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  • Le chant du temps

    Les couleurs de Kitty Crowther et le nom de Jan Toorop sur l’affiche m’ont attirée, à la bibliothèque Sésame de Schaerbeek, vers la petite salle d’exposition aux murs mauves à l’arrière (l’auditorium). L’illustratrice y montre ses dessins originaux pour Jan Toorop Le chant du temps, un album paru en français aux éditions Versant Sud Jeunesse à Bruxelles, en néerlandais à La Haye (Gemeentemuseum Den Haag/Leopold) en 2016.

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    Le nom de Jan Toorop (1858-1928) est connu en Belgique, on trouve des œuvres du peintre néerlandais dans nos musées, comme la Dame à l’ombrelle au musée d’Ixelles, et parfois aux expositions d’artistes belges, étant donné qu’il a vécu quelques années à Bruxelles et a fait partie du groupe des XX. Il fut l’ami de Degouves de Nuncques dont il a fait un très beau portrait au pastel. Toorop est né sur l’île de Java (alors Indes néerlandaises) en Indonésie, pays mis à l’honneur de l’actuel festival Europalia.

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    A l'entrée de l'exposition

    Des courbes aux couleurs vives, des fleurs, un bateau, un homme et une fillette face à la mer, des paysages, des visages… Je me suis d’abord laissé porter par ces scènes qui titillent l’imagination, ouvrent au rêve, pour le plaisir d’observer le dessin, d’entrer dans cet univers à la fois proche et exotique. Un petit homme en noir y apparaît, souvent en compagnie de femmes – Jan Toorop.

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    Vous connaissez peut-être Kitty Crowther, une raconteuse d’histoires qui a déjà écrit et illustré de nombreux albums à l’Ecole des Loisirs. Elle a obtenu le prix Libbylit pour ce récit en images sur ce peintre qui a dit un jour : « Les Indes sont indissociables de ma personne. Le fondement de mon œuvre est oriental. » Son histoire est contée en dessins ; la première des doubles pages (ci-dessous) le montre au milieu d’une végétation luxuriante, face à deux jeunes femmes aux longues chevelures en courbes typiques du symbolisme et de l’art nouveau.

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    © Kitty Crowther, Jan Toorop Le chant du temps, 2016

    « Ce récit commence sur une île. Loin d’ici. » Une seule page de texte résume le parcours d’un garçon d’abord appelé Johannes, qui était amoureux de deux princesses sans arriver à choisir sa préférée. A onze ans, « il fut envoyé tout seul sur un grand bateau aux Pays-Bas, afin de recevoir une bonne éducation. » Il n’a jamais revu ni son île ni sa famille.

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    © Kitty Crowther, Jan Toorop Le chant du temps, 2016 (détail)
    Détail inspiré de la peinture de Jan Toorop, Les dunes et la mer près de Zoutelande, 1907

    Des bandes de toutes les couleurs entourent une ile couverte d’arbres et de palmiers qui s’éloigne (ci-dessous, au milieu). Place à un panorama hollandais (à droite), un moulin à vent à l’horizon, un couple sur une barque et, dans un angle, un garçon qui les dessine. Aucune explication ni légende pour accompagner ces dessins. Au jeune Jan, les Hollandais offraient de nombreuses physionomies à saisir, ou bien la campagne où un jeune homme peut embrasser une jeune femme sous un arbre, les bois pour s’approcher d’un oiseau…

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    Une vue de l'exposition à la bibliothèque Sésame

    Chaque double page est un tableau, crée une atmosphère. « Lorsque l’on fixe longtemps quelque chose, d’autres couleurs apparaissent », écrit Kitty Crowther à la fin. Elle nous apprend que la fille du peintre, Charley Toorop, la fillette tenue par la main, « est devenue une artiste célèbre ». Conseillé aux jeunes lecteurs de 12-13 ans, Jan Toorop le chant du temps offre des dessins vibrants.

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    © Kitty Crowther, Jan Toorop Le chant du temps, 2016 (détail)

    L’exposition sur ce « livre d’artiste sur un artiste » (Lucie Cauweinspiré par l’univers onirique, la vie et l’oeuvre du peintre symboliste Jan Toorop, est prolongée jusqu’au 28 février. Vous pourrez y découvrir à travers ces dessins originaux (et sans le pli central de la reliure) le grand talent de Kitty Crowther, prix Astrid Lindgren en 2010. Jan Toorop Le chant du temps est disponible à la bibliothèque Sésame – un album à offrir sans hésitation.

