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Littérature - Page 258

  • Blixen en personnage

    Baronne Blixen n’est pas une biographie mais un roman. Dominique de Saint Pern fait raconter la vie de la grande conteuse et amoureuse par Clara Selborn, engagée à son service au domaine familial de Rungstedlund, après son retour au Danemark. Celle-ci est deviendra sa complice au point de se voir confier la gestion posthume de l’œuvre littéraire d’Isak Dinesen, alias Karen Blixen.

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    Clara Selborn et Karen Blixen (source)

    Encouragée par le billet de Dominique qui avait placé La ferme africaine parmi ses dix meilleurs livres lus entre 1998 et 2008 (A sauts et à gambades), j’ai donc ouvert ce roman qui s’ouvre sur une invitation : Meryl Streep, choisie pour incarner Karen Blixen dans Out of Africa, souhaite rencontrer Clara qui « a vécu dans son intimité pendant vingt ans ».

    C’est avec ce tournage en Afrique (Nairobi, 1984) que commence le portrait : « J’adore l’idée d’incarner une femme profonde et frivole », déclare l’actrice, curieuse d’apprendre comment se comportait cette femme singulière à qui son mari a refilé la syphilis, qui a osé tenir tête aux lions mêmes, qui a étonné et intrigué Denys Finch Hatton, son futur amant magnifique.

    L’histoire de Karen Blixen en Afrique, on la connaît par ce film qui a gravé sur ces deux êtres les visages de deux acteurs formidables ou, mieux encore, par ce chef-d’œuvre qu’est La ferme africaine, un récit écrit des années plus tard, au Danemark. Pour ses intimes en Afrique, Karen que sa famille appelait « Tanne » était « Tania » (ce n’est pour rien dans le choix de mon pseudonyme de blogueuse, mais j’accueille, bien sûr, cette étoile tutélaire).

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    Isak Dinesen (Photo Rie Nissen)

    Dominique de Saint Pern raconte l’arrivée en Afrique de celle qui est devenue baronne par son mariage avec Bror Blixen, dont elle avait d’abord aimé le frère jumeau, indifférent. Et puis déroule l’histoire d’amour entre Denys et la conteuse hors du commun, un enchantement mutuel. Je connaissais peu du reste de sa vie en Europe, après la vente forcée de la ferme qui l’oblige à quitter le Kenya qu’elle aimait tant. D’où ma curiosité pour la suite, le passage à l’écriture littéraire, à près de cinquante ans.

    De retour à Rungstedlund, où sa mère lui attribue deux pièces à elle (« un lieu à soi » selon le titre proposé par Marie Darieussecq à l’essai de Virginia Woolf dans une nouvelle traduction), Karen Blixen est encouragée à écrire par son frère Thomas et commence par des contes – un exercice assez différent de l’improvisation orale. Pour sa première publication (Sept contes gothiques), elle veut un pseudonyme qui la masque, « un nom insolite » : Isak Dinesen, prénom d’homme ou de femme ? La photographie en quatrième de couverture, elle la veut « masquée » et fait contribuer la photographe Rie Nissen au mystère.

    En Afrique, elle était « Msabu » pour Kamante, l’enfant kikuyu. Après avoir rêvé de lui, elle se décide à ouvrir ses « caisses africaines » déposées au grenier. Les livres de Denys y tombent en miettes, elle retrouve le précieux livre de cuisine – « plus de mille recettes victoriennes » – qui lui a tant servi. Karen Blixen peut à présent se souvenir sans en être « dévastée ». Tant de morts parmi ses amis de là-bas.

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    Karen Blixen (source sans date)

    Elle décide d’écrire un livre où « chaque page frémirait de vie », pas des mémoires, mais un récit pour faire entendre toutes les voix de sa vie africaine. « La fréquentation de ses amis disparus lui apprenait une chose qui, elle l’espérait, l’aiderait à vivre : la ligne de démarcation que l’on trace pour séparer le passé du présent est totalement fausse. Les belles choses de la vie ne sont pas détruites. Jamais. » D’où La ferme africaine.

    Clara a vingt-sept ans quand elle entre dans la vie de Karen Blixen au Danemark, sous occupation allemande. Un réseau clandestin s’était formé pour sauver les Juifs d’une rafle annoncée, les cacher puis les faire passer en Suède. C’est lors d’une vente à leur profit qu’elle lui a été présentée, et puis Karen l’invite chez elle et l’engage pour traduire en français un livre qu’elle va signer « Pierre Andrézel » (Les voies de la vengeance). Clara remplira diverses fonctions, deviendra indispensable.

