Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Culture - Page 150

  • Sainte-Marie

    Finch Ste Marie.jpg« A plusieurs reprises, l’œuvre graphique de Finch sera présentée au public sous forme d’ensembles assez importants : à Helsinki lors de l’exposition du groupe Septem en 1916, à Turku en 1925, à l’exposition d’art graphique finlandais de 1927, sans oublier la grande rétrospective organisée un an avant sa mort à Helsinki, qui rassemblera vingt-trois eaux-fortes et vernis mous. L’une de ses eaux-fortes semble lui avoir été particulièrement chère, puisqu’elle participe à chaque exposition dès 1905 : elle représente, en couleurs, la coupole de l’église Sainte-Marie de Bruxelles. »

    Heikki Malme, A.W. Finch, peintre-graveur 1897-1930

    Catalogue A.W. Finch, Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique, 1992, Bruxelles, Crédit communal.

    A.W. Finch, La coupole de l’église Sainte-Marie, Bruxelles, 1904-1905, eau-forte, Collection privée, Finlande

  • Finch, peintre et céramiste

    Voici un autre artiste du groupe des XX, ce cercle belge d’avant-garde et de réputation internationale, très actif de 1883 à 1893 : Alfred William Finch, né à Bruxelles en 1854 et décédé à Helsinki en 1930. Une belle rétrospective lui a été consacrée en 1992 aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique à Bruxelles, après avoir été présentée en Finlande au Musée de l’Ateneum.

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    En couverture du catalogue, un détail de
    A.W. Finch, Les falaises au Southforeland, 1892

    Pour rappel, c’est Willy Finch qui figure de profil dans La musique russe d’Ensor, où il écoute une pianiste (la sœur d’Ensor, selon certains ; Anna Boch, selon d’autres). Comme Ensor, dont il est très proche au début (le père d’Ensor est anglais comme les parents de Finch), comme Anna Boch et Théo Van Rysselberghe, Finch est un « vingtiste » à Bruxelles, avant de faire partie du groupe finlandais Septem.

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    A.W. Finch, Le chenal à Nieuport, 1889

    Le catalogue est signé par des experts belges et finlandais, ce qui rend bien compte du double parcours de cet artiste anglo-belge. En Belgique, il est surtout connu pour ses peintures pointillistes, mais il y a aussi innové dans l’art de la céramique, qu’il développera en Finlande où il a renouvelé et enseigné cet art.

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    A.W. Finch, Les meules, 1889, Musée d'Ixelles, Bruxelles

    A ses débuts, Finch s’intéresse au paysage, dans l’esprit de Guillaume Vogels qui excelle à rendre les atmosphères nuageuses. Van Rysselberghe n’est pas le seul à s’enthousiasmer pour les idées neuves de Seurat ; avant lui, même, Finch est ébloui par le pointillisme. En 1902, il écrit un article sur « Georges Seurat et la technique néo-impressionniste » pour la revue Euterpe. Van Rysselberghe change sa manière de peindre des portraits, Finch renouvelle son approche du paysage « à travers sa structure, sa synthèse formelle et son rythme » (Philippe Roberts-Jones).

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    A.W. Finch, Verger à La Louvière, 1890, Ateneum, Helsinki

    Séduit également par le renouveau des arts appliqués, à la suite de Ruskin et Morris et du mouvement Arts & Crafts, Finch va travailler aux faïenceries Boch à La Louvière, collaborer avec Henry Van de Velde pour sa maison Bloemenwerf à Uccle. Un comte suédois, Louis Sparre, remarque ses créations et l’invite à diriger la firme de céramique Iris à Porvoo/Borga. « Ainsi un artiste né à Bruxelles, au sang britannique, devint-il l’un des principaux ferments d’une orientation majeure du design au XXe siècle : l’école finlandaise » (Ph. R.-J.) 


    a.w. finch,peintre,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture,céramiste

     

    A.W. Finch, Pot à lait, vers 1901,
    Terre cuite, glaçure à décor sgraffité,
    rehaussé de points blancs
    (sous la base : A.W.F. / IRIS / Finland)
    MRBAB, Bruxelles

     

    a.w. finch,peintre,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture,céramiste

