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Art - Page 169

  • Doux et brillant

    « « Doux et brillant, il apparaît aux hommes comme la bienveillance ; fin, compact et résistant, il est l’intelligence ; anguleux mais non pas acéré, il est coupant comme la droiture ; en grains, l’un en dessous de l’autre, c’est l’humilité ; clair et sonore, il est comme une note de musique ; avec des défauts qui ne cachent pas la beauté, il est la loyauté ; avec son rayonnement intérieur, il est l’expression de la bonne foi ; aussi brillant qu’un arc-en-ciel, il est le ciel ; exquis et mystérieux, provenant des collines et des rivières, il est l’expression de la terre ; insigne de rang, il indique la vertu ; apprécié de tous, il montre le chemin de la vérité et du devoir. » C’est en ces termes que dans les Mémoires sur les rites ( Liji), on attribua à Confucius la description des multiples qualités du jade, symbole d’excellence. »

     

    Guillemette Coulomb, Les jades chinois (Catalogue du Musée des arts asiatiques, Toulon, 2001)

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    Pendentif de jade Qing (Paris, Musée Guimet)
    © photo Thierry Ollivier / Réunion des Musées Nationaux / Art Resource, NY

    http://arts.jrank.org/pages/9688/Jade.html

  • L'Asie à Toulon

    Villa Jules Verne, Musée des Arts asiatiques. Sur le Littoral Frédéric Mistral à Toulon, non loin du Fort Saint-Louis, il suffit de passer sous un porche et de pénétrer dans le jardin de la villa, espace public doté d’une belle fontaine murale en céramique, pour se retrouver aux portes de l’Asie. Acquise en 1973 par la Ville de Toulon, la Villa Jules Verne, qui aurait été habitée par son fils, offre ses étages depuis 2001 à une intéressante collection d’objets asiatiques. Des collectionneurs français, des marins toulonnais, différents dons l’ont enrichie, en particulier le legs Fauverge de French en 1961, 473 œuvres de grande qualité.

     

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    Villa Jules Verne, Toulon

     

    Dès le rez-de-chaussée, le musée donne une impression de raffinement : au mur, un beau paravent contemporain signé N’Guyen Van Minh représente un cheval dans une forêt de bambous, laque et or sur fond noir. Sous une autre œuvre de cet artiste, sur une sobre console en verre, un arrangement de fleurs. Toutes les salles du musée offrent un décor très soigné, des vitrines, des boiseries, des banquettes design, des stores blancs pour filtrer la lumière. Des panneaux et bannières situent les objets dans l’histoire, des numéros renvoient à leur description, c’est très clair.

     

    La Chine occupe la plus grande partie du premier étage. Age du Jade, âge du Bronze, âge de la Soie… Même si l’on ignore l’histoire chinoise, comment ne pas s’émerveiller devant un pendentif en jade très ancien, devant un peigne d'ivoire finement sculpté, devant un petit cavalier en terre cuite polychrome, un petit cheval Tang, devant des statuettes de guerriers casqués intactes après tant de siècles  

     

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    Stupa votif (photo Aurélie Chaumat, Wikimedia commons)

     
    Le bouddhisme est une source d’inspiration omniprésente, par exemple avec un Boddhisatva Padmapami porteur de lotus, taillé dans la pierre. Les objets sont groupés par époque, il y a des coupes, des vases, des personnages, des bijoux… Une grande Joueuse de cithare en terre cuite grise surprend par sa beauté et son sourire radieux. Quel contraste avec le visage mélancolique de Maïtreya, prince pensif ! Un spectaculaire Stupa votif en grès gris du XIe ou XIIe siècle compte parmi les pièces majeures du musée.

