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Culture - Page 455

  • Amoureux de la Russie

    Tous les matins, depuis trois mois, j’ai commencé ma journée avec un article du Dictionnaire amoureux de la Russie (2004), un régal pour qui aime ce pays, pour qui a la chance de le visiter, pour qui a envie de le découvrir. Rien que du bonheur à le relire presque huit ans après deux magnifiques voyages, à Moscou puis à Saint-Pétersbourg. Une façon aussi de retrouver les deux organisatrices de ces séjours inoubliables, mes amies disparues à qui je dédie ce billet. 

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    Bulbes à Novodevitchi (Moscou)

    Dominique Fernandez, en avant-propos, explique qu’avant son premier voyage en Russie en1986, il avait été « profondément marqué dès l’adolescence par la littérature russe. » Dostoïevski, Tolstoï, Tchekhov, lus en rhétorique pour ma part, sont des écrivains qui marquent, surtout portés par un professeur passionné par la culture russe – elle emmenait parfois ses élèves aux séances de cinéma des Amitiés belgo-soviétiques.

    C’est l’amitié d’un étudiant russe à Paris, dont la famille lui a donné la chaleur qui lui manquait chez lui, qui a scellé « l’immense tendresse » de Fernandez « pour la façon de vivre russe, la culture russe. » Guide excellent et enthousiaste, l’écrivain et critique français nous emmène de « Akhmatova (Anna) » à « Zavtra », « demain » en russe. 

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    Au Musée Anna Akhmatova (Saint-Pétersbourg)

    Le Dictionnaire amoureux de la Russie, illustré de dessins signés Catherine Dubreuil, s’ouvre sur une poétesse. A propos puisque Ahkmatova est pour Soljenitsyne « l’âme de la Russie ». Dominique Fernandez aborde la littérature (environ la moitié des entrées) avec amour, sans complaisance. Il ne présente pas les écrivains de façon encyclopédique, il les a lus, et il a ses préférences. A côté des plus grands, dont Pouchkine, l’écrivain phare aux yeux des Russes, il nous incite à découvrir d’autres écrivains russes moins connus, comme Ivan Bounine ou Iouri Kazakov, et aussi des essais ou des romans étrangers consacrés à la Russie. De larges extraits parfois, par exemple de Vassili Grossman sur la bonté, « l’humble bonté individuelle » opposée au « Bien » imposé par les Etats totalitaires.

    Parmi les autres champs culturels russes ici parcourus, la musique vient en premier : « Le peuple russe est le plus mélomane du monde. » La Russie a donné tant de compositeurs, d’interprètes, de voix incomparables. Fernandez parle en connaisseur des opéras, notamment du « plus bel opéra du monde » à son avis, Eugène Onéguine de Tchaïkovski, dont il aborde aussi la personnalité tourmentée. « Aujourd’hui encore, la plupart des Russes ignorent que Tchaïkovski était homosexuel et, lorsqu’on le leur apprend, ils pensent que l’on veut profaner sa statue. » 

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    Statue de Pouchkine sur la Place des Arts (Saint-Pétersbourg) 

    On ne résume pas un dictionnaire. Certains articles sont lus plus vite que d’autres, certains sont lus et relus, on y coche des passages, on sait qu’on y reviendra. Fernandez parle de la danse, des icônes et de la peinture – « le domaine de la culture russe le plus négligé par le public occidental » ; de belles pages sur Isaac Levitan –, du cinéma. Des sujets qui fâchent, sans langue de bois : « Antisémitisme », « Homosexualité », « Tchetchénie »… De la vie quotidienne : « Blague » (« Sport national russe »), « Famille » (« Rien n’est plus éloigné de l’ancienne cellule bourgeoise française, close et étouffante, que la famille russe. »).

    Ce Dictionnaire amoureux de la Russie mérite une place dans la valise, pour le plaisir de lire ou relire sur place les articles sur Moscou et Saint-Pétersbourg (dissocié de l’entrée « Leningrad »), sur les villes de l’Anneau d’or – « Le charme de Souzdal, comment le décrire ? » – et d’autres d’où Fernandez a ramené ses impressions de voyage. Pour l’année France-Russie 2010,  il était un des quatorze écrivains français à bord du Transsibérien, aventure qu’il évoque en recevant Danièle Sallenave à l’Académie française : « Madame, nous nous sommes connus dans un train. Nous avons parcouru ensemble, pendant trois semaines, 9 288 kilomètres, traversé l’Oural, la taïga et la steppe, relié l’Europe à l’Asie, franchi des fleuves larges de trois kilomètres, longé un lac long de huit cents kilomètres, nous arrêtant dans des gares en forme de palais russe, de château cosaque, de mosquée, de locomotive, sans nous douter que cette épopée ferroviaire, cette magnifique aventure du Transsibérien, aboutirait pour vous, Madame, à la plus prestigieuse de toutes les gares au monde, la Coupole que voici. » (29/3/2012) 

