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architecture - Page 15

  • L'église St-Servais

    Inséparable de la belle avenue Louis Bertrand qu’elle domine, l’église St-Servais attend une restauration depuis des années – elle devrait commencer bientôt. Ce jeudi 23 juillet, Yves Jacqmin, notre guide PatriS, l’a présentée au groupe des Estivales, d’abord devant l’entrée où les échafaudages dissimulent en partie la statue du Saint. 

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    Paroisse historique de Schaerbeek, cette église a été construite pour remplacer la première, petite église de village, qui se situait en contrebas (emplacement marqué aujourd’hui par le grand « Vase aux Bacchantes » de G. Devreese). Il n’en subsiste que la cure et son jardin de curé. St Servais, premier évangélisateur en région gallo-romaine au IVe siècle, a été l’évêque de Tongres avant de partir pour Maastricht où se trouvent sa tombe et son « Trésor ».

     

    La décision de démolir l’ancienne église a été prise en 1864, malgré sa valeur architecturale – des artistes se sont mobilisés en vain contre cette destruction exécutée en 1905. La nouvelle église St-Servais inaugurée en 1876 et l’ancienne ont donc coexisté quelque temps. La petite, désacralisée, a servi de gymnase (on y pratiquait l’escrime) et d’école de dessin (qui préfigure l’Ecole de la Ruche). 

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    On compte une trentaine de paroisses dédidacées à Saint Servais entre la mer du Nord et Cologne. D’après la Légende dorée, inspiratrice de tant d’artistes, il descendrait de la sœur de Sainte Anne, mère de Marie. On raconte que, prisonnier des Huns, il a été protégé par des anges et un aigle. Le musée de Tongres contient des objets le concernant. Servais avait une réputation de diplomate. (C’est aussi le troisième des « saints de glace », fêté le 13 mai.)

     

    Les plans de l’église sont de Gustave Hansotte, architecte entre autres de l’église Royale Sainte-Marie. Le choix de son emplacement est lié avant tout à un plan d’urbanisme, le chœur n’est plus orienté vers l’est comme le voulait la tradition. La façade est signée. La commune de Schaerbeek s’est impliquée financièrement dans son édification, vu son accroissement démographique à la fin du XIXe siècle. 

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    L’église St-Servais est de style néo-gothique, mais de construction moderne avec une armature métallique dissimulée. Certaines pierres viennent de carrières locales, on a utilisé aussi la pierre de Gobertange. A l’intérieur, le guide nous rappelle la diversité du patrimoine religieux de Schaerbeek, tous les styles y sont représentés : éclectisme à l’Eglise Royale Sainte-Marie, romane et byzantine, néo-classicisme à Sts-Jean-et-Nicolas, néogothique pur ici et à Ste-Elisabeth (Cage aux Ours). Au XXe siècle, le néogothique sera mêlé à l’art déco ou stylisé.

     

    En outre, St-Servais a conservé son mobilier du XIXe siècle, « rescapé de Vatican II » : confessionnaux, chaire de vérité, fonts baptismaux, autels, statues polychromes, banc de communion sont restés en place. On les doit à des artisans spécialisés primés à des concours internationaux. L’orgue (1935) est remarquable, deux concerts par an permettent d’apprécier ses très belles sonorités. Il est du facteur allemand Johannes Klais.  

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    Bien qu’imitateur du XIIIe, le néogothique du XIXe siècle comporte sa part d’invention. Nous regardons des visages copiés de l’antique sous les colonnettes des ogives, une chaire de vérité en bois sculpté d’inspiration médiévale. Guillaume Geefs, l’auteur des fonts baptismaux (c’est lui qui a réalisé le monument de la Place des Martyrs) était aussi portraitiste royal. D’origine modeste (des parents boulangers), devenu bourgmestre en 1850, il a réussi une belle ascension sociale. Schaerbeek était au XIXe une commune de sculpteurs : Léon Mignon y avait son atelier, Paul De Vigne, Constantin Meunier (avant de s’installer rue de l’Abbaye), Charles Van der Stappen

     

    Les toiles anciennes accrochées à gauche du chœur proviennent de l’ancienne église St-Servais, qui dépendait du chapitre de Soignies. On y faisait la quête pour l’entretien des églises mais l’abbaye tardait à restituer cet argent à la fabrique d’église de St Servais qui peinait déjà pour assurer les travaux nécessaires. Heureusement, des curés actifs prenaient des initiatives, comme l’organisation d’un pèlerinage à St-Servais dont on faisait le tour à cheval. 

