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2017 - Page 2

  • L'avenue Rogier

    C’est dans une des avenues les plus connues de Schaerbeek que le rendez-vous de Patris était donné le 9 juillet (Estivales 2017). Yves Jacqmin attendait les amateurs du patrimoine et des promenades guidées sur le terre-plein de la place de la Patrie. (Pour information, quasi toutes les dates affichent complet et il ne reste plus qu’à espérer des désistements pour ceux qui sont sur liste d’attente.)

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    Place de la Patrie, Schaerbeek © SPRB-DMS

    Vers 1860, la commune a décidé de prolonger la rue Rogier qui reliait déjà la chaussée de Haecht au quartier Nord : l’avenue Rogier s’est ouverte en plusieurs phases, jusqu’à la place Meiser. Charles Rogier (1800-1885), homme politique plusieurs fois ministre de l’Etat belge, a de son vivant vu son nom donné à une rue puis une avenue, et aussi à la place Rogier. Enterré au cimetière de Saint-Josse ten Noode, il a sa statue place de la Liberté.

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    Au milieu, un entablement blanc typique de l'Art Déco en haut d'une façade, entre deux colonnes (place de la Patrie)

    La visite commence donc par le tronçon le plus récent : la place de la Patrie, prévue à l’origine pour une église finalement bâtie plus loin, est devenue un square ; en venant de la place Meiser, c’est la première étape sur le tracé de l’avenue Rogier, avant la place des Bienfaiteurs. Elle a été construite dans les années 1920, quand s’épanouissait l’Art Déco. La bourgeoisie privilégiait encore des styles plus anciens, comme en atteste une maison à proximité (ci-dessous), avec ses œils-de-bœuf sous le toit et un joli fer forgé au balcon central.

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    Vue partielle de l'avenue Chazal

    Nous traversons l’avenue Chazal qui monte vers la place Dailly, ce qui rappelle à notre guide l’hiver 60 qui rendait « fous » ses élèves quand la neige rendait l’ascension difficile pour le bus et occasionnait des retards. Devant une maison de Joseph Diongre, l’architecte de Flagey, qui a gardé ses sgraffites et quelques éléments art nouveau, pas ses châssis malheureusement, je me dis que cette façade comme beaucoup d’autres dans l’avenue Rogier mériterait d’être restaurée.

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    A droite, maison moderniste (avenue Rogier)

    De l’autre côté de cette large avenue large plantée d’arbres, où le tram circule au milieu, nous observons une maison moderniste de l’architecte Léon Guianotte (au 280, ci-dessus) à côté d’une façade de style beaux-arts. Du côté impair, un autre témoignage du modernisme présente un parement noir et blanc en carreaux de céramique (au 299). Du côté pair, le numéro 250 présente une belle loggia en bois ; la pierre bleue du rez-de-chaussée encadre une entrée inspirée par l’art nouveau dans sa phase stylisée.

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    Maison de style Beaux-Arts (la plus haute), avenue Rogier

    La diversité des styles architecturaux frappe comme presque partout dans Bruxelles. Ici un pignon en briques, vaguement médiéval, là de grandes baies vitrées – les maisons de style beaux-arts, inspirées du XVIIIe français, sont très bien éclairées. Le petit bois des fenêtres, dont les moulures jouaient avec la lumière, a souvent été remplacé par du PVC inesthétique, mais il suit tout de même les lignes originales.

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    271, avenue Rogier

    Plus loin, une confrontation radicale entre tradition et modernité : le mur de verre de la façade, au 271, inédit en 1968 pour une maison particulière, tranche avec les maisons voisines – les vitres ont déjà été modifiées depuis. A l’angle de la rue Victor Bourgeois, le propriétaire du 263 a réalisé en 1930 une extension moderne avec garage très différente de sa maison : châssis arrondis, crépi blanc... Aujourd’hui, les murs sont jaunes et portent depuis la fin du mois dernier une fresque sympathique signée Nean, dans le cadre du projet d’art urbain Mixity.

