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Belgique - Page 160

  • On croit rêver

    Cela fait des mois qu’on voit s’élever vers le ciel la future plus haute tour résidentielle bruxelloise, le long du canal, non loin du site de Tour & Taxis. Il y a quelques jours est apparu sur son toit le « bouquet final » marquant la fin du gros œuvre. 140 mètres de haut (dix de moins que la Tour du Midi), 42 étages – si le cœur vous en dit. L’ensemble du projet devrait loger quelque 2500 habitants. 

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    Vue depuis l'avenue Eugène Demolder (avril 2013)

    Stupéfaction générale ce lundi 15 juillet 2013 : la RTBF annonce que, contrairement aux prescriptions européennes en la matière, les eaux usées du nouveau site se déversent non pas dans un collecteur d’égouts mais directement dans la Senne ! La ministre responsable de l’Environnement et de la Politique de l’eau dans la Région de Bruxelles Capitale rassure : le problème – signalé déjà en 2008, deux ans avant la délivrance du permis d’environnement et du permis d’urbanisme (juin 2010) – devrait être réglé en… 2014. Quand on sait que le RER bruxellois devait être achevé pour 2012, et qu’on le promet à présent pour 2019, il y a de quoi s’inquiéter (Bruxelles-Ottignies en 2021 ?)

    On croit rêver ! Au XXIe siècle, dans la capitale de l’Europe, permettre le déversement des eaux usées d’une nouvelle construction dans une rivière (voûtée sur presque tout son parcours à Bruxelles au XIXe siècle pour raisons d'hygiène)…  La ministre écolo, soucieuse de dédramatiser, indique sur son site officiel que « Aujourd’hui, 100% des eaux bruxelloises sont épurées. » Il est vrai que deux stations d’épuration ont été construites au Nord et au Sud de la ville. Le dernier rapport de Bruxelles Environnement constate que « malgré un retard historique important, la mise en service des stations d’épuration a déjà apporté une amélioration très nette de la qualité des eaux de la Senne à la sortie de Bruxelles. »

    Il est sans doute trop tôt – attendons les finitions – pour apprécier les qualités architecturales de ce projet immobilier  qui vend « un concept unique en Belgique » : « Contemporain et raffiné, le projet UP-site affiche son esprit avant-gardiste avec beaucoup de subtilité. Implantée dans le cœur palpitant de Bruxelles, la tour résidentielle est en passe de devenir le reflet emblématique d’un nouveau style de vie urbain, chic et actif. » « Eco & Green », peut-on lire sur le site promotionnel. Cela commence mal.

    Si je me réjouis de voir la zone du canal revivifiée par de nombreux projets, dont peut-être même un nouveau musée d’art moderne – le fameux musée sans musée –, permettez-moi d’exprimer mon étonnement devant le laxisme dont profitent les promoteurs dans la capitale de l’Europe et mon inquiétude pour son environnement. « Bruxelles pas belle » ? « Bruxelles je t’aime » ? Arrêtons en tout cas d’apporter de l’eau au moulin de la « bruxellisation ».

  • Certitudes parapluies

    « Maggie m’avait dit plus d’une fois que la seule façon d’avoir une chance d’être heureux, c’est d’accepter que rien n’est jamais certain, que rien n’est définitif, ni les bonnes choses… ni les mauvaises. Elle avait réussi à me faire sourire en me disant que les certitudes sont des parapluies qui ne s’ouvrent que les jours où il fait beau et qu’alors ils nous gâchent la lumière du soleil. »

    Francis Dannemark, Histoire d’Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris, plus un)

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  • Alice et ses maris

    Francis Dannemark, écrivain belge et éditeur, annonce la couleur de son dernier roman dès le titre (qu’il choisit souvent long) : Histoire d’Alice qui ne pensait jamais à rien (et de tous ses maris, plus un) (2013). Le ton est guilleret, même si cela commence par un enterrement. 

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    "Kissing Alice", une fausse photo attribuée à Lewis Carroll 
    (Merci à MH d'avoir dénoncé le montage et excusez-moi pour ce choix malheureux.)

    Paul rencontre sa tante Alice en novembre 2001, le jour de l’enterrement de sa sœur – « de ma mère, pour le dire autrement ». Il ne l’avait jamais vue, ils font connaissance. Cette « étrangère avec un accent anglais (…) avait les mêmes grands yeux clairs que (sa) mère ». Ses parents ne lui parlaient jamais d’elle, mais il savait qu’en mai 1945, la petite sœur de Mady avait été très malade après la mort de leurs parents et qu’elle s’était mariée à dix-sept ans avec un veuf qui avait perdu femme et enfants dans un bombardement. Ils s’étaient installés aux Etats-Unis.

