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amitié - Page 6

  • Giacomo, Haut-Adige

    De Mario Rigoni Stern (cité par Paolo Cognetti dans Le garçon sauvage), Les saisons de Giacomo (traduit de l’italien par Claude Ambroise et Sabina Zanon dal Bo) figuraient depuis un bon moment dans ma liste de livres à lire et, cette fois, il était disponible à la bibliothèque : une bonne occasion de retourner en Italie, me suis-je dit, et de retrouver la montagne.

    Rigoni Stern Pavillons poche.jpg

    Mario Rigoni Stern (1921-2008), dans les quatre pages du premier chapitre, décrit un hameau où il fait « un saut » en plein hiver et, dans le silence de l’abandon, entre dans une maison : « Maintenant, c’est-à-dire depuis une trentaine d’années, les sept portes du hameau ne s’ouvrent que quand les gens de la ville montent de la plaine pour les vacances. » C’est un saut dans le passé : « Ce qui était vivant dans cette maison est très loin, elle est vidée de tout et remplie de silence. Ici était né et avait vécu jusqu’à vingt ans mon copain d’école. »

    Dans cette région de l’empire austro-hongrois rattachée à l’Italie en 1919, le Haut-Adige, le village avait été reconstruit après la Grande Guerre, les cloches réinstallées en haut du clocher en 1922 – « Giacomo, Nino et Mario étaient là eux aussi, qui tiraient de toutes leurs forces, serrant les dents et serrant la corde. » En 1928, une année record de chaleur et de sécheresse, l’incendie spectaculaire du Dubiello avait détruit les plants d’épicéas destinés au reboisement, la récolte de pommes de terre avait été misérable et il n’y avait pas de travail pour les hommes.

    Malgré l’interdiction, ceux qui n’avaient pas pu partir pour l’étranger et qui avaient faim, allaient dans la montagne « récupérer les obus, les cartouches, le plomb, les barbelés » pour les vendre et avoir de quoi nourrir leur famille. Après l’annonce de la réconciliation entre le pape et le Duce, les enfants ont écrit une dictée sur les victoires de Mussolini « contre les factieux, contre la malaria, contre les blasphémateurs, contre la dévaluation et même contre les mouches. » Mais pour la grand-mère de Giacomo et d’Olga, sa soeur, ce n’est pas le Duce « qui fait bouillir la marmite ».

    De saison en saison, d’année en année, Mario Rigoni Stern raconte la vie de Giacomo à l’école, à la maison, avec ses amis, au travail. Lui aussi devient un « récupérateur ». Même s’il ne sait pas grand-chose des batailles qui ont laissé dans la montagne tant de douilles, billes de plomb, morceaux de cuivre et de métal, il sait quoi ramasser pour se faire un peu d’argent de poche ou contribuer aux frais du ménage.

    En 1929, Giacomo surprend sa grand-mère en voulant devenir « balilla » comme ses copains (l’organisation de jeunesse fasciste) – il espère ainsi recevoir un uniforme, des skis et des gants, un bonnet de laine et des grosses chaussettes… Son père a émigré pour travailler comme mineur en France, en 1927, et leur envoie des mandats pour payer leurs dettes à l’épicerie.

    Devenue une jolie fille, sa soeur Olga a un amoureux, Matteo, qui vient régulièrement leur rendre visite. De son côté, Giacomo cherche la compagnie d’Irene et ensemble ils vont couper un petit sapin pour Noël, même si à l’école on leur a dit que c’était « une mode étrangère » et qu’il valait mieux faire une crèche. Quand son père rentre par surprise, il est content de voir un arbre de Noël entre la fenêtre et l’âtre. Après trois ans de mine, il leur a ramené à tous quelques chose de France et un petit capital pour passer l’hiver.

    Matteo est invité par un oncle qui a émigré en Australie en 1903 à le rejoindre là-bas avec Olga, il leur payera le voyage. Alors on prépare des malles, on publie les bans, Olga et Matteo se marient avant de partir. Dès le printemps, Giacomo rejoint ses copains au bois, pour ramasser des morilles, chasser des nids de bourdons. Une fois le certificat d’études obtenu, l’école s’arrête pour lui comme pour la plupart des enfants. Le cours complémentaire coûte trop cher et le garçon est utile à la maison et aux champs. Il aide son père à récolter le foin.

