerte à sa grand-mère devenue folle, qui en fera un usage inattendu à l’hospice. S’il évoque avec grâce le commun des mortels ou Paul Léautaud, esprit libre (Un héros solipsiste), Grozdanovitch écrit aussi sur Ted, le champion de squash, ou sur le fair-play, la prime de l’élégance du geste revenant sans conteste au joueur de tennis (Le futur champion) qui s’entraîne inlassablement contre un mur. Autant le compte rendu d’une soirée entre artistes, « tumultueux méli-mélo constitué d’une dizaine de prétendus dialogues vociférés » est hilarant, autant Au musée de Bruxelles par un jour de pluie en hiver… qui commente quelques toiles anciennes représentant l’homme dans la nature se mue en interrogation philosophique non exempte de mélancolie.

     

    En lisant, en visitant – voilà la démarche de ce Petit traité de désinvolture de haut vol où l’on rencontre tantôt Nietzsche tantôt le satyre du cimetière anglais de Corfou, « le bonheur de l’été » et aussi des sentiments disparus, où l’on songe gaiement à l’ennui, sur un vélomoteur le long de la Seine (en imaginant un « Club des Amis du temps perdu ») ou seul en forêt, dans le lit de Proust (Le Robinson de la chambre en liège) ou même dans les rêves d’un homme à la riche existence nocturne (Portrait de l’artiste en vieux songe). Ce livre est un cadeau du ciel, n’hésitez pas à vous l’offrir.

  • Vert étrange

    « Les matins d’automne, la vallée se couvre de fleurs vert foncé, minuscules comme des gouttes de rosée. Ce sont sans doute les plus éphémères des fleurs. Elles ne vivent que quelques heures. Vers sept heures ou sept heures et demie, le soleil d’automne sèche les herbes, les boutons commencent à s’ouvrir. Vers huit heures, les fleurs s’épanouissent, elles vivent quelques instants la plénitude de leur extraordinaire beauté. Elles fleurissent en grappes, dansent comme des milliers et des milliers de gouttelettes vertes sur les feuillages épais, d’une blancheur de marbre, illuminés par des reflets d’argent velouté. Vers dix heures ou dix heures et demie, les pétales graciles se fanent, se fripent, s’enroulent. A midi juste, les cinq pétales froissés, ratatinés, se tassent en un point noir. Aucun peintre n’a encore réussi à rendre le vert étrange de cette fleur, aucun poète n’a encore su décrire sa beauté chimérique. »

    Duong Thu Huong, Terre des oublis (traduit du vietnamien par Phan Huy Duong)

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  • Miên et ses maris

    Première incursion dans la littérature vietnamienne avec Terre des oublis, de Duong Thu Huong (2005). Sa défense de la démocratie lui a valu d’être exclue du parti communiste en 1990 et de vivre en résidence surveillée à Hanoi, interdite de publication. Elle envoie alors ses manuscrits à Paris, où elle vit depuis 2006. Le roman s’ouvre, comme la plupart des chapitres, sur une évocation très sensible du paysage : « Une pluie étrange s’abat sur la terre en plein mois de juin. D’un seul élan, l’eau se déverse à torrents du ciel, la vapeur s’élève des rochers grillés par le soleil. L’eau glacée et la vapeur se mêlent en un brouillard poussiéreux, aveuglant. » 

     

    Miên, partie à la récolte du miel avec d’autres femmes, s’est abritée dans une grotte. Quelque chose l’oppresse depuis le matin, elle est inquiète pour son fils que garde la tante Huyên et pour son mari, Hoan, parti en bateau pour ses affaires. Vu le temps, la journée est perdue, de toute manière. Au Hameau de la Montagne, devant sa maison sur la colline, entourée d’orangers et de pamplemoussiers, un attroupement inhabituel : un homme l’appelle, de l’intérieur, dont elle ne reconnaît pas la voix. C’est celle de Bôn, son premier mari, qu’elle n’a plus vu depuis quatorze ans, déclaré mort à la guerre. Deux ans après l’avis de décès, Miên a épousé Hoan, un riche propriétaire terrien, dont elle a eu un enfant, le petit Hanh.

