Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

exposition - Page 24

  • De Tiepolo à Richter

    De Tiepolo à Richter, L’Europe en dialogue : les musées du Cinquantenaire (MRAH) présentent une sélection d’œuvres importantes prêtées par quatorze fondations, à l’occasion de l’année européenne du patrimoine culturel. Eclectique plutôt que disparate, cette exposition en deux parties – du XIVe au XIXe siècle, de la fin du XIXe à aujourd’hui – offre de quoi satisfaire les curieux qui acceptent de circuler « à sauts et à gambades » dans l’histoire de l’art. 

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Giovanni Battista Tiepolo, Chasseur à cheval, 1718-1730, Fondazione Cariplo, Milan

    C’est toujours gai de découvrir une exposition dont on n’a pas encore entendu parler, sinon par un courriel de la Fondation Roi Baudouin qui y participe largement. Aussi je ne vous en dirai pas trop, promis. Le Guide du visiteur (source des citations) offert par les Musées royaux d’Art et d’Histoire commente l’histoire de chacune des 69 œuvres exposées en une dizaine de lignes. 

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Hayez Francesco, La dernière rencontre entre Jacopo Foscari et sa famille avant d’être envoyé en exil, 1838-1840, Fondazione Cariplo, Milan

    L’entrée est impressionnante avec deux tableaux de 1840 commandés par Ferdinand Ier d’Autriche « lorsqu’il s’est rendu à Milan pour être couronné roi de Lombardie-Vénétie » : un chef-d’œuvre de Francesco Hayez et un magnifique Intérieur de la cathédrale de Milan par Luigi Bisi. Vous y verrez aussi L’enseigne du Saint-Sang, un rare bois polychrome de 1529.

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Scènes de la vie et de la mort de la Vierge, vers 1280-1300, Fondation / Musée Calouste Gulbenkian, Lisbonne 

    Plus loin, un petit retable portable, fine sculpture gothique en ivoire, présente des Scènes de la vie et de la mort de la Vierge (XIIIe). Un panneau ogival accroché juste au-dessus montre Jésus debout sur les genoux de la Madone du Maître de San Davino (XVe), il enlace tendrement sa mère. Au siècle suivant, contraste total, La montée au Calvaire d’après Jérôme Bosch le montre écrasé sous la lourde croix, le regard baissé.

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Jean-Baptiste Bonnecroy, Vue de Bruxelles, 1664-1665, huile sur toile 169 x 301,5 cm, Fondation Roi Baudouin, Bruxelles

    L’art ancien domine dans l’exposition, les peintres illustres n’y manquent pas : Dürer, Jordaens, Tiepolo, Guardi, Lombardi… Comment en parler rapidement ? Il faut aller les voir. Et aussi cette vue panoramique de Bruxelles par Jean-Baptiste Bonnecroy (1664-1665) où l’on reconnaît certains édifices. Je me suis attardée plus loin devant un pupitre indo-portugais en teck et bois de rose, orné de belles incrustations en ivoire (l’exposition comporte aussi quelques objets).

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Auguste Rodin, Buste de Victor Hugo, modelé en 1883, reproduit en marbre en 1886-1888,
    Fondation / Musée Calouste Gulbenkian, Lisbonne 

    Un marbre admirable, le Buste de Victor Hugo par Rodin (1886-1888), fait la transition vers l’art moderne et contemporain où j’ai eu quelques coups de cœur pour des œuvres venues de Finlande. Par ordre chronologique, je commence par La fille du forgeron (1928) d’Helene Schjerfbeck, cette artiste fameuse dont je vous ai montré récemment un bel autoportrait. Les quatre enfants du forgeron étaient parmi ses modèles préférés à Hyvinkää, ils l’aidaient aussi dans ses tâches quotidiennes.

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    Helene Schjerbeck, La fille du forgeron, 1928, Kirpilä Art Collection / Finnish Cultural Foundation, Helsinki

    Deux beaux petits paysages d’hiver du début du XXe siècle ont de quoi séduire les amateurs. Plus récent, Automne (1968) de Ernst Mether-Borgström, « pionnier de l’art abstrait finlandais dans les années 1940 », illustre son évolution vers un art géométrique où les couleurs jouent le premier rôle. Enfin, j’ai aimé cette encre sur papier d’Elina Merenmies, Espace (2009) : l’artiste d’Helsinki a étudié à Bruxelles et à Prague.