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    D’autres tableaux viennent de « couvents improductifs » fermés par Joseph II, comme la « Vision de Saint Servais » par Gaspard de Crayer, un Christ en croix et une Assomption du XVIIe siècle. A droite du chœur, une belle Annonciation est pour l’instant masquée par des échafaudages.

     

    La visite s’est terminée à l’extérieur. En prenant quelques photos avant de sortir, j’ai aperçu de beaux vitraux XIXe dans une chapelle latérale. Yves Jacqmin nous a fait remarquer qu’en faisant le tour de l’église, nous descendons : cette déclivité du terrain a été récupérée par le bâtiment, l’entrée latérale comporte un perron. Le chevet, entouré d’une grille en fonte, est surmonté de faux arcs-boutants. Une petite entrée basse donne sur la sacristie, invisible de l’intérieur. De ce côté aussi, l’église est judicieusement placée dans la perspective de la rue Gallait. 

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    Si comme moi, vous n’étiez jamais entré dans l’église St-Servais, je vous recommande la prochaine visite programmée ce jeudi 30 juillet à 12h30 – si les inscriptions sont encore ouvertes.

  • Deux choses

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    Deux choses à ajouter en ce qui concerne l’avenue Demolder.

     

    Elle porte le nom d’un écrivain et avocat belge, Eugène Demolder (1862-1919) qui a épousé la fille du peintre Félicien Rops – vous vous souvenez peut-être du portrait de Claire Demolder par Van Rysselberghe.

     

    L’été, les roses trémières montent à l’assaut des arbres de l’avenue et elles sont particulièrement belles cette année, atteignant même leur feuillage.

  • L'avenue Demolder

    Dimanche 19 juillet, 17 h. Pour découvrir l’avenue Eugène Demolder, rendez-vous était donné à la « Cage aux ours », surnom de la place Verboeckhoven dû à la ressemblance, à sa création, d’une rocaille dans la fosse du chemin de fer qui passe en dessous avec la fosse aux ours de Berne (place aujourd’hui défigurée par une passerelle blanche controversée).  

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    Photo © Sylvie Wilhelm / http://fr.sylvie-wilhelm.com/

    C’est une autre histoire qui nous éloignerait de cette « Estivale » à la découverte de façades admirables dans une avenue prestigieuse, véritable « festival d’ornements » selon la formule d’Anne-Cécile Maréchal, notre guide PatriS. Construite à partir de 1908, cette avenue bourgeoise a été conçue dans le cadre du prolongement de l’axe royal (rue Royale, rue Royale Sainte-Marie, Hôtel communal) vers la gare de Schaerbeek (place princesse Elisabeth).

     

    Parmi les huit artères qui aboutissent à la Cage aux Ours, la plupart portent les traces d’un passé industriel. Celle-ci, beaucoup plus large, dotée de jardinets de rue et de grilles qui concourent à son élégance, a vu beaucoup d’architectes et d’entrepreneurs s’y établir : ils affichaient ainsi leur « carte de visite » et se trouvaient sur place pour diriger les travaux dans le quartier. 

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    Photo © Sylvie Wilhelm

    Le parcours commence devant la « résidence Demolder », un immeuble signé J. Teughels, dont l’entrée donne sur la place. Un de ses occupants nous présente une copie des plans de façade pour M. Colignon, notaire. L’étude et la salle d’attente occupaient le rez-de-chaussée, les clercs travaillaient au-dessus, puis c’était l’appartement personnel du notaire. Les trois étages supérieurs étaient donnés en location, surmontés de chambres de bonne spacieuses. 

