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âne

  • L'âne de St Nicolas

    Les fêtes occupaient une place intangible dans le calendrier de mon enfance. La Saint-Nicolas à la maison, c’était le 6 décembre, pas avant, pas après, une longue attente que nous trompions en laissant des carottes le soir, pour l’âne de Saint Nicolas, et parfois nous trouvions en retour des pièces d’or en chocolat au petit matin. Bien sûr, on lui avait laissé une lettre et on rêvait de la visite du grand saint : auxquels de nos souhaits répondrait-il ? 

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    Tout le bonheur est dans l’attente, dit-on, en tout cas l’imagination traversait les murs, s’envolait au-dessus des toits jusqu’au ciel dont l’infini semblait ouvert à tous les possibles. Et, quel bonheur, nos parents étaient de merveilleux associés de Saint Nicolas : c’était la fête des enfants, la fête des cadeaux entre toutes. Quand nous descendions de nos chambres le matin du grand jour, la salle à manger était métamorphosée par les paquets et les bonnes choses à manger : mandarines, chocolats, spéculoos, massepains... Chaque année, le grand saint était au rendez-vous et inventait un décor nouveau, il y avait des surprises – nous avions de la chance.

    Deux Saint-Nicolas particulières surgissent de ma mémoire. D’abord cette année où, terriblement impatients de découvrir le spectacle, nous, les enfants, réveillés au milieu de la nuit, nous avions décidé ensemble, en chuchotant, de descendre l’escalier sans faire de bruit pour surprendre le grand saint à l’œuvre. Mais nos parents avaient l’ouïe fine et il n’était pas encore minuit, contrairement à ce que nous avions cru. Ils étaient encore en bas à disposer les présents, et nous ont interceptés – oups, au lit, vous attendrez demain ! Un autre soir de 5 décembre, je ne sais plus quand exactement, toute cette magie s’est écroulée : ma grande sœur, avec qui je partageais la chambre, peut-être fatiguée de mes questions, de mes bavardages, de ma naïveté, m’apprit des choses que j’ignorais. 

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    Pour Noël, c’était tout autre chose. Peu ou pas de cadeaux, parfois un vêtement utile, ce n’était pas l’essentiel. L’important, c’était d’abord, mais jamais avant le 20 décembre, l’installation de l’arbre de Noël – il fallait que les aiguilles tiennent jusqu’à l’Epiphanie. Le sapin, coupé ou en motte, était juché sur un tabouret, la grande « boîte de Noël » descendue du grenier d’où l’on sortait les boules, la flèche, les guirlandes, la crèche et ses personnages, sans oublier le boeuf et l’âne, naturellement. Ma mère avait l’art de disposer la grande feuille de papier kraft chiffonné, où persistaient des traces de neige carbonique, pour former les « rochers » au pied de l’arbre, avec un creux pour la crèche, un autre où marcheraient les rois mages, et de la place pour les petits moutons aux alentours.

    Et puis, bien sûr, pour une famille chrétienne, la veillée, les chants traditionnels, avant la messe de minuit. Nuit de lumière dans l’église parée pour la fête, remplie à craquer. Là aussi des sapins, l’éclairage des bougies, une grande crèche devant laquelle on nous invitait à déposer des cadeaux destinés aux enfants défavorisés. Certaines années, selon notre âge, une tenue d’ange pour accompagner la procession vers l’autel – d’autres figuraient Marie et Joseph, les bergers. L’arrivée de l’enfant Jésus, poupon ou vrai bébé quelquefois, en était le moment le plus marquant. Le retour à la maison concluait joyeusement cette nuit de fête : on mangeait le délicieux cougnou que mon père était allé chercher à Mesnil-Saint-Blaise, dans un village voisin de celui de sa mère, avant d’aller se coucher, des étoiles dans les yeux. 

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    J’aurais aimé vous raconter l’histoire des fresques qui ornent un pilier devant un magasin de vêtements à vocation sociale (Les Petits Riens), non loin de chez moi. Schaerbeek, vous le savez déjà, s’appelle la Cité des Ânes. Celui de Saint Nicolas y a des cousins. Je vous ai parlé de Camille et Gribouille, mascottes du parc Josaphat, mais peut-être pas de Colignou, sur la place de l’Hôtel communal. Certains habitants de la commune l’associent certainement à un autre âne célèbre, celui de Nasr Eddin Hodja (leur statue orne la rue Gallait depuis quelques années).

    Revenons aux mosaïques illustrant ce billet. Je ne sais ni de quand elles datent, ni qui les a créées. Elles ont dû être installées pour annoncer le « Bazar Saint Nicolas », grand magasin de jouets qui se trouvait autrefois à cet endroit, sur la chaussée de Helmet. A chaque passage, elles me réjouissent : l’âne et sa hotte, le grand saint avec sa crosse, et les trois enfants qui l’accueillent sous un soleil rouge. Un autre petit patrimoine bruxellois à préserver pour le plaisir des petits et des grands.

  • Côté rue

    Même là où nous sommes déjà souvent passés, un jour ou l’autre, question de lumière ou d’humeur, un détail attire soudain l’attention. Cela m’arrive régulièrement quand je flâne dans ma commune au hasard des rues. Et chaque fois, excusez-moi de le répéter, Schaerbeek me fait de l’œil : il y a tant à voir quand on a le temps de s’attarder. 