     

    « En ce temps-là, les jeunes soldats se mariaient précipitamment, juste avant de partir au front. Ils consumaient hâtivement leurs amours comme les éphémères se jettent en tournoyant dans les flammes. » Bôn mesure, à voir le luxe dans lequel vit Miên, la différence entre sa bicoque et cette vaste demeure au milieu d’une plantation. Les villageois, toujours curieux de ce qui se passe chez les autres et
    envieux de la réussite d’autrui, se rangent d’emblée du côté de Bôn, qui a souffert pour son pays. Miên avait dix-sept ans quand ils se sont mariés, elle sait où est son devoir, impossible de s'y dérober, mais demande une semaine à Bôn, le temps de revoir Hoan qui va bientôt rentrer.

     

    De jeunes volontaires communistes aident le soldat à retaper sa maison. Bôn a honte de sa sœur avec qui il cohabite, d’une sexualité débridée depuis l’adolescence, deux fois veuve, et qui élève ses enfants dans la crasse. Pour plus d’intimité, il fait construire une cloison de briques pour mieux séparer sa chambre. Sur la route qui le ramène
    chez lui, Hoan, prévenu dès son arrivée au port, pense à ses parents, un instituteur et une commerçante qui l’ont forgé selon leurs valeurs : « intelligent, travailleur, bon, généreux, parfois naïf face à la vie ». Tombé très jeune dans le piège d’un mariage d’intérêt – la gérante d’une boutique l’avait attiré chez elle pour le faire boire et céder aux avances de sa fille enceinte à la recherche d’un mari –, il avait dénoncé leur union truquée dès le jour des noces et divorcé après neuf ans de vie séparée. Puis il avait rencontré Miên, son bonheur. Et voici que la fatalité les sépare. Miên essaie chacune des chemises de soie qu’il lui a rapportées, mais décide de ne rien emporter, à part des vêtements sombres. Pendant leurs derniers jours ensemble, aucune visite. « Et tout le monde traite le jeune couple comme des condamnés à mort attendant l’exécution. » Miên laisse tout ce qu’elle possède de précieux pour leur fils. Hoan l’assure que la maison sera toujours à elle et la force à accepter de l’argent. Mais elle refuse d’emporter les clés.

     

    Chez Bôn, Miên remet de l’ordre, traque la saleté et envoie Bôn chez tante Huyên pour lui demander quelques bols et de la vaisselle correcte. Tandis qu’elle découvre le jardin en friche où plus rien ne pousse, Bôn attend impatiemment la nuit, obsédé par son désir. Quand il se jette sur elle, Miên reste froide comme une statue – « La beauté éblouissante de Miên sera comme un gouffre sans fond où il s’engloutira sans espoir de retour » – et le voilà impuissant, pour la première fois de sa vie, nuit après nuit. Son ami Xa le Borgne devine la situation et prévient Bôn : sa femme ne pourra pas vivre avec lui jusqu’à sa mort uniquement par devoir. Il lui conseille de se faire soigner la bouche – il empeste –, d’aller travailler à la plantation d’Etat, à cent kilomètres de là, et d’y refaire sa vie avec une femme revenue de la guerre. Mais Bôn s’entête. Seul l’argent de Miên leur permet de vivre décemment. Hoan, lui, est retourné en ville dans la maison de son père, que sa sœur avait divisée en deux. Il est doué pour les affaires et fait prospérer le commerce familial. Une fois par semaine, il
    se rend au Hameau de la Montagne pour voir son fils.

     

    Duong Thu Huong éclaire régulièrement le récit des malheurs de Miên et de ses deux maris par le monologue intérieur des trois protagonistes, en italiques. On comprend vite que leur situation est invivable. Liés par un amour invincible, Miên, soumise à l’opinion publique, et Hoan, respectueux du choix de Miên, attendent que Bôn en prenne lui-même conscience. Lui, malgré sa santé chancelante, ne veut pas abandonner son rêve de vivre comme avant. Il prend des remèdes pour la virilité, s’obstine à vouloir mettre sa femme enceinte pour se la lier définitivement. Le temps fera son œuvre, lentement, cruellement, jusqu’à délier un peu les peurs qui les étouffent.

     

    Terre des oublis montre leur vie au présent, saison après saison, et plonge aussi dans les souvenirs de chacun. Les scènes de guerre qui hantent Bôn sont terrifiantes. La romancière les décrit crûment, comme elle le fait pour la violence sexuelle, en
    contraste avec le lyrisme des moments de tendresse ou de fusion avec la nature, dans un style alliant force et finesse. Il vaut le voyage, ce parcours au cœur des souffrances d’un peuple et de ce trio aux prises avec la fatalité, amplifiée par les préjugés.