    Régulièrement, parmi les « récupérateurs », il y a des victimes, mortes ou blessées par une explosion. Parfois ils trouvent aussi des restes humains, des objets personnels, comme la montre que le père de Giacomo a trouvée près d’un soldat hongrois. Puis la réévaluation de la lire fait baisser le prix des métaux et la Milice les dénonce. Mais la préparation d’un grand camp Mussolini pour la fête fasciste donne du travail et de quoi manger ; le père de Giacomo, surpris à distribuer des restes aux enfants, est accusé d’entretenir des vauriens, « un déshonneur pour l’Italie ! » Il lui faudra ruser pour continuer.

    Puis commencent les travaux pour un ossuaire monumental sur la colline des Laiten, en face du hameau, pour tous les héros tombés pour la patrie. Giacomo suit comme les autres « avant-gardistes » l’instruction fasciste et la gymnastique, tous les samedis. En décembre, ils reçoivent des chaussures, un uniforme et des skis : Giacomo est un excellent skieur, et Irene l’admire.

    Mario Rigoni Stern décrit la vie du hameau dans tous ses détails concrets et pratiques, les efforts des uns et des autres pour survivre. Quand la construction de l’ossuaire reprend au printemps, ce sont les femmes qui sèment et cultivent, pendant que les hommes reprennent la « récupération ». Des tracts communistes circulent en secret dans certaines mains. Les paysans s’opposent au Syndicat fasciste qui veut leur imposer la race svitt au lieu des vaches de la race tarine qu’ils élèvent traditionnellement. Il y aura des arrestations, mais quand les femmes manifesteront à leur tour, il faudra bien relâcher les manifestants et les laisser faire comme ils veulent.

    La vie est si dure que le père de Giacomo se décide à émigrer de nouveau, mais c’est compliqué sans les bons papiers. Et puis une nouvelle guerre se prépare, avec la mobilisation ; Giacomo n’y échappera pas. « Mario Rigoni Stern, qui a connu la guerre et qui a été fait prisonnier par les Allemands en 1943, ne porte aucun jugement, décrivant avec sobriété les siens, ceux de son village vénète. » (Isabelle Fiemeyer dans L’Express) Ami de Primo Levi, qui l’admirait, il décrit surtout dans Les saisons de Giacomo les difficultés de la vie quotidienne durant l’entre-deux-guerres, tout en rendant hommage à sa belle région meurtrie par les combats.

  • Du pouvoir

    meg wolitzer,les intéressants,roman,littérature américaine,roman d'apprentissage,new york,études,art,créativité,amour,amitié,culture« Ethan ? Il se moquait du pouvoir. Il portait des T-shirts Félix le chat et Gepetto et il continuait à dessiner dans des carnets à spirale. Posséder du pouvoir, c’était différent. Aucun d’eux n’était censé avoir du pouvoir, ce n’était pas une chose à laquelle ils avaient aspiré. Ils n’avaient pas aspiré à gagner de l’argent non plus, mais dans ce domaine, Jules et Dennis appartenaient désormais à une minorité. Lentement, le mouvement qui s’éloignait de la créativité et se rapprochait de la création d’argent devenait de plus en plus visible. »

    Meg Wolitzer, Les Intéressants

  • Les Intéressants

    Meg Wolitzer offre avec Les Intéressants (2013, traduit de l’anglais (américain) par Jean Esch, 2015) un gros roman sur six protagonistes qui se surnomment ainsi, « les Intéressants », lors d’un camp d’été à Spirit-in-the-Woods quand ils ont quinze, seize ans. Rien ne prédestinait Julie Jacobson à ce genre d’endroit où l’on mise sur la créativité – elle y est grâce à une bourse et à sa prof d’anglais qui la voyait se morfondre depuis la mort de son père au début de l’année. Elle n’en revient pas quand Ash Wolf, un soir, dans leur tipi de filles, l’invite à l’accompagner pour rejoindre « les autres ». C’est Julie qui raconte leur histoire.