     

    Nous apprenons que l’ascenseur est d’époque, en acajou, avec des vitres biseautées. Les appartements – quelque 170 mètres carrés – ont des parquets de chêne garnis de frises (essences tropicales) et des cheminées de différents marbres. La sculpture d’angle est de Pierre de Soete, également médaillier. Enfin, les caves sont étonnantes, prévues pour conserver trois à quatre mille bouteilles ! 

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    Photo © Sylvie Wilhelm

    Les numéros 11 à 17, côté impair, sont du même architecte, G. Leemans, et pourtant les maisons, de plus en plus hautes, sont très différentes. L’éclectisme est à la fête dans cette avenue : art nouveau, art déco, beaux-arts s’y mélangent, entre autres. La signature de l’architecte au bas d’une façade signifie aussi qu’il est fier du résultat.

     

    Au n° 13, un grand sgraffite orné a disparu, comme au n° 11 ou au n° 14 – la guide nous montre le dessin initial des façades, ce qui permet de juger des modifications apportées en un siècle (on peut consulter l’Album de la Maison Moderne à la Maison des Arts de Schaerbeek.) Mais un sgraffite à petites fleurs blanches typiques de Privat-Livemont est encore visible au-dessus et en dessous du bow-window. Graphiste et décorateur, celui-ci enseignait à l’Ecole industrielle de la Ruche, toute proche. Les entrepreneurs avaient ici les « bonnes personnes » sous la main. Un temps oublié, l’art du sgraffite, heureusement, est aujourd’hui retrouvé.  

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    Au 17, la ferronnerie de la porte monumentale est sans doute l’œuvre du fondeur pour lequel la maison a été construite. Le plan intérieur montre la disposition typique de l’époque : loggia vers la rue, puis salon et fumoir ; à l’arrière, salle à manger et véranda. En face, plusieurs maisons de François Hemelsoet : au 24, une ferronnerie art nouveau spectaculaire a été refaite à l’identique, de même que les pilastres du balconnet qui la supporte. Au 26, les portes ont été changées pour aménager un garage, la loggia à vitraux a disparu.

     

    Du côté impair, la guide attire notre attention sur la « maison aux iris », sur d’autres récemment restaurées, sur un joli porche dont les marches dissimulent l’entrée des domestiques. Deux maisons de J. Teughels encore (ci-dessous) datent des années vingt : leurs lignes sont simplifiées, le décor stylisé, tout en gardant beaucoup d’élégance. Les quatre colonnes en granit rouge de la seconde font grand effet en contraste avec la pierre blanche de façade. 

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    Maisons J. Teughels  / Photo © Sylvie Wilhelm

    Henri Jacobs a aussi œuvré ici, notamment pour une demeure construite en deux temps, ce qu’il a subtilement masqué à l’aide d’une frise et d’autres détails qui achèvent d’imbriquer les deux parties successives. Son style s’y révèle : soubassement en pierre bleue, jeu des briques en façade, éléments art nouveau, pierre travaillée et enfin les grilles pour unifier (ci-dessous). Leur motif se prolonge devant la maison voisine, ce qui améliore encore l’impression d’ensemble.

     

    1909 a été une année faste pour Jacobs : il a gagné quatre des prix décernés par la commune de Schaerbeek. Sa maison personnelle est sur l’avenue Foch, mais il a dessiné aussi la « maison Fontaine » au 46, où nous retrouvons les pâquerettes de Privat-Livemont autour d’un visage de femme. En haut de la maison qui lui fait face, de beaux sgraffites restaurés illustrent les quatre saisons – et les quatre âges de la femme, suggère une participante. 

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    La maison construite "en deux temps" de Henri Jacobs

    C’est à Joseph Diongre, connu pour son œuvre art déco (paquebot Flagey, maison communale de Woluwe-St-Lambert) qu’on doit deux maisons pittoresques dans un style plutôt « balnéaire », aux 51 et 53. De fausses jumelles, très bien préservées, l’une plus étroite que l’autre – on peut s’amuser au jeu des différences.

