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amour - Page 48

  • Amis et amoureux

    Entre deux lectures successives apparaissent parfois d’étranges liens : dans Chaos calme, un homme perd sa femme au moment où il en sauve une autre de la noyade ; dans Ma femme de ta vie (La mujer de mi vida, 2005), la chilienne Carla Guelfenbein réunit deux amis qui ne se sont plus vus depuis quinze ans au bord d’un lac de montagne au Chili pour Noël. En invitant Theo, Antonio n’avait pas mentionné la présence de Clara, Theo ne serait sans doute pas venu. Revoir « sa » Clara qui a renoncé à la danse pour illustrer des contes pour enfants, Theo n’y est pas préparé. Correspondant de guerre, il n’a qu’une seule attache stable : sa fille Sophie, qui vit avec sa mère aux Etats-Unis. Pourquoi l’a-t-on invité ? Ni Antonio ni Clara ne répondent clairement à cette question. Quelques jours après s’être réconcilié avec Theo, Antonio trouve la mort en se jetant à l’eau pour sauver une fillette. A ses funérailles, son ami, qui l’a « trahi » autrefois, est bouleversé du désespoir de Clara : l'épouse d’Antonio a été pour Theo la femme de sa vie et l’est peut-être encore. 

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    « Les certitudes qui m’habitent ne sont pas nombreuses, mais je suis convaincue d’une chose, nous sommes trois et ce capital de temps qui s’étale devant nous dans toute sa plénitude est puissant et nous appartient » : voilà ce qu’écrit Clara en juillet 1986 dans le cahier à couverture rouge qui ne la quitte pas. A cette époque, Theo est devenu l’ami d’Antonio, un étudiant chilien en troisième année de sciences politiques à l’université d’Essex. Lui n’est qu’en deuxième, mais ils ont un cours commun, où les confrontations entre un professeur et Antonio à propos du marxisme révèlent l’aura que procure à celui-ci la réputation de son frère, un dirigeant étudiant en pointe dans la résistance à la dictature chilienne. L’assurance d’Antonio, sa personnalité fascinent Theo. Le jour où ils se découvrent la même date d’anniversaire, à un an près, ils font vraiment connaissance.

     

    A la surprise de Theo, qu’une angine cloue au lit peu après, Antonio vient alors s’occuper de lui, lire dans sa chambre pour lui tenir compagnie – personne à part sa mère ne s’est jamais soucié de lui de cette manière. Puis un jour, Antonio l’emmène chez son père, qui parle mal l’anglais, mais Theo a appris l’espagnol. Jour de drame : un coup de téléphone informe sa famille de la mort de Cristóbal, le frère d’Antonio, tué dans une manifestation. Après cela, Antonio n’a qu’une obsession : rentrer au pays, se préparer à la guerre. En attendant, Théo lui est devenu aussi indispensable qu’un frère.

     

    Au début des vacances d’été, les deux amis se rendent à Edimbourg, chez un professeur de littérature latino-américaine dont la fille, Clara, suit des cours de danse à Londres. Son père est un « disparu » chilien. Quand Clara apparaît, avec sa façon « typique des danseuses de se déplacer », ses yeux clairs font à Theo « l’effet
    d’une lumière qui soudain vous brûle ».
    Il est submergé de désir et Antonio le voit. Pour lui, dit-il, Clara est « comme une sœur ». Theo pressent qu’il y a davantage entre eux, même après que son amour pour Clara est devenu une réalité visible : « il essayait de nous montrer qu’il n’était en rien affecté par ma relation avec Clara, et plus encore que, quoi que nous fassions, nous lui appartenions tous les deux. »

     

    Déprimé de voir le parti envoyer quelqu’un d’autre au Chili, Antonio sombre dans la dépression. Clara se charge de lui, lui fait remonter la pente. Il faut de l’argent à Antonio pour financer par lui-même son retour au pays. Theo s’en procure en écrivant des articles qu’un ami, admiratif de sa plume, l’aide à faire éditer dans une revue. Clara, avec son groupe de danse, prépare un spectacle pour une fête de solidarité chilienne. Mais les choses ne se passeront pas comme prévu – ni sur le plan politique, ni dans ce trio amoureux et ami.

