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Culture - Page 149

  • 1 2 3 Hartung

    Hans Hartung (Leipzig 1904-1989 Antibes) a fait l’objet d’une rétrospective au Musée d’art moderne de Paris en 2019-2020. Plusieurs galeristes de la Brafa 2021 présentaient des œuvres de ce maître de l’abstraction lyrique, un artiste français d’origine allemande à la vie mouvementée, . En voici trois qui ont retenu mon regard. La première date de 1960, année d’un « changement technique et stylistique majeur » (Wikipedia).

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    © Hans Hartung, T1960-19, 1960, Vinyl peint sur papier,
    64.7 x 49.6 cm (galerie Hurtebize)

    « Expérimentant les peintures industrielles, acryliques et vinyliques, Hartung cesse de procéder par la mise au carreau minutieuse de dessin spontané, mais attaque directement le support et recourt beaucoup au grattage dans la matière fraîche. »

    hartung

    © Hans Hartung (Leipzig 1904-1989 Antibes), P20-1976-H7, 1976,
    acrylique sur carton, 52.5 x 72 cm (galerie Bailly)

    La seconde est une quasi calligraphie somptueuse des années 1970, quand sa renommée lui vaut d’être exposé dans le monde entier et qu’il devient membre de l’Académie des beaux-arts. La troisième date de sa dernière année : Hartung peint plus de trois cents toiles en 1989 grâce au pistolet à peinture. Dans celle-ci, très lumineuse, entre feu d’artifice et incendie, monte une note noire qui inquiète.

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    © Hans Hartung, T1989-U14, 1989,
    acrylique sur toile, 97 x 146 cm  (galerie AB-BA)

    « Sa peinture, qui présente toujours l’apparence de la spontanéité, est en fait le fruit d’une méditation prolongée qui l’apparente à la fois à la calligraphie extrême-orientale et à la tradition puissamment dynamique de la peinture allemande. » (Encyclopedia universalis)

  • A la Brafa 2021

    Avez-vous fait votre marché virtuel dans les superbes salons de la Brafa 2021 ? Bien sûr, il y manquait l’atmosphère des grands jours, le brouhaha des visiteurs, les décorations florales éblouissantes, l’élégance des stands, la bonne compagnie… Déambuler dans les allées de Tour & Taxis, ce sont aussi des questions aux galeristes, de belles choses que l’on découvre alors qu’on allait vers une autre, des étonnements, des surprises, des coups de cœur.

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    © Emile Claus, Le jardin d'Emile Claus, huile sur toile, 92 x 73 cm (Jan Muller Antiques)

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    © Pierre Bonnard, Maison du peintre au Cannet, circa 1942,
    Huile, gouache et aquarelle, 40.8 x 32.9 cm (Bailly Gallery)

    La Brafa en ligne ne manquait pas de ressources. C’est toujours la peinture qui m’attire en premier, les beaux paysages. D’André Lhote (chez Alexis Pentcheff), une Promeneuse qui se penche et dont les courbes répondent à celles des branches d’arbres. D’Emile Claus, valeur sûre de la peinture belge, une jolie vue de son jardin. De Bonnard, sa Maison au Cannet peinte d’un chemin en hauteur, dans l’exubérance du paysage méditerranéen où il se plaisait tant. En note mineure, mais sympathique, un parc peint par Utrillo (Galerie Willow).

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    Frits Thaulow, Hiver à Amiens 1904, huile sur toile, 65 x 81 cm (Van der Meij Fine Arts)

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    Frits Thaulow, La rivière, jour de neige, pastel sur toile, 56 x 92 cm (Ary Jan)

    La lumière d’hiver dans le Nord, le peintre norvégien Frits Thaulow (1847-1906), qui a beaucoup voyagé en Europe, la rend merveilleusement dans les deux vues que voici : Hiver à Amiens (1904), à la galerie hollandaise Van der Meij Fine Arts (avec une notice), et La rivière, jour de neige, un pastel proposé chez Ary Jan.

