Le thème de l’estivale du 19 juillet portait un titre alléchant : « Schaerbeek en quinze tableaux ». La guide du jour avait préparé un parcours à partir de l’église royale Sainte-Marie pour nous montrer la commune à travers les très nombreuses reproductions de son classeur, bien plus de quinze, une façon originale d’illustrer l’histoire et les paysages de la Cité des Anes.
Eugène Verboeckhoven (1798-1881), Les ânes schaerbeekois
"On lui doit notamment les deux belles têtes d’ânes
qui ornent le cabinet du Bourgmestre." (source)
Jusqu’à la Révolution belge en 1830, Bruxelles vivait à l’intérieur de ses remparts. Ceux-ci ont été détruits pour donner accès à la première couronne, aérée et verdoyante. Sur le parvis où nous nous trouvions, ce n’étaient alors que champs, marécages, prairies, comme on peut le voir sur ce Panorama de Bruxelles vu de Schaerbeek par Frans Binjé.
Frans Binjé (1835-1900), Panorama de Bruxelles vu de Schaerbeek
Autour de la ville, le prix des terrains était plus abordable pour des populations aux revenus divers, d’où l’installation de nombreux artistes à Schaerbeek où ils pouvaient avoir une maison avec un atelier ; de nombreuses rues schaerbeekoises portent le nom d’un peintre ou d’un sculpteur, à leur mémoire. Le repos d’Alfred Verwée illustre le temps où on y était véritablement à la campagne, en zone agricole.
Alfred Verwée (1838-1895), Le repos
Ces artistes trouvaient facilement des acheteurs dans la bourgeoisie qui se faisait construire des maisons neuves à Schaerbeek. Dès le XIXe siècle, le conseil communal désire « mettre la beauté à la portée du peuple » et acquérir des œuvres d’artistes résidant dans la commune ; elles seront présentées dans un musée communal, fermé dans les années 1920. Mais la collection communale continue à s’étoffer et compte environ 1700 œuvres dont certaines sont visibles en ligne sur le site 1030.
Thomas Daems, Brussels Vibes, 2011
in F. De Roose, Bruxelles vue par les peintres, 2
Voici l’église royale Sainte-Marie sur une œuvre graphique de Thomas Daems, Brussels Vibes (2011), mixant photographie, pochoir et peinture : « des couleurs douces pour traduire l’ambiance de fin de soirée lors de la prise de vue » (Fabien De Roose, Bruxelles vue par les peintres 2). Cette église de style éclectique et de plan octogonal est un jalon important sur le « tracé royal » entre le Palais royal et le château de Laeken, résidence royale.
Liévin Herremans (1859-1931), Kermesse Saint-Corneille, le soir, place de la Reine
in F. De Roose, Bruxelles vue par les peintres, 2
La place de la Reine qui la jouxte, ainsi nommée en hommage à la première reine des Belges, Louise-Marie d’Orléans, épouse de Léopold Ier, couvre une ancienne plaine sablonneuse peinte par Camille Wollès. La guide montre aussi une belle peinture de Liévin Herremans, Kermesse Saint-Corneille, le soir, place de la Reine : au Moyen Age, un pèlerinage pour les enfants handicapés partait de cette place vers Diegem, c’était un jour de liesse populaire.
Agnès Bogaert (1955 -), La Maison des Arts, 1993
in F. De Roose, Bruxelles vue par les peintres, 2
Nous prenons la chaussée de Haecht (c’est plus difficile d’y respecter les distances, nous sommes les seuls à porter un masque et cela nous vaut quelques quolibets) jusqu’à la Maison des arts, dont Agnès Bogaert a joliment peint l’entrée avec trois demoiselles en robes longues. La rue de la Constitution nous fait longer les Halles de Schaerbeek, ancien marché couvert devenu lieu culturel (premier festival Couleur Café en 1990), jusqu’à la rue Royale Sainte-Marie (où j’ai pris la photo ci-dessous).
Les Halles de Schaerbeek et l'arrière de l'église royale Sainte-Marie
Sur la place Lehon, la guide nous présente une maison-atelier classée, mais l’arrière de l’église Saint-Servais, magnifiquement restaurée, attire mon regard : ses pierres noircies ont retrouvé leur clarté lumineuse – nous verrons plus tard sa façade, en haut de l’avenue Louis Bertrand. Puis nouvel arrêt devant l’Hôtel communal, place Colignon, avec quelques peintures historiques. Paul Leduc a peint les dégâts de l’incendie qui l’a ravagé en 1911.
