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Balades - Page 34

  • Douce Drôme

    Les prévisions météorologiques annoncent encore des températures au-dessus de vingt degrés dans le pays de Nyons. Elle me manque déjà, cette douceur de la Drôme provençale au passage de l’été à l’automne. En voici quelques moments à partager avec vous.

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    D’abord une promenade qui part de Venterol où il ne reste quasi pas de traces du tournage du film « Raoul Taburin » cet été, avec Édouard Baer et Benoît Poelvoorde, qui a laissé bien des souvenirs aux habitants. On descend entre deux murs de pierres sèches vers la Sauve, le ruisseau qu’on suit vers le bas avant de traverser la route et de remonter sur la route de Vinsobres. Près des vignes de Provensol, on monte à droite sur la crête de Serre Long, d’où on a une très belle vue sur Venterol (ci-dessus) et sur toutes les montagnes derrière, de la Lance jusqu’au Ventoux, en passant par le Corbiou.

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    La fine lumière de septembre s’accrochait aux graminées le long du sentier et aussi à ces clématites sauvages dont j’ai eu tant de plaisir à regarder les aigrettes plumeuses, tantôt blanches, tantôt roses, qui enguirlandent les murs ou les haies au bord des chemins à cette saison. Quelle surprise, à mon retour, de voir une nouvelle fleur sur la clématite de mon jardin suspendu et même un autre bouton – le soleil reviendra-t-il l’aider à s’ouvrir ?

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    Quel beau pays où marcher, se promener, se reposer. Et quel plaisir aussi de pouvoir nager dans une eau même un peu fraîche dans ce cadre enchanteur ! Ne faire qu’un avec les bleus du ciel et de l’eau, les blancs des nuages, les verts des vignes et des lavandes coupées, des oliviers, des chênes truffiers, se poser là comme une hirondelle de passage.

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    Près des poubelles d’un hameau, une petite troupe de chats sauvages survit grâce aux dépôts de leurs amis. De jeunes tigrés, tachetés, gris, et cette belle siamoise, moins farouche, qui semblait curieuse de ce que nous lui disions doucement, pour ne pas l’effrayer.

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    Un peu partout flambe là-bas l’or de ce que nous prenons pour un crocus d’automne, qui s’appelle en réalité sternbergia lutea ; ce bulbe qu’on surnomme aussi la Vendangeuse fleurit en septembre, octobre, de l’Italie à l’Iran, et ces notes jaune vif sont inattendues dans un paysage qui prend jour après jour des teintes automnales.

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    Septembre permettait encore de déjeuner en terrasse. Mention spéciale pour le Bistrot de Venterol : on y mange sur l’agréable place du Château ou à l’intérieur, dans un décor de brocante chaleureux, où jaime ces belles boîtes de thé anciennes. Et à Grignan, près du lavoir rond à colonnes, sur le Mail, pour Le Clair de la Plume où nous avons apprécié un midi la formule Bistro dans la véranda – toutes les tables du jardin étaient occupées.

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    Nous arrivions de Notre-Dame d’Aiguebelle où nous voulions voir en particulier le Mémorial de Tibhirine. L’abbaye cistercienne ne se visite pas, on peut y assister aux offices. Le site, calme et paisible, offre des endroits de contemplation et aussi des chemins de promenade balisés (brochure en vente sur place). Le Mémorial dédié aux chrétiens et aux musulmans – vous vous rappelez sans doute le film Des dieux et des hommes – comporte des photos, le rappel des faits, des textes forts comme le testament spirituel de frère Christian ou la lettre écrite à ses amis par Mohammed Bouchikhi, musulman, chauffeur et ami de Mgr Claverie.

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    Et aussi des œuvres d’art : un chemin de croix sculpté par un artiste drômois, un vitrail d’un artiste polonais, une mosaïque. Je suis restée émue devant le beau Christ de l’oratoire. « Sur le rocher au fond du mémorial, comme un rappel des montagnes de l’Atlas, le Christ Ressuscitant. Il n’est plus fragile, il est solide, de la solidité de Dieu. Il sort de la nuit (d’où la couleur sombre du bas de la statue) et entre dans la lumière. Sa résurrection engendre celle de nos frères ; il est leur solide point d’appui. » (Livre du Mémorial, à consulter en ligne.)

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    Douce Drôme au couchant – plusieurs fois, nous sommes montés sur la colline pour admirer ce paysage, ces lumières, cette paix du jour qui s’éteint et de la saison qui s’achève.