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     Vue de Souzdal

    Un index des noms de personnes, un autre des noms de lieux précèdent la table : une centaine d’entrées. C’est le sous-titre du Voyage d’Italie de Dominique Fernandez qui a inspiré le nom de cette belle collection chez Plon : « Un Dictionnaire amoureux est le contraire d’un dictionnaire, car il est toujours imprévisible. On se promène dans le jardin secret d’une personnalité, d’un écrivain surtout, puisqu’il s’agit avant toute chose de littérature, évasion garantie. » (BiblioMonde

  • Leçon

    « Le parc était petit, pas plus grand que Logan Circle, mais il y avait là assez de verdure pour produire l’effet recherché, pour mettre le monde à l’écart et vivre dans le calme près d’une demi-heure, plongés dans nos pensées. Mon père marchait les mains croisées dans le dos et songeait en silence à sa journée. Il arrivait que ses réflexions l’emmènent plus loin dans le temps et, lorsque c’était le cas, il faisait le tour du parc en parlant tout seul à voix basse. Il murmurait les noms de membres de la famille qui était décédés – sa mère, son père, morts tous deux longtemps avant ma naissance. Nous n’échangions presque jamais de paroles durant ces promenades. Cela aurait trahi la leçon qu’il tentait de m’enseigner. Il ne suffisait pas d’être à l’aise avec le silence. Pour vraiment le comprendre, il fallait l’accueillir et l’inviter dans notre vie. » 

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    Dinaw Mengestu, Les belles choses que porte le ciel 

     


  • Entre deux mondes

    Stéphanos tient une petite épicerie sur Logan Circle à Washington. Il est le narrateur d’un roman émouvant de Dinaw Mengestu, Les belles choses que porte le ciel (2006, prix du Premier Roman étranger 2007, traduit de l’américain par Anne Wicke). Tous les jeudis, ses amis Joseph et Kenneth viennent l’y retrouver. Ils se sont connus dix-sept ans auparavant, quand ils étaient tous les trois de nouveaux immigrants engagés comme bagagistes au Capitol Hôtel. 

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    Kenneth est toujours bien habillé : ce grand Kenyan devenu ingénieur se soucie de la bonne tenue du commerce de son ami, le conseille, l’encourage à ouvrir sa boutique très régulièrement. Joseph – Joe du Congo – travaille à présent comme serveur et boit trop. Avec Stéphanos, d’origine éthiopienne, ils jouent depuis quelque temps « au coup d’Etat » : lancer un nom de dictateur africain, ensuite trouver le pays et l’année.

    L’arrivée d’une nouvelle voisine apporte un peu de sel à la vie routinière de l’épicier. Le quartier change. Judith – une Blanche dans ce quartier noir et pauvre ! – fait restaurer la belle maison de briques à quatre étages abandonnée depuis dix ans près de chez lui, et s’y installe avec sa fille métisse, Naomi. Mrs. Davis, qui habite en face, se méfie : « Pourquoi, d’après vous, une femme comme ça peut avoir envie de vivre ici ? » – « C’est un pays libre, Mrs. Davis. Les gens peuvent vivre où ils le veulent. »

    La fillette de onze ans vient bientôt traîner à l’épicerie de « Monsieur Stéphanos » et lui réclame des histoires. Quand il a lâché ses études pour ouvrir cette épicerie, il y a dix ans, Stéphanos a déçu son oncle, Berhane Sélassié, qui l’avait pris en charge à son arrivée et lui souhaitait un avenir brillant. « De fait, je n’étais pas venu en Amérique pour trouver une vie meilleure. J’étais arrivé en courant et en hurlant, avec les fantômes d’une ancienne vie fermement attachée à mon dos. Mon objectif, dès lors, avait toujours été simple : durer, sans être remarqué, jour après jour, et ne plus faire de mal à qui que ce soit. » Tenir une épicerie, c’était aussi avoir du temps pour lire – un livre tous les deux jours en moyenne.

    Un soir, Judith l’invite à dîner chez elle. En congé pour un an, elle enseigne l’histoire politique ; des disputes continuelles avec le père de Naomi les ont amenés à se séparer. Naomi une fois couchée, Judith montre toute la maison à Stéphanos. Quand il s’en va, elle l’embrasse brièvement. Comme le pressentaient ses amis, il en est tout « enamouré ».