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    urbana_project Mixity Wall #3 / Nean - Bruxelles « ville intergénérationnelle » (détails

    En descendant vers la place des Bienfaiteurs, rond-point en pente qui coupe lavenue à mi-parcours, un habitué des Estivales me fait remarquer, en me montrant la perspective, que le premier creux de l’avenue Rogier, plus bas, correspond à la vallée du Maelbeek. Puis on remonte vers la chaussée de Haecht avant de redescendre, dans la rue Rogier, vers ce qui fut la vallée de la Senne.

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    Vue de la place des Bienfaiteurs vers l'avenue Deschanel (en bas) puis la chaussée de Haecht (en haut)

    Au centre de cette grande place inaugurée en 1907, un « Monument aux Bienfaiteurs des Pauvres » de Godefroid Devreese est agrémenté d’une fontaine et de bassins auxquels ont collaboré Henri Jacobs et l’architecte paysagiste du parc Josaphat, Edmond Galoppin. Plus de cent ans plus tard, les arbrisseaux devenus de grands arbres dissimulent le piteux état de la fontaine – faute d’entretien, les bassins de cette place remarquable et pourtant classée ont un besoin urgent de restauration.

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    Monument des Bienfaiteurs (Godefroid Devreese) : « Cette allégorie de la Charité protégeant le vieillard et l’enfant
    est complétée d’une paysanne schaerbeekoise qui rassemble ses choux dans un panier.
    Le patrimoine communal possède les deux esquisses en plâtre de cette imposante fontaine. »

    Les maisons qui l’entourent datent des années 1908-1909 et présentent un mélange de styles propre à l’éclectisme bruxellois : pignons d’inspiration médiévale, courbes Art nouveau… Les bâtiments d’angle vers le bas de l’avenue (photo de la vue plus haut) sont à la fois semblables et différents, leurs coupoles d’origine – trop coûteuses à restaurer, parfois faute d’artisans qualifiés – ont été remplacées par des toitures plates.

     

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    Le Bienfaiteur, place des Bienfaiteurs, 25 (angle de la rue Frans Binjé)

    Une ancienne habitante de la place nous fait remarquer qu’Alain Resnais a tourné ici une séquence de « Je t’aime, je t’aime ». Elle se souvient d’un temps où les fontaines fonctionnaient encore. Le guide nous fait remarquer un hôtel dit « de rapport » annonçant les immeubles à appartements : sa façade en briques jaunes se termine par un pignon, elle dispose de trois portes (photo ci-dessous), celle du milieu dessert le haut, les latérales les appartements de chaque côté.

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    Trois portes d'un immeuble ou « hôtel » de rapport de style éclectique (architecte Louis Serrure), 1912
    place des Bienfaiteurs 26-27-28

    Nous verrons encore quelques bâtiments aux alentours avant de revenir sur la place – le snack-resto Le Bienfaiteur occupe le rez-de-chaussée d’une maison d’angle surmontée d’un renard, remarquable avec ses pierres bleues et ses balustres sous les fenêtres. En face, de l’autre côté de la place, le café Le vase d’argent (disparu) était connu des amateurs de jazz. Une petite communauté ou comité de quartier des environs sappelle « les Bienfêtards » !

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    A gauche, maison en briques jaunes à arcs brisés (architecte A. Dankelman), 1909 (rue Frans Binjé)

    Quand on descend vers l’avenue Deschanel où la promenade se termine – espérons qu’elle aussi fasse un jour l’objet d’une Estivale schaerbeekoise –, on peut admirer entre autres la belle poste de l’avenue Rogier (ancien hôtel de maître) ; une maison qui porte la mention « Anno 1908 » très hétéroclite avec ses carreaux de céramique ; un magasin dont la façade déborde de fantaisie décorative.

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    Poste de l'avenue Rogier (stores rouges)

    Nous voici presque à l’avenue Deschanel, nous nous arrêtons au pont du chemin de fer pour admirer ses beaux matériaux. Quand la station-service de l’avenue a été reconstruite, tout près, on a veillé à ce qu’elle ne dépare pas trop le grand carrefour des avenues Rogier et Eisenhower (hauteur réduite, murs de briques). Ces avenues ont conservé un beau patrimoine, mais il semble fragile.

