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Culture - Page 114

  • Corona di Sonetti, XI

    Seban Du Bellay Portrait.jpgSois présent à la noce, au festin, au tournoi,
    Comme un galant Ronsard ; fuis cette solitude
    Qui peigne et frise un vers et parfume l’envoi ;
    Que ton âme chétive ignore sa quiétude !
    Tu n’entends plus, hélas, fleurir l’esprit du roi,
    Ni fouiller la nature et gagner par l’étude
    L’estime de tes pairs, ni de sa propre loi
    Déposséder ton cœur pour quelque servitude !
    Que de mélancolie en tes sombres Regrets !
    Que de dédain pour Rome et de propos aigrets ;
    Contre Pétrarque, enfin, quelle rude anguillade !
    Mais quel hymne d’amour pour la France et l’Anjou !
    Célébrons le Liré, ce verdoyant bijou,
    D’un rondeau bien tourné, d’une folle ballade.

    Jean-Loup Seban, Les Chapellades du poète courtisan, Van Loock, Bruxelles, 2022.

    Portrait de Du Bellay

     

  • Hommage à Du Bellay

    Des mains amies m’ont mis entre les mains Les Chapellades du poète courtisan de Jean-Loup Seban. Ce recueil de poésie vient de paraître (hors commerce) à l’occasion des cinq cents ans de la naissance de Joachim Du Bellay, grand poète de la Pléiade, ou, comme l’écrit l’auteur, « en l’honneur du Quint-centenaire de la Nativité du sieur du Bellay, Gentil-homme angevin, Poëte excellent ».

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    Jean-Loup Seban se désigne comme un « rimeur d’oire » (d’aujourd’hui). Vous pouvez lire son parcours de professeur, chercheur et pasteur sur le site de l’Association des Écrivains belges. Après la lecture de ses Chapellades (coups de chapeau, selon le glossaire), j’y ajouterai le titre de « versificateur ». « Le poète est un être inspiré, un quasi penseur ; le versificateur est un virtuose. Le poète est un rejeton des dieux ; le versificateur un amant des Muses. » Ainsi le présente Marcel Detiège (à propos d’un autre recueil, La Bouquineuriade) sur le site de l’Association Royale des Écrivains et Artistes de Wallonie-Bruxelles.

    « Souffrez, cher amateur d’ancienne poésie,
    Qu’un vieux bibliophile, ivre de fantaisie,
    Vous présente un hommage au rimeur Du Bellay
    Dont l’œuvre émerveilla tant le clerc que le lai
    De la plus belle cour du monde sublunaire ! »

    Ainsi s’ouvre l’Epistre au lecteur de Seban. Sa « Corona di Sonetti » m’a littéralement éblouie : quinze sonnets dans lesquels nous nous plaisons d’abord à retrouver la personnalité de l’auteur de Défense et Illustration de la langue française, ami de Ronsard, avec qui il fonde la Brigade, puis la Pléiade.

    « Après les brumes, le mauvais temps et les crépuscules du Moyen Age, le soleil se levait enfin sur la France » écrit François Bott au début d’un article du Monde des Livres glissé dans mon XVIe siècle de Lagarde et Michard (Pique-niques Renaissance, sur la nouvelle édition Pléiade de Ronsard et des Œuvres poétiques de Du Bellay en deux tomes dans les Classiques Garnier, 29/10/1983).

    Mais revenons aux sonnets de Jean-Loup Seban : « Ecoutons Du Bellay conseiller l’artisan… » Truffés d’allusions littéraires (le renvoi aux notes en bas de page n’est pas indiqué à l’aide de chiffres mais de signes typographiques : astérisque, croix latine ou double, etc.), ses poèmes nous racontent la vie et l’œuvre du poète qui fut aussi courtisan.

    Tout au plaisir de retrouver le dernier vers d’un sonnet au début du suivant, je découvre peu à peu, et avec ravissement devant tant de virtuosité, en quoi consiste une « couronne de sonnets » : non seulement la chute du poème y devient l’ouverture d’un autre, mais le quinzième sonnet, « Sonetto maestro », sonnet maître, est composé par le premier vers de chacun des quatorze sonnets ! Waouh ! si j’ose écrire. 

    Sous le titre « Apollon malcontent »,  Jean-Loup Seban poursuit même, à partir de ce sonnet maître, par un sonnet à bouts rimés – « rimeur » et « rimailleur », décidément. Puis ce sont des vers en hommage aux poètes de la « Brigade stellifère »« Terza rima » :

    « Aux sept filles d’Atlas, aux sept bardes d’Egypte,
    Gloires d’Alexandrie et du monde lettré,
    Des français se sont joints dans l’éternelle crypte ! »
    (premier tercet)

    Et puis viennent d’autres « poëteries » : sonnets, ballade, stance, iambes… Faut-il rappeler l’origine italienne du sonnet (« sonetto ») et l’admiration des poètes de la Pléiade pour la Renaissance italienne ? Voici « Un amant pétrarquisant » :

    « Noble ami de Manuce, en la Sérénissime,
    Bembo, par ses sonnets dignes d’un troubadour
    Pétrarquisant, cueillit le plus charnel amour
    Auprès de Maria, la veuve aimant la rime ! »

    Sans oublier « Le chat du poëte », qui rappelle la fameuse épitaphe de Du Bellay en mémoire de son chat Belaud.