    Alice lui donne rendez-vous dans un petit hôtel charmant de Bruxelles dont le salon va recueillir bien des confidences. Mais elle l’interroge d’abord sur la mort de sa mère, sur sa vie à lui. Il lui parle de sa femme et de leur fille qu’elle est allée rejoindre à Boston où celle-ci s’est retrouvée le bras dans le plâtre, pour l’aider à terminer son programme d’études. Alice a un service à lui demander : elle voudrait retrouver quelqu’un, un homme qu’elle a aimé – mais elle trouve injuste de ne parler que de lui.

    « Ce serait injuste pour qui ?
    – Pour les autres. Mes maris.
    – Vous avez été mariée plusieurs fois ?
    – Oui. Et veuve. Plusieurs fois…
    – Tant que ça ?
    – Oh… Je n’aime pas compter, a-t-elle dit dans un sourire. »

    Jour après jour, Alice et Paul se retrouvent à l’hôtel ou au restaurant. Son neveu de 56 ans est curieux d’apprendre l’histoire de cette inconnue.

    Les titres de douze chapitres sur treize sont des prénoms masculins. Seul le premier, « Alice », fait exception. Imaginez ce que vous voulez – patientez. A travers l’histoire de Pierre, Henri, Sydney et les autres, la vie d’Alice se raconte étape par étape, depuis son premier amour en 1944 pour l’instituteur du village jusqu’à ce médecin iranien qui l’a soignée en Inde après la mort accidentelle de son dernier mari.

    L’anglais se glisse dans la conversation d’Alice quand elle ne trouve plus ses mots en français. Elle revient sur sa vie avec un tel détachement, qui pourrait sembler de l’indifférence, que Paul la compare à un ange : « Si les anges peuvent voler, c’est parce qu’ils se prennent à la légère. »

    Dannemark dresse à travers leurs dialogues (« À quoi bon un livre sans images, ni dialogues ? » se demande l’Alice de Lewis Carroll) les portraits des hommes qui ont compté dans la vie d’Alice, 73 ans, et l’autoportrait d’une femme déjà veuve à vingt ans. Alice a quelque chose d’espiègle dans le regard, elle aimerait que Paul, qui a déjà publié un roman, écrive ses souvenirs, pour ne pas perdre les traces des personnes formidables qu’elle a rencontrées. Comme Maggie, la mère de Sydney, sa meilleure amie, son alliée, son modèle.

    Des rencontres et des voyages, Alice en a vécu beaucoup. Des deuils, plus qu’il n’en faut. « Si Dieu avait décidé que j’accompagnerais des hommes jusqu’à la porte de sortie, c’est qu’Il avait Ses raisons », lui a dit un jour quelqu’un en ajoutant « que c’était la preuve qu’elle avait assez d’amour pour eux tous. » Alice est sereine : elle n’était pas faite pour vieillir avec les hommes de sa vie.

    Il y a quelque chose d’un conte de fées dans cette Histoire d’Alice… où tout est bien qui finit bien en dépit de tous les malheurs. Dannemark souligne régulièrement le caractère paisible de cette femme qui traverse le temps sans s’apitoyer sur elle-même, qui s’est contentée d’accepter ceux qui venaient à elle sans les chercher – à part le dernier –, qui a goûté toutes les variations du destin, les cuisines du monde, la sensualité, la diversité des êtres.

    Mais derrière cette belle image, qui est vraiment Alice ? Pourquoi est-elle restée si longtemps éloignée de sa sœur ? Paul apprendra d’elle plus qu’il n’attendait.

    Léger, divertissant, le dernier roman de Francis Dannemark aborde les choses de la vie avec un optimisme délibéré. Il l’a conçu comme « une comédie dramatique à l’anglaise. Et à l’ancienne. »  Qui a dit que les gens heureux n’ont pas d’histoire ? Cette lecture vous fera au moins sourire, comme Alice, un personnage né dune visite au cimetière.

  • Sot printemps

    Balade 12 juin fenêtres.jpg

    Moineaux, bourgeons… amour peut-être, 
    Dissous dans le soleil léger,
    Pénètrent
    Le golfe bleu de ma fenêtre.

    Petit déjeuner dans la chambre :
    Hermine où grésille
    Une pastille
    D’ambre.
    - Ça s’appelle un œuf au miroir -

    Je m’y regarde, sans rien voir.

    Comment s’y regarder sans rire ?