     

    Les Chinois sont les maîtres des émaux cloisonnés sur cuivre : j’admire un vase aux poissons dont les motifs se dessinent sur une belle couleur turquoise, une coupe au décor floral, une paire de bougeoirs aux bougies intactes elles-mêmes sculptées. Dans les vitrines sont exposés de petits animaux fantastiques ou réalistes, comme un héron à la tête baissée en cuivre, un éléphant en jade vert clair, et de petits personnages en bois doré ou laqué, de petites verseuses, des brûle-parfums. En lisant la légende d’une coupe, j'apprends qui sont les trois amis de l’hiver : le prunier, le bambou et le pin. Une magnifique « pierre de rêve » ronde me rappelle l’aventure calligraphique de Fabienne Verdier, j’y songe en contemplant ce disque de marbre veiné qui évoque une montagne, le ciel, des nuages... C’est la première fois que j’en vois une et cela m’émeut.
     

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    Fontaine du jardin de la Villa Jules Verne

     

    Côte à côte, deux magnifiques peintures sur soie : les portraits d’un mandarin et de son épouse, vêtus d’une robe rouge ornée du prestigieux motif au faisan doré. Près d’eux, sur un guéridon, un vase, un bouquet, une coupe composent de fines natures mortes. Plus loin, un rouleau horizontal du XVIIIe siècle représente, sur un fond clair, des Jeunes femmes sur une terrasse s'adonnant à la musique et à la danse, par petits groupes. De la même époque, un petit plateau d’ivoire au décor de fleurs et de chauves-souris évoque irrésistiblement l’art nouveau, c’est étonnant !

     

    L'érotisme aime les jeux de cache-cache : cinq panneaux sculptés de scènes érotiques sont dissimulés derrière une vitre opaque. Il suffit de pousser sur un bouton pour que le verre devienne translucide et dévoile les ébats amoureux – version contemporaine du rideau. Plus loin, diverses représentations permettent de se familiariser avec les huit immortels du taoïsme (dont deux immortelles), objets de dévotion populaire comme le montre un petit autel domestique.

     

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    Catalogue du Musée des arts asiatiques de Toulon

     

    Les dernières salles du premier étage illustrent les arts du Japon. Des bouilloires en fonte et en cuivre, un amusant petit récipient à eau en forme de citrouille surmontée d’un rat, un beau buffle en bronze poli, entre autres. Un bel ensemble de treize masques du théâtre no (en format réduit), certains en ivoire, d’autres en bois peint, en plâtre : le vieil homme (bon), des démons, une jeune fille, tous caractérisés. Au second étage du Musée sont illustrées d’autres cultures d’Asie du Sud-Est : la Thaïlande (des bouddhas), le Vietnam (joli plat en pierre de lard rose, céramiques), le Tonkin (marionnettes du théâtre d’ombres), la Birmanie (une jolie boîte-crapaud en bois doré), l’Inde (sculptures hindouistes), le Tibet et la Mongolie.

     

    Je n’imaginais pas une telle présence de l’Asie à Toulon derrière l’entrée discrète de la Villa Jules Verne. Le Musée des Arts asiatiques est ouvert tous les après-midi (sauf le lundi), L’entrée est gratuite. Un beau catalogue dû aux soins de Guillemette Coulomb, conservateur, présente des illustrations en pleine page et des notices explicatives sur papier noir (qui mériteraient une solide correction orthographique). Il n’y avait pas grand monde au musée en début d’après-midi, ce qui, bien sûr, convient davantage aux visiteurs qu’aux administrateurs, mais je ne doute pas que ce beau musée toulonnais attire le public. Riches et variées, ses collections permanentes valent vraiment d’être découvertes. Le 8 avril prochain, une exposition temporaire prendra place au rez-de-chaussée, des peintures de Fanfan Li. Avis aux amateurs.

  • L'âme slave

    Vladimir Fédorovski, ancien diplomate, publie quasi un livre par an sur son pays d’origine depuis les années nonante, avec succès. Le roman de l’âme slave (2009) propose « une promenade historique et amoureuse, éclairée par deux guides étonnants » : Diaghilev, avec ses fameux Ballets russes, et Lénine, leader des bolcheviques. Une association due à la naissance à deux ans d’intervalle, en 1870 et 1872, du fondateur de l’Etat soviétique  et du « tsar des artistes du XXe siècle ». Issus du même milieu, les deux « révolutionnaires », chacun dans leur domaine, ne se sont jamais rencontrés mais ont habité les mêmes villes, en particulier Paris et Saint-Pétersbourg, où Fédorovski commence son récit.