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    Théo Van Rysselberghe, Le Ruban écarlate, 1906, sanguine, gouache et craie blanche sur papier, 110 x 88 cm

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    © Edgar Maxence, Sirène avec coquillages, circa 1900, huile sur panneau, 73 x 65 cm (galerie Ary Jan)

    Peu de figures dans ces paysages, aussi je me tourne vers cette superbe sanguine de Théo Van Rysselberghe, Le ruban écarlate (Lancz). Cette jeune femme au miroir est moins mystérieuse que la Sirène aux coquillages d’Edgar Maxence, si bien encadrée, de la même époque, au tout début du XXe siècle. De 1935, une Tête de femme de Marie Laurencin est commentée sur une vidéo de la Galerie des Modernes, qui rappelle que cette œuvre est passée par la galerie Paul Rosenberg (21 rue La Boétie). De manière abstraite, sur une toile d’après la guerre, Calder rend hommage aux sœurs Hamon « avec joie et amour ».

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    Dino Martens (Venise, 1894-1970) pour Rag. Aureliano Toso, Murano Bol Zanfirico

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    Pablo Picasso, Céramique émaillée à tête de faune, circa 1955

    Le premier objet qui m’a tiré l’œil parmi les objets d’art sur le site de la Brafa, c’est cette coupe de Dino Martens, une verrerie Murano dont la galerie Heirmans montre des détails en gros plan – quelles couleurs et quel travail raffiné ! Il propose aussi, à moins que ce ne soit ailleurs, une belle céramique à tête de faune de Picasso. Plus terre à terre, une terrine exceptionnelle en forme de dinde (une faïence de Bruxelles du XVIIIe chez Lemaire) m’attire moins que cette terrine chinoise « Famille Rose » Qianlong, détaillée dans la brochure à feuilleter sur le site de Bertrand de Lavergne (je vous la conseille si vous aimez les belles porcelaines d’antan).

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    © Gustave Singier, Egéenne, 1970, huile sur toile, 100 x 81 cm (Galerie des Modernes)

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    Sam Francis, Sans titre (SFF73-089), 1973, aquarelle sur papier, 76 x 56 cm (Galerie Bailly)

    Quel terme utiliser pour désigner ces peintures abstraites où la toile devient d’un bout à l’autre un champ de couleurs et de rythmes ? C’est au Centre Pompidou que j’ai vu pour la première fois une œuvre de Simon Hantai, dont l’œuvre m’a toujours semblé musicale. Je ne connaissais pas Gustave Singier qui a peint Egéenne. L’aquarelle « tachiste » de Sam Francis est plus explosive – une vidéo présente aussi une autre œuvre de lui sur le site de la galerie.

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    Albéric Collin, Puma, 1920-1925, bronze

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    Antoine-Louis Barye (Paris, 1795-1875), Cheval turc n°2, antérieur gauche levé, circa 1857,
    Bronze, 29.5 x 31.6 x 12.5 cm (Univers du bronze)

    Je ne sais si les vidéos seront encore disponibles au moment où vous lirez ce billet, sinon vous les trouverez peut-être sur le site de la galerie même. Xavier Eeckhout présente le sculpteur animalier belge Albéric Collin. J’espère que vous apprécierez la belle présentation chez Rodolphe Janssen d’une artiste iranienne que j’ai découverte là, Sanam Khatibi. Attirée par une nature morte d’un grand raffinement, j’ai été épatée par son atelier (elle vit et travaille en Belgique) plein d’objets qu’elle combine dans ses peintures et enchantée d’y apercevoir au passage la couverture d’Œdipe sur la route de Henry Bauchau.

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    Sanam Khatibi (Iran, 1979), She can’t pass a mirror without seducing it, 2020, huile sur panneau, 21 x 31 cm

    brafa,2021,galeries,objets d'art,peinture,sculpture,art ancien,art moderne,art contemporain,cultureAgustín Ivan Edwards McClure & A. Gomez Palacios,
    Aventuras de Juan Esparraguito o el niño casi legumbre.
    Cuchicheos de un abuelo,
    Paris (Argenteuil, R. Coulouma & Le Coloris Moderne), 1930 (CLAM)

    Voici un autre livre : parce qu’il n’y a pas de Brafa sans chats, je termine sur cette couverture d’un monument de la littérature pour enfants chilienne dont je n’avais jamais entendu parler, Les Aventures de Juan Esparraguito ou l’enfant presque légume. Chuchotements d’un grand-père, une édition de 1930. Et vous, connaissiez-vous ce titre ? Et avez-vous fait de belles découvertes en ligne ?