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    © Elina Merenmies, Espace, 2009, encre sur papier, Saastamoinen Foundation Art Collection / EMMA

    Impossible de terminer ce billet sans signaler ces chefs-d’œuvre sélectionnés par la Fondation Roi Baudouin : un délicieux logogramme de Christian Dotremont au titre non moins ravissant, Brusquerie de soie, bruissement de suie ; le Squelette de James Ensor regardant des chinoiseries ; Charles au jersey rayé d’Evenepoel ; la terrible Buveuse d’absinthe de Spilliaert, entre autres.

    de tiepolo à richter,l'europe en dialogue,exposition,cinquantenaire,bruxelles,mrah,patrimoine européen,fondations européennes,fondation roi baudouin,art,culture,2018
    © Gerhard Richter, Musa, 2009, tapisserie en polyester, coton, laine, soie et acrylique, Olbricht Collection / Foundation, Berlin

    De Tiepolo à Richter, l’Europe en dialogue, nous fait voyager dans le passé et le présent de notre continent si riche de ses échanges artistiques. Il me semble que chacun sera sensible à ces « belles histoires attestant de la parenté interculturelle entre citoyens européens ». A voir au Cinquantenaire jusqu’au 30 septembre.

  • Nocturne

    Melancholia Nocturne.jpgKiki Smith, artiste américaine née en 1954 à Nuremberg, vit et travaille aujourd’hui à New York. Les images et les sculptures qu’elle compose incluent souvent la nature et le corps humain et reprennent les codes du monde de l’enfance pour les charger d’une inquiétante étrangeté. Pour reprendre ses propres mots : « Le corps est notre dénominateur commun, la scène de notre désir et de notre souffrance. Je veux exprimer par lui qui nous sommes, comment nous vivons et nous mourons. »

    Guide du visiteur, Melancholia, Fondation Boghossian, Villa Empain, Bruxelles >19.08.2018

  • Melancholia

    A la Fondation Boghossian, « centre d’art et de dialogue entre les cultures d’Orient et d’Occident », Melancholia réunit une quarantaine d’artistes de différentes parties du monde, plus ou moins connus, et 70 œuvres dont plusieurs installations in situ. J’ai aimé flâner dans la Villa Empain, de l’entrée aux salons, d’une chambre à l’autre, puis au jardin, pour découvrir ces variations sur un thème : « Le Paradis perdu, Mélancolies, Ruines, Le temps qui passe, Solitude, Absence ». Quelques œuvres par pièce, de l’espace entre elles, cela permet de bien regarder, de respirer, de ressentir.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne

    « Je n’ai qu’un seul ami, Echo ;
    et pourquoi est-il mon ami ?
    Parce que j’aime ma tristesse
    et qu’il ne me l’enlève pas.
    Je n’ai qu’un seul confident,
    le silence de la nuit ;
    et pourquoi est-il mon confident ?
    Parce qu’il se tait. »

    Sören Kierkergaard

    Ces vers d’accueil à l’exposition introduisent aussi le Guide du Visiteur distribué à la réception : éditée par Louma Salamé, directrice générale et commissaire d’exposition, cette brochure très soignée, illustrée en couleurs, présente un artiste et une œuvre par page, et reprend les citations affichées tout au long de l’exposition.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne 
    © Claudio Parmiggiani, Senza Titolo, 2013-2015 / © KRJST Studio, Orion, 2016

    Sur le marbre du grand salon, Claudio Parmiggiani a amoncelé des têtes antiques, un assemblage « évoquant les ruines de l’antiquité » (Sans titre, 2013-2015). Ces têtes gisant au sol contrastent avec une longue tapisserie qui tombe de la mezzanine, Orion (2016), de KRJST Studio (Justine de Moriamé et Erika Schillebeecks) : les bleus de cette constellation textile, traversée de lumière blanche et d’ombres, correspondent bien au thème de la mélancolie.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne
    © Pascal Convert, Bibliothèque, 2016

    Dans les deux salons à l’arrière, voici d’abord la Bibliothèque de Pascal Convert, une des œuvres les plus marquantes : cinq cents livres de verre, doubles de livres anciens, témoignent des bibliothèques « incendiées par les régimes autoritaires et totalitaires ». Blancs ou rouges, avec des traces de brûlure et des parois éclatées, ces livres sont disposés sur des rayonnages et aussi sur les appuis de fenêtre, ce qui permet à la lumière du jour de les traverser et de leur donner vie. Troublant mélange de destruction et de mémoire. De l’autre côté, de très grandes photos montrent l’absence des Bouddhas détruits par les talibans (Falaise de Bâmiyân, 2017).