    Son récit fait le bilan d’une vie qui s’englue, se ranime, se décourage, se reprend. Les bonnes résolutions sont précaires. Les rencontres heureuses semblent trop fragiles pour garantir un avenir. L’épicerie périclite. Joseph, l’ami de Stéphanos, lui a fait découvrir ce vers parfait dans L’Enfer de Dante : « Par un pertuis rond je vis apparaître / Les belles choses que porte le ciel. » Au professeur dont il suivait le cours sur le symbolisme de Dante, Joe avait expliqué « que personne ne peut mieux comprendre ce vers qu’un Africain » parce que c’est ce qu'ils ont vécu. « L’enfer quotidien, avec seulement quelques aperçus du ciel par moments. »

    Lumière des journées sombres, la petite Naomi procure au jeune épicier le pur bonheur de lire pour elle, tout haut, Les Frères Karamazov, entre les passages des clients, de plus en plus rares. Mais une lettre d’avocat l’a prévenu des trente jours qui lui restent pour évacuer les lieux, à la suite des loyers non payés – « prévisible », selon Kenneth.

    Nous découvrons peu à peu les circonstances dans lesquelles Stéphanos a dû quitter l’Ethiopie, l’arrestation de son père qui a menti sur l’âge de son fils aîné pour le protéger (à cause des tracts d’étudiants trouvés dans leur maison), ses premiers pas dans la société américaine. Nous suivons la relation entre Judith et son voisin avec les mêmes doutes et les mêmes craintes qu’eux. Noël est une période terrible pour qui a « conscience d’une existence solitaire et creuse ».

    Dans le quartier de Logan Circle, la tension monte. La restauration des maisons anciennes et l’arrivée de nouveaux arrivants plus riches entraînent leur lot d’augmentations du loyer, d’expulsions. Des pétitions sont lancées. Et bientôt des pierres. Dinaw Mengestu, né en 1978 à Addis-Abeba, a fui l’Ethiopie en pleine révolution deux ans plus tard, avec sa famille. A travers le personnage bouleversant de Stéphanos l’épicier, le journaliste américain devenu romancier raconte ce que c’est que de « vivre » ainsi. J’ai pensé en le lisant à La dernière larme du lac Kivu, de Patrick François, récit traversé des mêmes espoirs et des mêmes douleurs de l’exil.

    « Que disait toujours mon père, déjà ? Qu’un oiseau coincé entre deux branches se fait mordre les ailes. Père, j’aimerais ajouter mon propre adage à ta liste : un homme coincé entre deux mondes vit et meurt seul. Cela fait assez longtemps que je vis ainsi, en suspension. » Et aussi : « Nous essayons de faire de notre mieux. »

  • Confusion

    « A présent, il sentait de nouveau, solidement attaché dans son cœur, le lien fraternel qui les unissait, Allan et lui, et il pouvait s’écrier avec la sincérité d’autrefois : « Si la pensée de le quitter brise mon cœur, cette pensée est mauvaise ! » Au moment où cette noble conviction s’emparait de lui, apaisant le tumulte, chassant la confusion de son esprit, la maison de Thorpe-Ambrose et Allan sur le perron, attendant son retour, lui apparurent à travers les arbres. Il ressentit un inexprimable soulagement et, emporté tout à coup loin des soucis, des craintes, des doutes qui l’avaient oppressé si longtemps, il entrevit le radieux avenir qui brillait dans les rêves de sa jeunesse. Ses yeux se remplirent de larmes et il pressa avec effusion la lettre du révérend sur ses lèvres en regardant Allan à travers l’éclaircie des arbres : « Sans ce papier, se dit-il, le crime de mon père nous eût séparés à jamais ! »

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    Tel fut le résultat du stratagème qui fit prendre à Mr. Brock le visage de la bonne pour celui de Miss Gwilt. Ainsi, la croyance superstitieuse de Midwinter fut ébranlée dans la seule occasion où elle touchait à la vérité, et l’habile mère Oldershaw triompha de difficultés et de dangers qu’elle-même n’avait jamais soupçonnés. »

    W. Wilkie Collins, Armadale 

  • Deux Allan Armadale

    Un gros roman à lire au coin du feu ? Armadale, de W. Wilkie Collins (1824-1889), est ce qu’il vous faut (traduit de l’anglais par E. Allouard). « C’était l’ouverture de la saison de 1832 aux bains de Wildbad. » Dans l’hôtel le plus important de la petite ville allemande arrivent d’abord un Ecossais, Mr. Neal, puis un homme très malade, accompagné de sa femme. Après avoir examiné ce dernier, le docteur se rend chez l’autre curiste avec une étrange requête : Mr. Armadale, atteint de paralysie, veut achever avant de mourir une lettre importante, sans en révéler tout le contenu à son épouse, une métisse. Mr. Neal étant le seul à maîtriser l’anglais à part eux, il se trouve forcé d’écrire les dernières volontés d’Armadale sous sa dictée, en présence de son petit garçon à qui la lettre sera remise à sa majorité. 

