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Belgique - Page 98

  • Rob Mallet-Stevens

    L’exposition « Rob Mallet-Stevens » vient de fermer ses portes à la Fondation Civa (qui avait présenté la joyeuse « Flora’s Feast » l’an dernier), en collaboration avec la villa Noailles. Elle rassemblait de nombreux documents, photos, revues et objets pour retracer la carrière de cet architecte moderne. J’étais curieuse de la découvrir après quelques passages à la villa d’Hyères et la visite de la villa Cavrois près de Lille, l’an dernier. En voici un aperçu.

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    L’arbre qui présente sa généalogie prestigieuse permet de le situer dans une famille propice à une vocation artistique. Son père français, Maurice Mallet, était marchand et expert en tableaux ; sa mère belge, Juliette Stevens, était la fille d’un critique d’art et marchand de tableaux, Arthur Stevens, « découvreur de Corot, défenseur de Courbet, soutien de Millet et ami de Whistler et de Baudelaire » (toutes citations lues à l’exposition), dont les deux frères étaient peintres (Alfred et Joseph) et collectionnaient les estampes japonaises.

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    Jacques-Emile Blanche, Portrait de Robert Mallet-Stevens, 1933, Musée des années 30, Boulogne-Billancourt
    « Je vois sourire son fin et mince visage dont on dit volontiers – et justement d’ailleurs –
    qu’il est très français quand on ignore que ce Parisien est à demi brabançon. » (Francis Jourdain)

    Adolphe Stoclet y apparaît également et la construction du magnifique Palais Stoclet sur l’avenue de Tervueren, « rectiligne comme un mastaba, mais l’on pénétrait dans l’enchantement d’une basilique ravennate » (Edmond de Bruyn), a influencé le jeune architecte à qui certains reprocheront en 1912 de trop copier les « Munichois ». Au noir et blanc de la Sécession succède alors un intérêt pour le style Directoire, sa sobriété et ses couleurs primaires éclatantes.

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    Sous les plans et dessins accrochés au mur, de nombreuses revues d’architecture et de décoration illustrent tout au long de l’exposition l’évolution de Rob Mallet-Stevens (1886-1945), tant pour la construction que pour la décoration intérieure, le mobilier, les luminaires. En agrandissant la photo ci-dessus, vous pouvez voir que les projets de villa sont encore « sous influence ».

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    Dans un bel ensemble de dessins pour « Une cité moderne », moins de décor, une seule couleur vive rehausse un élément (porte, vitrail, ornement) : Mallet-Stevens dessine une école, une église, un garage, un magasin, un bureau de poste, une bibliothèque..., place chaque fois un peu de végétation à proximité. Une deuxième série réalisée plus tard montre à quel point il continue à simplifier volumes et dessins.

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    Des sièges (dont le transat conçu pour la villa Noailles, en tube de tôle laquée et toile), du mobilier, une maquette, des tapis, quelques objets offrent un peu de variété au regard. Par exemple, une fonte en bronze d’un curieux « arbre en ciment armé » qu’il avait conçu avec Jan & Joël Martel pour accompagner des « murs en plantes » dans des jardins. Près des photos de leur atelier, j’ai aimé leur bel Accordéoniste, dans une niche éclairée, près d’un Oiseau volant (bouchon de radiateur d’automobile). 

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     © Jan & Joël Martel, L'accordéoniste, bronze, 1925 (Collection particulière)

    Mallet-Stevens a décoré de nombreux magasins parisiens. Pour l’exposition universelle de 1937, il a redessiné les luminaires de l’avenue Président Wilson, toujours en service. Pour lui, tout était concerné par la modernité, le commerce et la publicité étaient aussi des objets d’étude, pas seulement les maisons et les musées. On peut le considérer comme un véritable designer.

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    A l'avant-plan, Rob Mallet-Stevens & frères Martel, Arbre en ciment armé,
    fonte en bronze d'après la maquette d'origine

    Bien sûr, un pan de l’exposition est consacré au projet de la villa Noailles et un autre à la villa Cavrois. Il est amusant de lire ce que le vicomte de Noailles écrit à son architecte en 1925 : « Nous voilà installés dans la petite maison et je tiens tout de suite à venir vous dire combien elle est réussie et combien nous en sommes enchantés. C’est un triomphe. » Quand on visite la villa Noailles aujourd’hui, on y découvre des pièces plus modestes quà la villa Cavrois ; elle est néanmoins dotée de multiples commodités nouvelles, piscine, gymnase, terrasses, annexes… et d’une vue magnifique !