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    En cet été 1974 où la publication des Hommes du Président va bientôt amener Nixon à démissionner, les autres se connaissaient déjà. Julie se sent d’abord extérieure au petit groupe quand Ash l’emmène dans le tipi de garçons où se trouvent Goodman Wolf, son grand frère, Ethan Figman, Cathy Kiplinger, et Jonah Bay, le fils de la chanteuse folk Susannah Bay, des adolescents « tous originaires de New York », le « noyau chaud » du camp qui rassemble des jeunes aux dons artistiques.

    Goodman, plus d’un mètre quatre-vingts, veut devenir architecte mais paraît assez indolent. Si Julie le trouve moins spectaculairement beau que sa sœur, moins soigné, il n’en est pas moins séduisant. Ash et lui fréquentent ce camp depuis leurs douze ans et y jouent un rôle essentiel. Goodman adore Günther Grass, Ash préfère Anaïs Nin. Julie, une fille dégingandée à la peau claire, est mortifiée de la « tête de caniche et de fleur de pissenlit » que lui font ses cheveux permanentés, une idée de sa mère. Ethan n’a pas non plus de physique avenant ; trapu, de l’eczéma sur les bras, il garde toujours sa chemise et, à la piscine, passe son temps à interroger Old Mo Templeton qui a travaillé avec Walt Disney.

    Ethan propose un joint à Julie et s’intéresse à elle. Les parents Figman se sont séparés, rien à voir avec les brillants parents Wolf, un banquier d’affaires et son épouse qui s’intéresse à l’art. Les premières fois que Julie prend la parole ce soir-là, ses remarques décalées plaisent à la petite bande : la banlieusarde insignifiante récolte des hurlements approbateurs. C’est Ash, qui deviendra sa meilleure amie pour la vie, qui la rebaptise alors : « Bravo, Jules ! »

    Une animatrice va bientôt les surprendre, les filles doivent retourner dans leur tipi. Ethan Figman les suit et propose à Jules de lui montrer « le contenu de son cerveau » : dans l’atelier d’animation, ses dessins punaisés partout révèlent un garçon « anormalement doué ». Quand ses parents se disputaient, il imaginait son personnage Wally Figman entrer en rapetissant dans une boîte à chaussures sous son lit, un monde parallèle, la planète Figland ; il en a même fait un dessin animé aux dialogues « à la fois brillants et idiots ». Jules est stupéfaite de tant d’originalité. Ethan, ravi de sa réaction, cherche à l’embrasser, mais elle le repousse. Déçu, le garçon ne se décourage pas : « Passe plus de temps avec moi et on verra ce que ça donne. »

    C’est le premier de ces « moments d’étrangeté », comme dit Ash, quand un grand moment survient qui ne ressemble pas du tout à ce qu’on croyait. Jules est heureuse de parler avec cette fille qui la comprend – pas comme sa sœur – et Ash apprécie que cette fille drôle et gauche, qui voudrait devenir une actrice comique, soit si enthousiaste. « On devrait toutes essayer de faire ce qu’on a envie de faire dans la vie » dit Jules, qui se sent « quelque part sur un axe entre Ethan et Ash, un peu écœurante, un peu désirable, pas encore réclamée par un côté ou l’autre. »

    Nous voici à la page 38 de ce roman de 594 pages qui plaira certainement aux étudiants des années 1970 comme aux autres : roman d’apprentissage, amitiés pour la vie, amours compliquées, jeunes qui cherchent leur voie dans un monde qui ne ressemble pas forcément à ce camp d’été où tout s’offrait à eux librement. Vont-ils réussir à vivre à la hauteur de leurs rêves ? Ethan le surdoué, probablement ; pour les autres, ce sera moins facile.

