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paysages

  • Estampes modernes

    Amateurs d’estampes et curieux d’art, ne manquez pas la nouvelle exposition du musée Art & Histoire au Cinquantenaire : « Shin Hanga. Les estampes modernes du Japon 1900-1960 ». La belle affiche est signée Torii Kotondo, moins connu que les grands noms de l’ukiyo-e (Utamaro, Hokusai, Hiroshige) à qui la première salle rend hommage. Les œuvres des artistes modernes valent la découverte : plus de deux cents estampes, issues de collections privées néerlandaises et de celles du Musée.

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    Torii Kotondo (1900-1976), Cheveux du matin (détail), 1931,
    48 × 29,5 cm © Collection particulière, Pays-Bas

    Le dessin de Cheveux du matin ou Asanegami, mot qui « évoque l’image d’une femme allongée sur son lit, pensant à son bien-aimé » a été jugé « trop voluptueux » (des cheveux trop décoiffés) et l’impression interrompue par les autorités, les invendus saisis, en faisant une des estampes shin hanga les plus rares. (Citations extraites du Guide du visiteur ou des notices du musée.)

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    Takahashi Hiroaki (Shōtei) (1871-1945), Bateau sur une rivière par temps de neige,
    13,4 × 36,5 cm © MRAH – JP.06147

    C’est l’intérêt croissant des Occidentaux qui a poussé un jeune éditeur, Watanabe Shōzaburō (1885-1962) – son petit-fils a prêté des œuvres de sa collection – à imprimer des reproductions de qualité des estampes anciennes et à créer des shin hanga (ou nouvelles images) sur du papier de haute qualité, d’un format un peu plus grand, avec des pigments plus raffinés. Un produit de luxe faisant appel aux meilleurs artisans selon la technique traditionnelle : dessinateur, graveur, imprimeur, éditeur. (Une salle est consacrée aux étapes de ce travail, avec une vidéo sur la xylogravure ou gravure sur bois.)

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    Friedrich (Fritz) Capelari (1884-1950), Femme tenant un chat noir, 1915, 
    21 × 31,5 cm © S. Watanabe Color Print Co.

    Les premières estampes de ce nouveau style sont étroites (horizontales ou verticales), comme Bateau sur une rivière par temps de neige. On les vend dans les boutiques de souvenirs à une clientèle étrangère. En 1915, Watanabe voit une exposition d’aquarelles de l’Autrichien Fritz Capelari, il décide d’éditer douze de ses œuvres, puis d’autres du Britannique William Bartlett : les deux artistes correspondent au nouveau style qu’il recherche.

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    Charles William Bartlett (1860-1940), Kyoto, 1916  © Collection Scholten

    L’irrésistible Femme tenant un chat noir est la première des dix estampes de l’exposition dont le numéro est accompagné d’une fleur stylisée : « invitation à regarder plus intensément ». Dans le Guide, un petit texte attire l’attention sur le sujet, les détails, les couleurs – une bonne idée pour aider à prendre le temps d’observer et de recevoir. De Bartlett, une vue animée de Kyoto montre le passage de personnages sur un pont – remarquez qu’il y a plus d’enfants dans cette scène qu’on ne le pense au premier abord. Tous les âges sont représentés. Le mont Fuji vu depuis le lac Shoji aborde ce thème traditionnel d’une manière nouvelle, dans de très belles nuances de couleur.

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    Charles William Bartlett (1860-1940), Le mont Fuji vu depuis le lac Shōji, 1916,
    28 × 39 cm © S. Watanabe Color Print Co.

    « Portraits de femmes avant 1923 » montre une magnifique série de « jolies  femmes ». Les artistes japonais du XXe adoptent la manière occidentale du portrait d’après modèle dans leur atelier. Ce ne sont plus des courtisanes ou geishas célèbres, mais des « beautés songeuses » représentées dans l’intimité, sortant du bain ou se maquillant. Le raffinement technique est admirable, les teintes subtiles des carnations exigent un grand savoir-faire des imprimeurs qui utilisent un papier très épais absorbant bien les couleurs.