     

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    L’auteur dépeint le Saint-Pétersbourg romantique et festif du règne d’Alexandre II. Le tsar a fait jaser d’abord en épousant une « petite princesse de Hesse » (fruit des amours adultères de sa mère), devenue la grande-duchesse Maria Alexandrovna, puis plus tard, en prenant pour maîtresse Catherine Dolgorouki, une élève remarquée à l’Institut Smolny (pensionnat des jeunes filles nobles) qu’il finit par installer au Palais d’Hiver et avec qui il se remariera une fois veuf. Malgré l’abolition du servage en 1861 et les réformes d’Alexandre II, les attentats terroristes se multiplient. A la huitième tentative contre l’empereur « libérateur », celui-ci est tué en 1881.

     

    Cette « catastrophe nationale » fait prendre conscience à la société russe de sa fragilité. Ce sont les prémices de la terreur politique « de masse » que conduira un jour Vladimir Oulianov – dit  « Lénine » en souvenir de son assignation à résidence pour propagande révolutionnaire en Sibérie, sur les bords de la Léna – son frère aîné a été pendu après un attentat manqué contre Alexandre III en 1887.  La fiancée de Lénine, Nadejda, rêvait d’un « mariage libre à la Tchernychevski ». Celui-ci, pour compenser le statut inférieur de la femme dans la société, proposait de lui donner une place supérieure dans la vie privée, la liberté absolue de ses sentiments et de sa conduite, la compagnie d’un mari soumis, fidèle et dévoué. Libéré en 1900, Lénine entame alors un périple international qui durera dix-sept ans.

     

    Mais c’est le destin flamboyant de Serge Diaghilev qui forme l’axe principal du Roman de l’âme slave. Fils d’un général, il apprend le français avec une gouvernante dijonnaise tandis que sa « niania » lui inculque le culte des icônes. Le jeune homme est envoyé à Saint-Pétersbourg pour y étudier le droit, bien que la musique le passionne davantage. En 1890, la ville déploie toute l’élégance d’une capitale occidentale, on y parle le français, on y organise des fêtes somptueuses. Le 9 mars, pour fêter le retour des alouettes, on confectionne « de petits pains torsadés en forme d’oiseau, avec des raisins secs à la place des yeux ». 

     

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    Diaghilev par Valentin Serov

      

    Grand admirateur de Tchaïkovski, Diaghilev fréquente l’opéra, le ballet, se lie avec des amis au sein d’une « société secrète » où l’on tient des conférences sur la peinture et la musique. « Le beau Serge » est tenu un peu à distance comme un parent de province. Mais lorsqu’il se met à étudier sérieusement l’histoire de l’art et s’imprègne, en voyage avec son cousin Dimitri, de tout ce qu’il voit à Paris, Berlin ou Venise – toute sa vie se partage entre la Russie et l’étranger – , il parvient rapidement à s’assurer un mode de vie luxueux, tout en affichant ouvertement son homosexualité.

     

    Se disant lui-même « un grand charlatan », charmeur, impertinent, il estime à vingt-trois ans qu’il est fait pour être un mécène : « J’ai tout, sauf l’argent, mais ça viendra. » Fin 1898, il lance une revue, Le monde de l’art, la fait financer par de riches protecteurs. Artiste et homme d’affaires, il organise des expositions, se fait si bien remarquer qu’on l’engage au poste de directeur adjoint des Théâtres impériaux. Envoyé à Moscou, il prend ses habitudes au Théâtre Bolchoï. A Saint-Pétersbourg, il est convié aux bals de la cour. Diaghilev se souviendra des spectaculaires apparitions du tsar Nicolas II lorsqu’il dirigera les Ballets russes.

     

    Soupçonné de vouloir aller « trop vite et trop loin » dans l’innovation artistique, Diaghilev est limogé. Il se rend alors à Paris, parvient à y intéresser des membres de la haute société à ses projets : expositions de peinture, concerts avec Chaliapine, Boris Godounov à l’Opéra de Paris. Il convainc Gabriel Astruc de faire venir à Paris les meilleurs danseurs russes, Nijinski et la Pavlova, que dirigera Fokine, maître de ballet novateur.