  • Arts du dessin

    verhaeren,critique d'art,exposition,musée des beaux-arts,gand,msk,peinture,sculpture,illustration,dessin,gravure,culture« On dénommait jadis « Arts mineurs » les arts du dessin et de la gravure. L’expression fait sourire aujourd’hui, et il n’est guère de critique pour oser parler encore de hiérarchie dans le domaine des manifestations plastiques de la pensée. La démocratisation de l’art, le besoin intense de vulgarisation et de propagande qui possède les artistes feraient plutôt accorder la préférence aux expressions qui se peuvent tirer à grand nombre, être distribuées à bon marché et porter la bonne parole rénovatrice et encourageante dans les écoles, dans les intérieurs modestes, dans les ateliers, dans les fermes. Le tableau, l’exemplaire unique, le chef-d’œuvre bordé d’or apparaît presque comme une anomalie. Et c’est avec raison que le Salon de la Libre Esthétique fait mêmes honneurs aux estampes, aux affiches, aux illustrations du Livre et de l’Album, qu’aux toiles peintes, jugées seules dignes, jadis, de toute considération. »

    Emile Verhaeren, Quelques dessinateurs in L’art moderne, 11/3/1894.

    Catalogue « Verhaeren verbeeld / Le regard de Verhaeren », Musée des Beaux-Arts de Gand, 2016. Exposition jusqu’au 15/1/2017.

    Odilon Redon, La Fleur du marécage, une tête humaine et triste, de la série Hommage à Goya, 1885. Lithographie, Gand, MSK.

  • Verhaeren en passeur

    « Le regard de Verhaeren / Verhaeren verbeeld », c’est le titre de l’exposition du Musée des Beaux-Arts de Gand (MSK) consacrée à Emile Verhaeren en tant qu’écrivain-critique de l’art de son temps (de 1881 à 1916), la seule des expositions organisées pour le centenaire de sa mort encore en cours. A cette occasion, le musée gantois si agréable à visiter (et à découvrir de toute façon pour ses collections permanentes), inaugure un nouveau cabinet de dessins. Entre livres, illustrations et surtout peintures, pour la plupart du MSK, c’est un beau parcours dans cette période faste du renouveau artistique.

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    Théo Van Rysselberghe, Verhaeren lisant, 1898. Eau-forte, 241 x 171 mm, Gand, MSK

    Subjectif et intuitif, Verhaeren cherche à transmettre « la sensation artistique », son enthousiasme pour les novateurs, les « intéressants oseurs ». « Dès ses premiers articles sur l’art, le caractère descriptif et illustratif du texte joua un rôle essentiel. » (Catalogue) « Nous ne prétendons nullement dire le dernier mot de l’art, mais uniquement le mot de l’heure et du moment. » L’émotion intense ressentie au contact direct avec l’œuvre d’art est pour lui une véritable jouissance – « une jouissance, oui, psychique et sensuelle ».

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    Théo Van Rysselberghe, Octave Maus lisant, 1883-1884.
    Huile sur toile, 55 x 38 cm, Musée d'Ixelles, Bruxelles.

    On découvre en entrant à l’exposition un beau portrait d’Octave Maus lisant (secrétaire des XX) signé Van Rysselberghe, accroché près de celui d’Edmond Picard (les yeux fermés) par Auguste Levêque. Picard, l’avocat bruxellois chez qui Verhaeren a fait un stage dans les années 1880, lui a fait découvrir « la vie artistique progressiste de la capitale » (Guide du visiteur). En vitrine, différents documents rappellent que Verhaeren écrivait dans des revues comme L’Art moderne et La Jeune Belgique.

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    Guillaume Vogels, Vue de plage, vers 1878. Huile sur toile, 41 x 61 cm, MSK.

    Au mur, de salle en salle, des citations tirées de ses articles et essais permettent de suivre son regard sur les peintres qu’il aimait. Des paysages lumineux voisinent avec des portraits du poète par Maximilien Luce, dont il admirait l’intérêt pour les ouvriers, par Van Rysselberghe ou par George Lemmen, en hommage à « l’un des principaux acteurs du paysage culturel belge et européen vers 1900 » (Idem).

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    Léon Spillliaert, Double portrait de Léon Spilliaert et Emile Verhaeren (Edmond Deman en arrière-plan), 1908.
    Pointe sèche, 114 x 152 mm, Zoersel, NF Art Gallery.