    La vie étudiante, avec tous ses possibles, et le regard qu’on porte plus tard sur sa jeunesse, Carla Guelfenbein les dépeint dans Ma femme de ta vie à travers les liens puissants et parfois troubles entre ces trois personnages. Relatée par Theo, leur histoire est régulièrement interrompue par des extraits du « Journal de Clara », en contrepoint. A la fin du roman, un an après le drame, Theo et Clara se retrouvent au bord du lac où Antonio s’est ouvert à son ami une dernière fois, sans tout lui dire cependant. Dans quelle mesure la vie les a-t-elle changés ?

  • La plage d'Ostende

    Florilège d’automne /Incipit

     

     

    Dès que je le vis, je sus que Léopold Wiesbeck m’appartiendrait. J’avais onze ans, il en avait vingt-cinq. Ma mère dit :

    - Voici ma fille Emilienne.

    Il me fit un sourire distrait. Je pense qu’il n’avait aperçu qu’une brume indistincte, car ma mère captait le regard.

     

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    Elle était, et fut jusqu’à sa mort, une femme couverte d’ornements : colliers et bracelets, écharpes, chignon architecturé, elle manipulait toujours quelque chose, une cigarette, son sac, une boucle d’oreille, les cheveux de sa fille. Elle avait manqué de peu l’éventail qui passa de mode pendant son adolescence, les ombrelles et le face-à-main, mais elle eut les étoles qui glissent le long des épaules, les plis de la jupe qu’il faut sans cesse disposer avec grâce, les manches à réenrouler, une perpétuelle turbulence de tissus qui flottaient autour d’elle. Tout cela scintillait, étincelait, vibrait, cliquetait, elle était au centre d’un frémissement et je disparaissais parmi les mouvements des mains, les hochements de tête et l’abondance de sa parole. Elle avait une belle voix ronde, aimait à parler et, comme il lui venait peu d’idées, elle se répétait :

    - C’est ma fille.

    - Certainement, dit Léopold.

    Ainsi, la première chose qu’il sut à mon sujet fut que j’étais, certainement, la fille de la belle Anita.

    Moi, j’étais foudroyée.

     

     

    Jacqueline Harpman, La Plage d’Ostende, Stock/Livre de Poche, 1993.

  • Course folle

    « Ca s’ouvrait en variations infinies : rubans de nuages mauves, douche de lumière et rideau de pluie diagonale et jaune, rien ne manquait à l’appel. Au loin, le mélange de bleu intense et de blanc lumineux n’en avait plus pour longtemps, ça cavalait à quatre-vingts kilomètres-heure et sur le sable, de larges bandeaux d’ombre fuyaient vers les pointes, puis le soleil repeignait tout en un clin d’œil, c’était quelque chose de voir avancer la lumière, de suivre sa course folle. A nos pieds, la mer tanguait sec, les cormorans s’en foutaient on les voyait plonger sous la surface et remonter quelques secondes plus tard, le cou tendu vers le ciel, où glissaient de minuscules poissons argentés. L’heure tournait, il a fallu s’arracher à tout ça, la voiture nous attendait à l’ombre d’un grand pin, les roues avant enfoncées dans le sable meuble. »

    Olivier Adam, Des vents contraires  

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  • Rester vivants

    Des vents contraires, le titre choisi par Olivier Adam pour son dernier roman (2009), en annonce et le ton et le temps. Les adieux de Manon à l’école (quatre ans), le silence de Clément (neuf ans), et c’est le départ pour la Bretagne avec leur père qui quitte la maison où ils avaient emménagé, Sarah et lui, cinq ans plus tôt. Leur arrivée dans la maison de ses parents en Bretagne n’est pas folichonne – c’est le père, Paul Anderen, qui raconte – même s’il se réjouit. « Elle ressemblait à ce que j’aurais voulu faire de mon cerveau : des murs blancs, des sols et des plafonds clairs, des fenêtres par où entrait une lumière de verre. » 

    La mer, une photo d'Aifelle (30 mai 2009).jpg
    La mer, une vue d’Aifelle sur « Le goût des livres » (30 mai 2009),
    un blog lumineux où j’aime me balader entre les photos et les mots.

