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essai - Page 54

  • D'Adrienne Monnier

    A lire Les gazettes d’Adrienne Monnier, rédigées de 1923 à 1945, j’ai souvent pensé qu’aujourd’hui, cette libraire parisienne aurait tenu un blog littéraire de haut vol. Née en 1892, Adrienne Monnier a perdu son père d’un accident de travail en 1914. C’est grâce à ses indemnités qu’elle a pu ouvrir une librairie : la Maison des Amis des Livres, au 7, rue de l’Odéon. Faute de place, elle n’y vend que les livres de ses amis : Claudel, Leiris, Joyce, Prévert, Gide, Hemingway… Des amis de choix ! 

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    Adrienne Monnier par Gisèle Freund © Gisèle Freund/IMEC/Fonds MC

    L’avant-garde littéraire de la première moitié du XXe siècle se retrouve chez la « nonne des lettres », comme on la surnomme. Séances de lecture, édition de revues, Adrienne Monnier participe au développement de la « jeune littérature » d’alors. « Les gazettes du « Navire d’argent », 1925-1926 » ouvrent ce recueil ; la libraire n’a pu continuer à diffuser sa brochure, elle lui coûtait trop cher, malgré les abonnements, et même avec l’aide de son amie Sylvia Beach qui avait ouvert Shakespeare & Co au n° 12, dans la même rue.

    « Description de la voix de Claudel », le premier texte, commence ainsi : « On ne peut la comparer qu’à l’action de manger. Elle se repaît des mots, elle les mâche, elle en éprouve le goût et en assimile la substance (…) » En moins de vingt lignes, une description superbe. Plus loin, elle parle de « crible machinal » pour rendre l’intonation de Paul Valery. Ecrivains, peintres, spectacles, expositions, Adrienne Monnier présente, cite, raconte, d’une plume très expressive.

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    A l’époque où l’on proposait encore aux clients de couvrir leurs livres de papier cristal, la libraire décrit l’un d’eux, Berthier, qui vient lui demander un recueil de Léon-Paul Fargue. Le poète est dans la librairie, mais son lecteur ne le connaît pas. Quand Fargue se met, par jeu, à déprécier ses propres poèmes, avec insistance, Berthier lui répond sèchement d’abord, puis se fâche. Alors Adrienne M. tend le livre au poète, avec le nom de Berthier sur un bout de papier, puis le lui rend, dédicacé – s’ensuivra une « poignée de main comme l’arc-en-ciel. »

    « Visite à Marie Laurencin » : Marcelle Auclair, Sylvia Beach et Adrienne Monnier prennent le thé chez la peintre qui fut un temps l’amante d’Apollinaire. Il est question d’une amie battue par son petit ami, de plusieurs façons de se coiffer – « Pour plaire aux hommes, il vaut mieux passer pour bête, moi je suis la reine des gourdes », déclare Marie Laurencin. Elle montre sa toile en cours, fait visiter son appartement plein de ces femmes aux « grands yeux vides et volubiles comme le ciel entre les murs », dans de jolis cadres.

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    Adrienne Monnier (1892-1955), libraire française, dans sa "Maison des amis des livres",
    7, rue de l'Odéon. Paris, 1935. © Roger-Viollet

    Les « Ecrits divers, 1923-1931 » comportent des critiques de livres, de poésie surtout, et des préfaces pour des expositions – « Une nature morte, quelle singulière façon d’appeler ces tentatives vraiment magiques de donner la vie à ce qui paraissait inanimé. » Idem pour « Les airs du mois de « La N.R.F. », 1934-1937 ». Sujet du temps, « Le swastika » : les Allemands en font un usage inquiétant, elle en cherche l’origine, distingue les graphismes, étudie le symbole.