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    Rob Mallet-Stevens a conçu de nombreux immeubles à appartements aux lignes pures, sans ornements, un modernisme dont l’architecture contemporaine reste largement l’héritière. On entre à l’exposition entre de grandes photos prises dans la fameuse rue Mallet-Stevens à Paris, bordée d’immeubles modernistes, dont l’Hôtel Jan & Joël Martel avec leur atelier et son propre Hôtel particulier construit en 1925-1926 (toute l’œuvre est présentée sur le site de la Fondation des amis de Mallet-Stevens).

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    © Josette Briau-Martel, Vue de la rue Mallet-Stevens, vers 1930 (Collection particulière) / détail

    « L’architecte moderne peut faire autre chose qu’un bloc compact fait de pierre, de bois, de fer, de zinc, de fonte, de staff, de marbre, de stuc, de briques, de plomb ; il peut « jouer » avec une succession de cubes monolithes. La décoration rapportée n’a plus de raison d’être. Ce ne sont plus que quelques moulures gravées dans une façade qui accrocheront la lumière, c’est la façade entière. L’architecte sculpte un bloc énorme : la maison. Les saillies, les décrochements rectilignes formeront de grands plans d’ombres et de lumière. Un cartouche, une guirlande de feuillages laisseront la place à des surfaces unies butant contre d’autres surfaces unies. L’architecture devient monumentale. » (Mallet-Stevens, 1924)

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    Une petite exposition parallèle était consacrée à « Charles de Noailles et les jardins – Jalons d’un parcours entre art et botanique ». J’y ai découvert les beaux jardins de la Villa Croisset à Grasse, résidence de la mère de Marie-Laure de Noailles, un domaine aménagé par Ferdinand Bac. Charles de Noailles s’installera à Grasse après la seconde guerre mondiale, à l’Ermitage de Saint-François, une ancienne bastide sur les hauteurs, pourvue d’une source pour arroser les jardins et alimenter des fontaines.

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    Ferdinand Bac, Projets pour la villa Croisset à Grasse, 1913-1917 © Coll. Musée d’Art et d’Histoire de Provence, Grasse

    On y montre aussi les jardins de l’Hôtel Noailles à Paris, le jardin moderniste d’Hyères. Le vicomte était passionné de plantes méditerranéennes, sur lesquelles il a écrit un ouvrage. Une dédicace illustre son amitié avec René Pechère, architecte paysagiste belge. Et des photos du « Fenouillet » que ce dernier avait fait construire à Hyères, une habitation sans étage avec un patio intérieur, dotée d’un « jardin romain » en neuf carrés identiques, au milieu d’un maquis sec et sauvage.

  • Retour rue La Boétie

    21, rue La Boétie, le récit d’Anne Sinclair paru en 2012 est à l’origine de la belle exposition prolongée jusqu’au 19 février à Liège (avant le musée Maillol à Paris, de mars à juillet). Il commence par cette histoire ahurissante en 2010, dans une préfecture : la mention de sa naissance à l’étranger (New York) amène un employé à lui demander d’abord, vu « des directives nouvelles », l’extrait de naissance de ses parents et puis, carrément : « Vos quatre grands-parents sont-ils français ? »

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    Anne Sinclair et son grand-père Paul Rosenberg

    « La dernière fois qu’on a posé ce type de questions à ceux de leur génération, c’était avant de les faire monter dans un train à Pithiviers, à Beaune-la-Rolande ou au Vel d’Hiv ! » s’étrangle-t-elle. Rien à faire. « Pendant des années, je n’ai pas voulu écouter les histoires du passé ressassées par ma mère. » Micheline Rosenberg-Sinclair, à qui son livre est dédié, l’ennuyait « un peu » en lui racontant l’histoire de ses grands-parents maternels.