    Les succès littéraires, notamment en Amérique où plusieurs de ses livres sont primés au Club du Livre du mois, ce qui assure sa notoriété, sont gagnés contre les récidives de la maladie, les opérations. Cela ne l’empêche pas de répondre aux invitations, de rencontrer des écrivains, des éditeurs, des poètes. Avec Thorkild Bjørnvig, rédacteur en chef de la revue Heretica, c’est d’emblée une complicité totale, une « intimité intellectuelle rare ».

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    Elle devient son mentor, l’encourage quand il doute de son génie poétique, de ses choix personnels (il a une épouse, un enfant) et finit par lui proposer de s’installer chez elle (sa femme décline l’invitation et s’installe dans les environs). Il y sera bien pour guérir (après une contusion cérébrale à Paris) et surtout pour écrire : solitude garantie dans le salon vert où elle ne lui rend visite qu’une seule heure par jour, le soir, pour parler, écouter de la musique ensemble.

    Pour Thorkild, de trente ans son cadet, elle déploie comme elle le faisait avec Denys tous ses talents de « magicienne », jusqu’à passer avec lui un pacte que lui seul pourra rompre. Un pacte avec le diable ? Karen Blixen croit aux esprits, et parfois les convoque.

    Baronne Blixen relate dans sa seconde moitié cette vie singulière, axée sur l’écriture et l’échange, sur la prise de risques personnels. L’ambiguïté du récit, entre romanesque et biographique, m’a un peu gênée. Dominique de Saint Pern assure que « les faits sont avérés » et qu’elle a « choisi de les exprimer librement à travers le prisme de la fiction ». Ce « roman vrai » illustre en tout cas le statut hors norme de l’écrivaine, une personnalité entière, au charisme indubitable.

  • Coup d'archet

    Baronian grumiaux_arthur.gif« Au vrai, ce soir-là, il m’a profondément bouleversé et, chaque fois que j’entends le Concerto de Mendelssohn, je le vois, lui, Arthur Grumiaux, je le vois et le revois au Palais des Beaux-Arts, tout inhibé, comme en retrait de l’orchestre et de l’assistance, mais faisant jaillir de son instrument les timbres les plus magiques. C’est ce que disent et répètent d’ailleurs tous les mélomanes, tous les critiques : la pureté du style, la beauté lumineuse de la sonorité, l’élégance du coup d’archet. » 

    Jean-Baptiste Baronian, « Grumiaux, Arthur » in Dictionnaire amoureux de la Belgique

    Photo : Arthur Grumiaux (Wallonie en ligne)

  • Belgique GHIJK...

    Bien sûr, Jean-Baptiste Baronian ne pouvait manquer de passer par Gand dans son Dictionnaire amoureux de la Belgique, ni d’évoquer deux écrivains qui me sont chers, différents à tout point de vue – seule leur initiale les rapproche : Marie Gevers et Michel de Ghelderode.

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    Hôtel de Ville de Bruxelles par Henri Cassiers (1858-1944)

    Chez la « dame de Missembourg », les chroniques sur la nature, les « relations de voyages » et « recueils de textes plus ou moins anecdotiques » constituent « la part la plus originale de son œuvre », selon Baronian. Ce qu’il écrit à propos de L’Herbier légendaire et de Parabotanique est fort tentant  (je n’ai lu ni l’un ni l’autre, les deux livres semblent épuisés). Quant à l’article sur Ghelderode et son « carnaval scénique », j’y ai appris le mot « middelmaestisme » par lequel l’écrivain désignait « la manie belge des compromis » (voir § 7).

    Aux amateurs du ballon rond, je signale un bel hommage à Raymond Goethals à qui « aucun entraîneur de football à travers le monde ne ressemblera jamais ». Aux amateurs de la petite reine, un article sur Grammont, pour le fameux « mur de Grammont » que doivent franchir les coureurs du Tour des Flandres, « sorte de mont Ventoux en miniature » – et aussi, entre autres spécialités dont je vous laisse la surprise, pour la tarte au maton, dont le nom « tarte au maton de Grammont » est désormais protégé (on la fabrique aussi ailleurs en Belgique.)

    Le plus surprenant, à cette lettre « G », c’est l’incroyable « Guerre de la vache et les Ronds du Hainaut », une affaire méconnue qui a vu périr bien des humains au Moyen Age… pour un vol de vache. On n’attendra pas le « J » pour regretter le beau revers de notre « Juju » nationale : Justine Henin récolte plus de trois pages à la lettre « H », pas mal. Hergé et Horta feront mieux, on s’en doute.