    Verhaeren aimait aussi l’art des XVe, XVIe et XVIIe siècles, comme le rappellent ici, par exemple, des œuvres de Bruegel et de Jerôme Bosch – très beau Saint Jerôme en prière –, ainsi que ses monographies sur Rembrandt et sur Rubens : « On admire Rubens, mais on aime Bruegel. » Pour décrire la peinture flamande, Verhaeren parle d’une « manière solide, sanguine, profonde, large et grasse de sentir », privilégiant la sensualité et l’opulence.

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    Jheronimus Bosch, Saint Jérôme en prière, vers 1485-1495. Huile sur panneau, 80,1 x 60,6 cm, MSK.

    Dans cette salle consacrée à « Verhaeren et l’art ancien », une gravure de Rembrandt où la grande aile d’un ange protège au dernier moment Abraham prêt à sacrifier Isaac ; des gravures de William Hogarth que Verhaeren appréciait particulièrement ; Melencolia de Dürer, peintre à la longue chevelure rousse qu’on peut voir ci-dessous (à droite) sur un tableau de Henri Leys le montrant en visite à Anvers.

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    Henri Leys, La visite d'Albrecht Dürer à Anvers en 1520, Huile sur panneau, 1855, Anvers, KMSKA.

    Les meubles de présentation en chêne clair comportent de nombreux tiroirs à ouvrir pour admirer des trésors conservés à l’abri de la lumière, des éditions anciennes, des illustrations : celles d’Odilon Redon, de Fernand Khnopf, de George Minne. Avec Edmond Deman, libraire et éditeur, un ami proche, qui a édité 18 livres de lui, Verhaeren partageait l’amour du livre où texte, graphisme et illustration visent à l’harmonie avec originalité. Les illustrations de Redon m’ont éblouie. (Il faut absolument ouvrir les tiroirs où reposent ces merveilles.)

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    La Lecture par Emile Verhaeren de Van Rysselberghe, cette grande toile de 1903 où le poète, en veste rouge, la main levée, lit un poème à un groupe d’amis attablés autour de lui, est évidemment l’œuvre phare de cette exposition. Vous y verrez de nombreuses toiles des peintres qu’il admirait et que je ne peux tous énumérer.

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    Théo Van Rysselberghe, La lecture, 1903. Huile sur toile, 181 x 241 cm, Gand, MSK.
    De gauche à droite : Felix Le Dantec, Emile Verhaeren, Francis Vielé-Griffin, Félix Fénéon (debout accoudé),
    Henri-Edmond Cross, André Gide, Henri Ghéon, Maurice Maeterlinck.

    Bien sûr, Ensor, le « poète et musicien de la couleur », « coloriste impeccable », ou le « peintre de masques », est bien représenté. A découvrir, un prêt au musée pour deux ans, ses « Poissardes mélancoliques » (1892), œuvre vendue à un prix record chez Sotheby’s, et ce n’est pas la seule. (Des extraits de Verhaeren sur Ensor sont à lire ici.)

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    James Ensor, Les Poissardes mélancoliques, 1892
    Huile sur toile, 100 × 80,5 cm. Collection privée. Courtoisie Sotheby’s

    Admirateur des impressionnistes belges, Verhaeren s’enthousiasme ensuite, après le choc ressenti devant Dimanche à La grande Jatte de Seurat, pour les néo-impressionnistes français et belges. Il considère Van Rysselberghe, qui saura se dégager des règles, comme « le néo-impressionniste le plus complet ».

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    Paul Signac, Application du Cercle Chromatique de Mr. Charles Henry, 1888 / 1889.
    Programme de la 5e nuit au Théâtre Libre à Paris, Lithographie en couleurs, 161 × 184 mm. Collection privée.

    Que dartistes à l’honneur ! Finch, Toorop, Anna Boch, Vogels, Mellery, Heymans, Claus, Le Sidaner, Signac, Cross… Un autre beau portrait de lecteur, celui de Laurent Van de Velde par Henry Van de Velde, assis dos à la plage, à la fois portrait et paysage.

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    Xavier Mellery, Mon vestibule. Effet de lumière, vers 1889.
    Craie et encre sur papier, 54 × 76 cm. Collection privée.

    Le débat sur la place de l’art dans la société, sur son rôle émancipateur – « un art pour tous », importe à Emile Verhaeren. Il apprécie les artistes qui montrent l’homme au travail (comme Meunier), les conditions de travail et de vie du peuple (comme Luce, Laermans).

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    Auguste Rodin, La Douleur, vers 1903–1904.
    Plâtre, 25 x 25 x 28 cm. Collection privée.