    « Ce que j’aimais, c’était la politique, le journalisme, le côté du père plus que celui de la mère. » Robert Sinclair (ex-Schwartz), d’abord simple soldat affecté à la météo en 1939, s’était engagé une fois démobilisé via les Etats-Unis dans la France Libre, combattant cette fois au Proche-Orient. On lui avait conseillé de changer de nom et il avait choisi dans le bottin téléphonique new-yorkais ce nom irlandais très commun, « Sinclair ». Après la guerre, il avait décidé de le garder, sans doute pour éviter à sa fille « les périls qu’un nom juif avait fait subir à sa famille. »

    La mort de sa mère a donné à Anne Sinclair l’envie de mieux connaître « ce monsieur qui s’appelait Paul Rosenberg et qui habitait à Paris, au 21 de la rue La Boétie. » Une façade que sa mère lui montrait chaque fois qu’elles passaient devant, où sa fille ne s’était jamais arrêtée. En avril 2010, elle téléphone à la société qui y a des bureaux, on lui permet d’y jeter un coup d’œil. Tout a été transformé mais elle repère certains éléments des photos d’archives familiales, imagine les lieux du temps de la fameuse galerie Paul Rosenberg.

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    Après la guerre, l’Etat français en a chassé les collaborateurs du sinistre Institut des questions juives et y a installé le siège de Saint-Gobain, avant de restituer l’immeuble à son propriétaire qui finit par le vendre en 1953 – impossible d’habiter là où les caves contenaient encore de la propagande antisémite. Anne Sinclair raconte ces « années noires », tandis qu’en Allemagne on opposait l’art « dégénéré » et l’art allemand, une idéologie si bien montrée à la Boverie. 

    Alors que l’exposition présente la vie de P. Rosenberg chronologiquement, le récit commence par « Le 21 à l’heure allemande » et par la saga des œuvres pillées par les nazis, évoquée dans le billet d’octobre dernier. Paul Rosenberg s’était réfugié un temps à Floirac, près de Bordeaux. Anne Sinclair s’y est rendue et rapporte les occupations de son grand-père en 40, avant qu’il ne quitte la France en catastrophe : les visites de Braque, « troublé et malheureux », les contacts avec Matisse installé à Nice, avec Picasso à Royan, « pas très loin ». Grâce à ses liens avec Alfred Barr, conservateur du MoMA, Rosenberg réussit à obtenir des visas pour toute sa famille qui débarque à New York en septembre 1940.

    Anne Sinclair relate ses recherches, et sa façon de remonter le temps, à la fois journalistique et personnelle, laisse les lecteurs témoins de ses impressions, de ses doutes, de ses émotions. Visite des archives dans les entrepôts du Centre Pompidou, visite du garde-meubles où se trouvent les caisses de France Forever dont sa mère a été la secrétaire générale – « une tâche exaltante, pour laquelle elle s’était dévouée tout entière, avec talent et imagination » – une exception dans sa vie « conventionnelle, conjugale et maternelle » qui a paru « archaïque », comme un « gâchis », un anti-modèle pour sa fille.

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    Au musée de la Boverie, une grand photo de la cage d'escalier au 21, rue La Boétie (source)

    A partir des papiers et des lettres de son grand-père obsédé par ses tableaux, soucieux pour son fils Alexandre et sa fille Micheline, tendre pour sa petite-fille (« ma cocotte chérie »), des photos, se dessine peu à peu le portrait d’un homme « anxieux » et « pudique » qui, dans les années 50, se plaignait « de sa santé, mauvaise, et de ses affaires, en fait prospères, mais qu’il trouvait exécrables ». « Il demeurait préoccupé de l’avenir, sans insouciance ou soulagement du cauchemar désormais fini. »

    Le mot « marchand » gênait Anne Sinclair, lui paraissait impur quand il s’agissait de tableaux et d’art. Mais en découvrant le parcours de son grand-père, à la suite de son propre père, elle découvre un « passionné » d’art, défenseur des modernes, qui écrivait : « Les peintres en avance sur leur époque n’existent pas. C’est le public qui est parfois à la traîne de l’évolution de la peinture. (…) Trop souvent, le spectateur cherche en lui-même des arguments contre leur art plutôt que de tenter de s’affranchir des conventions qui sont les siennes. »

    « C’est sans doute ce qui me réconcilia avec ce mot de marchand : parti de rien, mon arrière-grand-père fit sa propre éducation artistique, en se fiant à son goût audacieux. » Lui s’était passionné pour Manet, Monet, Renoir – « une passion, devenue un métier. » 21, rue La Boétie raconte le parcours de Paul Rosenberg, ses erreurs, ses intuitions, ses goûts, son œil « légendaire » pour reconnaître les œuvres de qualité exceptionnelle.