    Et pourtant, c’est Victor Hugo qui gagne la première place : « De 1837 à 1871, il est venu dans le pays une bonne quinzaine de fois et, certaines années, il y a effectué de longs séjours. » Non seulement, il y a beaucoup écrit, mais il a beaucoup dessiné, parfois au lavis, au cours de ses voyages dans différentes villes belges. Hugo s’extasiait devant l’hôtel de ville de Bruxelles, « une éblouissante fantaisie de poète tombée de la tête d’un architecte ».

    A « Humour », vous assisterez à une malicieuse estocade sur la façon dont les Français parlent du rire belge et des Belges, vous rencontrerez du beau monde dans le décalé voire dans l’absurde, et pas seulement Philippe Geluck, figure bien connue outre-Quiévrain. J’y inclurai d’ailleurs Baronian lui-même pour avoir introduit un seul sujet à la lettre « I » : I comme « Informateur ».

    Par les temps qui courent, vous songez peut-être aux indicateurs de police, pas du tout. C’est l’occasion de revenir sur un épisode peu glorieux d’histoire contemporaine : la Belgique est restée 541 jours sans gouvernement en 2010-2011, au cours desquels le roi a dû nommer successivement des informateurs, médiateurs, conciliateur et clarificateur avant de pouvoir nommer un formateur (Elio di Rupo).

    Un seul « J », trois « K » : je terminerai par une devinette – sans tricher, n’est-ce pas ? (Abstenez-vous si vous possédez ce Dictionnaire amoureux de la Belgique.) Que suggérez-vous pour ces entrées ? Non, pas « Juju », je vous l’ai dit (§ 4). Les paris sont ouverts – des paris « belges », cela va sans dire. (Un indice : deux peintres.)

  • Le lieu où l’on est…

    Meur Bibliothèque de Berlin.jpg« Le lieu où l’on est...  Dans ce roman où je saute sans cesse de sujet en sujet, je comprends à présent pourquoi j’ai eu besoin d’évoquer de plus en plus les lieux où je me trouvais ou que je connaissais – les bibliothèques, les cimetières, le salon de mon appartement parisien et sa table à rallonges, etc. Un réflexe salutaire. A l’ère d’Internet, nous avons l’impression de pouvoir être partout à la fois ; mais rien ne remplace la présence réelle, et – n’en déplaise à Henri, qui ne jure que par les univers virtuels – il n’arrive pas grand-chose d’intéressant dans des lieux qui n’en sont pas. On n’y vit pas de vraies expériences, il y manque le sel de la vie : les perceptions, et l’imprévu. »

    Diane Meur, La carte des Mendelssohn

  • Meur & Mendelssohn

    Vous vous souvenez peut-être de cette maison polonaise qui raconte son histoire dans Les Vivants et les Ombres ? Diane Meur, toujours curieuse des histoires de famille, se penche dans La carte des Mendelssohn sur la personnalité d’Abraham Mendelssohn. Qui était-il ? Son père, Moses Mendelssohn, est un illustre philosophe des Lumières – le « Socrate allemand » a servi de modèle à G. E. Lessing pour sa fameuse pièce Nathan le sage – et son fils, Felix Mendelssohn, est un non moins illustre compositeur. Aussi Abraham, à l’identité flottante, connu surtout comme le fils de son père et le père de son fils, pouvait-il devenir un « merveilleux sujet de roman ».

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    Ce n’est ni une biographie ni un essai : La carte des Mendelssohn est un roman dont cette famille est le thème conducteur, ou plus exactement les recherches de Diane Meur sur les descendants de Moses Mendelssohn. L’idée en est venue à la romancière, que la relation père-fils intéresse beaucoup, après un séjour à Berlin, ville où Abraham Mendelssohn est né et décédé.

    « Seules les vies ont un commencement, et encore. » L’embryon d’arbre généalogique inséré au début du livre (emprunté à Sébastian Hensel, auteur de Die Familie Mendelssohn en 1879) aligne sous les prénoms des enfants de Moses Mendelssohn & Fromet Gugenheim ceux de leurs petits-enfants et de leurs arrière-petits-enfants à la ligne suivante. Diane Meur ira jusqu’à la huitième génération, mais sans résumer pour autant la vie des uns et des autres, pas du tout.

    « Seules les histoires ont un commencement, et encore. » Avec un bagout déconcertant (un peu contaminée par ma lecture, je souris de l’adjectif qui me vient sous les doigts), la romancière et narratrice nous plonge dans le déroulement de ses investigations, y mêle des éléments de sa propre existence, note une discordance de dates, observe une carte postale, parle de ses activités en cours – Diane Meur est aussi traductrice (de l’allemand) –, remonte au siècle des Lumières, caresse le projet d’écrire un roman « sur le vide et les filiations ».