     

    En arrivant au boulevard Lambermont, nous remarquons des châssis en aluminium qui ne seraient plus autorisés aujourd’hui. C’est la commune qui a créé le boulevard, en échange l’Etat a offert les deux ponts monumentaux et leurs escaliers en pierre bleue, chaussée de Haecht et chaussée d’Helmet. L’âne rouge, dans le second tronçon de l’avenue vers le square Riga, attire le regard vers deux jolies maisons aux façades renflées, décorées l’une de pommes, l’autre de raisins. Un peu plus loin, Thomas Owen a vécu au n° 74.  

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    La maison "Chu-Chin-Chow"

    A côté d’un bel immeuble à appartements, une maison néo-Renaissance est ornée de chauves-souris, anges, raisins, tête de bouc en macaron, une ambiance de bacchanale. A nouveau les signatures de Teughels, Lauwers, Diongre au bas de belles façades où règne un éclectisme « de bon goût ». Pour finir, l’étonnante maison « Chu-Chin-Chow » au n° 99 : conçue en hommage à une comédie musicale à succès adaptée au cinéma, elle date de 1934. Rénovée avec respect, elle a gardé le dessin particulier du bois qui garnit ses fenêtres et sa corniche, ainsi que le joint creux en façade. L’entrée est très originale.

     

    Si vous voulez découvrir vous-même l’avenue Eugène Demolder, sachez qu’une autre promenade guidée est prévue le dimanche 30 août, même heure, même endroit (Mise à jour 24/7/2015 : le groupe est complet.)* Un grand merci à Sylvie Wilhelm, photographe, rencontrée lors de ce parcours, pour le partage de ses photos (1 à 5).

     

    ***

     

    * Pour information, il ne reste que trois dates ouvertes pour les Estivales 2015 :

    30/7 12h30 Eglise Saint-Servais

    06/8 12h30 Eglise Saints-Jean-et-Nicolas

    06/9 17h A vélo - Schaerbeek se la joue "cottage".

  • Expos en vrac

    Dimanche matin, j’arrivais d’un bon pas aux Musées Royaux des Beaux-Arts pour revoir la rétrospective Chagall (qui s’achève le 28 juin) quand j’ai remarqué les gens qui attendaient sur les marches – le week-end, depuis janvier, le musée n’ouvre ses portes qu’à onze heures au lieu de dix. Quelques-uns patientaient, sans doute pour être les premiers dans la file, mais la plupart des arrivants s’en allaient – quel horaire dissuasif, malencontreux, pour les visiteurs d’un jour ! 

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    Cap sur le Palais des Beaux-Arts ou Bozar, tout proche, où j’ai vu bien des choses réjouissantes. D’abord V+ 2014-2015, une exposition d’architecture, présentée dans les anciennes boutiques côté rue, – bonne idée de faire revivre ces espaces bien éclairés. Des documents, matériaux, maquettes, autour de « cinq projets publics en cours d’étude ou de chantier » : un château d’eau (Ghlin), un centre culturel (Deinze), des musées – de la mode et du design (Bruxelles), du folklore (Mouscron) – et un cinéma (Charleroi).  (Jusqu’au 20 septembre.) 

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    Ensuite, et c’est aussi entrée libre, en marge de la grande exposition « Les Belges. Une histoire de mode inattendue », le joli coup de pub d’une célèbre marque de lingerie qui fête ses 150 ans, à gauche du grand hall Horta : « La mémoire de l’intime ». Cette entreprise belge met en scène l’évolution de ses parures à même la peau à travers « une sélection remarquable d'articles de lingerie datant de 1865 à nos jours ». Une présentation originale, de quoi réjouir les yeux et aussi apprécier de ne plus vivre à l’époque des corsets ! (Jusqu’au 28 juin.) 