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    Première édition en deux volumes (1866)

    Orphelin dès l’enfance, Allan Armadale, qui vit sur l’île de la Barbade, hérite à vingt et un ans d’un riche cousin, son parrain, dont sa mère lui avait donné le prénom, après que celui-ci a renié son seul fils qui s’est « déshonoré ». Quelques semaines plus tard, pour parfaire son éducation et le détacher d’un jeune homme de son âge récemment arrivé dans l’île, Fergus Ingleby, dont il s’est entiché impulsivement, sa mère décide de l’envoyer en Angleterre chez un ancien admirateur, sir Stephen Blanchard de Thorpe-Ambrose, dans le Norfolk. Et le voilà sur un bateau en direction de Madère, où ce gentleman réside pour raisons de santé, avec en poche une miniature de la fille de Mr. Blanchard, que celui-ci leur a envoyée en espérant qu’ils se plaisent et se marient.

    Sur place, le jeune Allan, qui avait tout raconté à son meilleur ami, apprend que Miss Blanchard vient de se marier avec un certain… Allan Armadale, « le fils proscrit dont j’avais pris le nom et l’héritage », véritable identité de Fergus Ingleby qui s’est fait passer pour lui : « Je lui avais pris son nom, il m’avait pris ma femme ; nous étions quittes. » Pour achever de tromper Mr. Blanchard, une orpheline de douze ans, la femme de chambre de sa fille, a imité l’écriture de la mère d’Allan (dont Ingleby avait volé une lettre) et rédigé une fausse lettre de consentement.

    Pour éviter le duel, Ingleby-Armadale et son épouse montent à bord de La Grâce-de-Dieu, un navire français en route pour Lisbonne. Mr. Blanchard se lance à leur poursuite sur son yacht, où Allan s’est fait engager comme marin, incognito. Quand ils rejoignent le navire pourchassé, celui-ci est en très mauvaise posture, en pleine tempête, et ils mettent des canots à la mer pour recueillir ses passagers. Un homme manque à l’appel, on retrouvera son corps plus tard : Ingleby est mort noyé dans une cabine fermée de l’extérieur, c’est Allan qui l’y a enfermé.

    Après avoir avoué son crime, Armadale adresse à son fils une demande ultime. Sachant que la veuve, après ce malheur, a mis au monde un enfant posthume, un autre Allan Armadale, qui doit avoir à peu près son âge, il l’implore de fuir tous les protagonistes de ce drame et de ne jamais entrer en contact, d’aucune façon, avec son homonyme, afin d’échapper à toute malédiction.

    Ce prologue d’une quarantaine de pages importe pour comprendre tous les éléments de l’intrigue, un long suspense compliqué de près de huit cents pages. Il en donne le ton. Le Révérend Brock, un pasteur qui s’est chargé de l’instruction d’Allan à la demande de sa mère, a lu dans le journal une annonce priant Allan Armadale de se mettre en rapport avec des avocats à Londres, « pour une affaire importante ». Mais Mrs. Armadale a fait valoir la différence d’âge d’un an et l’a dissuadé d’en parler à son élève. Quand celui-ci atteint ses vingt et un ans, c’est un garçon franc et aimable, très naïf, passionné par les bateaux. L’arrivée au village d’un jeune homme au nom bizarre, Ozias Midwinter, un sous-maître d’école que sa mauvaise santé a privé de son emploi, déclenche sa compassion : Allan Armadale le fait soigner et le prend en affection.

    Le pasteur, lui, se méfie, mais il est lié par le secret. Quand Mrs. Armadale, malade, le convoque pour le mettre en garde contre une femme qui s’est présentée chez elle et qu’elle veut fuir à tout prix (c’est l’ancienne femme de chambre qui avait rédigé la fausse lettre), il est déjà trop tard. Elle meurt bientôt. Pourra-t-on éviter la rencontre entre les deux jeunes Allan Armadale ? On a déjà compris que non. Echapperont-ils à la malédiction ?

    Armadale a été publié d’abord en feuilleton, les rebondissements n’y manquent pas. Collins, ami de Dickens, est prodigue en détails dans ses descriptions, dans l’analyse psychologique des personnages, il ne faut pas être pressé. C’est une immersion dans l’Angleterre du XIXe siècle avec ses usages, ses classes sociales, ses codes, ses bas-fonds. Les femmes y jouent un rôle aussi important que les hommes, moral ou immoral. Le roman a fait scandale : «L’indécence au service du suspense » (Michel Le Bris dans la préface). Tout tourne autour de l’héritage, celui d’un nom, d’une fortune, de propriétés, mais surtout celui d’une malédiction familiale transmise de génération en génération. Crimes, mensonges, complots, vengeance : Armadale ou l’invention du thriller.