     

    Ce sera bientôt le deuxième Noël sans Sarah, disparue sans plus donner signe de vie. « En attendant, les petits étaient calmes et sereins, de temps à autre un éclair de joie illuminait leurs visages, le paysage agissait sur eux comme un baume » et lui s’obstine, « au milieu de ces jours dévastés », à lire le journal, à « maintenir un
    lien avec le monde ».
    Son frère Alex, qui a repris l’auto-école fondée par leur père (leurs parents sont morts dans un accident de voiture), l’engage pour donner des leçons. Un boulot de dépannage, vu qu’il n’a plus rien publié depuis trois ans.

     

    Sa première élève, Justine, vit mal ses dix-huit ans dans un immeuble où lui-même a vécu ses dix premières années entre un père taxi et une mère « discrète et monochrome ». Son enfance, il la commente ainsi : « Le concret nous cimente, le quotidien nous lie, l’espace nous colle les uns aux autres, et on s’aime d’un amour étrange, inconditionnel, d’une tendresse injustifiable et profonde, qui ne prend pourtant sa source qu’aux lisières. » Après la mort du père de Justine, sa mère a rencontré « Johnny », un ami qui s’est occupé d’elles, et que la fille ne supporte plus.

     

    La voisine avec qui Anderen a fait connaissance, une infirmière comme Sarah, se rapproche bientôt de lui, elle vit seule. Son fils marin lui envoie des cartes postales. De son côté, le frère de Paul lui confie ses craintes : sa femme voit un autre homme. Alex et Naline, minés par « la tristesse d’une vie sans enfants », sont ravis de s’occuper de Manon et Clément de temps à autre. Ce qui les ronge Paul et les petits, c’est de ne pas savoir où est Sarah, ni même si elle est encore vivante. Quand elle a disparu, Paul s’est étonné de ce que personne autour de lui ne soit surpris, son départ paraissant à ses connaissances « un acte inéluctable et prévisible ». Paul Anderen, sans travail fixe, passe pour un caractère « impossible », prêt à se disputer avec tout le monde et buvant trop.

     

    A la nouvelle école, l’institutrice de Manon, qui juge celle-ci hypersensible, déplaît d’emblée à Paul. Le jour où les policiers débarquent un matin pour l’interroger – le petit Thomas de la classe de Clément a disparu et on a vu Anderen parler avec son père en face de l’école quelques jours avant – le voilà désigné à nouveau comme un « paria ». Le père de Thomas a perdu la garde de son enfant, Paul le sait, il a sympathisé avec lui, c’est le déménageur qui leur a débarqué leurs affaires. La
    situation se complique lorsque Justine, son élève, disparaît à son tour. L’inspecteur Combe trouve que cela fait un peu trop de disparitions autour de Paul Anderen,
    même s’il semble le prendre en amitié.