     

     

     

    A.W. Finch, Vase, vers 1900,
    Céramique, glaçure vert-bleu, Iris, 
    H. 20,5 cm
    (Bukowkis auctions)

     

    a.w. finch,peintre,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture,céramiste

     

     

    A.W. Finch, Tasse en faïence avec décor "vague et lune"
    pour La Maison Moderne à Paris,
    Iris, Porvoo, Finlande, H. 9,5 cm
    (Collectors Weekly)

     

     

     

    De 1890 à 1897, il a appris le métier chez Boch Keramis, expérimenté « oxydes, glaçures et cuissons », puis il a travaillé à Virginal et surtout à Forges, dans une région réputée pour sa poterie populaire et utilitaire. Finch poursuivra ce travail à Porvoo et y fera évoluer les couleurs et les décors, tout en exposant ses créations en Belgique à La Libre Esthétique (mouvement qui a succédé aux XX). 

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    A.W. Finch, Paysage, soleil couchant, 1892, Musée d'art de Turku, Finlande

    Celui-ci n’abandonne pas la peinture ni le dessin pour autant. Il arrive en Finlande à l’automne 1897, « un moment particulièrement favorable de l’évolution des arts graphiques finlandais » (Heikki Malme). Il a déjà réalisé des eaux-fortes en Belgique et renoue avec la gravure, inspiré par le thème de Porvoo, « petite ville aux ruelles étroites et aux cours pittoresques » où il s’est installé à son arrivée. Quand la firme Iris ferme ses portes, il devient en 1902 professeur de gravure à l’Ecole de dessin de la Société des Beaux-Arts de Finlande et professeur de céramique à l’Ecole centrale des Arts décoratifs.

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture
    A.W. Finch, Le Pier de Rosehearty, 1910, Ateneum, Helsinki

    L’enseignement l’appelle à Helsinki, où il retourne aussi à la peinture, à la gravure et au dessin. Il correspond régulièrement avec son ami Georges Lemmen, qui l’encourage à envoyer des œuvres aux expositions : en 1912, 34 peintures et des céramiques à Paris (Galerie Bernheim Jeune) ; dès 1913, à l’Ateneum avec le groupe Septem.

    a.w. finch,peintre,céramiste,groupe des xx,bruxelles,septem,finlande,divisionnisme,paysage,gravure,art,culture

    A.W. Finch, Profil de femme, 1915, Finnish National Gallery

    Finch continue à peindre surtout des paysages, de Finlande et des pays où il voyage : Angleterre, Italie, sud de la France. Dégagé du respect strict des principes du divisionnisme, il laisse libre cours à plus de spontanéité dans l’impression. L’année précédant sa mort (en 1930, des suites d’une opération), une grande rétrospective A.W. Finch a eu lieu au Taidehalli d’Helsinki, « une fête pendant laquelle le spectateur ressent l’intense émotion que peuvent susciter la sensibilité des formes et le triomphe des couleurs, qui caressent l’œil et réveillent l’esprit », selon le critique Onni Okkonen. « Une seule vie, c’est bien trop court pour l’Art » avait déclaré Finch en 1928.

  • Mi sembra lungo

    cognetti,le garçon sauvage,récit,carnet de montagne,italie,val d'aoste,alpage,solitude,nature,culture« Tu sais comment on dit quand on est triste ? me demanda-t-il. On dit mi sembra lungo : je le trouve long, en parlant du temps. C’est le temps, quand on est triste, qui ne veut plus passer. Mais l’expression vaut aussi pour quand on est nostalgique, qu’on se sent seul, qu’on n’arrive pas à dormir, qu’on n’aime plus la vie qu’on fait. Remigio décida un jour que ces trois mots ne sauraient lui suffire, il lui en fallait plus pour pouvoir dire comment il allait, et il se mit à les chercher dans les livres. C’est ce qui avait fait de lui un lecteur aussi avide. Il cherchait les mots qui lui auraient parlé de lui. »

