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Rechercher : Le monde des hommes

  • Rumeur

    vuillard,congo,récit,littérature française,afrique,conférence de berlin,colonisation,france,allemagne,belgique,angleterre,politique,culture« Depuis des siècles, les Africains avaient appris à se débrouiller avec les Européens qui traînaient près des côtes ; mais voici qu’à présent des tribus reculées entendaient parler d’eux. On avait beau vivre au-delà des rapides, une rumeur remontait le cours du fleuve. Sur tout le continent, un point d’interrogation commençait de se former et de se dresser tout doucement comme une menace. Les roseaux agités par le vent semblaient ne rien savoir, le monde était un être ténébreux derrière un masque de lumière. Le mal apparaissait sous la forme des divinités sanguinaires, des morts voraces, des bêtes, mais il n’allait jamais seul, il était toujours accompagné dans sa courbe déclive et fuyante. Son mystère se mêlait à l’herbe mouillée, à une traînée de feu, aux singes qui crient, à la colère, au sexe qui s’élève, à l’orage. Mais le petit Satan qui allait venir n’aurait besoin ni des hyènes, ni des singes, ni des marécages, et il introduirait de l’homme à l’homme une sorte de méfiance. »

    Eric Vuillard, Congo

    Photo de couverture : Sir Henry Morton Stanley ; Kalulu (Ndugu M'hali),
    National Portrait Gallery, Londres

  • Cette histoire

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    « J’admire ta patience de pèlerin rusé et je crois que je commence à bien t’aimer ! Pour une fois que j’ai l’occasion de parler de cette histoire… Elle a pourtant quelque chose d’une vieille putain réduite à l’hébétude par l’excès des hommes, cette histoire. Elle ressemble à un parchemin, dispersé de par le monde, essoré, rafistolé, désormais méconnaissable, dont le texte aura été ressassé jusqu’à l’infini – et tu es pourtant là, assis à mes côtés, espérant du neuf, de l’inédit. Cette histoire ne sied pas à ta quête de pureté, je te jure. Pour éclairer ton chemin, tu devrais chercher une femme, pas un mort. »

    Kamel Daoud, Meursault, contre-enquête

  • Boîte noire

    « S'adressant à Eric, la directrice lui demanda ce qui n'allait pas à l'école. "J'aimerais bien être comme tout le monde", répondit-il et après un long silence : "J'ai une boîte noire dans la tête que je ne peux pas ouvrir." Il parlait tout bas comme s'il avait peur d'être entendu, ce qui se traduisait par d'énigmatiques chutes de voix. Juliette était bouleversée. N'en pouvant plus, elle se leva et discrètement prit congé de la directrice. »

    Jean-Luc Outers, De jour comme de nuit

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    Jacob Smits, Profil de jeune homme


  • Murmures

    burton,jessie,miniaturiste,roman,littérature anglaise,amsterdam,xviie,marchands,mariage,maison de poupée,culture,extrait« La salle des fêtes de la guilde des argentiers est vaste et pleine de monde. Les visages se fondent en un mélange d’yeux, de bouches et de plumes rebondissant sur des chapeaux. Autour d’eux enfle la cacophonie des tasses en argent et des rires gras des hommes qui répondent aux bavardages des femmes. Il y a une quantité presque monstrueuse de nourriture. De longues tables sur tréteaux, nappées de damas blanc, ont été mises bout à bout et garnies de plats de poulets, de dindes, de fruits confits, de tourtes à la viande et de chandeliers en argent tordus. Johannes tient fermement le bras de Nella alors qu’ils avancent le long des lambris en acajou. On dirait que murmures et ricanements les suivent. »

    Jessie Burton, Miniaturiste

  • Sur la conscience

    « Quand Stuart Sutherland affirmait que rien n’avait été écrit sur la conscience qui vaille la peine d’être lu, il exprimait un jugement assez méprisant pour tous les travaux publiés dans le champ professionnel de la psychologie, mais sans le vouloir (j’espère du moins que c’était le cas), il balayait le corpus entier de la littérature du monde – parce que s’il existe des archives de la conscience humaine, c’est bien la littérature qui nous les fournit, et ce sont les plus riches et les plus complètes qui soient. La poésie lyrique est sans doute la plus achevée des tentatives de l’homme pour décrire les qualia. Le roman est peut-être le plus abouti de ses efforts pour dépeindre l’expérience d’individus traversant le temps et l’espace. »

    David Lodge, La conscience et le roman (A la réflexion) 

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