  • Prairies

    solnit,rebecca,l'art de marcher,essai,littérature américaine,marche,marcheurs,histoire,société,culture« La rêverie a besoin des prairies de l’imagination, de toute cette part d’imaginaire qui n’a pas encore été défrichée, cultivée, réquisitionnée pour un usage immédiat. Les écologistes répètent sur tous les tons que les papillons, les savanes et les steppes, les forêts tropicales remplissent des fonctions absolument essentielles à l’équilibre global de la planète, même s’ils ne produisent pas d’excédent commercialisable.

    Cela vaut aussi pour les prairies de l’imagination : le temps à leur consacrer n’est pas du temps de travail, mais sa suppression attriste l’esprit, le rend stérile, domestiqué. Le combat pour les espaces où marcher (espaces naturels ou espaces publics) doit s’accompagner de la défense du temps libre, seul disponible pour leur exploration. A défaut, l’imagination sera anéantie par le rouleau compresseur des débouchés offerts à l’appétit de consommation, de la fascination pour les crimes affreux et les scandales croustillants »

    Rebecca Solnit, L’art de marcher

  • Du temps libre

    « Le succès des marches ou des promenades collectives peut certes surprendre, tant ceux qui aiment aller à pied mettent en avant le désir d’indépendance, l’amour de la solitude, le sentiment de liberté dû à l’absence de structures et d’embrigadement. Le plaisir d’arpenter le monde à pied repose toutefois sur trois conditions préalables : il faut avoir du temps libre, un endroit où aller, un corps que ni la maladie ni les codes sociaux ne handicapent.

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    Ces libertés fondamentales furent l’objet de luttes innombrables, et il était parfaitement logique que les organisations ouvrières qui se battaient pour ramener la journée de travail à dix, puis huit heures, la semaine de travail à cinq jours, se préoccupent également des espaces où jouir de ce temps libre durement gagné. Ce combat ne se résume d’ailleurs pas, comme pourraient le laisser penser les pages qui précèdent, à l’espace naturel et rural ; l’aménagement des parcs urbains a aussi derrière lui une longue histoire, liée à l’ambition démocratique et romantique d’offrir les vertus de la vie campagnarde aux citadins qui n’avaient pas les moyens de s’échapper des villes. » 

    Rebecca Solnit, L’art de marcher

  • Dans la rue

    Solnit couverture ville.jpg« A un journaliste qui lui demandait comment elle se préparait à affronter son public, la chanteuse Patti Smith répondit : « Je vais me balader une heure ou deux dans la rue. » En quelques mots, elle résumait ainsi son romantisme rebelle et la manière dont ce genre de flânerie arme et affûte la sensibilité, plonge dans un isolement capable d’inspirer des chansons assez farouches, des mots assez violents pour rompre le silence de la songerie. Patti Smith parlait en New-Yorkaise. Virginia Woolf la Londonienne écrivit en 1930 « Au hasard des rues », un texte sur la beauté de l’anonymat des villes. Fille du grand alpiniste Leslie Stephen, elle expliquait à une amie : « Comment les montagnes et l’escalade pourraient-elles me paraître romantiques ? Dans ma chambre d’enfant, il y avait des alpenstocks et une carte en relief des Alpes montrant tous les sommets escaladés par mon père. Aussi je n’aime rien tant que Londres et les marécages, bien sûr. » »

    Rebecca Solnit, L’art de marcher

  • La marche en ville

    « A bien des égards, pourtant, la marche en ville présente plus de points communs avec la chasse et la cueillette primitives que la promenade en pleine nature. Pour la plupart d’entre nous, en effet, les espaces dits naturels sont des lieux à traverser en marchant, mais nous n’y faisons pas grand-chose d’autre qu’en repaître nos sens et nous n’y prélevons rien (le Sierra Club avait ce commandement : « Tu ne prendras que des photographies, tu ne laisseras que des empreintes »).

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    Il en va tout autrement en ville. Comme le chasseur-cueilleur s’arrête devant un chêne dont les glands arriveront à maturité d’ici quelques mois ou inspecte une oseraie prometteuse, le piéton citadin note que cette épicerie reste ouverte tard, qu’il peut faire ressemeler ses chaussures dans cette boutique, que cette petite rue transversale mène à la poste. Par ailleurs, le marcheur des champs (ou le randonneur, le montagnard) a généralement une vue d’ensemble – sur le panorama, la beauté du paysage –, alors que le marcheur des villes est à l’affût des détails, des occasions, et autant pour le premier les changements de perspective sont progressifs, autant ils sont abrupts pour le second. »

    Rebecca Solnit, L’art de marcher