Au programme de l’Estivale du 12 août, la Maison Ajoux et le quartier des Fleurs, de l’autre côté du parc Josaphat par rapport au quartier des Azalées. Un quartier conçu par Octave Houssa au début du XXe siècle « dans la vallée Josaphat », lorsque Schaerbeek se développe et s’urbanise. Je vous l’ai déjà présenté il y a quatre ans. Curieuse de découvrir l’intérieur d’une maison originale, j’ai suivi cette fois les explications de Cécile Dubois, centrées sur l’Art Déco & le Modernisme, deux styles bien représentés ici, parmi d’autres.
La promenade guidée commence à l’église Sainte-Suzanne où les travaux de rénovation ont bien avancé, même si le clocher est encore sous les échafaudages. De l’autre côté de l’église, la cité-jardin et le parc Terdelt (sur l’ancien cimetière de Schaerbeek) avaient une vocation sociale, comme l’école communale. Le quartier des Fleurs était destiné aux bourgeois, qui disposeront d’une école catholique à proximité (Saint Dominique).
Il y a 90 ans que Sainte-Suzanne a été inaugurée, le 11 août 1928. Louise Thiéry, épouse du Général Maes mort en 1915, a fourni le terrain et les fonds pour construire cette église en mémoire de sa fille Suzanne décédée en 1914. L’architecte Jean Combaz, fils de l’affichiste Art nouveau Gisbert Combaz, l’a construite dans un style résolument moderne, teinté d’Art Déco.
Nous y entrons pour découvrir la verrière du chœur remise à jour – elle avait été occultée ainsi que celles du plafond, parce que l’église avait été jugée trop lumineuse. Je vous renvoie au site Iris monument (Inventaire du Patrimoine architectural) pour l’histoire des vitraux. Le contour en vert, jaune et rouge de cette verrière surprend – des tons très différents des grands vitraux latéraux plus tardifs –, il est d’origine ; la partie centrale a été recréée sur base d’archives.
Dans l’avenue des Glycines, nous nous arrêtons devant un immeuble de style paquebot. La guide présente à peu près les mêmes bâtiments que ceux montrés dans mon ancien billet sur le quartier des Fleurs, aussi je préfère noter ici l’une ou l’autre remarque nouvelle, comme la volonté de l’urbaniste, dès le départ, de bâtir dans ce quartier une succession de maisons mitoyennes, par série de cinq, interrompue par un espace de jardin pour maisons trois façades, une sorte de « respiration » visuelle.
Voici d’autres éléments de style paquebot, au 55 de la rue des Mimosas : cette villa Art Déco de 1935 présente un grand relief floral sur son pan coupé à l’angle de l’avenue des Héliotropes. Cécile Dubois la compare avec l’hôtel de maître juste en face (au 44), signé Adrien Blomme, construit à la fin des années trente dans un style plus épuré, plus sobre. C’est un choix esthétique et non économique, comme en témoignent les ferronneries aux signes du zodiaque (idem pour la rampe d’escalier à l’intérieur), l’entrée et sa grande verrière, l’aile droite pour les domestiques (aujourd’hui louée séparément), etc.
Au 2A de l’avenue des Héliotropes, une villa moderniste à trois façades (Jean De Ligne, 1933) répond davantage aux critères d’un modernisme strict : suprématie de la fonction sur la forme, emploi de volumes géométriques élémentaires, toiture plate, fenêtres en bandeau et matériaux modernes comme le béton armé (source IPA). La porte de garage ajoutée nuit à l’harmonie, mais nous admirons ses fins châssis d’origine « à petits-fers » et aussi la ligne de géraniums sur la toiture-terrasse (ci-dessous, à droite).
Beaucoup d’autres arrêts (une maison louée par Magritte et sa dernière maison (photo 2), entre autres) ont été marqués sur ce parcours qui se terminait à l’angle de la rue des Mimosas et de l’avenue des Jacinthes. Nous y sommes entrés dans une maison moderniste de 1935, due à René Ajoux, l’architecte de l’immeuble « Cascade » près des étangs d’Ixelles. A l’extérieur comme à l’intérieur, elle emboîte les arrondis.
Un chat et un jeune ginkgo biloba pour nous accueillir dans le jardin, voilà qui me plaît. Il faut aimer l’architecture pour bien conserver une habitation de ce genre ; de nombreux prescrits urbanistiques protègent ce quartier classé, et il n’est pas facile, par exemple, de placer du double vitrage sur des châssis à guillotine.
Autre photo de la maison Ajoux sur Iris Monument
Dès le passage de la porte (arc en plein cintre), nous admirons les courbes, du sol (céramique, parquet en acajou) au plafond qui intègre un éclairage indirect circulaire. Un escalier tournant mène à l’étage. Les nouveaux propriétaires de la maison ont à cœur de respecter son style, ils ont très bien mis ses formes en valeur : canapé arrondi, tables rondes design, luminaires à boules… Un intérieur chaleureux.
Source : https://www.banad.brussels/fr/activites/maison-ajoux
C’est vraiment sympathique d’ouvrir ainsi sa porte à un groupe d’amateurs du patrimoine, comme lors du dernier BANAD festival, un des plaisirs qu’offrent les Estivales de Schaerbeek, en attendant les Journées du Patrimoine.