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    Une énigme, pour commencer : ce « door ons, voor ons » (par nous, pour nous) inscrit dans la pierre en haut d’un pilastre, rue d’Anethan, derrière l’église Sainte Elisabeth. Cette maison rénovée abrite aujourd’hui une asbl d’aide à l’enfant, gérée par la communauté flamande. Je serais curieuse de connaître l’ancienne affectation de ce bâtiment et son histoire. 

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    Dans une autre artère qui part de la Cage aux Ours (nom populaire mieux connu à Bruxelles que celui de la place Verboekhoven) – je vous parlerai une autre fois de sa métamorphose en cours, l’installation récente d’une passerelle métallique au-dessus du chemin de fer commence à faire jaser, pour des raisons esthétiques autant que budgétaires, le retard apporté aux finitions du site n’arrangeant rien –, la commune a placé sous la plaque de rue une brève notice sur l’artiste dont elle porte le nom, ici Jean-François Portaels, un peintre belge. Tout près, ce bel encadrement sculpté dans la pierre bleue, de style art nouveau, garde aussi son mystère qu’une photo trouvée sur Wikimedia n’éclaire pas. Tout renseignement vous vaudra ma gratitude.

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    Les Schaerbeekois qui passent par là – ne disons pas où, il ne faudrait pas attirer les coquins – ont déjà tous repéré ce nouveau membre de la Cité des Anes, qui décore joliment la cour d’une maison (la photo date de l'été dernier). Un clin d’œil à Camille et Gribouille, nos chères mascottes du parc Josaphat, qui ont de nouvelles attributions « au secours de l’environnement », ai-je lu dans Info Schaerbeek : les souffleuses de feuilles y ont été bannies, pour le confort des promeneurs et l’économie, je suppose.

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    De temps en temps, je photographie des arbres par-ci par-là. En automne, certains sont encore plus remarquables, mais ce sera pour un autre billet que je projette d’écrire. Voici tout de même un feuillage de saison, n’est-ce pas que la rue en est enchantée ?

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    Les portes et les fenêtres dessinent le visage d’une façade, j’aime les observer. Ici un splendide auvent de pierre surmonté d’un sgraffite, commande d’un franc-maçon, comme l’indiquent l’équerre et le compas. Là les courbes du fer forgé dessinent un panier fleuri au-dessus d’une porte ; les grilles décoratives qui protègent les vitrages ou entourent les cours et jardinets font parfois le cachet d’une rue.

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    Des campagnes de sensibilisation attirent de temps à autre l’attention sur ce petit patrimoine qui embellit un bâtiment, riche ou modeste. Bien l’entretenir est la meilleure façon de le préserver d’une restauration coûteuse ou pire, d’une disparition pure et simple. Certains propriétaires le négligent. Heureusement, d’autres bichonnent ces détails décoratifs. La Région bruxelloise offre une aide aux particuliers, qui l’ignorent trop souvent.

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    C’est parfois tout en haut que résident les plus beaux atours d’une façade. Que dites-vous de ces superbes sgraffites art nouveau, ces femmes des quatre saisons, sans doute de Paul Cauchie ? Si vous ne le connaissez pas, je vous conseille de visiter un jour la maison du plus célèbre des sgraffiteurs bruxellois, à Etterbeek.  

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    Enfin, à hauteur des passants, s’ils ne sont pas perdus dans leurs pensées ou trop pressés, de belles choses se présentent qui méritent un regard, un sourire, comme ces corbeilles de roses qui nous charment à toutes les saisons. Peut-être voulaient-elles signifier à l’origine que le commanditaire avait les moyens, ou du goût pour l’artisanat. Qu’importe aujourd’hui : ces fleurs de pierre nous offrent, à chaque passage, un certain parfum d’autrefois.

  • Erratum

    Cela fait longtemps que je dois cette correction à JEA, qui partage sa rigoureuse érudition dans Mo(t)saïques. A propos du monument à Philippe Baucq dans le parc Josaphat de Schaerbeek, il a eu l’amabilité de m’instruire – je le cite : « Philippe Baucq a été arrêté par l'occupant le 31 juillet 1915. Motif : organisation d'un réseau d'évasion pour soldats anglais. Ce réseau débuta par Mons pour s'étendre au Nord de la France et retenir Bruxelles comme plaque-tournante. Il est resté célèbre sous le nom d'Edith Cavell. De nationalité anglaise, celle-ci dirigeait l'Ecole d'infirmières créée par le Dr Depage. Elle fut fusillée tout comme l'architecte Baucq. » 

    Philippe Baucq - monument du parc Josaphat.JPG

     

    Et de m’interroger : « Une question, si vous le permettez : le peloton d'exécution les cribla de balles le 15 octobre 1915. Or vous mentionnez 1918 comme année de décès. Il y aurait là un point d'histoire à éclaircir. » Je m’étais trompée, comme vous pouvez le vérifier sur la photo. Je voulais rephotographier la pierre de plus près, mais hélas, des barbouilleurs l’ont récemment maculée d’orange et de vert, ainsi que plusieurs sculptures du parc.

     

    Sans rapport avec ce qui précède – Camille et Gribouille se portent bien. Soigneusement brossés et placides, les deux ânes communaux de Schaerbeek se promenaient dimanche sur la grande pelouse du tir à l’arc. Visiblement, l’herbe « sucrée » (dixit le gardien) leur était savoureuse.