Le chevet de l'église Saint-Servais, vu de la place Lehon
Je vous montre encore ce magnifique sgraffite de Privat Livemont en haut du 17, rue Vogler, qui fut la dernière maison et l’atelier du peintre Alfred Ruytinx, son neveu et élève. « Malgré une restauration en 1991, il est à nouveau en partie détérioré. Le sgraffite présente une allégorie de la peinture : une femme peignant des marronniers, accompagnée d’un enfant. » (Inventaire du patrimoine architectural) D’autres artistes ont occupé ensuite ces « ateliers Vogler ». Le vitrail d’imposte attire l’attention avec ses bateaux et moulins à vent évoquant la Hollande.
Sgraffite de Privat Livemont au 17, rue Vogler
De là, nous sommes descendus jusqu’à la rue de Jérusalem où la guide nous a fait voir une vue panoramique avant de nous emmener vers le Brusilia, bâti sur l’ancien Palais des Sports de Schaerbeek. Notre balade assez longue s’est terminée dans l’avenue Louis Bertrand, près du vase en bronze de Godefroid Devreese. Nous nous tenions à l’emplacement du vieux Schaerbeek, un village avec quelques maisons autour d’une église qui a été détruite ; seule la cure a subsisté, un peu en retrait de cette belle avenue que Betty Scutenaire a immortalisée avec ses arbres et ses parterres fleuris.
Vue partielle de l'avenue Louis Bertrand, dominée par l'église Saint-Servais
Ce parcours m’a paru plus intéressant pour les non Schaerbeekois que pour les habitués des estivales, à qui il n’offre pas de vraie découverte. De plus, le micro sans oreillettes ne permettait pas toujours de bien comprendre les commentaires de la guide ni les noms des artistes, ce qui m’a laissée un peu sur ma faim. En marchant d’un bon pas d’un endroit à l’autre, tout le monde semblait néanmoins content de se balader et d’observer plus attentivement que d’habitude ce patrimoine architectural et pictural.
Commentaires
j'aime ce coin, je m'y suis déjà beaucoup beaucoup promenée, le nez en l'air mais sans guide et sans rien savoir de toutes ces belles choses du passé :-)
merci Tania!
(y passer un jour de marché est tout à fait dépaysant :-))
J'espère qu'un jour, tu pourras participer à une de ces promenades. Si tu veux, l'an prochain, je te préviens de la date d'ouverture des inscriptions. Bonne journée, Adrienne.
Les 2 ânes dans le genre réaliste, sont incroyables. et j'aime le Sgraffite , l'art 1900 dans l'architecture.
Tu nous convies à une belle visite virtuelle!
Des ânes vraiment emblématiques de la commune de Schaerbeek - et aussi les deux ânes bien vivants du parc Josaphat, Camille et Gribouille. Merci, Anne, d'apprécier cette balade.
Les Halles son absolument magnifiques! Et ce tableau de la kermesse qui rend parfaitement l’ambiance festive.
De la campagne à la ville...tu peux imaginer qu'il y avait des vaches là où tu habites...c'est fou!
Bonne journée Tania
Oui, c'est fou comme les villes se sont étendues... Heureusement Bruxelles est encore une ville à taille humaine.
C'est toujours étonnant de voir des rétrospectives, en temps accéléré de l'évolution des villes au cours des siècles !
L'église St Servais, un peu trapue et blanchie est toute belle !
Merci Tania pour cette visite guidée si intéressante !
Si tu as cliqué sur le lien vers un ancien billet, Claudie, tu auras vu que l'église Saint-Servais revient de loin. Je ne la connaissais que noire et la lumière retrouvée de ses pierres l'a métamorphosée à mes yeux.
Bonsoir Tania, un grand merci pour ton magnifique billet. Tout est beau, j'apprécie infiniment. Les deux ânes sont de toute beauté ainsi que toutes les autres toiles.
Belle soirée, très chaude et demain encore plus chaud!
Bisous ♥
C'est toujours avec plaisir, Denise, que je partage un peu de ce patrimoine qui nous entoure. Ces deux belles têtes d'ânes ont figuré longtemps sur le pignon d'un immeuble à l'entrée de Schaerbeek en venant de Laeken, avec d'autres peintures. Le temps les a décolorées et un immeuble contemporain assez joli a pris la place. Ciel d'azur et on annonce plus de 30°, ce sera la première fois à Bruxelles cet été. Belle journée !
C'est un peu pareil avec toutes les grandes villes ; il faut faire travailler son imagination pour voir la campagne et des vaches là où il y a des noeuds routiers ou des constructions les unes sur les autres .. il y a toutes sortes de styles dans ce que tu nous montres aujourd'hui.
Oui, ces promenades guidées permettent de repérer les traces d'autres époques et les peintures reflétaient les courants qui se sont succédé, du réalisme à l'art contemporain.
C'est tout mon quartier "de quand j’étais petite" que tu décris là! Merci pour cette belle promenade!
Bonjour, Coumarine. J'avais oublié que tu étais d'origine schaerbeekoise. Pensées amicales pour toi & ta famille.