    Adrienne Monnier aime le cinéma, s’enthousiasme pour une adaptation d’« Alice au pays des merveilles », pour Fernandel. Le cirque (illustration ci-dessous), les Folies-Bergère, un rayon « Chiens et chats de toutes races » à la Samaritaine, Maurice Chevalier ou Noël-Noël, c’est toute une vie parisienne dont elle se fait la chroniqueuse.

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    Parfois, la libraire s’échappe en Savoie (« Esquisse des Déserts ») ou à Tignes, à Venise, et note ses impressions. Mais c’est principalement Paris qui l’inspire : ce « coude du quai d’Orléans »« La Seine ouvre les bras et enserre la Cité. Ne disons plus rien, c’est trop beau. La ville et le fleuve chantent à l’unisson. L’hiver peut venir. » Et surtout le pont des Arts, qu’elle traverse lentement « parce que, des deux côtés, Paris est doux et magnifique, parce qu’on est là au seuil des îles, parce qu’on peut s’asseoir sur un banc, le regard perdu dans le regard fascinant et moqueur de la jeune femme fleuve. » (« Petite promenade »)

    Après les gazettes de « Vendredi », il y aura « La gazette des Amis des Livres », grâce à une « aubaine » : Gallimard lui a acheté la traduction d’Ulysse, un apport d’argent bienvenu dans une période difficile. La vie de libraire a comblé Adrienne Monnier – « j’exerçais depuis deux ans un métier dont je ne savais pas encore grand-chose, sinon l’ivresse de causer avec des gens qui aimaient les livres que j’aimais. » – mais elle n’en cache pas les difficultés.

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    Adrienne Monnier devant sa librairie

    Lire Les gazettes d’Adrienne Monnier, c’est passer des livres dont on coupe encore les pages à l’art, à une réflexion sur la guerre ou sur la société. L’élite, la classe, la bourgeoisie, la noblesse, voilà des notions qu’elle commente, à rebours des lieux communs. Les persécutions contre les Juifs en Allemagne lui inspirent des « Réflexions sur l’antisémitisme » en novembre 1938, une quinzaine de pages.

    Sa causerie sur « L’Ulysse de Joyce et le public français » (1931) constitue une belle introduction à la lecture. Barrault, « Verve » (Adrienne Monnier a écrit pour la revue d’art de Tériade), la survie dans Paris occupé (« Lettre aux amis de zone libre ») – on apprend par ailleurs que le chocolat manquait « terriblement » à Henri Michaux, « qu’il en avait besoin pour travailler »Madame Colette à qui elle lit les lignes de sa main... plus de septante sujets et autant d’entrées dans le monde d’une libraire dont on aurait aimé passer la porte.

  • Civilisation

    William Morris Médaillon Red House.jpg« Je pensais que civilisation signifiait conquête de la paix, de l’ordre et de la liberté, bonne entente entre les hommes, amour de la vérité et haine de l’injustice, en résumé une bonne vie nourrie de ces valeurs, libérée de la lâcheté et de la peur, mais riche en événements. Voilà comment je définis la civilisation, et non par l’accumulation de sièges rembourrés et de coussins, de tapis et de gaz de ville, de viandes délicates et de boissons fines et, enfin, par des différences toujours plus aiguës entre les classes. »

     

    William Morris, « The Beauty of Life » (L’âge de l’ersatz)

     

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    Edsme Prélude.jpg

     

    Bonne nouvelle !

    L’exposition « (Extraits) Abstraits » de Gérard Edsme à la DCA Gallery est prolongée jusqu’au 30 juin.

    A voir ou à revoir, avec quelques nouvelles peintures.

     

    Ill. "Prélude" © Gérard Edsme

     

     

     

     

     

     

  • Contre l'ersatz

    Dans L’art et l’artisanat, que je vous ai présenté l’an dernier, William Morris (1834-1896) explique son engagement artistique. Dans L’âge de l’ersatz et autres textes contre la civilisation moderne, un choix de textes traduits et présentés par Olivier Barancy aux Editions de l’Encyclopédie des nuisances (Paris, 1996), il parle des liens nécessaires entre l’art et le travail. Pour Morris, « l’art est l’expression de la joie que l’homme tire de son travail ».