    Meg Wolitzer s’attache à tous ses personnages, qu’elle suit sur une quarantaine d’années. Née en 1959, elle a leur âge. Raphaëlle Leyris a écrit dans Le Monde que « le fait qu’elle soit une écrivaine décortiquant la vie intérieure de ses personnages, et les liens entre eux – le mariage, l’amitié, la famille –, ne lui permet pas d’obtenir un statut littéraire à la hauteur de son talent, en dépit du succès des Intéressants, qu’une couverture éclatante de couleurs contribua à faire passer pour une sympathique saga à lire à la plage, quand il était bien plus que cela. »

    Comment rester fidèle à soi-même, intéressant ou pas ? La romancière américaine analyse finement ce qui se passe en soi et avec les autres quand on cherche à devenir la personne qu’on voudrait être. Bien des choses diffèrent entre ceux qui vivent dans les beaux quartiers de New York et ceux qui habitent un petit appartement sans ascenseur, mais chacun a ses problèmes et doit se débrouiller pour aller de l’avant, dans le domaine de l’art ou dans un autre. 

  • Paysage

    montald,constant,peintre belge,exposition,1982,la médiatine,verhaeren,amitié,femmes artistes,symbolisme,eden,nature,beauté,paysage,harmonie,culture,baudelaire,poésie,littérature française[...] Alors je rêverai des horizons bleuâtres,
    Des jardins, des jets d’eau pleurant dans les albâtres,
    Des baisers, des oiseaux chantant soir et matin,
    Et tout ce que l’Idylle a de plus enfantin.
    L’Emeute, tempêtant vainement à ma vitre,
    Ne fera pas lever mon front de mon pupitre ;
    Car je serai plongé dans cette volupté
    D’évoquer le Printemps avec ma volonté,
    De tirer un soleil de mon cœur et de faire
    De mes pensers brûlants une tiède atmosphère.

    Charles Baudelaire, Paysage (Tableaux parisiens)

    Constant Montald, Bord de rivière, 1913

  • Montald l'idéaliste

    Quand vous entrez aux Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (MRBAB), vous ne pouvez pas manquer d’admirer, dans l’immense forum, une peinture monumentale de Constant Montald. Il me semble qu’il s’agit de La Fontaine de l'inspiration, dont un détail figure sur la page d’accueil des MRBAB ou bien de La barque de l'Idéal qui figure sur cette photo des Journées du Patrimoine. Les MRBAB viennent de rouvrir leurs portes. On peut à nouveau visiter, dans un premier temps, les salles du Musée d’art ancien devenu « Old masters museum ».

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    Constant Montald, La fontaine de l'inspiration, 1907, huile sur toile,
    535 x 525 (dimensions d'origine) ; 393 x 490 (sans châssis), Bruxelles, MRBAB

    Une exposition Constant Montald (1862-1944) a été présentée en 1982 à la Médiatine du Château Malou (Woluwe-Saint-Lambert) : « Une vie, une œuvre, une amitié – Emile Verhaeren ». Montald et Verhaeren étaient de grands amis, deux couples amis même. En 1909, Verhaeren lui écrit : « Vous nous manquez. Non seulement pour les parties de cartes, mais pour le coude à coude journalier. Vous êtes les seuls êtres au monde avec lesquels nous pourrions vivre. Nous vous aimons bien. »

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    Catalogue de 1982 (illustré en N/B) : détail de Vasque aux ramiers, 1927

    Quel plaisir de rouvrir ce petit catalogue qui me rappelle beaucoup de choses oubliées sur ce peintre qui préférait « le sentiment des choses à leur réalité » (Grégoire Le Roy) et a exposé ses œuvres, à la fin du XIXe siècle, au Salon d’art idéaliste, dans la voie de l’ésotérique Jean Delville. Ces adeptes de « la Beauté spirituelle, la Beauté plastique, la Beauté technique » avaient pour maîtres « Böcklin, Burne-Jones, Puvis de Chavannes entre autres ».