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne
    © Giorgio De Chirico, Pomeriggio d’Estate, 1972, Piazza d’Italia, ca. 1970 et
    Alberto Giacometti, Homme à mi-corps, 1965, courtesy Fondation Boghossian, photo Lola Pertsowsky

    A l’étage, dans la Chambre Nord, deux belles toiles signées De Chirico se répondent : sur la place d’Italie, deux personnages, une statue, les ombres et lumières du couchant. Une des dernières sculptures de Giacometti, Homme à mi-corps, « montre un homme à genoux, le regard pensif ». Autres figures de la mélancolie, un doux portrait de femme par Delvaux, un autre avec des vers d’Eluard, deux personnages solitaires de Rops, entre désespoir et ironie.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne
    © Léon Spilliaert, Golfbreker met paal, 1909 / © Norbert Schwontkowski, Phys Experiment, 1995

    Coup de cœur dans la Salle d’Armes, où débute le thème des « Ruines » : à un splendide Spilliaert nocturne, Brise-lames avec poteau, répond une grande toile de Norbert Schwontkowski, Phys Experiment, où un homme se penche au bord d’une falaise pour regarder la chute d’une pierre dans le vide. Belle résonance entre ces deux visions anxieuses du monde, dans des lumières du Nord.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,art contemporain,art moderne
    © Lionel Estève, La beauté d'une cicatrice, 2012
    / © Melik Ohanian, Selected Recordings n°99, 2003

    « Le temps qui passe », comment l’exprimer ? Lionel Estève a coloré en partie des pierres ramassées sur une plage grecque, l’ensemble s’intitule La Beauté d’une Cicatrice. On les regarde, ainsi que la photo d’une île sauvage enneigée sous les nuages (Melik Ohanian) et un paysage contemplatif d’Etel Adnan, Soleil sur le Mont Tamalpais, en entendant des voix, une œuvre audio d’On Kawara, One million years.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Giuseppe Penone, Rovesciare i propri Occhi, 1970

    Le thème de la solitude est traité de diverses manières (Chambre de Monsieur) : peintures typographiques avec des messages sur le visible et l’invisible (Rémy Zaugg), photos de Joseph Beuys, autoportrait de Giuseppe Penone avec des lentilles de contact miroir qui l’aveuglent, lithographies de Martin Kippenberfer, des autoportraits réalisés l’année précédant sa mort. Au sol, Parmiggiani offre un raccourci de la condition humaine : une tête antique sur un livre ouvert – ciel étoilé en double page – à côté d’une petite horloge : l’homme, l’espace, le temps.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Samuel Yal, Dissolution, 2012

    On s’interroge parfois sur le rapport entre certaines œuvres et le sujet de l’exposition. Dissolution de Samuel Yal, une mosaïque de fragments de céramiques suspendus, suggère l’explosion d’un visage dans l’univers. Mais l’œuvre conceptuelle de Jef Geys, une liste de !vrouwenvragen ? (questions de femmes), ici en anglais, quel rapport ? Idem pour la drôle de table à jouer de Barbara Bloom.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Constant Permeke, Torso, 1938 / © Paul Delvaux, Nuit sur la mer, 1976

    Dans la Chambre de Madame, les tentures sont entrouvertes sur un Torse de Constant Permeke qui voisine avec une grande toile de Delvaux, Nuit sur la mer. Une autre œuvre de Parmiggiani rappelle les livres de Convert au rez-de-chaussée : des silhouettes d’objets brûlés sur des étagères, du blanc au noir. Noirs aussi, les bas de soie qu’enfile une femme assise, sur une peinture de Marlene Dumas. A côté, dans le Boudoir, Lamia Ziadé a rassemblé quelques meubles et objets dans un petit coin intime, l’alcool et la cigarette semblent y meubler la solitude, avec ces drôles de volutes de fumées en céramique.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Lamia Ziadé (détail)

    Une installation « à la Mondrian » d’objets ménagers en plastique bleu, jaune et rouge m’a semblé incongrue à proximité d’une vidéo de quelques minutes d’Eli Cortiñas, Fin (2010) : c’est la fin d’un film, montrée en boucle : un homme et une femme se tenant par la main s’enfoncent dans un paysage de neige – vont-ils disparaître ?