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    Autoportrait de William Morris, 1856, Victoria and Albert Museum.

    Morris était à l’occasion orateur en plein air (ce qui était alors interdit) et passait pour un agitateur, il a été arrêté à plusieurs reprises lors de manifestations. Le socialiste anglais a donné environ deux cents conférences dans tout le pays, dont quarante ont été publiées de son vivant. C’est davantage un tribun qu’un théoricien. Influencé par Ruskin, il estimait que l’aventure esthétique ne peut être séparée de l’engagement social.  

    L’auteur rejette l’architecture victorienne et la confusion entre civilisation et commodités bourgeoises accumulées sur le dos des travailleurs. Aussi considère-t-il l’époque moderne comme « le siècle des nuisances ». Le traducteur a traduit « makeshift » (pis-aller, expédient, substitut, succédané) par « ersatz » (un anachronisme puisque le mot ne s’est imposé en français et en anglais qu’avec la Première Guerre mondiale) parce que ce mot « possède en français une force critique qui correspond parfaitement au propos de Morris ». Il termine son avant-propos par cette citation de l’auteur : « Sans parler du désir de produire de belles choses, la passion dominante de ma vie a toujours été la haine de la civilisation moderne. »

    morris,l'âge de l'ersatz et autres textes contre la civilisation modern,essai,conférences,art,travail,architecture,ornementation,civilisation,barbarie,cultureLe recueil s’ouvre sur le manifeste de la Société pour la Protection des Monuments Anciens, créée à son initiative et toujours vivante aujourd’hui. Morris y rappelle comment on réparait autrefois les édifices sans craindre d’en modifier le style, ce qui menait à une diversité de styles intéressante, chaque époque y laissant son empreinte. Il ne supporte pas la « restauration » contemporaine qui détruit pour ajouter et aboutit à une mystification – résultat de l’affligeante absence de style propre au XIXe siècle. L’objectif de cette Société est donc de protéger les bâtiments anciens sans les restaurer ni les abandonner, mais en les réparant simplement, dans une « sollicitude constante ».

    « Architecture et histoire » revient sur ce rejet d’une « version académique de l’original ». La patine des ans et du climat ne doit pas être effacée. Morris insiste sur la dimension collective de tout ouvrage architectural. La qualité d’un tel travail de coopération est déterminée par les conditions sociales. Au Moyen Age, les guildes protégeaient les artisans. Ceux-ci vendaient leurs produits localement, il existait même des lois contre les spéculateurs et les accapareurs, pour favoriser un rapport direct entre fabricant et utilisateur. A partir du XVIe siècle, la recherche croissante du profit va transformer les conditions de travail, on va fabriquer des biens pour la vente et non plus pour l’usage, et finalement, au XIXe, l’ouvrier d’abord « abaissé au rang de machine » en devient quasi l’esclave, dans une nouvelle « barbarie ».

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    Rear of Red House, Bexleyheath © David Kemp for Geograph Britain and Ireland

    Le but du socialisme pour Morris est de rendre les hommes heureux : « une vie pleine, libre, et la conscience de cette vie ». Dans « La Société de l’avenir », il explique sa vision d’une société sans luxe : on y mène une vie simple et naturelle ; on y enseigne, en plus de la lecture et de l’écriture, les arts manuels élémentaires – une société sans riche ni pauvre.

    Mais rien de frivole dans la décoration des objets utilitaires : il s’agit d’embellir et aussi de rendre le travail agréable. Une habitation est belle si elle est bien construite et adaptée aux besoins des hommes. Peinture et sculpture sont liées à l’architecture, mère de tous les arts et qui les contient tous. Morris s’insurge contre les maisons « utilitaires » bâties durant son siècle, et contre la fausse ornementation commerciale. Lutter pour débarrasser l’art de l’ersatz est pour lui une priorité. Il faut retrouver la tradition coopérative pour redevenir de bons ouvriers et artisans (« Les arts appliqués aujourd’hui », 1889).

