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Culture - Page 145

  • L'escargot

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    Est-ce que le temps est beau ?
    Se demandait l’escargot
    Car, pour moi, s’il faisait beau
    C’est qu’il ferait vilain temps.
    J’aime qu’il tombe de l’eau,
    Voilà mon tempérament.

     

     

     

    Belles de trottoir (1).jpg

     

    Combien de gens, et sans coquille,
    N’aiment pas que le soleil brille.
    Il est caché ? Il reviendra !
    L’escargot ? On le mangera.

     

    Robert Desnos,
    Chantefables et Chantefleurs
    à chanter sur n’importe quel air

     

     

  • Belles de trottoir

    C’est l’été, promenons-nous dans les bois, les champs, baladons-nous en ville – les « estivales » reprennent à Schaerbeek. Goûtons les plaisirs de la marche avec les yeux bien ouverts sur le paysage, le patrimoine… et regardons où nous mettons les pieds.

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    Durant ce drôle de printemps, j’ai découvert de nouvelles mosaïques dans mon quartier, des « belles de trottoir ». On appelle parfois ainsi les plantes sauvages qui poussent dans les rues, pourquoi ne pas en faire autant avec ces carrés de couleurs qui égaient habitants et passants ?

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    L’artiste Ingrid Schreyers en avait mis devant chez elle, il y a une dizaine d’années, et le succès de « couleur pavé » a été tel que de nombreuses mosaïques sont apparues ici et là. D’autres créateurs ont pris le relais, pour le bonheur des Schaerbeekois. Parfois elles s’écaillent, disons qu’elles se patinent.

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    Le placement de ces mosaïques, dalle ou pavé, est encouragé par la commune, elle prend leur installation en charge. Chacun choisit le motif, les couleurs : il y en a de tous les styles. Le bestiaire des trottoirs ne comporte pas que des chats et des chiens. Certaines mosaïques sont abstraites, d’autres forment un abécédaire, cliquez sur le site de l’Atelier Flamand rose et vous en verrez d’autres.

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    Au son du saxo, je vous souhaite un bel été. Laissez leurs ailes aux libellules, leurs fleurs aux passeroses, parlez aux chats – ils aiment ça – et surtout ne forcez pas l’allure !

  • Trous de mémoire

    modiano,encre sympathique,roman,littérature française,enquête,mémoire,oubli,temps,culture« Mais je ne voulais pas comptabiliser ma vie, je la laissais s’écouler comme l’argent fou qui file entre les doigts. Je ne me méfiais pas. Quand je pensais à l’avenir, je me disais que rien ne serait perdu de tout ce que j’avais vécu. Rien. J’étais trop jeune pour savoir qu’à partir d’un certain moment vous butez sur des trous de mémoire. »

    Patrick Modiano, Encre sympathique

  • Modiano et l'oubli

    Que faut-il pour contrer un blocage vis-à-vis d’un écrivain ? Une autre lecture. Dora Bruder m’a donné envie de retourner dans l’univers de Patrick Modiano. Encre sympathique (2019) s’ouvre sur une épigraphe idéale de Maurice Blanchot : « Qui veut se souvenir doit se confier à l’oubli, à ce risque qu’est l’oubli absolu et à ce beau hasard que devient alors le souvenir. »

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    L’incipit aussi donne bien le ton : « Il y a des blancs dans cette vie, des blancs que l’on devine si l’on ouvre le « dossier » : une simple fiche dans une chemise à la couleur bleu ciel qui a pâli avec le temps. Presque blanc lui aussi, cet ancien bleu ciel. Et le mot « dossier » est écrit au milieu de la chemise. A l’encre noire. » Le seul dossier que le narrateur a conservé de son passage à vingt ans dans « l’agence de Hutte ». Il le rouvre un demi-siècle plus tard.

    Sa première mission avait été d’enquêter dans le voisinage d’une disparue, Noëlle Lefebvre, dont Hutte avait la carte des PTT retrouvée à son domicile, avec photo et adresse, destinée à retirer du courrier au guichet de la poste restante. La concierge ne l’avait plus revue depuis plus d’un mois, à la poste il n’y avait aucun courrier pour elle.