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Abdelkader Benchamma, The unreachable part of us, 2018 

    J’avais manqué, en entrant dans la villa, tout de suite à droite, l’œuvre spectaculaire d’Abdelkader Benchamma, The unreachable part of us : sa fresque en noir et blanc couvre entièrement les murs de la pièce. Le spectateur est plongé dans un univers sans début ni fin, invité à cadrer lui-même des motifs en mouvements, des vibrations, les vides et les pleins d’un paysage abstrait, sans repères.

    melancholia,exposition,villa empain,fondation boghossian,peinture,culture,textile,installations,photographies,art contemporain,art moderne
    © Christian Boltanski, Animitas, 2016-2018 / © Tatiana Wolska, Atrakcja, 2018

    « J’ai eu successivement tous les tempéraments : le flegmatique dans mon enfance, le sanguin dans ma jeunesse, plus tard le bilieux et j’ai enfin le mélancolique qui probablement ne me quittera plus. » (Giacomo Casanova) N’oubliez pas de faire un tour au jardin si vous allez voir Melancholia, plusieurs œuvres intéressantes, discrètes ou spectaculaires, y sont installées. L’exposition de la Fondation Boghossian est visible à la Villa Empain jusqu’au 19 août 2018.

  • Baudelairienne

    Portraits (33).JPGJaime, ô pâle beauté, tes sourcils surbaissés,
    D’où semblent couler des ténèbres,
    Tes yeux, quoique très noirs, m’inspirent des pensers
    Qui ne sont pas du tout funèbres.

    Tes yeux, qui sont d’accord avec tes noirs cheveux,
    Avec ta crinière élastique,
    Tes yeux, languissamment, me disent : " Si tu veux,
    Amant de la muse plastique,

    Suivre l’espoir qu’en toi nous avons excité,
    Et tous les goûts que tu professes,
    Tu pourras constater notre véracité
    Depuis le nombril jusqu’aux fesses ; 

    Tu trouveras au bout de deux beaux seins bien lourds,
    Deux larges médailles de bronze,
    Et sous un ventre uni, doux comme du velours,
    Bistré comme la peau d’un bonze,

    Une riche toison qui, vraiment, est la sœur
    De cette énorme chevelure,
    Souple et frisée, et qui t’égale en épaisseur,
    Nuit sans étoiles, Nuit obscure !

    Baudelaire, Les promesses d'un visage

    © Charlotte Beaudry (1968-), Sans titre, Collection privée

    Promesses d'un visage, Musées royaux des Beaux-Arts, jusqu'au 15 juillet 2018

     

  • Promesse de visages

    « Promesses d’un visage, L’art du portrait des primitifs flamands au selfie », c’est le titre en français de l’exposition Promises of a Face aux Musées royaux des Beaux-Arts (MRBAB) – l’affiche en anglais cible les touristes ; j’ai saisi l’occasion de revoir des peintures tirées des réserves, entre autres de feu le Musée d’Art moderne. A voir à Bruxelles jusqu’au 15 juillet.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture

    « Memling, Rubens, Van Dyck, Gauguin, Ensor, Chagall, Delvaux, Bacon, Tuymans, Borremans, Fabre, Vanfleteren… À travers cette exposition, le visiteur redécouvrira dans un nouveau contexte certains chefs-d’œuvre des Musées royaux des Beaux-Arts. Les maîtres anciens y dialoguent avec les créations les plus contemporaines et les célébrités d’hier et d’aujourd’hui se côtoient de façon inédite. » (site des MRBAB)

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture

    On aperçoit d’en haut en arrivant le « troupeau » de Jan Fabre, un ensemble spectaculaire d’autoportraits en bronze ou en cire, une vingtaine, à différents âges, tous affublés d’oreilles ou de cornes animales, non sans ironie : « L’autoportrait comme une aspiration vers ce qui est étrange et autre. » Ils font face à des autoportraits de peintres de différentes époques.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Ecole des Pays-Bas méridionaux, Paysage anthropomorphe. Portrait d'homme, seconde moitié du XVIe s., MRBAB, Bruxelles

    Puis l’accrochage est chronologique, des portraits anciens, parfois flanqués d’une œuvre contemporaine (comme la photo d’un sans-abri par Serrano près d’un portrait du XVe siècle), aux portraits modernes. Pas de panneaux explicatifs ; les peintures et quelques sculptures sont groupées par type – portraits de famille, portraits royaux, épouses d’artistes, enfants…

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Lambert Suavius (attribué à), Portrait de Guillaume de Norman le jeune ?, vers 1540, MRBAB, Bruxelles