     

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    Fédorovski est un conteur passionné de l’histoire des Ballets russes et des passions de Diaghilev pour ses danseurs étoiles. Nijinski est le premier à recevoir  de son mentor une « éducation stoïcienne » : une initiation complète à tous les arts, musique, peinture, arts visuels, arts de la scène. La création de Petrouchka sur la musique de Stravinski en 1911, d’après Le Gaulois, « C’était toute l’âme slave, la Russie avec ses danses, avec sa musique, tantôt primitive, tantôt d’un raffinement morbide, qui nous pénétrait aussi profondément que l’œuvre de ses grands romanciers… » Quand Nijinki s’enfuira, ce sera le tour de Massine, un jeune figurant repéré à Moscou. Et bien plus tard, celui de Serge Lifar.

     

    Après la Révolution d’Octobre 1917, Lénine transfère la capitale russe à Moscou, installe rue Arbat, non loin du Kremlin, la « camarade » Inès Armand, mariée elle aussi, dont il est tombé sous le charme lors de son séjour à Paris. Plus qu’à la politique,  Fédorovski s’attarde sur le mode de vie et la sphère privée. Inès Armand, « porte-drapeau du féminisme en Russie soviétique »,  connaîtra malgré les attentions de son protecteur la dépression, l’éloignement, la maladie.

     

    Tchaïkovski, Tolstoï, Tchekhov, les Russes blancs à Paris ou à Nice, Diaghilev et Cocteau, Picasso et la danseuse Olga Khokhlova, les créateurs de mode comme Poiret ou Chanel… Fédorovski convoque tous les grands noms des arts de cette époque. Après l’évocation de la mort du « tsar des artistes » à Venise, son épilogue centré sur Soljenitsyne surprend, tant sa personnalité et son œuvre sont aux antipodes.

     

    Pour mieux comprendre « l’âme slave », les grands écrivains russes restent selon moi irremplaçables. Sous un titre assez bateau, Fédorovski, qui a signé par ailleurs Le Roman de Saint-Pétersbourg, Le Roman du Kremlin, Le Roman de la Russie insolite, Le Roman de l’Orient-Express, et plus récemment, Le Roman de Tolstoï, se révèle dans ce récit documentaire un infatigable conteur mêlant biographie et lyrisme, histoire et romance. Bien informé, à l’instar d’un Troyat, ce vulgarisateur rend ainsi hommage à la culture russe et à son rôle en Europe, où son prestige reste immense.

  • Des fauves

    « Nous avons aussi nos fauves tout comme Paris a les siens. Et s’ils sont moins ingénieux, moins âpres, moins individualistes, plus portés vers les concessions que leur collègues parisiens, ce n’en sont pas moins des fauves. »

    Dezső Rózsaffy, peintre et critique d’art, à propos d’une exposition en 1911 du Groupe des Huit.

     

    Dialogue de fauves - Fauvisme hongrois (1904-1914), Hôtel de Ville, Bruxelles

     

    Márffy Odön, Autorportrait d'un fauve.png

    Odön Márffy, Autoportrait

  • Fauvisme hongrois

    Besoin de couleurs ? Vous en trouverez à l’Hôtel de Ville de Bruxelles (Grand-Place) à l’exposition « Dialogue de fauves – Fauvisme hongrois (1904-1914) » jusqu’au 20 mars prochain. L’occasion de découvrir des peintres dont les noms ne sont guère connus du grand public hors de Hongrie, quelque cinquante tableaux d’inspiration parisienne puis belge dans la première salle, hongroise dans la seconde.

     

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    De jeunes artistes hongrois séjournent à Paris au début du XXe siècle et fréquentent entre autres l’académie Julian et l’atelier de Matisse. Les premières toiles exposées montrent des rues, des places de Paris aux couleurs vives, avec leurs passants. Des intérieurs aussi, comme La chambre verte. Sur les nus de ces peintres, la chair prend tous les tons que produit la lumière ou l’ombre, comme on peut le voir sur l’affiche de l’exposition. Quelques autoportraits complètent cette série, et une scène d’atelier, Ecole des peintres, des jeunes gens et des jeunes femmes face au modèle.

