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Littérature italienne

  • La discrétion

    II. « Si l’affabilité est l’art de parler avec grâce, la discrétion est celui de passer sans se faire remarquer. »

    Pensées discrètes.jpg

    « Et, si l’affabilité est la première des vertus sociales, la discrétion est la première des vertus personnelles […]. »

    « De fait, discrétion signifie discernement, capacité de distinguer en peu de temps, parmi les opportunités et les événements, ce qu’il y a de nuisible ou d’utile ; la discrétion est aussi l’art de « garder patiemment en soi » tout ce que l’on écoute, la force de « mettre de côté » le bourdonnement mondain, un respect absolu des confidences reçues. »

    Un des charmes d’Ossola dans Les vertus communes que je cite ici, c’est d’illustrer ses propos par des citations diverses. A l’appui de ce chapitre : un exemple tiré de l’évangile ; des extraits de Principio Fabrizi, de la Règle de saint Benoît, de B. Castiglione (Le Livre du Courtisan), de Chateaubriand (Vie de Rancé), de Mme de la Fayette (La Princesse de Clèves) ; des vers d’Emily Dickinson, de Wislawa Szymborska.

  • L'affabilité

    Ossola Les vertus communes.jpgI. « L’affabilité d’un langage familier que tout le monde puisse comprendre sans qu’on hausse le ton ; un propos conciliant et bienveillant, qui est la base de toutes les autres vertus […]. »

    L’affabilité, « petite vertu qui a traversé les siècles d’un pas léger », est « le contraire de l’arrogance ; elle n’est ni ennuyeuse ni gonflée d’orgueil ; elle est certes agréable, mais elle ne cède pas à l’agréable […]. »

    Carlo Ossola, Les Vertus communes

    Un site propose une liste de 66 synonymes de l’adjectif « affable » : lequel choisiriez-vous ?

     

  • Quelles vertus ?

    La lecture d’Entrez sans frapper m’a donné envie de poursuivre avec son auteur, Carlo Ossola. Une série d’articles publiés dans Il Sole 24 Ore a été publiée en recueil sous le titre Les Vertus communes (traduit de l’italien par Lucien d’Azay). Notre époque valorisant peu ou trop peu ce qui touche au bien commun, je vous propose un petit feuilleton estival, en début de semaine, pour les découvrir.

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    Dans son introduction intitulée « Douze stations pour devenir un peu plus humains », Ossola définit ces vertus communes comme suit : « celles qu’il convient d’exercer chaque jour où nous devons faire l’effort de vivre en société, vertus qui ne sont « petites » que parce qu’elles sont perçues comme telles, alors qu’elles exigent une application personnelle, permanente, une présence d’esprit, consciente de ses propres limites et de celles d’autrui. »

    J’ai choisi pour ce billet d’annonce une photo du rond-point Max Morton, à l’entrée du square Riga : le parterre fleuri y est particulièrement réussi cette année. Merci aux jardiniers de la commune qui œuvrent à la beauté de l’espace public – un bien commun.

  • Bruissements

    Ossola Entrez sans frapper.jpg« J’aime les bruissements du silence que les feuilles susurrent par le ton de leurs couleurs, par la variation musicale des saisons. J’ai vécu, au bureau 16 du Collège de France, cet enchantement : j’entrais, face à moi de hautes branches vives, bienveillants souverains qui me faisaient signe d’approcher. Dans leur nature, du reste, les livres, les branches et les feuilles, ont la même origine : produits du liber, « pellicule qui se trouve sous l’écorce de l’arbre ». Des arbres de mots m’ont entouré et caressé. »

    Carlo Ossola, Au seuil (incipit) in Entrez sans frapper

  • Un livre d'amitié

    Voici les mots du professeur Carlo Ossola en quatrième de couverture de son recueil Entrez sans frapper (2025) : « C’est un livre d’amitié.
    L’amitié de livres qui savent créer autour de nous des mondes. L’amitié de ceux qui les ont écrits et dont la fidélité a été un abri.
    Le bureau 16 du Collège de France nous a tous réunis pour fêter, chaque jour et chaque page, le privilège d’être hommes, pour retrouver notre dignité et le besoin d’universel que les livres accueillent et renouvellent.
    C’est un livre pour des chemins d’avenir. »

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    Carlo Ossola dans son bureau du Collège de France, à Paris, en novembre 2022. 