  • Serres communales

    Ce dimanche 7 mai, les serres communales de Schaerbeek étaient ouvertes au public. Beaucoup de gens ont profité de l’occasion, souvent en famille, pour découvrir les ateliers des jardiniers communaux, les plantes destinées aux parterres et aux décors publics, ou participer aux animations.

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    On y accède au numéro 411 du boulevard Lambermont, en haut du parc Josaphat. De belles floraisons entourent déjà les serres, comme ces iris blancs – ce week-end, c’était aussi la fête de l’Iris, la fête de la région bruxelloise. De merveilleux pavots fleurissent dans l’allée principale.

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    Les enfants étaient ravis de faire un petit tour tirés par Camille ou sur le dos de Gribouille, les ânes de la commune (vous pouvez lire ici pourquoi Schaerbeek est surnommée la Cité des Anes). Dans la grande serre, un magnifique âne végétal attirait tous les regards.

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    Mais ce sont bien sûr les plantes cultivées ici avant d’être plantées un peu partout dans la commune qui jouaient les vedettes, soigneusement alignées, étiquetées, parfois déjà en fleurs, parfois débutantes : géraniums et pelargoniums, pétunias, surfinias, gazanias, gauras, impatiens, marguerites, bégonias… et j’en passe.

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    Le long de la serre principale, voici des potentilles assorties à la tenue de travail des jardiniers, occupés à garnir un grand bac en pierre. Plus loin, Vouziers, un des deux chevaux de trait ardennais qui participent à l’entretien de l’espace public, regardait calmement passer ceux qui se rendaient au bout de l’allée : là, sensations garanties en montant grâce à l’élévateur jusqu’à la cime des arbres !

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    Derrière le stand d’information sur le compostage, un petit chemin mène à une zone de compost et de paillage, où plusieurs panneaux indiquent les différentes manières naturelles d’entretenir un jardin, d’y attirer les oiseaux, les insectes, de recycler les branches taillées pour créer des barrières naturelles le long des chemins du parc.

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    Même sous les nuages, qu’il est beau, ce parc Josaphat au printemps, avec tous ses verts différents, ce roux indéfinissable des jeunes feuilles de hêtres ! Un couple de bernaches avec leurs sept oisons irrésistibles attiraient tous les regards et les appareils photo, bien sûr.

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    Sous un vénérable marronnier aux grandes chandelles blanches, des moniteurs encadraient les enfants inscrits pour la « grimpe aux arbres » ou plutôt « l’accrobranche » à l’aide de cordes. Plus loin, une sorcière avait aussi un certain succès auprès des plus jeunes.

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    Les tulipes sont pour l’instant les reines des parterres, mais quel plaisir aussi de contempler les arbres aux feuillages encore légers, les vieux troncs noueux, les canards endormis ou en quête de quelque nourriture. On se sent reverdir aussi au contact de tout ce renouveau végétal autour des étangs.

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    Détail du panneau à l'entrée des serres communales

    « Schaerbeek ou le mariage réussi de la nature et de la ville », titrait le site de la commune. Ce n’est pas encore vrai dans tous les quartiers, mais beaucoup d’efforts sont faits pour embellir et entretenir les espaces verts, et cela de manière écologique.

  • Autour du monde

    belgian art prize,2017,maarten vanden eynde,bozar,art,cultureLes finalistes du Belgian Art Prize (ancien prix de la Jeune Peinture Belge), exposent leurs œuvres récentes au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles jusqu’au 28 mai. Un jury international a désigné Otobong Nkanga comme gagnante de cette édition 2017. Maarten Vanden Eynde a remporté le prix du public décerné par les visiteurs.

    « La pratique artistique de Maarten Vanden Eynde mêle la sculpture, la photographie et l’installation, et est souvent liée au contexte. Du point de vue des changements suscités par la mondialisation, Vanden Eynde pose des questions sur l’évolution : qu’est-ce que le progrès ? Allons-nous de l’avant ? Où allons-nous ? Et pourquoi avançons-nous ? Ses œuvres se situent souvent à la limite du présent et du passé, anticipant l’avenir d’hier, ou revenant sur le passé de demain. »

    belgian art prize,2017,maarten vanden eynde,bozar,art,culture« The Gadget est une version 3D en dentelle de la première bombe atomique, allusion au lien significatif entre coton et uranium. »

    « L’installation Around the World, une bobine en forme de fusée, symbolise le rôle capital joué par le coton à l’échelle globale. » (40.015 kilomètres de coton y sont enroulés, léquivalent de la circonférence de la terre.)