     

    La première signature qui a vraiment capté mon attention est celle de Béla Czobel avec Détail d’un parc, une belle composition tout en courbes autour du tronc bleu sombre d’un vieil arbre au milieu d’un parterre. En glissant le regard sous son feuillage, on découvre les allées du parc, des gens assis sur les bancs, des promeneurs. Accroché un peu plus loin, Dans le parc de Vilmos Perlrott-Csaba permet d’apprécier le contraste entre un paysage « animé » et un paysage sans personnages. Czobel a exposé en compagnie de Matisse, Braque, Derain. Louis Vauxcelles (le critique qui a donné leur nom aux fauves) le surnommait le « fauve inculte ».

     

    Après ce parcours « parisien », on a regroupé quelques toiles peintes en Belgique, à Bruges en particulier. Il y a là des vues de rues ou de marchés, et bien sûr des quais, des bateaux multicolores. Deux portraits intéressants, côte à côte : une Fillette en robe rose, de face ; une vieille femme assoupie, de profil, dans des tons sombres.

     

    La deuxième salle nous emmène en Hongrie, avec de nombreux paysages dont un Paysage de Nagybánya avec meules de foin signé Sándor Ziffer. Cette ville roumaine fut le « Barbizon » des peintres hongrois. Dans Le jardin d’un mineur, des vêtements mis à sécher sur la barrière d’un jardin, à l’avant plan, sont autant d’aplats de couleur pure.

     

    Deuxième nom que je m’efforcerai de retenir, celui de Géza Bornemisza. Ses deux paysages encadrés de noir valent la visite à eux seuls, leurs couleurs flamboient. Dans le premier, un chemin rouge serpente dans l’herbe et guide le regard vers la montagne à l’arrière-plan. Des arbres occupent presque tout le second intitulé Rue du Village. De part et d’autre d’un terre-plein, repoussée sur les côtés de la toile, la rue d’un bel orange corail crée une atmosphère magique.

     

    De Rippl-Ronaï, le « Nabi » hongrois, j’ai aimé L’atelier de Kapozvar (1911) avec sa grande fenêtre carrée, ses couleurs vives. Ce coin près de la fenêtre, Sándor Galimberti l’a peint à sa façon et la confrontation des deux toiles permet de comparer les rouges, les jaunes, aux accents différents même s’il s’agit de la même pièce.

     

    Il faudrait aussi mentionner les natures mortes, dont une étonnante avec une chaise Thonet en premier rôle, les Nus de Lajos Tihanyi (inspirés par La Danse de Matisse). En plus des vues campagnardes, des jardins clôturés de bois avec les habitants qui s’y croisent (Vilmos Huszár), la ville est représentée par deux grandes toiles carrées : un marché, une place. La Place du Marché de Tibor Bornemisza est magnifique avec ses hauts immeubles bordant la place où les auvents des échoppes se serrent les uns contre les autres ; les silhouettes des passants dans les allées, d'un noir d'encre de Chine, animent la partition.

     

    Peu familière des prénoms hongrois, je me suis renseignée auprès d’un gardien : ce peintre était-il une femme ? Le plus sérieusement du monde, il m’a répondu que « ça n’existait pas, des femmes qui peignaient » ! Au comptoir d’accueil, ce ne fut guère mieux : oui, il y avait une peintre parmi les artistes exposés, mais son nom ? J’ai retrouvé sur la Toile cette Nature morte aux fleurs – et au livre – de Valéria Denes, la deuxième épouse de Galimberti. Par ce "Dialogue de Fauves", la Ville de Bruxelles rend hommage à la peinture hongroise dans le cadre de la présidence tournante européenne. Il reste beaucoup à découvrir, par exemple sur le site Fine arts in Hungary, pour connaître un peu mieux ces peintres dont les œuvres ont été prêtées par de grands musées hongrois et des collections particulières.