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    Hashiguchi Goyō (1881-1921), Femme peignant ses cheveux, 1920, 
    44,6 × 34,5 cm © Collection particulière, Pays-Bas

    Femme peignant ses cheveux de Hashiguchi Goyo est « une des œuvres emblématiques de l’estampe moderne au Japon ». L’étude au crayon exposée à côté permet d’observer à quel point le travail de gravure et d’impression donne vie au dessin. Le rendu des tissus aussi est remarquable, par exemple dans Femme en long vêtement de dessous, « grâce à un gaufrage en relief minutieux ». Impossible de tout montrer, comme cette femme en rouge de profil de Devant le miroir ou Après le bain d’Ito Shinsui, autre grand collaborateur de Watanabe.

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    Hashiguchi Goyō (1881-1921), Femme en long vêtement de dessous, 1920
    © Collection Scholten

    Viennent ensuite des « Paysages avant 1923 », soit avant le terrible tremblement de terre survenu cette année-là sur l’île principale du Japon, détruisant Tokyo et Yokohama. Du même Shinsui sont exposées Huit vues d’Omi, près de Kyoto. Cette série ne reprend pas les conventions traditionnelles, ce sont des paysages intimes centrés sur les conditions atmosphériques, la lumière, sans personnages (cliquer sur la photo pour agrandir).

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    Itō Shinsui (1898-1972), Huit vues d'Ōmi, 1917
    © Collection particulière, Pays-Bas

    Le pin à Karasaki (35G)  nous met au pied d’un arbre ancien géant dont certaines branches sont soutenues, mais qui se développe librement. Derrière lui, les teintes du ciel se transforment très doucement. Les gorges de Tsuta, Mutsu de Kawase Hasui attirent par les bleus et les verts intenses (j’ai appris que le vert est une nuance du bleu pour les Japonais), et puis on remarque la barque des pêcheurs.

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    Kawase Hasui (1883-1957), Les gorges de Tsuta, Mutsu, 1919
     © Collection Scholten

    Je n’en suis qu’au tiers du parcours. La suite ? « Portraits de femmes après 1923 », « Portraits d’acteurs », « Fleurs et oiseaux », « Modernité », « Paysages après 1923 ». Comptez au moins deux heures pour visiter cette superbe exposition qui mérite une seconde visite si l’on souhaite prendre le temps de tout bien regarder. « Shin Hanga. Les estampes modernes du Japon 1900-1960 » : à voir jusqu’au 15 janvier 2023.

  • Echappée drômoise

    Echappée ? En peinture, cela se dit « d’une perspective de ciel ou de lointain entrevue par un espace libre, réservé à cet effet » (Jules Adeline, Lexique des termes d’art, citation du TLF). Voilà qui résume bien le lieu et l’esprit de mon séjour en Drôme provençale, dont voici un début d’abécédaire.

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    ARBRES. Oliviers scintillant sous le soleil, pins s’arrondissant à la rencontre du ciel, ombre accueillante des tilleuls, yeuses omniprésentes, les arbres sont des repères dans ce paysage de vignes et de lavandes.
    Ils font signe par la fenêtre ouverte. Ils vous attendent au bord de la route ou du chemin, comme ce « sempervirens » à la silhouette imposante.

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    BESTIAIRE. Les petits scorpions de Provence aiment rôder la nuit et, quand on a la chance de disposer d’une piscine, il convient de vérifier si l’un ou l’autre n’y est pas tombé en s’aventurant sous la bâche. Coup de filet.
    Une étonnante apparition d’un matin près de la fenêtre nous révèle la splendide épeire fasciée (araignée guêpe ou argiope frelon, elle ne manque pas de surnoms évocateurs) et son cocon raffiné, en forme de montgolfière retournée.