    Le symbolisme lui semble plus difficile à appréhender en peinture, mais le touche beaucoup, lui qui sait la force des images en poésie. Il admire les sculptures d’Eugène Carrière et de Rodin. Du premier, on peut voir aussi un étonnant Sommeil (Jean-René Carrière) d’une modernité inattendue. 

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    Maximilien Luce, Fonderie à Charleroi, la coulée, 1896.
    Huile sur toile, 130 x 160 cm, Mantes-la-Jolie, Musée de l’Hôtel-Dieu.

    Ce très bel hommage à Verhaeren en passeur d’art est présenté à Gand jusqu’au 15 janvier et se prolonge dans un riche catalogue bilingue, qui explicite et illustre le rôle d’Emile Verhaeren au tournant du XXe siècle.

  • Ex-libris

    Rassenfosse ex libris Pipette.jpg« Limité par l’espace, Rassenfosse l’est aussi par les moyens : en quelques traits, il doit évoquer la personnalité du dédicataire, exprimer son idéal poétique, créer un climat.

    Cette forme d’art réclame habileté, élégance et maîtrise technique du dessin et de la gravure. »

     

    Nadine de Rassenfosse & Pierre Gilissen, Rassenfosse ou l’Esthétique du Livre, Fondation Roi Baudouin, 2015.

     

    Exposition à la Bibliotheca Wittockiana
    > 31/1/2016

  • Rassenfosse à la W.

    La Bibliotheca Wittockiana, près du parc de Woluwe, attire les amoureux des beaux livres. L’exposition « Rassenfosse ou l’Esthétique du Livre », offre une excellente occasion de pousser la porte du Musée de la Reliure et des Arts du livre (l’histoire de ce musée unique en son genre est racontée sur son site). La Fondation Roi Baudouin, qui gère le Fonds Armand Rassenfosse, met ici en valeur le travail du graveur et peintre liégeois dans le domaine de l’édition (jusqu’au 31 janvier 2016, entrée libre). 

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    Les parents d’Armand Rassenfosse (1862 – 1934) tenaient une boutique d’objets d’art et espéraient que leur fils unique poursuive leur activité, mais très tôt celui-ci se passionne surtout pour le dessin et la gravure. A Liège d’abord, puis auprès de Félicien Rops qui le conseille et l’encourage. Rassenfosse se fait peu à peu connaître, en Belgique et en France : affiches publicitaires, estampes pour des revues, illustrations littéraires, ex-libris... Au XXe siècle, il se montrera en peinture aussi un chantre de la femme, son sujet de prédilection. 

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    Le coin de l’aquafortiste : Armand Rassenfosse dans son atelier en 1910, manipulant la presse sur laquelle travaillèrent également
    Adrien de Witte, François Maréchal, Auguste Donnay et James Ensor. Photographie anonyme, Liège, 1910 (coll. privée).

    Dans ce musée moderne où l’amour du beau livre se décline sous toutes les formes – aux collections permanentes s’ajoutent un atelier de reliure, une bibliothèque –, on est véritablement accueilli, cela mérite d’être souligné. Une belle photographie de Rassenfosse à la presse dans son atelier précède les premières vitrines consacrées aux illustrations de jeunesse, comme cette couverture de Rassenfosse pour Nos plages, Guide du littoral (imprimé chez Bénard, son premier employeur), des gravures pour Albert Mockel, dont il dessine l’ex-libris, entre autres.  

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    La brochure du visiteur contient les légendes de toutes les pièces exposées (en petits caractères). Pour les non-initiés, le vocabulaire est parfois mystérieux : le « chagrin » bordeaux, par exemple, est une « peau de chèvre tannée à grain assez petit » (on trouve quelques définitions affichées près de l’atelier). Quant au « frontispice » souvent mis à l’honneur, c’est l’« illustration placée au début d’un livre, généralement sur la fausse page (verso) qui fait face à la page de titre (recto) », explique le glossaire à la fin de la publication très bien illustrée de la Fondation Roi Baudouin (prix modique). 

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    Armand Rassenfosse, Lettres ornées, parues dans Le Courrier français des 12 et 26 juillet 1896, encre de Chine,
    Coll. Fonds Armand Rassenfosse, Fondation Roi Baudouin, © Studio Philippe de Formanoir

    L’exposition stimule avant tout le plaisir de l’œil à se poser sur ces images que les éditeurs d’antan commandaient aux artistes pour accompagner les textes littéraires. En comparaison, la plupart des livres que nous lisons aujourd’hui sont très standardisés. La littérature est devenue plus accessible, mais quand on a sous les yeux, ou entre les mains, un de ces beaux ouvrages anciens, il y a de quoi comprendre comment naît une passion de bibliophile. 