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    Constant Montald, Nymphes dansant, vers 1898, huile liant mat et détrempe sur toile,
    95,5 x 135,5 cm, Bruxelles, MRBAB

    Francine-Claire Legrand, à qui j’emprunte ces citations, distingue ainsi le symbolisme et l’idéalisme : le symbole est mystère, on le voit bien dans l’œuvre de Fernand Khnopff ; l’allégorie « est claire puisqu’elle doit être édifiante ». Montald recherche « le grand art », « serein et solennel » en peignant des œuvres à la fois décoratives et monumentales. Il veut représenter le Bonheur, l’Eden hors de ce monde, avec des couleurs fictives, « des ors intemporels », des nus parfois drapés – « un passeport pour des départs vers l’imaginaire ». Mais il a peint aussi des paysans, des scènes villageoises.

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    Constant Montald, Affiche pour l'Exposition triennale des Beaux-Arts de Gand, 1895

    Fils d’un cordonnier gantois d’origine italienne (Montaldo), Constant Montald a d’abord travaillé comme peintre en bâtiment et suivi des cours du soir à l’Académie de Gand (peinture décorative). Il y obtient le premier prix à l’issue de ses études en 1885, puis le prix de Rome en 1886. Après son mariage en 1892, il expose de plus en plus souvent à Bruxelles où il s’installe en 1897.

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    Constant Montald, Portrait d'Emile Verhaeren, 1911

    Jean-Baptiste Baronian raconte « les paradoxes d’une amitié ». Constant Montald a rencontré Verhaeren en 1898 et peint de nombreux portraits du grand homme de lettres au tournant du XIXe et du XXe siècle. Leur amitié s’est trouvée renforcée par les liens entre Marthe Verhaeren-Massin et Gabrielle Montald-Canivet, femmes d’artistes et femmes artistes (lire dans Koregos la belle étude de Barbara Caspers). Verhaeren, symboliste et passionné, est beaucoup plus concret que Montald, tourné vers la mythologie gréco-romaine, inspiré par la Renaissance et le préraphaélisme, chantre de l’harmonie. Deux esthétiques différentes, mais « c’est un peu une seule éthique que poursuivent les deux hommes », écrit Baronian de ces deux créateurs séduits par le socialisme et l’espoir dans le progrès.

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    Constant Montald dans son jardin, photo 1930

    Montald était « un personnage » : sa prestance, sa distinction, son allure vestimentaire, sa joie de vivre ont fait de lui un professeur très aimé à l’Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles, où il fut nommé en 1897. Parmi ses élèves, il y a eu Marie Howet, Paul Delvaux, Jean-Jacques Gailliard, Anto Carte… Il les encourageait à l’audace, à la persévérance, à la liberté dans la création même s’ils s’écartaient de ses propres préférences.

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    Constant Montald, Jardin sous la neige, 1916, Peinture à la colle sur carton,
    69,5 x 81 cm, Bruxelles, MRBAB

    Dans sa technique, quelques constantes : une peinture mate – les fresques italiennes de la Renaissance « firent de lui un adepte inconditionnel des grandes peintures murales » – à la colle, des toiles de gros coton américain, « rude et solide », du carton souvent, bien qu’il soit peu résistant. Pour la peinture à l’huile, il préconise trois couleurs : « le rouge anglais, l’ocre jaune, parfois brun ou rouge, et l’outremer, irremplaçable » (Denise Thiel-Hennaux), sans oublier l’emploi de « l’or lumière » où il était maître.

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    Constant Montald, L'heure dorée, 1927,
    Gouache sur papier marouflé sur panneau

    Je n’ai jamais visité la Villa Montald que le peintre s’était fait construire à Woluwe-Saint-Lambert et dont le jardin, soigné par Gabrielle, admiré de tous, a reçu de nombreuses personnalités diverses et beaucoup d’artistes : Verhaeren bien sûr (lui recevait les Montald au Caillou-qui-bique où Montald a fait tant de portraits du poète), le sculpteur Charles Van der Stappen, le graveur Charles Bernier, George Minne, Stefan Zweig, entre autres. Montald, qui jouait de plusieurs instruments (sa femme du piano), organisait chaque mois des séances musicales.


    Une vidéo de cinq minutes sur Constant Montald (Inès Vigo, YouTube, 2017, ci-dessus) vous permettra de découvrir en musique l’univers de ce peintre des jardins paradisiaques, des arbres et des fleurs, des éphèbes et des nymphes, et peut-être de tomber sous le charme.