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    CLOCHERS. Autre écriture verticale dans le paysage, dont Proust a magnifié la présence, le clocher est la signature d’un village.
    A Venterol, le campanile en fer forgé du XVIIe siècle attire l’œil dès qu’on approche de ce beau village perché. De pierre, celui de l’église Saint-Michel à La Garde Adhémar se profile entre de hauts murs.

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    DE JOUR, les merveilles de la terre : lavandes, oliveraies, vignes, lointains si bleus dont le dégradé me charme. En passant, le regard se pose sur les cabanons de pierre au milieu des champs.
    DE NUIT, le ciel s’habille de larges rayures aux couleurs intenses puis de plus en plus douces avant de laisser leur toile aux étoiles.

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    ENSEIGNES. Non loin de la mairie de ce village médiéval classé parmi les plus beaux de France, je m’interroge devant la mystérieuse enseigne de « Gustave Comte de Salsifis », peintre à la palette un peu sorcier : qui m’en dira le secret ? Serait-ce lui qui a jeté un sort à La F..rmi ?

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    FLEURS. Avec les oiseaux, toutes sortes de fleurs décorent les jolies plaques en céramique (signées Dana) qui indiquent aux flâneurs le nom des rues et des traverses de La Garde Adhémar. Et aussi le « Jardin des herbes ». Le parvis de l’église offre une superbe vue panoramique sur la plaine de Pierrelatte. Une petite barrière ouvre sur l’escalier d’un « jardin remarquable », tout en terrasses, qui rassemble des plantes médicinales et aromatiques.  

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    « G » ? La lettre est presque au milieu du mot « encoignure » qui relie les deux dernières photos de ce billet. L’une, prise dans une ruelle de Venterol, joue sur la forme triangulaire ; certains détails y révèlent la présence d’un tigre de salon. L’autre encoignure, sur le site du Val-des-Nymphes (un endroit de culte païen puis chrétien à ne pas manquer, tout près de La Garde Adhémar), abrite un bénitier à l’entrée d’une petite chapelle dans un mur, non loin d’un bassin. Il y a beaucoup à découvrir autour de la chapelle prieurale (XIIe siècle) au centre de ce vallon plein de résonances.

    Merci pour vos commentaires sur T&P en mon absence.
    Ravie de vous retrouver bientôt pour de nouveaux échanges.

    Tania

  • Théo Van Rysselberghe

    D’Anna Boch à Théo Van Rysselberghe, la transition est facile – on n’oublie pas le magnifique portrait qu’il a fait d’elle, où il tente non seulement de la peindre au travail mais de « pénétrer dans la nature même du processus créateur » en la montrant en train de réfléchir à sa toile (hors du tableau), comme l’écrit Jane Block dans le catalogue de la belle rétrospective Théo Van Rysselberghe au musée des Beaux-Arts de Gand en 1993.

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    En couverture : Portrait d'Irma Sèthe, 1894, musée du Petit Palais, Genève

    Robert Hoozee, dans l’introduction, donne raison à Verhaeren qui considère, après la mort de Seurat, que Théo Van Rysselberghe est « le néo-impressionniste le plus complet ». Même si le peintre belge aux multiples facettes peint de nombreux paysages et marines, « son œuvre se centre surtout sur le problème que pose la capture de la forme de l’être humain sur la toile » (Jane Block, comme pour les citations qui suivent).

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    Théo Van Rysselberghe, Armand Heins peignant, 1881, Musée des Beaux-Arts, Gand

    Il a fait le portrait de parents, d’amis, de collègues, d’une série « de personnages qui se trouvent au cœur de sa vie créatrice et de celle de la capitale artistique qu’était Bruxelles au cours des dernières années du dix-neuvième siècle ». Né à Gand en 1862, Van Rysselberghe y avait reçu une formation académique dans la tradition du portrait des grands artistes flamands (Van Eyck, Rubens, Van Dyck) et la bourgeoisie en était friande, malgré l’invention de la photographie.