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    Armand Rassenfosse, Illustration pour Les yeux de Berthe in Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, Paris, Les Cent Bibliophiles, 1899,
    gravure à la pointe sèche et à l’aquatinte, Coll. Fonds Armand Rassenfosse, Fondation Roi Baudouin, © Studio Philippe de Formanoir

    Comme illustrateur, Rassenfosse atteint un sommet avec la fameuse édition de 1899 des Fleurs du Mal de Baudelaire, au cœur de l’exposition. La Société des « Cent Bibliophiles » lui demande d’illustrer en couleurs chacun des textes du recueil, un travail énorme (158 poèmes, le frontispice, les titres de chapitres, plus 160 culs-de-lampe lithographiques !) On peut voir des dessins originaux de Rassenfosse sur une édition courante de Baudelaire, où il essaie des figures, et puis de très belles pages sous verre, ainsi qu’un magnifique exemplaire privé aux « contreplats ornés de deux gouaches originales de Rassenfosse, La Sagesse et La Folie ». 

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    Charles Baudelaire, Les fleurs du mal, Paris, Les Cent Bibliophiles, 1899, illustrations d'Armand Rassenfosse.
    Exemplaire n°81/115 d'Arthur Monnereau relié par A. Cuzin en plein marocain bordeaux mosaïqué et enrichi de deux gouaches originales de Rassenfosse, La Sagesse et La Folie, intégrées dans les plats de la reliure (coll. privée) 
    (Désolée pour la piètre qualité de la photo.)

    Dans tous les livres exposés, ce sont les raffinements des dessins, des vignettes, de la mise en page qui captivent. Par exemple, cette tête de femme pour la collection « To the Happy few » (Anna de Noailles, De la rive d’Europe à la rive d’Asie ; Le dernier amour de Ronsard signé P. de Nolhac ; Au courant de la Vie, par Camille Saint-Saens). Ou la légèreté de ces figures dansantes pour La maison de la petite Livia (Pierre de Querlon). 

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    Vitrine consacrée à La maison de la petite Livia de Pierre de Querlon, Paris La connaissance, 1924.
    En feuillets sous couverture cartonnée d'éditeur. Ouvrage illustré de 15 dessins hors-texte (...)

    Cà et là, quelques huiles sur carton : L’amateur d’estampes, Les jeunes sorcières (un chat noir, une goutte de peinture en guise de boucle d’oreille), des portraits de Baudelaire, de Rops. Rassenfosse a illustré des auteurs comme Claude Farrère, son ami (différentes étapes pour illustrer Shahrâ sultane), des écrivains belges et français : Colette, Lemonnier, Eekhoud, Debussy, Barbey d’Aurevilly (Les Diaboliques)...

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    Devant une couverture réalisée par Rassenfosse pour Claudine à Paris, un portrait de Colette à l'encre de Chine (coll. privée)

    Quelques ouvrages de la bibliothèque personnelle de Rassenfosse, évidemment amateur de beaux livres, offrent à voir gravures et dédicaces. Un de mes coups de cœur, c’est la trentaine d’ex-libris exposés (il en a dessiné une centaine), dont celui-ci de Marie Rassenfosse, son épouse.  

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    Ex-libris de Marie Rassenfosse

    Le service pédagogique (dossier ici) propose un atelier aux groupes scolaires : « Qu’est-ce qu’un ex-libris ? À quoi sert-il ? (…) Viens le découvrir tout au long de cet atelier : amène ton livre préféré à la Wittockiana et apposes-y ton propre ex-libris ! » Tentant, non ? 

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    Armand Rassenfosse,  Imprimerie Bénard S. A. Liège, 1908, lithographie,
    Coll. Fonds Armand Rassenfosse, Fondation Roi Baudouin, © Ville de Liège – photo Marc Verpoorten

    Ne manquez surtout pas les affiches de Rassenfosse à l’étage : un inattendu « Salon anti-boche » (1929), des affiches publicitaires (« Huile russe », « Soleil » (bec à gaz), « Calorifère Bijou »), à côté d’affiches pour diverses expositions. La belle bibliothèque du musée est juste à côté. La Bibliotheca Wittockiana conserve des collections permanentes riches et variées : reliures anciennes et modernes, livres-objets, almanachs de Gotha, sculptures, et même des hochets. Pour info, elle participera le 22 octobre aux Nocturnes des musées bruxellois.