     

    Roger KERVYN de MARCKE ten DRIESSCHE, Vingt-quatre triolets(La Maison du Poète, Bruxelles-Paris)

    Source : http://www.sculfort.fr/articles/litterature/poemes/poesiebelge.html

  • Un mât électrique

    Apparu, disparu, reparu, le mât électrique de Lalaing est une curiosité du patrimoine schaerbeekois que connaissent bien tous ceux qui passent à pied, à vélo, en voiture ou en bus dans les avenues Voltaire et Deschanel. J’en ai fait mon objectif pour une balade d’après-midi, et bien sûr, avec un appareil photo en poche, je me suis arrêtée souvent. 

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    Commençons par ce monument, une curiosité. Installé en 2006 au carrefour Deschanel-Louis Bertrand, cet objet d’art difficile à identifier au premier abord attire l’attention par les magnifiques félins en mouvement sur son socle triangulaire. Un jour, l’un d’eux a disparu – volé ? me suis-je demandé – puis tout l’édifice, démonté pour restauration. Classé, il a été pris en charge par le Fonds pour le Patrimoine et la Fondation Roi Baudouin. Et voilà que cette flèche de bronze de style art nouveau pare à nouveau cet endroit fort fréquenté, complétée du lampadaire qui lui manquait. 

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    Sur le site consacré à Jacques de Lalaing (1858-1917), le peintre et sculpteur belge est présenté comme un artiste et un homme de cœur. Vous y trouverez l’histoire du Mât-Tigres, comme on l’appelle aussi, d’après ses combats de fauves et de serpents. « Jacques de Lalaing remporte un franc succès lorsqu'il expose à Bruxelles en 1887 un groupe en plâtre intitulé Base de mât électrique. Il développe cette œuvre à l'échelle du paysage et, jusqu'à sa mort, il tentera de l'insérer dans l'espace public. » Refusé à de nombreuses places, le mât sera finalement installé à Schaerbeek. 

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    Tout près du parc Josaphat, le Mât de Lalaing est un des éléments remarquables de ce coin de Schaerbeek régulièrement arpenté par les amateurs d’architecture, d’urbanisme et d’espaces verts, au bas de l’avenue Louis Bertrand, une des plus belles de la commune. Là où ses pelouses s’élargissent, elles comportent à présent une partie non tondue semée de fleurs des champs, c’est du plus bel effet, et un chemin de traverse.

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    On peut remonter vers le boulevard Lambermont  en empruntant l’avenue du Suffrage universel : d’un côté, le stade rénové du Crossing avec ses nouvelles infrastructures, un domaine sportif qui revit ; de l’autre, des maisons bourgeoises construites dans les années vingt – j’aime regarder leurs façades, l’ornementation, tous ces détails qu’il y a presque cent ans on offrait aux passants pour le plaisir des yeux.

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    Bas-reliefs, bow-windows, frontons, balustres, alternance des matériaux, tout cela présente encore plus de valeur près d’un siècle plus tard, à une époque où le fonctionnel prédomine, et on se réjouit de voir ces façades entretenues, restaurées, malgré le coût que cela représente pour les propriétaires. Jolies aussi, ces fenêtres bleues dans la vigne vierge, non ?  

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    La chaussée de Haecht et la chaussée d’Helmet, deux grands axes très fréquentés de Schaerbeek, passent sous le boulevard Lambermont, mais pour les piétons, de beaux et larges escaliers de pierre bleue permettent d’y accéder rapidement. Celui que j’ai emprunté m’a semblé plus propre que la dernière fois – que de travail dans nos villes pour ramasser toutes les saletés que certains laissent derrière eux. Les tags sont le plus souvent une pollution visuelle, celui-ci m’a fait sourire, pour une fois.

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    Sur le trottoir du boulevard, plusieurs mosaïques d’Ingrid Schreyers, l’atelier B[is]art n’est pas loin. De l’autre côté, vers le square Riga (où le rond-point a retrouvé son olivier pour la belle saison), l’avenue Eugène Demolder aligne ses maisons de maître (de plus en plus souvent divisées en appartements). En sens inverse, lorsqu’on découvre l’avenue depuis le square, l’irruption dans le lointain de la tour Up (nouvelle et plus haute tour résidentielle en construction près du canal : elle comptera 42 étages) a considérablement modifié la vue.

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    Ici une grille de fer forgé s’ouvre sur une cour garnie de grands pots : des érables japonais en sont les vedettes et l’on aimerait voir la porte s’ouvrir pour remercier quelqu’un. 

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    Au pied des arbres, coquelicots et bleuets donnent une touche champêtre. Les jardins de ville, pleine terre ou pots, font le bonheur des citadins.