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    Pablo Picasso, Portrait de Mme Rosenberg et de sa fille (Micheline), 1918, musée Picasso, Paris (photo RMN)

    Anne Sinclair s’arrête sur le portrait que Picasso a peint pour son ami Paul, « Portrait de Mme Rosenberg et de sa fille » : « Je l’ai autrefois dédaigné, en le trouvant trop conventionnel, sorte de Vierge à l’enfant sur un fauteuil Henri II. Désormais, je viens méditer devant lui au musée Picasso, où j’ai toujours pensé qu’il avait sa place. » En 1918, il avait fait sensation, en rupture avec le cubisme. Tout un chapitre est consacré à l’amitié entre « Paul et Pic ».

    Enfin, Anne Sinclair évoque New York, ville refuge de sa famille, et la galerie PR & Co. « J’y ai passé tant de Noëls que jusqu’à une époque toute récente, New York avait pour moi un parfum envoûtant », écrit-elle discrètement. Les marches de la maison de la 79e Rue « étaient autrefois encadrées du Penseur de Rodin et de son camarade, L’Age d’airain. » C’était la neige, les vacances, les interminables discussions familiales sur la France, les gâteries des grands-parents, « le paradis pour l’enfant que j’étais ».

  • Profil d'homme

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    Chez Alexis Bordes (Paris), un bronze m’a fort intriguée : Profil d’homme vêtu d’une armure à l’antique, attribuée à César Cerebelli. Les attributs sur son armure (coquille et dragons sur le casque, serpent sur l’épaule, petite tête ailée sur la poitrine) rappellent le symbolisme, l’œuvre daterait de 1895.

    A la Brafa, chacun peut poser des questions et certains exposants ne se font pas prier pour donner des explications. Ici, j’ai reçu une notice détaillée et illustrée sur ce magnifique Profil et les recherches à son sujet : il pourrait s’agir de Persée ou d’Alexandre le Grand.

    « La mythologie avec ses héros et demi-dieux comme Persée et l’histoire antique où se mêlent réalité et légendes constituent, pour les artistes symbolistes, une source inépuisable et particulièrement riche de sens et d’interprétations. » (notice)

  • A la Brafa 2017

    Les lumières de la Brafa 2017 se sont éteintes dimanche, pourquoi ne pas en rallumer quelques-unes, pour le plaisir des yeux ? Je vous avais parlé l’an dernier de ce rendez-vous annuel des amateurs d’art et d’antiquités à Bruxelles, où il y a tant de choses à admirer (peintures, sculptures, meubles, céramiques, verreries, bijoux, etc.), trop pour une seule visite. (Vous pouvez vous en faire une idée à travers la vidéo de deux minutes sur le site de la Brafa, qui a adopté cette année un nouveau nom de domaine, « .art »)

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    Julio Le Parc, Sphère (210 cm de diamètre), Brafa, Bruxelles, 2017

    L’artiste invité, Julio Le Parc, né en 1928 en Argentine, y a installé quatre œuvres monumentales dont deux magnifiques sphères éclairées, une bleue, une rouge, qui attiraient tous les regards. Les antiquaires et les galeristes (132 exposants, 22 pays) rivalisaient dans la présentation de leurs stands : certains ressemblent de plus en plus à des salons où tout est de qualité, décor et objets, du sol au plafond.

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    Coin du stand de la galerie Mathivet

    L’antiquité et les arts premiers, de plus en plus présents, s’illustrent ici avec des œuvres parfois dignes de figurer dans un musée. Je m’émerveille souvent du soin qui les a entourées pendant des siècles et des siècles pour qu’elles arrivent dans un si bel état jusqu’à notre époque, comme cette Tête de déesse grecque au doux visage ou ce Masque de copte d’origine chypriote (Phoenix Ancient Art, New York).

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    Tête de déesse, Phoenix Ancient Art

    D’un stand à l’autre, d’un côté d’une allée à l’autre, on fait souvent le grand écart. Ici, une sculpture contemporaine en bois d’érable de Keping Wang (artiste chinois né en 1949), Jeune fille, présentée par une galerie londonienne (Aktis). Là Bruegel, Rubens, Niki de Saint-Phalle, Geluck et son chat, Cobra… Tous cohabitent à la Brafa, où l’on déambule dans l’histoire de l’art et à travers le monde, au bonheur de l’éclectisme.