    Paolo Cognetti, Un garçon sauvage

  • Carnet de montagne

    « Carnet de montagne » est le sous-titre du Garçon sauvage (2013, traduit de l’italien par Anita Rochedy, 2016), un récit de Paolo Cognetti publié quelques années avant son roman Les Huit montagnes. Il dédie ce carnet à ses « maîtres de montagne » et à son « esprit-guide », Chris McCandless, le jeune homme dont Krakauer a raconté l’histoire tragique dans Into the Wild. Cognetti cite à plusieurs reprises de beaux vers d’Antonia Pozzi, jeune poétesse milanaise comme lui, décédée à 25 ans à la suite d’une tentative de suicide en 1938.

    cognetti,le garçon sauvage,récit,carnet de montagne,italie,val d'aoste,alpage,solitude,nature,culture
    https://www.yanezmagazine.com/paolo-cognetti-scrittore-montagna-534/

    A trente ans, Cognetti a eu « un hiver difficile » ; il se sentait « à bout de forces, désemparé et abattu ». Attiré par les « expériences de solitude » de Thoreau, de John Muir, d’Elisée Reclus et de McCandless, il décide de remettre les pieds à la montagne où il a passé tous les étés jusqu’à ses vingt ans, de renouer en lui avec cet « enfant sauvage » dont la vie citadine l’a tant éloigné.

    « Au printemps, je trouvai l’endroit idéal dans la vallée voisine de celle où j’avais passé les étés de mon enfance : une baita en bois et en pierre à deux mille mètres d’altitude, là où les dernières forêts de conifères cèdent la place aux hauts pâturages. […] à l’horizon, les montagnes qui ferment la Vallée d’Aoste au sud, en direction de Grand Paradis ; mais aussi une fontaine creusée dans un tronc d’arbre, les restes d’un muret de pierres sèches, le murmure d’un torrent. »

    Le chalet est resté fermé pendant des mois, il l’aère en grand quand il y arrive, retrouve « l’odeur du bois et de la résine » qui lui donne le sentiment d’être « de nouveau à la maison ». Cela lui rappelle une nouvelle de Mario Rigoni Stern (1921-2008), Mes quatre maisons. Celle que Cognetti habite,  construite pour abriter bêtes et bergers pendant l’estivage, comporte deux pièces : l’étable en bas, devenue une chambre, à l’étage une pièce de séjour.

    Parcourir la montagne en tous sens, pour la saisir dans son ensemble et dresser la carte des environs est son premier objectif – « passé les premiers jours de dépaysement, j’étais affairé de tous côtés » – avec un catalogue des animaux et des plantes qu’il observe, le ramassage du bois pour le poêle, le nettoyage du pré autour de la baita. A la mi-mai, il se réveille sous une neige tardive qui lui donne l’occasion de trouver les traces d’un lièvre, d’un couple de chevreuils, et de découvrir la source d’un grand fracas entendu pendant la tempête : un mélèze dont le tronc a cédé à trois mètres de hauteur, « étendu de tout son long, inerte et encore vivant ».

    Son premier contact humain, c’est la visite de Remigio, le propriétaire, venu s’assurer que tout va bien et qu’il a encore de quoi se chauffer. C’est lui qui avait rénové la baita, passionné par la remise en état des vieilles maisons, dont il a fait son métier. Ce bon lecteur remarque les livres qu’il a emmenés avec lui et leurs échanges lui plaisent : « quand il parlait, il choisissait ses mots avec soin ».

    « Jardin », « Nuit », « Voisins », un nom suffit pour intituler la plupart des chapitres de ce Carnet de montagne.  On y suit les gestes et les états d’esprit d’un solitaire à qui l’été apportera la compagnie des bêtes et des hommes montés aux alpages. Les jours de pluie ne manquent pas, il faut se méfier de l’orage quand on marche hors des chemins balisés et que parfois l’on se perd.

    cognetti,le garçon sauvage,récit,carnet de montagne,italie,val d'aoste,alpage,solitude,nature,culture

    Le goût de la montagne, le goût des mots, le goût de la solitude et le goût des autres, voilà ce que raconte avec justesse et sans pose Le garçon sauvage. Après avoir assisté à la « désalpe » des autres, à l’automne, Paolo Cognetti finira par partir, lui aussi. « Il était temps de redescendre. Je savais déjà de quoi je rêverais tout l’hiver. »