     

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    Une vue intérieure de Red House, la maison de William Morris


    Un an plus tard, William Morris dresse le bilan de sept années de socialisme (« Seven years Ago and Now »). Pas encore de bénéfices concrets, mais les principes socialistes sont devenus des lieux communs. Le mouvement a connu des réussites et commis des erreurs, mais son point de vue sur la civilisation est mieux partagé. Morris ne croit pas ni au réformisme ni à l’émeute. Pour lui, il est essentiel d’abord de « former des socialistes », une prise de conscience massive est une nécessité préalable à l’action et au changement. (« Où en sommes-nous ? »)


    Le texte éponyme de ce recueil date de 1894 : « l’âge de l’ersatz », voilà comment il qualifie son époque, frustré devant « l’omniprésence des ersatz » que les gens achètent à la place de produits dont ils connaissent l’existence mais qui leur sont inaccessibles, comme le pain crayeux faute de bonne farine, la margarine au lieu du beurre, des vêtements hideux et des chaussures qui déforment pieds et jambes. Morris considère les voyages comme un ersatz de divertissement – « En toute sincérité, ce qui m’agrée le plus est un moment de calme, sans préoccupation immédiate, après lequel je me remets au travail l’esprit libre. »

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    Photo de William Morris sur Wikimedia Commons

    Maisons modernes mal agencées, villes indignes de ce nom, banalisation du paysage rural, son réquisitoire contre l’époque est impitoyable. Pour mettre fin à cette dérive, et à ce poison de la civilisation qu’est la pauvreté, le socialiste anglais prône la nécessité de « la meilleure éducation possible », quel qu’en soit le prix, la fin du gaspillage, la reconnaissance de tous comme des citoyens à part entière.

    Quelques annexes intéressantes témoignent du combat social de Morris. Il réagit par lettre aux articles parus dans différents journaux pour sauver une église abbatiale de la restauration (un mois avant de fonder la Société protectrice citée plus haut), signe une pétition contre le tunnel sous la Manche, dénonce la pollution d’un fossé, réclame la protection d’Oxford contre la destruction. Il défend la forêt de charmes d’Epping et même la cathédrale de Rouen contre les « dommages sérieux et durables » d’une restauration excessive. L’âge de l’ersatz ou les colères d’un homme engagé.

  • Fontaine d'amour

    « Ce tryptique évoque la légende de la Fontaine d’Amour. Placé judicieusement sur le manteau d’une cheminée, ce tableau devenait visible lors de l’ouvertures des portes de la salle dévolue aux mariages*. (…) »

    Fabien de Roose, Bruxelles vue par les peintres  (* A l’Hôtel communal de Schaerbeek – Fontaine du parc Josaphat, une des sources du Roodebeek)

     

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    Herman Richir, La fontaine d’amour (photo Simonis 2 sur Flickr)

     

    « Aujourd’hui, la croyance existe encore que deux amants qui ont bu de cette eau ensemble dans le même verre se verront unis avant la fin de l’année. »

    Emile Vanden Putte, échevin, lors de l’inauguration du parc (cité par F. de Roose)

  • Balades picturales dans Bruxelles

    La ville est une succession de tableaux pour les promeneurs qui aiment la regarder : façades, portes, décors de fenêtres, jardinets, jeunes et vieux arbres, passants, marchés, roses trémières et grimpantes de trottoir, carrefours animés, commerces, parcs… Sous un angle très original, Fabien De Roose propose des « promenades au cœur de la ville » dans Bruxelles vue par les peintres, dont je viens de découvrir le deuxième tome. Fondateur et animateur de l’asbl Dédale, guide à la Fondation Monet à Giverny, il organise des « promenades picturales » en France et en Belgique.