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    © Keping Wang, Jeune fille, Galerie Aktis

    J’ai découvert à la Stern Pissarro Gallery (Londres) que de nombreux descendants de Camille Pissarro ont peint eux aussi. De belles œuvres impressionnistes figurent dans le catalogue de cette galerie (en ligne). Chez Bailly (Genève), j’ai contemplé un beau petit Nicolas de Staël, Les Martigues, et une délicieuse Fillette avec sa poupée de Foujita.

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    © Nicolas de Staël, Les Martigues, 1954, huile sur toile, galerie Bailly, Genève

    A la Galerie Oscar de Vos (Laethem-Saint-Martin), on est sûr de retrouver des artistes qui y ont vécu ou travaillé au début du XXe siècle dans la région de Gand. Le portrait de Jeune fille, Celina appuyée sur le dossier d’une chaise dans un jardin, signé Emile Claus, est un bel exemple du luminisme, variante belge de l’impressionnisme. Un Delvaux exceptionnel, Jardins d’Alexandrie, était au premier plan à la galerie Harold ’t Kint Fine Arts (président de la Brafa), et aussi Nel sur son sofa de Rik Wouters.

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    Emile Claus, Jeune fille / Celina, 1903, galerie Oscar de Vos

    Certaines présentations sont remarquables : une fontaine abondamment fleurie entre deux angelots ; des masques de Calder sur fond noir (l’artiste est présent à plusieurs endroits avec des gouaches aux couleurs vives).

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    © Alexander Calder, Masque de lune, Masque bleu avec nez orange, Masque rouge souriant, métal peint, 1949, Opera Gallery

    A la galerie Sismann, au fond d’une alcôve, une Vierge pleurante en pierre calcaire (Bourgogne, XVe siècle), figure d’un « groupe de Mise au tombeau » aux lignes pures et douces, très belle ; ailleurs, je me suis arrêtée devant un Christ en bois polychrome encore plus ancien (fin du XIVe) d’origine toscane.

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    Vierge pleurante, pierre calcaire, Bourgogne, 2e moitié du XVe siècle, Galerie Sismann

    Pour qui aime la peinture, il y en a pour tous les goûts à la Brafa, des anciens aux modernes et de plus en plus de contemporains, des Belges et des étrangers. De grandes signatures comme Alechinsky, Soulages, Chagall, Ensor, Rik Wouters… Un exposant marseillais (Galerie Alexis Pentcheff) présentait un bel ensemble d’Henri Lebasque, des toiles d’atmosphère méditerranéenne : Deux jeunes filles au jardin, Nono au chapeau cloche… Lebasque est mort au Cannet, où il fréquentait Bonnard.

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    Henri Lebasque (1865-1937), Deux jeunes filles au jardin, Galerie Alexis Pentcheff

    Moins connus, certains artistes sont évoqués par une œuvre pleine de charme, comme ce Portrait de fillette de Léon Herbo (Ary Jan). Au stand de la galerie Boon (Knokke), un ensemble d’aquarelles signées Robaudi pour illustrer Les Parisiennes, un recueil de sonnets (le poème correspondant repris au dos du cadre), était assez tentant.

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    Léon Herbo, Portrait de fillette, Galerie Berko

    Chez Berko, j’ai admiré La Bourse de Bruxelles après la pluie, une toile d’Adolf Leonhard Muller-Cassel. Et Rêveuse de Fernand Toussaint, un peintre belge apprécié de la bourgeoisie qui a peint tant de jolies femmes : celle-ci porte une veste bleue sur sa jupe déployée, elle regarde sur le côté ; j’aime le jeu des couleurs sur cette toile, les nuances du fond.

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    Adolf Leonhard Muller-Cassel (1864-1943), La Bourse de Bruxelles après la pluie, Galerie Berko

    Chez Yann Ferrandin (Paris), les arts premiers sont à l’honneur et en vedette, une belle harpe congolaise ancienne avec une tête sculptée. Tout est raffiné sur ce stand : la présentation, les arrangements floraux, les éclairages (et les photos du catalogue sur papier glacé), tout concourt à mettre les objets en valeur. Mes photos ne sont pas à la hauteur, malheureusement.