  • Pour la localisation

    Connaissez-vous Helena Norberg-Hodge ? Un entretien de Sabine Verhest avec cette « lauréate du prix Nobel alternatif » (Right Livelihood Award, 1992), dans La Libre Belgique du 27 avril 2020, m’a donné envie d’en savoir un peu plus sur cette philosophe écologiste britannique et de partager son analyse avec vous, dans la continuité de la « décroissance heureuse » de Maurizio Pallante.

    helena norberg-hodge,local futures,localisation,économie,bonheur,changement,société,sens,culture
    Helena Norberg-Hodge au Ladakh, 1986

    « Les crises auxquelles nous sommes confrontés partagent une racine commune : la mondialisation économique. L’antidote ? La localisation. » Helena Norberg-Hodge et l’organisation Local Futures prônent une nouvelle économie qui nous préserve des dérives sociales et des pénuries constatées aujourd’hui à cause de notre dépendance envers les monopoles mondiaux. En prenant conscience de la trop grande vulnérabilité de nos sociétés qui en découle, nous voilà plus nombreux, il me semble, à nous ouvrir aux idées qu’elle a développées dans Le local est notre avenir.

    Non seulement la localisation raccourcit la distance entre la production et la consommation, autrement dit les circuits courts, mais elle réduit aussi la consommation d’énergie et la pollution. « En même temps, la localisation reconstruit le tissu d’une véritable communauté, le sentiment d’être dépendant d’autres êtres humains, au lieu de bureaucraties lointaines et de forces anonymes. »

    Le sentiment de connexion ainsi ravivé répond à un besoin humain fondamental : le lien « avec les autres et avec le monde vivant qui nous entoure ». C’est pourquoi Helena Norberg-Hodge parle d’une « économie du bonheur », une formule que je ne trouve pas très adéquate, mais elle décrit très bien l’insatisfaction causée par la séparation entre les gens, la distance, la déconnexion auxquelles conduit la mondialisation, alors que l’économie locale amène des relations « lentes » avec les autres, plus profondes et porteuses de sens.

    Elle appelle de ses vœux « un mouvement mondial pour le changement », un encadrement de l’économie par des valeurs écologiques et sociales, afin de « prévenir d’autres destructions » que celles dont nous sommes déjà les témoins : le fossé entre les riches et les pauvres qui s’élargit, l’appauvrissement de notre environnement, l’accroissement de l’anxiété.

    Sur le site de Local Futures, dont l’histoire commence au Ladakh, en Inde, il y a plus de quarante ans, vous trouverez leurs projets, leurs activités, leurs propositions économiques. Sur leur blog, je vous signale, entre autres, un article de GRAIN publié au début du mois d’avril sur l’origine de Covid-19, et un autre intitulé « Une perspective de décroissance sur la crise des coronavirus » qui explique comment cette crise, si elle n’est pas une décroissance, montre combien la décroissance est nécessaire et possible.

    Souvent, les soignants et les autres « aidants » que nous applaudissons tous les soirs à vingt heures – cela faiblit un peu dans ma rue, lassitude ou effet du déconfinement annoncé et espéré – et aussi les personnes qui se sont mises à coudre des masques, à distribuer de l’aide alimentaire, à faire des courses pour leurs voisins, expriment souvent à quel point ce qui les soutient dans la crise actuelle, c’est la conscience de faire quelque chose qui a vraiment du sens, qui va vraiment aider les autres.

    J’aime la façon dont le mouvement Local Futures relie les réalités économiques aux réalités sociales, insiste sur le sens de nos relations avec les autres et avec le monde qui nous entoure. Nous pouvons tous avancer vers une « économie du bonheur » avec Helena Norberg-Hodge, non seulement en faisant quelque chose qui soit à notre portée pour rendre le monde meilleur, mais aussi en nous opposant à « la dérégulation du commerce et de la finance, qui donne aux entreprises mondiales monopolistiques plus de puissance, plus d’argent, plus de droits, pendant qu’on restreint les droits de tous les autres. »

    P.-S. Signalée par Colo, une opinion de Gil Bartholeyns sur la crise sanitaire, pour compléter la réflexion (La Libre.be, 9/5/2020)