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    Auderghem, Saint-Josse-ten-Noode, Schaerbeek, Watermael-Boitsfort, Woluwe-Saint-Lambert et Woluwe-Saint-Pierrre, ce sont ces six communes de l’est de Bruxelles qu’il donne à voir ici sous l’œil d’une cinquantaine de peintres, « reconnus ou méconnus ». Sept balades dans l’espace et dans le temps. Chacune s’ouvre sur un rappel historique pour présenter les quartiers traversés et un plan numéroté (avec l’indication précise des transports en commun). Chaque numéro correspond à un tableau. Une double page raconte l’histoire du lieu et met à notre disposition texte, illustration et photographie. Le temps de lire et de regarder.

    La première, « Du Botanique à la place Saint-Josse », comporte sept arrêts sur image. « Victor Hugo avait affirmé : « Bruxelles possède deux merveilles uniques au monde : la Grand-Place et le panorama du Jardin Botanique. » Pierre-François Gineste (Paris, 1769 – Evere, 1850) a peint le Jardin Botanique à Bruxelles vers 1840. Sous l’illustration, une photo de l’endroit tel qu’il se présente aujourd’hui, sous le même angle de vue, permet la comparaison, dans ce cas-ci, peu flatteuse. Le magnifique panorama montré par Gineste à l’époque où se construisait la Gare du Nord n’a pas résisté aux pressions immobilières et au développement urbain. Le beau bâtiment néo-classique a été sauvé, mais les jardins, « désertés suite au transfert des collections botaniques à Bouchout en 1939, commencent leur descente aux enfers. » Puis viendront les tours de bureaux. Reste un patrimoine architectural préservé, et Le Bota, très vivant centre culturel de la Fédération Wallonie-Bruxelles, avec son Orangerie.

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    Carte postale, vers 1910

    C’est très gai de se promener ainsi, qu’on connaisse bien le quartier ou qu’on n’y ait jamais mis les pieds. Le familier des lieux découvre qu’il est loin d’y avoir tout vu, il les redécouvre à travers le texte et l’œil du peintre. Les nouveaux venus font connaissance avec un coin de Bruxelles d’une manière originale. Les amateurs de peinture iront de l’image au paysage en de multiples et excitants allers-retours.

    La ville aux quatre saisons, ses fêtes – Kermesse Saint-Corneille, le soir, place de la Reine (Liévin Herremans), ses événements – Matinée d’élection (Clément Brems), L’Hôtel communal en ruines (Paul Leduc). Ses monuments et ses avenues pittoresques. Mais c’est surtout la ville au quotidien, animée ou non. Bruxelles la secrète aussi avec ses beautés qui ne sont pas forcément visibles de la rue – il faut franchir une porte cochère pour accéder à La maison des Arts (Agnès Bogaert) – et ses légendes. Bruxelles la verte inspire les peintres de paysages – Le potager du Rouge-Cloître (Adolphe Keller) – et d’atmosphères, parfois surréalistes – Le peintre ou image de la brièveté de la vie (André Poffé).

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    Auguste Oleffe, En août (1909) - Terrasse de la maison du peintre, chaussée de Wavre

    Certains seront peut-être étonnés de découvrir dans la capitale de l’Europe des fermes et des moulins. Je leur en laisse la surprise, la couverture donne le ton avec Le moulin de Lindekemale à Woluwé-Saint-Pierre (aujourd’hui un bon restaurant). Fabien De Roose fournit à la fin de l’ouvrage un plan des transports en commun – le tram bruxellois figure évidemment sur les toiles contemporaines, comme Le tram vert, place Keym (Anne-Pierre-de-Kat) –, ainsi qu’une table des illustrations et une liste des peintres représentés.

    J’espère que vous vous laisserez tenter par ces balades particulièrement inspirées. Pour ma part, je compte bien emporter ce livre et emboîter le pas au guide in situ, à la première occasion. Au plaisir de marcher dans Bruxelles.