    A la terrasse du café où on la connaissait, l’enquêteur avait été abordé par un homme de son âge à qui le patron avait signalé qu’il cherchait Noëlle. Celui-ci voulant savoir à quel titre, il lui avait montré alors la carte des PTT, prétendant être un ami à qui elle confiait son courrier poste restante. Gérard Mourade, étonné, se demandait si son mari, Roger Behaviour, avec qui Noëlle habitait rue Vaugelas, était au courant de cette correspondance.

    Songeant à cette première rencontre lors d’un après-midi de printemps, le narrateur se rend compte qu’il ne lui en reste que des bribes « après un si grand nombre d’années ». L’agence enquêtait pour le compte d’un client, « Brainos, 194, avenue Victor-Hugo ». C’est ce nom qu’il avait communiqué à Mourade qui voulait savoir où lui l’avait connue, mais le nom ne lui disait rien.

    Tout de même, certains renseignements s’étaient glissés dans leur conversation : Noëlle travaillait chez Lancel, place de l’Opéra ; Roger pratiquait « un peu tous les métiers » ; Mourade suivait des cours de comédien et faisait de la figuration dans des films pour payer ses cours. Sur une impulsion, le narrateur-enquêteur avait improvisé : Noëlle et lui étaient nés dans la même région, « un village aux environs d’Annecy, Haute-Savoie. »

    Encre sympathique comporte de multiples indications de lieux, on n’en attend pas moins de cet arpenteur de Paris. Les nuances des couleurs y sont très précises aussi : « bleu Floride » pour l’encre des lettres envoyées à Noëlle poste restante, « un bleu très clair », « bleu outremer » des yeux  de Hutte se désintéressant bientôt du dossier qu’il lui a confié, le client ne s’étant plus manifesté.

    Dix ans plus tard, en attendant son tour chez le coiffeur, l’enquêteur était tombé sur le nom et une photo de Gérard Mourade dans un annuaire de cinéma. En s’en souvenant, il s’aperçoit qu’il a bien eu « un trou de mémoire » concernant ces dix années, lui qui ne tient ni journal ni agenda. « Désormais, il faut, dans la mesure du possible, que je m’efforce de respecter l’ordre chronologique, sinon je me perdrai dans ces zones où s’enchevêtrent la mémoire et l’oubli. »

    Une employée de la maroquinerie de l’Opéra lui a confié sa déception après le départ sans avertissement de son amie. Il a pris un verre avec un ami d’Annecy plus vu depuis des années et lui a parlé de la disparue. A Rome, il suit une Française dans la galerie « Gaspard de la Nuit ». Modiano plonge à la recherche du temps passé et ramène dans ses filets non seulement des noms et des lieux, mais surtout des rencontres. Son exploration de la mémoire et de ses pièges est envoûtante.

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    https://www.france.tv/france-5/la-grande-librairie/la-grande-librairie-saison-12/1069891-speciale-patrick-modiano.html
    (mise à jour 26/6/2020)

    « A mesure que je tente de mettre à jour ma recherche, j’éprouve une impression très étrange. Il me semble que tout était déjà écrit à l’encre sympathique. » Si le titre désigne d’abord ces traces invisibles sur le papier, l’encre n’apparaissant « que sous l’action de la chaleur ou d’un réactif chimique » (TLF), il dit aussi l’attrait du narrateur pour révéler ses personnages et, en particulier, cette femme dont il suit les traces. Pourquoi cette obsession ? Je me garderai de dévoiler son aboutissement. Dans L’Obs, Jérôme Garcin considère Encre sympathique comme un roman « brumeux et magnétique. »

  • Liège

    nathalie skowronek,max,en apparence,roman,littérature française,belgique,shoah,rescapé,famille,bruxelles,liège,berlin,auschwitz,jawischowitz,marbella,culture« Dans une ancienne version de mon récit, le chapitre précédent débutait comme suit : « Max avait quitté depuis longtemps Liège, jolie ville wallonne célèbre pour sa citadelle, et avec elle, Rayele, ma grand-mère, et sa fille, ma mère. L’histoire ne m’avait pas souvent été racontée mais je compris suffisamment tôt combien ma mère ne s’était jamais remise de la désertion de son père. » Je n’avais alors aucune idée de ce que représentait la citadelle, pas plus que je ne me doutais que j’éprouverais un jour le besoin de m’y rendre, me retrouvant un matin d’hiver, par moins dix degrés et les poumons en feu, à marcher le long de ses murailles. »

    Nathalie Skowronek, Max, en apparence

    Photo : Citadelle de Liège, Belgique (2011, par Romaine, Wikimedia Commons)