  • Au Comité central

    20 février 1958

    Pasternak Nobel Time.jpg« Le camarade Constantin Simonov, secrétaire de la direction de l’Union des écrivains, nous informe que Louis Aragon a proposé de publier dans le journal Les Lettres françaises la lettre que les cinq écrivains membres du comité de rédaction de la revue Novy Mir ont adressée à Boris Pasternak à propos de son roman Le Docteur Jivago. Selon Aragon, cette lettre datée de 1956 expliquerait pourquoi le roman n’a pas été publié en URSS et serait une arme décisive dans le combat que va devoir engager la presse française progressiste à propos du roman. Aragon suppose que la presse réactionnaire va lancer une grande campagne au moment de la sortie du livre, au printemps. […] »

    D. Polikarpov, directeur du Département de la culture
    B. Rurikov, directeur adjoint

    Extrait du Dossier de l’affaire Pasternak in Boris Pasternak, Ecrits autobiographiques. Le Docteur Jivago, Quarto Gallimard, 2020.

    Couverture de Time le 15 décembre 1958

  • L'affaire Pasternak

    Le dossier de l’affaire Pasternak compte plus de deux cents pages dans l’édition Quarto du Docteur Jivago. L’écrivain, après plusieurs refus en URSS, a confié son manuscrit à l’éditeur italien Feltrinelli qui le publie en novembre 1957, non sans avoir attendu qu’il soit d’abord publié en russe. D’autres traductions s’ensuivent en Europe et le prix Nobel de littérature lui est attribué en octobre 1958, ce qui renforce encore la fureur du Parti communiste (PCUS) et de la presse soviétiques à son égard.

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    Première édition du Docteur Jivago en 1957 (Feltrinelli)

    Pour Pasternak, ce fut la gloire et l’enfer. Sa renommée internationale le protège de l’exil forcé, on lui écrit de l’étranger, on lui rend visite, on plaide en sa faveur. Il est exclu de l’Union des écrivains. Il perd la possibilité d’exercer un travail rémunéré et de percevoir ses droits d’auteur étrangers, la vie matérielle devient très difficile. En 1960, il meurt à 70 ans d’un cancer chez lui, à Peredelkino où il a pu rester dans sa datcha. En 1988, Le Docteur Jivago sera enfin publié pour la première fois en URSS.

    Les archives du Comité central et du Politburo constituent la plus grosse partie du dossier rédigé en russe à partir des pièces originales. En 1992, après l’ouverture des archives sous la présidence d’Eltsine, ce dossier « finit par trouver preneur auprès de la maison Gallimard qui fit mettre aussitôt en œuvre sa version française », on y lit « le dernier chapitre de la lutte menée par le PCUS contre l’indépendance d’esprit d’un artiste, Boris Pasternak, mais aussi la résistance d’un homme à la pression de l’appareil totalitaire », pour reprendre les mots de l’excellente préface de Jacqueline de Proyart.

    Le dossier contient 86 pièces, datées de 1956 à 1985. Dès la première note ministérielle envoyée au présidium du Comité central pour le prévenir de la publication du Docteur Jivago en Italie, l’accusation est la suivante : « Le roman de Pasternak est un pamphlet haineux contre l’URSS. » Y est joint un rapport de Dimitri Polikarpov, directeur du Département de la culture, qui présente le roman comme l’expression « du point de vue d’un individualiste bourgeois plein de rancœur, pour qui la révolution est une émeute absurde et barbare, un chaos et l’expression d’une sauvagerie généralisée. »

    Pour le Comité central, il faut empêcher sa publication à l’étranger. On fait pression sur Pasternak pour envoyer en son nom un télégramme à l’éditeur italien lui demandant de retourner le manuscrit qui nécessite des remaniements. L’écrivain, quand il avait donné son accord à Feltrinelli, l’avait prévenu « de ne jamais accorder aucun crédit à un quelconque document qu’il lui adresserait en russe », mais seulement à leur correspondance en français ou en allemand.