    Sous-titre : « à l’abri des livres ». Des photographies accompagnent cet essai, à commencer par celle de l’ardoise d’entrée à son nom qui « introduisait à un bois de livres qui étaient abrités, ou plutôt qui animaient et comblaient le « Bureau 16 » du Collège de France. Pendant de nombreuses années (janvier 2000 – décembre 2022), ils furent là, rangés sur des rayons, empilés sur des chaises et sur les rebords des fenêtres ; ils n’y sont plus, je n’y suis plus, et je le regrette. »

    On peut lire dans une note à la fin de Ardoise d’entrée l’intention du titre. Adorno rappelait « la nécessité d’entrer doucement, avec délicatesse, dans la vie d’autrui : « Frapper avant d’entrer » ». Ossola y reconnaît un principe essentiel et ajoute que « seuls les livres, néanmoins, nous donnent la liberté d’entrer chez eux sans frapper, de bénéficier de leur amitié, de leur intimité… », citant à l’appui un marchand florentin, Giovanni di Pagolo Morelli (1371-1944). Le philologue italien indique toutes les références.

    Entrez sans frapper est né d’une « campagne de photographie discrète et amicale » du bureau 16, avant le départ à la retraite de Carlo Ossola. Ensuite est venue l’idée du livre pour évoquer ces années dans sa « forêt livresque » (voir la photo ci-dessus). Au seuil évoque cette vie près des livres et des arbres aux fenêtres, au fil des saisons.

    Dans ce recueil puissamment amical par lui-même et cadeau d’une amie, les textes sont pour la plupart inédits. Chaque chapitre en contient trois ou quatre. Pour vous en faire une idée, vous pouvez lire en ligne (après Mes remparts) Des mains, un texte à propos du tableau qui figure en couverture, d’un poème en prose de Gratiliano Andreotti, d’une Etude de mains de Dürer, ce qui mène à Focillon (Eloge de la main) puis à Shakespeare... Que de passerelles !

    Suivent des textes d’hommage : au chapitre I à Jankélévitch, Bonnefoy et, inattendu, à Roman Opalka, dont il a visité une exposition à Saint-Etienne en 2006 –  « essaims de chiffres », « peu de mots », « intervalles de silence »… Plus on connaît l’auteur ou l’artiste, mieux on arrive à suivre le cheminement de pensée de Carlo Ossola, grand lecteur et citateur. (L’index des noms à la fin du recueil compte quelque dix pages, cela vous donne une idée de son érudition.)

    Le chapitre « Le regard : attention et intention » m’a beaucoup intéressée, à commencer par cette citation de Jankélévitch en note : « L’œil est un organe, c’est-à-dire une chose ; la vision une fonction optique, c’est-à-dire une opération ; mais le regard est une intention. Faute de cette intention, la vision n’est qu’un phénomène abstrait et indifférent. »  L’auteur commente le regard de La Belle Ferronnière de Léonard de Vinci, cite les dix propriétés d’un objet selon l’artiste et poursuit avec « Regarder pour désobjectiver » – selon Ossola « l’un des impératifs des arts de la création au XXe siècle ».

    Entrez sans frapper ouvre de multiples pistes à la réflexion, témoigne des échanges du philologue avec les grands créateurs qu’il admire, ceux du passé et ses contemporains. J’ai été heureuse d’y retrouver « la petite phrase de Proust », via les fiches de Roland Barthes ou dans un essai de Carlo Bo : « Mettre le temps en musique, comme vous le savez, est pour Proust le devoir du romancier […] ».

    A la suite de l’extrait d’une lettre de Bonnefoy à Michel Butor (en 1956), Ossola écrit ceci qui sera ma conclusion sur ce recueil : « Des grands créateurs on ne peut hériter qu’un long, inlassable et fidèle exercice d’admiration. »