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    Rembrandt Bugatti, Deux petits léopards l'un derrière l'autre, vers 1912-1913, Galerie de la Béraudière

    Plusieurs exposants montrent des sculptures animalières, un genre qui a la cote et qui me séduit toujours, comme ces deux petits léopards l’un derrière l’autre (Rembrandt Bugatti, à la galerie de la Béraudière), une Chèvre et son petit (Albéric Collin), un canard d’un sculpteur que j’avais appris à connaître ici l’an dernier, Jonathan Knight. Ou encore ces oiseaux, libellules, papillons, salamandres juchés sur des branchages, une paire de candélabres en bronze argenté d’une créatrice belge, Paula Swinnen (Bruxelles, 1964). Elle semble s’inspirer ici du mobilier de Diego Giacometti, en plus baroque.

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    ©
    Paula Swinnen, Paire de candélabres, galerie Philippe Heim

    Le stand de la Fondation Roi Baudouin était spectaculaire. Celle-ci, en plus de son rôle social et philanthropique, s’occupe aussi du patrimoine culturel belge, par le biais de dons, legs, dations… et a mis quelques oeuvres en valeur entre ombre et lumière : un autoportrait de Jordaens et une œuvre de jeunesse de Van Dijck, notamment, divers objets d’art présentés dans des sphères métalliques (qui les cachaient un peu), comme une Fontaine de table Imari (émail et argent) ou des vases Keramis de Catteau. Plus loin, une « exceptionnelle statuette Art nouveau », des toiles de Maurice Wijckaert, entre autres.

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    Voilà quelques échos très subjectifs de cette édition 2017 « éclectique et conviviale » (Connaissance des arts), où chaque visiteur a ses coups de cœur évidemment, en fonction de ce qui l’intéresse ou l’attire, ou ses déceptions, « le goût d’aujourd’hui comprenant de moins en moins bien celui du passé », écrit Tancrède Hertzog qui a assisté au vernissage). On se promène dans les allées de Tour & Taxis sur un tapis spécialement réalisé par une étudiante en design textile de La Cambre, gagnante du concours. Avant de sortir, certains se prenaient en photo devant le mur d’orchidées à l’accueil, une tapisserie de fleurs naturelles.

  • Piot le japonisant

    A la fin de l’exposition « Ukiyo-e », aux MRAH, une salle est réservée à Dimitri Piot, dessinateur et illustrateur, né à Bruxelles en 1979. Il crée des images sur des sujets contemporains dans le style de l’ukiyo-e, jouant sur l’anachronisme volontaire. Par exemple, dans une série sur l’histoire du Japon moderne, il montre un trio en kimono traditionnel regardant le lancement d’un satellite ou encore des flâneurs sur un paisible bord de mer tandis qu’au loin explose le champignon nucléaire d’août 45 (voir le site de l’éditeur).

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    © Dimitri Piot, Osumi, 2012

    Ses couleurs sont très douces, très nuancées. Une quarantaine d’œuvres sont exposées, de genres variés. Pour une exposition de design, Options of Luxury, il a dessiné des produits de mode sous un angle japonisant (à voir sur son site). Une série de doubles pages extraites de ses petits romans dessinés – un dessin par page, « de la taille d’un paquet de cigarettes » (note de l’éditeur) conjuguent sobriété et contemplation. Ses dessins du monde du travail, très graphiques, sont surprenants.

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    © Dimitri Piot, Salaryman

    Invité spécial de l’exposition « Ukiyo-e », Dimitri Piot y montre aussi Bruxelles. La jolie vue vers la Grand-Place depuis le Mont des Arts, avec le mont Fuji dans le lointain, fait partie d’une série consacrée aux 150 ans des relations belgo-japonaises. Conçues pour la circonstance, les trois vues verticales des arcades du Cinquantenaire, Après les nuits (2016), sont plus personnelles, inspirées par sa vision du site où il arrivait à pied en revenant du centre, dans différentes ambiances et à des heures peu fréquentées : neige, pluie, couchant – un haïku visuel.

    Ukiyo-e, les plus belles estampes japonaises, Musées royaux d’Art et d’Histoire, 21/10/16 > 12/2/2017
    Prolongation : 18 & 19/2, 25 & 26/2 et 4 & 5/3