    Dans sa réponse en juin 1957, Feltrinelli, d’accord pour ne pas publier avant la parution en URSS prévue en septembre, prend la défense du roman qui a « une valeur littéraire considérable, qui apparente l’auteur aux grands écrivains russes du XIXe siècle », qui donne « une peinture bouleversante des événements de l’histoire du peuple russe, en dehors de tout cadre idéologique ». Tsveteremitch, le traducteur en italien, fait remarquer qu’une publication en URSS démontrerait « que des voix sérieuses et honnêtes » y ont droit de cité et d’expression : « Ne pas publier un tel roman constitue un crime contre la culture. »

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    Maison-musée Pasternak, sa datcha à Peredelkino

    Chacun des documents du dossier Pasternak illustre la surveillance constante de toute publication au sujet de l’écrivain à l’étranger (en Pologne, en France, en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis…) et en URSS. Ses faits et gestes sont surveillés. Une campagne de presse odieuse est lancée contre le grand poète et traducteur reconnu, son roman Le Docteur Jivago réduit à un acte antirévolutionnaire.

    Les rapports sur la presse internationale sont intéressants à lire pour se rendre compte de la réception mondiale du roman. Certains articles en font une arme politique contre le stalinisme, au service de la guerre froide ; d’autres s’appliquent à le ternir, par exemple dans un hebdomadaire du parti communiste italien qui oppose Pasternak et Cholokhov : « A nos yeux, l’art de Pasternak est un pas en arrière, il est tourné vers le passé. Les crépuscules sont souvent magnifiques, mais ce ne sont jamais que des crépuscules. »

    Que de textes forts dans ce dossier : la lettre du comité de rédaction de Novy Mir pour justifier son refus de publier ; la lettre de Pasternak renonçant à se rendre à Stockholm et à en toucher le prix ; les télégrammes de l’étranger pour prendre la défense de Pasternak et des siens ; la lettre de Pasternak à Khrouchtchev – « Je suis lié à la Russie par ma naissance, par ma vie, par mon travail. Je ne conçois pas d’en être séparé ou de vivre en dehors d’elle » – ou celle à La Pravda, forcée, « où presque tous les mots étaient de lui, mais où sa pensée était totalement absente » dira sa dernière compagne, Olga Ivinskaïa ; une lettre de la reine Elisabeth de Belgique même !

    L’appui et la reconnaissance de grands écrivains étrangers, du Pen Club, contrastent avec le silence ou les attaques d’écrivains russes vivant en URSS, soumis à la ligne idéologique de l’Union des écrivains. Faisant confiance à un journaliste, Pasternak lui a confié un poème destiné à Jacqueline de Proyart devenue une amie – la parution de ce texte, « Le prix Nobel », ne fera qu’envenimer les choses. Cinq lettres qu’il a écrites à son amie et traductrice complètent ce dossier : édifiant en ce qui concerne les pratiques totalitaires, il permet de prendre la  mesure de ce qu’a valu à Pasternak la publication du Docteur Jivago, concrètement et moralement.

  • Vidéos .be modern

    Avec You said Love is Eternity, je découvre en sortant de l’exposition .be modern, de Klee à Tuymans, l’univers d’Agnès Guillaume, une vidéaste belge. Venue de la musique et du chant, elle s’est mise à la vidéo en 2010.

    Be M Agnès Guillaume 2.jpg
    Agnès Guillaume, You said Love is Eternity, 2015, video for three colour screens, full HD, 9’59

    Celle-ci, belle et troublante, se présente sur trois écrans en enfilade horizontale (cliquer sur le lien pour voir un extrait sur le site de l’artiste). Elle s’inspire des portraits hollandais du XVIIe siècle où les personnages sont immortalisés sur un arrière-plan noir. Le mouvement lent et simultané des mains, de l’étreinte, fascine d’autant plus que les avant-bras donnent l’illusion d’un continuum.

    Be M Viola 1.JPG
    Bill Viola, Purification, MRBAB, exposition temporaire, Bruxelles, 2020-2021
    double projection réalisée pour la mise en scène par Peter Sellars de l’opéra de Wagner
    Tristan et Isolde
    à Paris Opéra-Bastille en 2005

    Dans la salle d’exposition temporaire à l’arrière du forum des MRBAB, on peut voir jusqu’en août prochain Purification, une installation de Bill Viola sur deux grands écrans. « Purification, une double projection réalisée pour la mise en scène par Peter Sellars de l’opéra de Wagner Tristan et Isolde en 2005, offre une parfaite synthèse de tous ces éléments. Avec des gestes ralentis à l’extrême, un couple se livre à un rituel de purification, qui évoque une renaissance. » (Site du musée)