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    De l’autre côté du hall, on est loin du travail des petites mains qui assemblent jusqu’à trente éléments pour fabriquer un soutien-gorge. Place à l’impression en trois dimensions : « Making a difference / A difference in making ». Les balbutiements de la 3D font place à présent à des objets très originaux, voire des œuvres d’art ou de design, et à des matériaux nouveaux pour  l’ingénierie et les sciences. On imprime même des robes ! Etonnant. (Jusqu’au 23 juin.)

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    De retour aux Musées des Beaux-Arts, c’est la foule des grands jours : la queue serpente pour l’achat des tickets – les Amis des Musées, heureusement, accèdent directement aux expos avec leur carte de membre. Quel monde à la rétrospective Chagall ! Une fois de plus, je vérifie qu’il vaut toujours mieux, quand on le peut, visiter une grande exposition à ses débuts et en semaine, pour regarder tout bien à l’aise. (Vu l’affluence, on a prévu des nocturnes pour les derniers jours.) 

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    Gao Xingjian, Ailleurs, Musées Royaux des Beaux-Arts, Bruxelles.

    Terminons avec Gao Xingjian, dont je n’ai malheureusement pas vu la récente rétrospective au Musée d’Ixelles. Il présente ici « L’éveil de la conscience ». Au bout du magnifique Forum où je n’avais pas encore remarqué l’accrochage de « Visio Smaragdina », vision d’émeraude de Thierry De Cordier (2009), c’est dans la première salle à gauche que le peintre et écrivain, prix Nobel de littérature 2000, a installé six œuvres monumentales « créées spécialement pour les lieux ». A l’encre de Chine sur toile blanche, une invitation à la méditation et à la contemplation. Des banquettes permettent de laisser le regard s’immerger dans cette « mer d’encre » avec ses noirs, ses gris, ses blancs – et dans une paix totale, à cette heure où personne d’autre n’en franchit le seuil.

  • Maison de caractère

    « Nous cherchions une maison qui ait du caractère » , a raconté la propriétaire d’une belle demeure schaerbeekoise, à l’angle de la chaussée de Haecht et de la rue de l’Est, qui a accueilli avec amabilité le petit groupe inscrit à la première des « Estivales 2015 » – huitième édition des promenades guidées gratuites proposées tout l’été par l’asbl PatriS, avec le soutien de la commune. 

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    Si souvent, en passant sur la chaussée, j’ai admiré la loggia d’angle et les belles façades de cette maison néo-Renaissance flamande. Aussi je me suis inscrite tout de suite à l’annonce de cette visite guidée organisée jeudi dernier. (Une seconde visite de cette maison est prévue le 3 septembre prochain.)

     

    Emmanuelle Dubuisson, notre guide, rappelle que la rue de l’Est (nom lié à la proximité de l’ancien Observatoire) a été percée à la demande de propriétaires privés, en 1881.  A cette époque, la commune attire les bourgeois et les artistes. Ce sont les héritiers Verboeckhoven (Eugène Verboeckhoven, peintre animalier et sculpteur, est mort à Schaerbeek en 1881) qui possèdent le terrain où cette maison va être bâtie et les suivantes, où seront aménagés plusieurs ateliers d’artistes. 

     

    Cette grande maison d’angle construite en 1890 pour un avocat (Maître Campioni-Balasse) disposait à l’origine d’un grand jardin, mais durant la première guerre, des voisins s’en sont approprié des parcelles. Juste en face, une maison du même style, avec tourelle d’angle, a été démolie dans les années soixante pour faire place à un immeuble de bureaux. Ici, heureusement, les propriétaires successifs ont résisté aux sirènes du progrès, qui suggéraient même de la remplacer par une station-service ! 

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    « Schaerbeek - Rue de l'Est n°2 - 002 » par Lumixbx (Wikimedia Commons)

    Pourquoi ce style Néo-Renaissance flamande, avec le mélange des briques rouges et de la pierre bleue, des vitraux et des croisées en pierre ? La visite s’intitule « Plongée dans l’éclectisme » : en façade on voit aussi des éléments néo-gothiques, un pignon en escalier sur le toit, des lucarnes dans le goût pittoresque, ainsi que des épis de faîtage. Au bout des nombreuses travées – la maison est large mais peu profonde – une frise lombarde achève le décor. 