    « Louons de Belaud la grâce gentille,
    Emmusiquons, cher luth, la cantatille ! »

    Précieux livret paru en mai 2022 chez Claude Van Loock à Bruxelles, Les Chapellades du poète courtisan sont agréablement illustrées d’estampes « du cabinet de l’auteur ». Le papier se caresse de page en page. Deux encarts y sont glissés, un glossaire très utile pour qui ne partage pas tant d’érudition et une reprise du frontispice : un portrait de Du Bellay sous lequel sont cités ces vers de Jacques Moysson : « Tes vers, ta fluidité, /Ta Muse, & ton docte Livre, / Du Bellay te font revivre / D’immortelle éternité. » Merci, Jean-Loup Seban, ami des Muses.

  • Feria

    Dès notre première promenade à Cordoue, en traversant le Guadalquivir sur le pont romain, nous avons croisé, surpris mais ravis, des Andalouses en tenue de fête, de la tête aux pieds. Nous apprendrons plus tard que durant la dernière semaine de mai se déroule chaque année la Feria de Cordoba, une foire en hommage à Notre Dame de la Santé (Nuestra Señora de la Salud).

    Cordoue Feria (1).JPG

    Le soir, en faisant le tour de la Mezquita-Cathédrale, nous avons vu la plus « moderniste » de ces robes spectaculaires sur une élégante qui prenait volontiers la pose et dont le charme faisait visiblement la fierté de son cavalier. (Ma photo est floue, malheureusement.)

    Cordoue Feria (2).JPG

    Dans cette famille photographiée le lendemain le long de la même enceinte, les tenues masculines ne sont pas traditionnelles, mais j’espère que vous apprécierez l’ambiance de cette scène festive prise sur le vif par mon photographe personnel. Festive Andalousie.

  • Vu à Cordoue

    Comme Séville et Grenade, Cordoue a son palais forteresse, mais l’Alcázar de los Reyes Cristianos (l’Alcazar des Rois chrétiens) qui se visite aujourd’hui n’est plus celui des Omeyyades. De style mudéjar, celui-ci a été construit par le roi Alphonse XI au XIVe siècle, « en ne gardant qu'une partie des ruines de l’ancienne forteresse maure » (Wikipedia). Il a servi de tribunal à l’Inquisition. Ses jardins, dont certaines parties étaient en travaux, ont de quoi enchanter les yeux : orangers, bassins et fontaines, statues, fleurs à foison, grandes amphores végétales.

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    Dans une allée d’arbres taillés en colonnade, un monument majestueux rappelle la rencontre entre les rois catholiques Isabel et Fernando avec Christophe Colomb, ils se font face sur un socle imposant. Leur entrevue avait pour but de financer son projet de voyage aux Indes, voyage qui débouchera finalement sur la découverte de l’Amérique.

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    Fleurs de mai (3).jpgFleurs de mai (2).JPGPeut-être pourrez-vous identifier cette plante remarquée non loin de là, sur une ancienne muraille de Cordoue, comme l’indique la plaque « Torreón de la Muralla » (XIVe siècle).
    Ses fleurs sont d’une telle beauté, ne trouvez-vous pas ?
    Un peu plus loin se dresse un monument en hommage au poète et philosophe Aben Hazam (XIe siècle).

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    Cordoue Aben Hazam.jpg

    Nous venions de nous promener dans le charmant quartier de la rue San Basilio, célèbre pour ses fenêtres et ses patios abondamment fleuris. Nous sommes entrés çà et là pour les admirer. Sur certaines façades, on affiche fièrement sa participation au concours annuel. Mes félicitations aux jardiniers-décorateurs qui ont littéralement couvert leurs fenêtres de pélargoniums – dans ces pots bleus, l’effet est magnifique !

    Fleurs de mai patios.jpgFleurs de mai (5).jpg

  • Comme vous voudrez

    Ishiguro Klara.jpg« En atteignant la voiture, je me préparai à reprendre ma place habituelle, mais la mère dit : « Mets-toi devant. Tu verras mieux. »
    Je m’installai donc à côté d’elle et j’observai la même différence qu’entre le milieu du magasin et la vitrine. La route descendait entre les champs, le Soleil était visible au milieu des nuages, et je remarquai les grands arbres regroupés à sept ou huit sur l’horizon alors que l’espace était vide autour d’eux. […]
    « Je te suis reconnaissante, Klara. Grâce à ta compagnie, je me suis sentie moins malheureuse.
    – J’en suis très contente.
    – Peut-être que nous pourrons recommencer de temps en temps. Si Josie est trop malade pour sortir. »
    Je me tus, et elle ajouta : « Tu n’y vois pas d’inconvénient, Klara, n’est-ce pas ? A ce que nous faisions une autre promenade de ce genre ?
    – Non, bien au contraire. Si Josie ne peut pas venir.
    – Tu sais quoi ? Je pense que nous ferions mieux de ne rien dire à Josie. Sur ce que tu as fait là-haut. En l’imitant. Elle pourrait mal le prendre. » Puis, au bout d’un autre moment, elle demanda : « Donc nous sommes d’accord ? Pas un mot à Josie à ce sujet.
    – Comme vous voudrez. »

    Kazuo Ishiguro, Klara et le Soleil