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    Théo Van Rysselberghe, Dario de Regoyos jouant de la guitare, 1882, MRBAB, Bruxelles

    Deux ans après s’être installé à Bruxelles, il peint en 1882 son nouvel ami et camarade d’étude, Dario de Regoyos jouant de la guitare, dans des tons bruns et noirs. Des voyages en Espagne et au Maroc vont l’inciter à mettre davantage de lumière dans ses œuvres. A Haarlem, il admire les « subtiles gradations de noir, de blanc et de gris » dans les portraits peints par Frans Hals. A partir de la deuxième exposition des XX, en 1885, il montre de plus en plus de portraits.

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    Théo Van Rysselberghe, Portrait d'Octave Maus, 1885, MRBAB, Bruxelles

    Celui, très élégant, de son ami Octave Maus, 39 ans, « absorbé dans ses pensées, mais confiant et détendu, en tenue de soirée, contemplant son piano », comporte une applique qui, selon Jane Block, « évoque plaisamment le papillon que Whistler avait adopté sous forme de monogramme ». Invité à la première exposition des XX, Whistler a fort influencé certains membres du groupe. Van Rysselberghe signera le plus souvent TVR ou VR.

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    Théo Van Rysselberghe, Portrait de Marguerite van Mons, 1886, Musée des Beaux-Arts, Gand

    Mais la rencontre avec les œuvres de Seurat à Paris, en 1886, va provoquer un changement décisif dans le style de Van Rysselberghe. Admirant Un dimanche après-midi à la Grande Jatte, Octave Maus considère Seurat comme le « messie d’un art nouveau ». Ses peintures « furent une révélation pour la plupart des vingtistes » : Willy Finch, Jan Toorop, Anna Boch, Henry Van de Velde« Théo Van Rysselberghe devint le plus prolifique des peintres de portraits pointillistes ». Le premier, celui d’Alice Sèthe, 19 ans, fait l’unanimité, même si certains critiques se moquent de la « peste parisienne qui menaçait de subvertir les véritables personnalités » de ces peintres.

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    Théo Van Rysselberghe, Portrait d'Alice Sèthe, 1888,
    Musée Maurice Denis, Saint-Germain-en-Laye

    Van Rysselberghe situe le plus souvent ses modèles dans un cadre qui exprime leurs intérêts culturels, comme dans le portrait de Maria Sèthe à l’harmonium, assise au clavier (elle deviendra l’épouse de Van de Velde). Mais il peint Auguste Descamps, le frère de sa belle-mère, « figure familière mais respectée de la famille », sur un fond imprécis. Les portraits constituent la participation majeure du peintre belge aux expositions des XX puis de La Libre Esthétique qui leur succède.

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    Théo Van Rysselberghe, La famille dans le verger, 1890, Rijksmuseum Kröller-Müller, Otterlo

    Quand il peint des groupes, comme dans La Promenade, il s’attache à rendre le mouvement des femmes marchant contre le vent sur la plage, l’atmosphère ensoleillée du bord de mer. Le thé au jardin montre trois femmes en chapeaux, chacune à leur occupation : cousant, remuant le thé dans la tasse, lisant. Quelle douceur de retrouver cette œuvre dans le catalogue aussi en carte double, avec des mots de maman qui me l’avait envoyée.

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    Théo Van Rysselberghe, Le thé au jardin, vers 1904, Musée d'Ixelles, Bruxelles

    Van Rysselberghe nous a laissé de magnifiques portraits de femmes et d’hommes et une œuvre unique dans la peinture belge, chère aux amoureux de la littérature : La lecture d’Emile Verhaeren (ami qu’il a souvent dessiné ou peint par ailleurs). Les paysages et marines de Théo Van Rysselberghe occupaient aussi une belle place à l’exposition gantoise et j’ai du plaisir à revoir des vues marocaines, Voiliers sur l’Escaut, La Pointe de Saint-Pierre à Saint-Tropez, entre autres. A Saint-Clair, près du Lavandou, où il a vécu de 1910 jusqu’à sa mort en 1926, il a peint nombre de paysages, de baigneuses et des portraits.

