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vivier - Page 2

  • Je ne veux pas

    Pause en poésie / 4      

     

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     Henri Horace Roland Delaporte (1724-1793)

     

    Je ne veux pas être philosophe

    Mais vivre, mais couper du pain…

    Tu peux entendre une parole

    Dans la peau rugueuse des mains.

     

    Mes semelles d’homme ont compris

    Le chant électrique et sourd,

    Le chant d’usure des pavés

    Dans la riche longueur du jour.

     

     

    Robert Vivier, Rien qu’aujourd’hui (Pour le sang et le murmure, 1954).

  • La joie

    Pause en poésie / 2      

    Vivier oiseau sur ciel bleu.jpg

    Connais-tu la joie ?

    C’est un vol d’images

    Que je n’ai jamais aperçues

    Et dont j’adore les couleurs.

     

    Peut-être bat-il en moi

    Ce bond inespéré

    D’oiseaux blancs et rouges,

    Mais j’ignore comment éclate

    La lucarne obscure.

     

    Rien ne pèse

    Sur la cloison du cœur

    Comme ces ailes du miracle

    Enfermé.

     

     

    Robert Vivier, Le miracle enfermé, 1939.

  • C'est peu de chose

    Pause en poésie / 1 
     
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    C’est peu de chose, la poésie :

     

    Un air plus tiède,
    L’arbre sans vent,
    Le soir qui cesse d’approcher,
    Les douces plantes qu’un remords
    Ramène au jardin des anciens jours.

     

    C’est peu de chose la poésie :
    Un cœur irrésolu,
    Tous les chemins qui recommencent…

     

    Et la vie peut-elle autre chose
    Que tendrement, avidement
    Recommencer ?

     

     

    Robert Vivier, Cahier d’un printemps (Pour le sang et le murmure, 1954)

    in Poésie 1924-1959, Editions universitaires, Paris, 1964.

  • Lessive

    « Elle descendait au jardin, son panier sur la hanche. Les oiseaux s’élevaient du sol et allaient se poser un peu plus loin sur une clôture ou dans la haie du jardin de la villa. Antonia tirait chaque pièce du panier, l’étalait bien, la secouait entre ses deux mains pour chasser les plis, puis se tendait sur la pointe des pieds pour accrocher le linge à l’aide de pinces de bois qu’elle prenait à mesure dans la poche de son tablier.

    Barbalala, La Lessive (Decogalerie).jpg

     Barbalala, La lessive © Decogalerie

     

    A demi détournée, elle expliquait à l’une ou l’autre voisine : « Oh ! C’est que j’ai peur qu’il ne pleuve tout à l’heure. Alors je me suis dépêchée. »
    Car il ne fallait pas blesser l’amour-propre des gens.
    « Vous êtes la première », lui criait Alice, descendant à son tour. Et parfois Alice était avant elle dans son jardin, occupée à suspendre les larges chemises de Nicolas.

    Peu à peu tous les jardins se pavoisaient. C’était un étrange peuple qui surgissait là. Les jambes des caleçons rayés se gonflaient de vent, et des bonshommes raides et soufflés se tendaient sur les cordes comme s’ils voulaient atteindre quelque chose. Ce jour-là, chaque ménage devait bien montrer ce qu’il avait, sans fausse honte. On aurait pu voir sans peine quelles dames avaient des dentelles à leurs combinaisons et lesquelles portaient des pantalons ouverts, et quels messieurs dormaient en pyjama. Mais personne ne regardait à cela : c’était du linge qu’on lavait, – et n’était-on pas tous des gens de la cité ? »

    Robert Vivier, Folle qui s’ennuie

     

    ***

     

    A partir de lundi, le poète Robert Vivier vous tiendra compagnie en mon absence. Je vous souhaite un début de printemps en douceur.

     

    Tania