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    Un détail de la carte (courtoisie Sabine Wiespieser Editeur)

    « Seules les idées ont un commencement, et encore. » A Berlin, elle fréquente évidemment la StaBi, comme on appelle familièrement la Staatsbibliothek, qui détient l’essentiel des archives Mendelssohn. Alors qu’elle s’est déjà rendue plusieurs fois à l’ambassade de Belgique, Jägerstrasse 52-53, elle y va un jour par l’autre côté et découvre une plaque au 51 : « Mendelssohn-Remise ».

    Dans ce petit musée, « l’ancienne remise à attelages de l’hôtel particulier où avait vécu et travaillé le banquier Joseph, frère d’Abraham », on vend un gros livre sur la famille Mendelssohn, un autre, de T. Lackmann, sur Abraham Mendelssohn – et Diane Meur de s’interroger sur la pertinence de son projet. Néanmoins, de retour à Paris, elle commence à s’occuper vraiment des Mendelssohn et « ce fragile projet auquel (elle n’était) même pas sûre de tenir, ce petit filet d’eau qui se refusait à grossir depuis cinq ou six ans, s’est soudain élargi en rivière. »

    « Et j’ai compris que ce fleuve en train de se répandre en un immense delta était gros de toute ma nostalgie de Berlin où j’avais voulu vivre une autre vie, sans jamais réussir à être vraiment là ; de toutes mes occasions manquées, de toutes mes affections perdues, de tout ce qu’il m’était jamais arrivé de laisser derrière moi ou d’échouer à retenir. De tout ce qui passe, s’enfuit, se dilue ou se disperse sur la face du monde – et cela fait beaucoup. » (C’est le dernier paragraphe du premier chapitre, page 25 d’un roman qui en compte 461, et 7 pages d’index des personnes).

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    L'entrée de la Maison Mendelssohn à la Jagerstrasse (Berlin) Source : Johannes Glintschert (2009)

    N’ayez pas peur de la quantité de noms et de pages, le « Mendelssohn-Komplex » de Diane Meur a sans doute quelque chose à voir avec La Vie mode d’emploi de Georges Perec, un écrivain qu’elle cite à plusieurs reprises et avec qui elle a des affinités certaines. Ce n’est pas un inventaire, ce serait plutôt un immense éventail avec des secrets dans ses plis qu’elle débusque ici ou là.

    En chemin, que de thèmes abordés : le judaïsme et le christianisme – de nombreuses conversions ; l’histoire des juifs en Europe, en Allemagne, et de l’antisémitisme ; des unions et des désunions ; des lectures diverses ; le choix d’un patronyme ou d’un prénom – Mendelssohn, Bartholdy, Enole… ; des lieux visités ; des correspondances ; des rencontres.

    Et pourquoi ce titre, La carte des Mendelssohn ? A mi-parcours, le chapitre 14 (sur 28) raconte l’émergence, au fil des recherches sur internet et en bibliothèque, d’un relevé des noms, des dates, des liens, sur de grands cartons de bristol où elle place des étiquettes repositionnables en fonction de l’avancement de ses travaux : « le monstre », « le tableau de chasse », comme l’appelleront ses enfants, va prendre de plus en plus de place sur la table de la salle à manger d’où il finira par déborder.

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    © Diane Meur pour la carte © Henri Desbois pour les photographies (Courtoisie Sabine Wespieser Editeur)

    Comment l’organiser ? Bien sûr par génération, mais Diane Meur instaure aussi des codes couleurs en fonction de la religion, du métier, et voit émerger des zones, des blocs, ce n’est pas du temps perdu. Elle organisera même une « fête de la carte » où elle s’entendra dire, à sa grande surprise, que « cette carte (lui) ressemble ». La manière dont elle agence la carte en pratique et construit du même coup La carte des Mendelssohn est un « tour de force », comme l’écrit l’éditrice. La narration est fluide, le style de connivence avec le lecteur (la lectrice en l’occurrence) tout au long du texte.

    Si vous acceptez de vous perdre en route, si vous êtes curieux de ce qui se présente à vous par hasard ou parce que vous l’avez bien cherché, si l’histoire, la philosophie, la musique vous intéressent (saviez-vous que Fanny, la sœur de Felix Mendelssohn était aussi compositrice et excellente pianiste ?), en bref, si vous aimez la littérature, alors « ce roman en spirale qui raconte sa propre histoire » est pour vous et vous vous réjouirez avec Diane Meur quand elle constate ceci : « L’histoire d’une famille ne m’intéresse que si elle devient l’histoire du monde, et c’est de plus en plus le cas. »