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    Théo Van Rysselberghe, La Pointe de Saint-Pierre à Saint-Tropez, Var, 1896,
    Musée national d'Histoire et d'art du Grand-Duché de Luxembourg

    J’avais un peu oublié la participation du peintre à l’ornementation du livre, dans la continuité de William Morris et du mouvement Arts and Crafts. Pour l’éditeur Deman, il dessine des frontispices, titres, fleurons, couvertures, culs-de-lampe, couvertures même. Ses calligraphies sont sobres, équilibrées, classiques jusque dans ses motifs « art nouveau ». En tant qu’ornemaniste, écrivent Adrienne et Luc Fontainas, Van Rysselberghe « a réussi à se former un style personnel, dans la joie toujours renouvelée de créer. »  

  • De la clarté

    De mon mystérieux voyage
    Je ne t’ai gardé qu’une image,
    Et qu’une chanson, les voici :
    Je ne t’apporte pas de roses,
    Car je n’ai pas touché aux choses,
    Elles aiment à vivre aussi.

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    Mais pour toi, de mes yeux ardents,
    J’ai regardé dans l’air et l’onde,
    Dans le feu clair et dans le vent,
    Dans toutes les splendeurs du monde,
    Afin d’apprendre à mieux te voir
    Dans toutes les ombres du soir.

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    Afin d’apprendre à mieux t’entendre
    J’ai mis l’oreille à tous les sons,
    Ecouté toutes les chansons,
    Tous les murmures, et la danse
    De la clarté dans le silence.

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    Afin d’apprendre comme on touche
    Ton sein qui frissonne ou ta bouche,
    Comme en un rêve, j’ai posé
    Sur l’eau qui brille, et la lumière,
    Ma main légère, et mon baiser.

     

    Charles Van Lerberghe (1861-1907)

    Le Ventoux au loin / Le troupeau rassemblé / La Drôme à Crest
    (septembre 2019)

  • Deux paysages

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    En haut © René Schlosser / En bas © Mireille Veauvy 

    Pourquoi gardons-nous le souvenir d’une peinture en particulier ? Est-ce le temps que nous avons passé à la regarder ? L’émotion que nous avons ressentie ?
    En zoomant sur cette photo, j’ai trouvé la signature de René Schlosser (1933-2017), dont la galerie Duvert à Crest propose plusieurs toiles.

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    © René Schlosser (détail)

    Un article du Matin (2002) m’apprend que cet artiste « rattrape des fragments de matériaux pétris de vécu utilitaire ou de caprices de la nature, pour leur redonner une autre destinée dans l’œuvre d’art. » Lui-même, dans une vidéo tournée dans son atelier de Valence, dit sa passion de travailler sur des matériaux « pauvres », « qui appartiennent à la vie courante », « usés par le temps », plutôt que sur des matériaux « beaux-arts ».

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    © Mireille Veauvy (détail)

    Dans ces deux toiles presque carrées, qui semblent inspirées de paysages asiatiques, pour la première en tout cas, on distingue en se rapprochant des pièces rapportées : à peine visibles dans celle du haut, dans une toile plus épaisse qu’une bordure souligne dans celle du bas. Il s’en dégage quelque chose de mystérieux, d’attirant, un je ne sais quoi qui retient le regard et mène au rêve.

    Rectificatif (17/4/2021) :

    Erronément, j’ai attribué ces deux œuvres à René Schlosser.
    Toutes mes excuses à Mireille Veauvy, peintre et licière, qui a créé la tapisserie entourée d’une peinture, deux techniques qu’elle rapproche. Je vous invite à découvrir son travail sur son site.