     

    A droite : © Maarten Vanden Eynden, Around The World, 2017
    (Exposition Belgian Art Prize 2017) 

    A gauche : © Maarten Vanden Eynden, The Gadget, 2017 (détail)
    (Oeuvre présentée en face de l'entrée de l'exposition Yves Klein)

     

    (Certains ont déjà critiqué ici l’augmentation des prix d’entrée aux expositions. En voulant m’approcher de la création monumentale de Maarten Vanden Eynde, superbement installée sous une verrière au bout d’un couloir, j’ai appris qu’il fallait pour cela débourser 6 €, en plus du ticket pour une autre exposition. En revanche, la brochure illustrée du BAP est distribuée gratuitement.)

  • D'Yves à Yves Klein

    Oui ? Non ? J’avoue que j’hésitais à visiter l’exposition « Yves Klein. Le théâtre du vide » au Palais des Beaux-Arts. Et puis je me suis souvenue de celle sur Daniel Buren, qui m’avait tout de même appris quelque chose, et j’y suis allée. Ils ont des points communs : le monochrome (Buren alterne avec du blanc), le travail dans l’espace, la rupture avec la tradition.

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    Palais des Beaux-Arts de Bruxelles ou Bozar, 26.4.2017 (architecte : Victor Horta)

    Près de la grande photo du Saut dans le vide au début du parcours, un photomontage qui fait bel effet au-dessus de l’entrée du bâtiment (photo ci-dessus, il est interdit d’en prendre à l’exposition), de jeunes malentendants suivaient les explications de leur guide en langue des signes, et j’ai partagé un moment leur silence. Yves Klein (1928 -1962) avait soigneusement préparé cette performance à Fontenay-les-Roses intitulée « Théâtre du Vide », sans prendre de risques puisqu’une couverture avait été tendue pour le recueillir et un matelas posé sur le trottoir.

    De sa biographie résumée dans la première salle, accompagnée de photos de l’artiste français, je retiens surtout sa première passion : le judo – pour lui la « découverte par le corps humain d’un espace spirituel ». Quatrième dan du Kodokan, il l’a enseigné et a même écrit un livre sur « Les fondements du judo ». L’art n’est pas sa vocation première, il a aussi été libraire à Nice, entraîneur de chevaux en Irlande, mais dès 1949, il peint des monochromes.

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    IKB 191, monochrome par Yves Klein, 1962 (Wikimédia Commons)

    Son premier livre, Yves. Peintures, rassemble de petits rectangles de couleur unis où il a apposé simplement son prénom en guise de signature. Il trouvera son bonheur en mélangeant de la résine et des pigments purs. Avant de devenir ainsi le « bleu Yves Klein » certifié, le bleu outremer est pour lui la couleur du ciel, de l’espace, de l’infini. Lors d’une exposition à Paris en 1957, il procède à un lâcher de 1001 ballons bleus pour ouvrir la « révolution bleue ». Dans le cadre d’une exposition collective à Anvers en 1959 (Pol Bury y participait), il tient une conférence sur « l’évolution de l’art vers l’immatériel ».

    Des vidéos font face à quelques monochromes plutôt lisses, à part le jaune qui présente une texture. Les éponges imbibées de son fameux bleu qu’il montre au début des années soixante illustrent son intérêt pour les reliefs et la perception du support. Une autre expérience l’occupe un certain temps : les peintures de feu « Le feu est bleu, or et rose aussi ». Des photos, des films de diverses performances – avec des flammes de gaz – accompagnent une série de peintures où le brun de la toile varie avec l’intensité de la brûlure.