     

    Cela fait beaucoup de situations irrésolues, dans un décor breton qu’Olivier Adam décrit avec force et poésie, quand Paul emmène ses enfants à la plage, quand il s’arrête en haut des falaises pour regarder les assauts de la mer, quand il se love dans le sable pour dormir tout son saoul. Un client au chômage, Bréhel, vit dans un mobil-home – « et pendant une seconde, je l’ai envié, je me suis imaginé là, seul dans
    la nuit presque insulaire, au creux de mon abri fragile, mon ébauche de maison, assailli par les marées, les oiseaux, la pluie, le silence et les bourrasques. »
    Des vents contraires
    est un récit tendu, vibrant, toujours au bord de l’implosion.
    « L’écriture a toujours été pour moi le contraire du retrait de la société, déclare l’auteur dans un entretien. L’écriture est plutôt une ‘sur-conscience’, une ‘sur-présence’ à la société. Je n’ai pas d’autres sujets que la société. Je cherche la justesse pour raconter comment on vit, ici et maintenant. »

     

    Les enfants Anderen ne vont pas bien, Paul devient fou de l’absence inexpliquée de Sarah. Les souvenirs réveillent ses angoisses, dont il se débarrasse en frappant jusqu’à l’épuisement sur un sac de boxe dans le garage ou en les engluant dans l’alcool. Le déménageur finit par le contacter, il le loge chez lui avec son fils même s’il sait que Combe les traque. Et puis il y a ce carnet de moleskine noir retrouvé dans la voiture de sa femme, face à la Seine, où elle notait les hauts et les bas de leur vie commune, à son insu.

    Ce qui sauve Paul dans la tempête, ce sont Manon et Clément – « Anderen », en néerlandais, signifie « les autres » – qu’il protège de son mieux, maladroitement, dans l’urgence. Même si ses décisions d’impulsif ne sont pas toujours prises à bon escient, elles expriment un amour sans faille, une tendresse violente et douce. Quand les questions qu’il se pose trouveront des réponses, pas forcément heureuses, il sera temps de reconstruire et de « rester vivants tous les trois ».

  • Miên et ses maris

    Première incursion dans la littérature vietnamienne avec Terre des oublis, de Duong Thu Huong (2005). Sa défense de la démocratie lui a valu d’être exclue du parti communiste en 1990 et de vivre en résidence surveillée à Hanoi, interdite de publication. Elle envoie alors ses manuscrits à Paris, où elle vit depuis 2006. Le roman s’ouvre, comme la plupart des chapitres, sur une évocation très sensible du paysage : « Une pluie étrange s’abat sur la terre en plein mois de juin. D’un seul élan, l’eau se déverse à torrents du ciel, la vapeur s’élève des rochers grillés par le soleil. L’eau glacée et la vapeur se mêlent en un brouillard poussiéreux, aveuglant. » 

     

    Miên, partie à la récolte du miel avec d’autres femmes, s’est abritée dans une grotte. Quelque chose l’oppresse depuis le matin, elle est inquiète pour son fils que garde la tante Huyên et pour son mari, Hoan, parti en bateau pour ses affaires. Vu le temps, la journée est perdue, de toute manière. Au Hameau de la Montagne, devant sa maison sur la colline, entourée d’orangers et de pamplemoussiers, un attroupement inhabituel : un homme l’appelle, de l’intérieur, dont elle ne reconnaît pas la voix. C’est celle de Bôn, son premier mari, qu’elle n’a plus vu depuis quatorze ans, déclaré mort à la guerre. Deux ans après l’avis de décès, Miên a épousé Hoan, un riche propriétaire terrien, dont elle a eu un enfant, le petit Hanh.

     

    « En ce temps-là, les jeunes soldats se mariaient précipitamment, juste avant de partir au front. Ils consumaient hâtivement leurs amours comme les éphémères se jettent en tournoyant dans les flammes. » Bôn mesure, à voir le luxe dans lequel vit Miên, la différence entre sa bicoque et cette vaste demeure au milieu d’une plantation. Les villageois, toujours curieux de ce qui se passe chez les autres et
    envieux de la réussite d’autrui, se rangent d’emblée du côté de Bôn, qui a souffert pour son pays. Miên avait dix-sept ans quand ils se sont mariés, elle sait où est son devoir, impossible de s'y dérober, mais demande une semaine à Bôn, le temps de revoir Hoan qui va bientôt rentrer.