    Les archives de Schaerbeek ayant brûlé avec l’Hôtel communal en 1911, on attribue cette maison à un architecte formé à Saint-Luc, qui a conçu d’autres belles demeures dans le quartier des squares et travaillé pour de nombreux couvents et églises. Après 1870, les libéraux de la « nouvelle Belgique » appréciaient ce style néo-Renaissance flamande par opposition au style néo-classique français.

     

    Il est temps d’entrer, après avoir appris que le bossage des pierres au bas des murs convient au caractère rustique de l’endroit à la fin du XIXe siècle, c’était encore campagnard. La porte est magnifiquement décorée et garnie de ferronneries d’époque. On monte cinq marches pour accéder au premier niveau d’où on peut admirer les vitraux art nouveau qui encadrent l’entrée, dans des tons orangés, puis les vitraux plus pâles autour de la seconde porte.  

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    Le vestibule a été transformé (confort, chauffage,…) et dans toute la maison, dont l’intérieur aussi est classé aux Monuments & Sites depuis 2004, des éléments qui ne sont pas d’origine ont été intégrés harmonieusement au fil du temps – parfois récupérés dans les chantiers de démolition des belles maisons de maître en pleine période de « bruxellisation ».

     

    Dans le salon de réception qui a conservé son mobilier d’origine, les médaillons des vitraux sont inspirés de tableaux anciens. Les vitraux intérieurs portent aussi des devises, une date : 1831, des motifs illustrant les quatre saisons. Sous le plafond à caissons (dont la peinture s’écaille en attendant un budget de restauration), des poutres se terminent par les têtes sculptées des archiducs Albert et Isabelle.

     

    Toutes les pièces visitées portent des lambris d’origine. De l’autre côté de l’entrée, après un charmant petit bureau, un grand salon de musique, pièce d’angle très lumineuse a des vitraux refaits dans les années 60, portant le blason azur et or de la famille Scribe (deux plumes croisées, quatre escargots), et sur une fenêtre rue de l’Est, un blason de réemploi non identifié qui m’a intriguée, montrant sous une couronne, un oiseau noir avec un anneau d’or dans son bec, juché sur un fer à cheval. Comme les murs peints de ramages et de couronnes de ce salon, ceux de la belle cage d’escalier, éclairée par une verrière à décor floral, ont conservé leur peinture d’origine, de très beaux tons rouge cuivre.  

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    On découvre à l’étage les pièces d’habitation familiale, le salon à l’angle avec ses vitraux refaits sur le modèle d’origine, sa loggia, et une belle cheminée en bois récupérée dans un château – le bois est présent partout dans la maison : les lambris, les parquets dont les motifs varient de pièce en pièce.

     

    Des murs clairs mènent à une jolie cuisine toute en longueur, équipée à la manière actuelle en face des vitraux, avec un coin à manger – tout ce qu’il faut pour une famille ; elle a été conçue en harmonie avec le lieu, la cheminée ancienne. Les cuisines d’origine, comme autrefois à Bruxelles, se trouvaient en cave, reliées au rez-de-chaussée par un monte-plats.

     

    Ensuite on accède à une chambre qu’habite également un chat roux, endormi en rond sur le couvre-lit blanc. Placide, il ne semble pas vite dérangé, accepte même quelques caresses. La cheminée – chaque pièce a la sienne – est imposante, une grande tapisserie d’époque agrémente le décor.

     

    Cette maison qui donne l’impression de voyager dans des temps anciens est contemporaine de la maison Autrique, construite en 1892 par Horta à deux pas d’ici. Un choix architectural et esthétique très différent. Débordant du temps prévu pour la visite, la propriétaire a bien voulu confier les avantages et inconvénients d’habiter une maison classée. Le plus inattendu, ce sont les coups de sonnette d’inconnus qui se croient à la maison communale !