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    Yves Klein Untitled Shroud Anthropometry, (ANT SU 5), 1960 ca.
    Dry pigment and synthetic resin on paper mounted on thin canvas, 77 x 50 cm © Yves Klein, ADAGP, Paris / SABAM, Bruxelles, 2017

    Puis vient la salle des « anthropométries » : on peut y voir sur un petit écran le film (en noir et blanc) et des photos du « happening » de 1960 qui avait scandalisé à l’époque. Plusieurs modèles nues – femmes pinceaux – se sont enduites de couleur puis, sur les directives de l’artiste, dandy au nœud papillon, ont apposé leurs formes sur les toiles tendues aux murs et des papiers sur le sol, devant le public convié au spectacle. Quelques-unes sont exposées, des empreintes tantôt légères, tantôt fortes, bleues, bleu et or, roses, on y voit la trace des corps, d’un baiser. Je n’avais jamais vu ces « anthropométries » de près : une étape dans l’évolution de l’art manuel vers l’art conceptuel, qui occupe tant de place dans la création contemporaine. Et une expérience annonciatrice de lArt corporel.

    Pierre Restany, critique d’art et son complice pour cette soirée, figure du Nouveau Réalisme, écrira dans un Manifeste : « Nous voilà dans le bain de l’expressivité directe jusqu’au cou et à quarante degrés au-dessus du zéro dada, sans complexe d’agressivité, sans volonté polémique caractérisée, sans autre prurit de justification que notre réalisme. Et ça travaille, positivement. » (L’aventure de l’art au XXe siècle, Chêne/Hachette, 1988)

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    Miet Warlop, HORSE © DR/GR (Bozar)

    Pendant l’exposition (jusqu’au 20 août), Bozar organise des performances « d’illustres artistes belges et internationaux ». Des vidéos dans une salle annexe présentent celles de deux Belges qui ont eu lieu le 28 mars dernier : « Horse » de Miet Warlop, (une jeune femme en robe rose et collants noirs chevauche un homme aux jambes nues chaussé de hauts talons et traverse ainsi les salles d’exposition, sur une musique de guitares et d’harmonica) et « Paint Explosions » de Pieter Van den Bosch (des explosions de noir, de jaune et de rouge), dans l’esprit provocateur de Klein. Le programme des prochaines « performances » prévues est donné sur le site de Bozar, avis aux amateurs.

    Le parcours se termine par la grande salle des monochromes bleus – y compris un grand « tapis de sol » (ce n’est pas son titre, mais c’est à quoi j’ai pensé, quoique les gardiens veillent de près à ce qu’on n’y touche pas) – un ensemble qui m’a fait peu d’impression, d’autant plus que les peintures sont exposées sous verre. Le bleu, couleur froide, produit par lui-même de la distance. En passant devant ces « boîtes » transparentes, on y découvre son ombre, son reflet, pas de quoi s’attarder. Peut-être est-ce volontaire, me suis-je dit en regardant un petit film où on voit Yves Klein scruter l’espace vide d’une pièce aux murs blancs, la surface des parois, et y déplacer son ombre (lors de son exposition du Vide !)

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    Couverture du livre sur l'exposition du vide (1958)
    aux éditions Dilecta

    Au bout de cette salle, une vitre de séparation donne sur l’exposition Pol Bury dont je vous ai parlé et qui m’a beaucoup plus intéressée que celle-ci pour laquelle, sans doute, il me manquait des clés de compréhension. Yves Klein, figure mythique de l’avant-garde parisienne des années 60, m’a paru surtout comme un metteur en scène. Sa marque déposée IKB, « International Klein Blue », et ses « actions » spectaculaires annoncent certaines voies de l’art contemporain.

  • A la plume

    wouters,rik,exposition,bruxelles,mrbab,2017,peinture,sculpture,dessin,art,belgique,culture« A l’instar d’Hokusaï, Rik Wouters est fou de dessin. Il dessinait toujours et partout. Nel en savait quelque chose : « Pendant mon sommeil, à ma toilette, durant mes repas, Rik était là, la plume à la main, comme la sentinelle vigilante de ma vie. » Et Rik de s’exclamer parfois : « Je ne fais que dessiner à la plume depuis trois semaines, quel merveilleux instrument ! »

    Roger Avermaete, Rik Wouters, Jacques Antoine, Bruxelles, 1986.

    Rik Wouters, Exposition rétrospective, Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles, 10.03 > 02.07.2017

    Rik Wouters, Femme à la table ronde (source non identifiée)