     

    De jeunes volontaires communistes aident le soldat à retaper sa maison. Bôn a honte de sa sœur avec qui il cohabite, d’une sexualité débridée depuis l’adolescence, deux fois veuve, et qui élève ses enfants dans la crasse. Pour plus d’intimité, il fait construire une cloison de briques pour mieux séparer sa chambre. Sur la route qui le ramène
    chez lui, Hoan, prévenu dès son arrivée au port, pense à ses parents, un instituteur et une commerçante qui l’ont forgé selon leurs valeurs : « intelligent, travailleur, bon, généreux, parfois naïf face à la vie ». Tombé très jeune dans le piège d’un mariage d’intérêt – la gérante d’une boutique l’avait attiré chez elle pour le faire boire et céder aux avances de sa fille enceinte à la recherche d’un mari –, il avait dénoncé leur union truquée dès le jour des noces et divorcé après neuf ans de vie séparée. Puis il avait rencontré Miên, son bonheur. Et voici que la fatalité les sépare. Miên essaie chacune des chemises de soie qu’il lui a rapportées, mais décide de ne rien emporter, à part des vêtements sombres. Pendant leurs derniers jours ensemble, aucune visite. « Et tout le monde traite le jeune couple comme des condamnés à mort attendant l’exécution. » Miên laisse tout ce qu’elle possède de précieux pour leur fils. Hoan l’assure que la maison sera toujours à elle et la force à accepter de l’argent. Mais elle refuse d’emporter les clés.

     

    Chez Bôn, Miên remet de l’ordre, traque la saleté et envoie Bôn chez tante Huyên pour lui demander quelques bols et de la vaisselle correcte. Tandis qu’elle découvre le jardin en friche où plus rien ne pousse, Bôn attend impatiemment la nuit, obsédé par son désir. Quand il se jette sur elle, Miên reste froide comme une statue – « La beauté éblouissante de Miên sera comme un gouffre sans fond où il s’engloutira sans espoir de retour » – et le voilà impuissant, pour la première fois de sa vie, nuit après nuit. Son ami Xa le Borgne devine la situation et prévient Bôn : sa femme ne pourra pas vivre avec lui jusqu’à sa mort uniquement par devoir. Il lui conseille de se faire soigner la bouche – il empeste –, d’aller travailler à la plantation d’Etat, à cent kilomètres de là, et d’y refaire sa vie avec une femme revenue de la guerre. Mais Bôn s’entête. Seul l’argent de Miên leur permet de vivre décemment. Hoan, lui, est retourné en ville dans la maison de son père, que sa sœur avait divisée en deux. Il est doué pour les affaires et fait prospérer le commerce familial. Une fois par semaine, il
    se rend au Hameau de la Montagne pour voir son fils.

     

    Duong Thu Huong éclaire régulièrement le récit des malheurs de Miên et de ses deux maris par le monologue intérieur des trois protagonistes, en italiques. On comprend vite que leur situation est invivable. Liés par un amour invincible, Miên, soumise à l’opinion publique, et Hoan, respectueux du choix de Miên, attendent que Bôn en prenne lui-même conscience. Lui, malgré sa santé chancelante, ne veut pas abandonner son rêve de vivre comme avant. Il prend des remèdes pour la virilité, s’obstine à vouloir mettre sa femme enceinte pour se la lier définitivement. Le temps fera son œuvre, lentement, cruellement, jusqu’à délier un peu les peurs qui les étouffent.

     

    Terre des oublis montre leur vie au présent, saison après saison, et plonge aussi dans les souvenirs de chacun. Les scènes de guerre qui hantent Bôn sont terrifiantes. La romancière les décrit crûment, comme elle le fait pour la violence sexuelle, en
    contraste avec le lyrisme des moments de tendresse ou de fusion avec la nature, dans un style alliant force et finesse. Il vaut le voyage, ce parcours au cœur des souffrances d’un peuple et de ce trio aux prises avec la fatalité, amplifiée par les préjugés.