    Devant les portraits de bourgmestres flamands ou ceux des archiducs Albert et Isabelle par Cornélis de Vos, on repense à ce qu’écrivait Baudelaire dans Le peintre de la vie moderne, un passage lu près du Portrait de Guillaume de Norman le jeune (des citations et notices sont proposées tout au long du parcours sur des feuillets collés au mur avec un adhésif, voir ci-dessus) : « (…) la plupart des beaux portraits qui nous restent des temps antérieurs sont revêtus des costumes de leur époque. Ils sont parfaitement harmonieux, parce que le costume, la coiffure et même le geste, le regard et le sourire (chaque époque a son port, son regard et son sourire) forment un tout d’une complète vitalité. »

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Rembrandt, Portrait de Nicolaes van Bambeeck, 1641, MRBAB, Bruxelles

    Après une longue série de portraits masculins, parfois accompagnés de celui d’une épouse ou d’une famille, je m’arrête devant deux peintures magistrales : l’une signée Frans Hals, Portrait de Johannes Hoornbeek, professeur à l’université de Leyde, un livre à la main, date de 1645 ; l’autre, Portrait de Nicolaes van Bambeeck par Rembrandt, de 1641 (ci-dessus). Des visages qui vivent, des personnalités perceptibles en plus d’un statut social.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Jean Delville, Portrait de la femme de l'artiste, 1916, MRBAB, Bruxelles

    Il faut attendre les XIXe et XXe siècles pour plus de liberté ou de fantaisie dans la représentation et souvent pour des sujets féminins, quoique Femme en gris (1904), le premier portrait de Nel par Rik Wouters soit fort austère par rapport à la façon dont il la montrera plus tard. Jean Delville peint sa femme dans une pose très souple, rêveuse, plus rassurante que le Portrait de madame Stuart Merrill aussi appelé Mysteriosa.            promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture

    Paul Gauguin, Portrait de Suzanne Bambridge, 1891, MRBAB, Bruxelles

    Gauguin a trouvé des bleus et des roses délicats pour le portrait de Suzanne Bambridge (1891), dont les parents s’étaient installés à Tahiti. Cette peinture vient d’être restaurée. Non loin, Femme lisant et fillette de Van Rysselberghe (1899) date de la même époque – portraits ou scène de genre ? –, les deux façons de peindre sont très éloignées l’une de l’autre.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Léon Spilliaert, Profil, 1907, Encre de Chine, craie rouge et bleue sur papier, MRBAB, Bruxelles
    Edouard Agneessens, La flamande, ca. 1867, huile sur toile ovale, MRBAB, Bruxelles

    Parfois l’association de deux tableaux n’est que formelle : entre Profil de Spilliaert et La Flamande d’Agneessens, quelle différence de peinture et d’univers aussi ! Quarante ans séparent ce portrait symboliste et le tondo de belle facture classique.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Louis Gallait, Simonne Bucheron à trois ans, 1872 / Louis Faider à trois ans, 1879, MRBAB, Bruxelles

    Louis Gallait a peint Simonne Bucheron à trois ans en 1872, Louis Faider au même âge en 1879. La fillette regarde sur le côté, sa pose est assez naturelle, celle de son chien aussi, tandis que le gamin et son chien sont campés tout droit. Lui est en promenade, avec son bâton, elle à l’intérieur, près d’un fauteuil. Stéréotypes du genre.

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Georges Verbanck, dit Geo, Fillette affligée, bois polychrome, 1917, MRBAB, Bruxelles

    L’ensemble contient de belles choses, de grands noms, il m’a paru pourtant hétéroclite ; les rapprochements ne permettent pas vraiment de comprendre comment a évolué la peinture du portrait. Avec ces 160 œuvres sélectionnées dans les collections, comme l’écrit Guy Duplat, l’exposition offre « une balade comme un autoportrait du musée, avec un fil assez ténu » (La Libre Belgique).

    promesses d'un visage,portraits,exposition,musées royaux des beaux-arts,bruxelles,peinture,sculpture
    Au niveau – 3, entre autres activités ludiques, des feuillets sont à disposition pour écrire un commentaire
    à coller avec un adhésif près d’une reproduction (ils ne sont pas tous aussi sympathiques).

    Pour ceux qui n’ont pas eu l’occasion de visiter le Musée d’art moderne avant sa fermeture, c’est l’occasion d’en découvrir certains chefs-d’œuvre, quoique hors contexte. Pour tout le monde, c’est l’occasion d’une trouvaille ou l’autre, par exemple, pour moi, cette sculpture de Geo Verbanck si expressive, Fillette affligée. Ou encore de s’exprimer par écrit à la sortie de cette exposition conçue comme un « libre parcours » (Michel Draguet).