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belgique - Page 20

  • Train World en gare

    On l’attendait, on y pensait chaque fois devant la jolie gare de Schaerbeek : depuis un mois, Train World est entré en gare. Avec François Schuiten à la scénographie, je me disais que ce serait bien, je me trompais : c’est fantastique ! Habitués du rail ou pas, passionnés ou non, de 7 à 77 ans, visitez ce Monde du Train qui n’a rien d’un musée ordinaire et vous fait véritablement voyager dans le temps. 

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    La gare de Schaerbeek date de 1887, son extension (ci-dessus) de 1920. Place Princesse Elisabeth.

    Quel plaisir de voir ce beau patrimoine réhabilité ! Un nouveau restaurant précède la grande salle des pas perdus et ses guichets en bois. Tout autour sont présentées des maquettes de locomotives à l’échelle un dixième – dont « Le Belge » (1835), la première locomotive à vapeur fabriquée en Belgique – et de gares belges : Anvers-Central la magnifique ; Bruxelles-Central, une des dernières réalisations de Victor Horta ; Liège-Guillemins et ses courbes calatravesques. 

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    Locomotive à vapeur Le Belge, 1835, à l'échelle 1/10

    Au-dessus, de grands écrans montrent des peintures, illustrations et extraits de films inspirés par le train : Turner, Monet, Hergé, Abel Gance... Contre un mur, un banc ouvragé parle d’une époque où l’élégance n’avait pas encore cédé la place au design. Je m’attarde devant deux bas-reliefs historiques : « In memoriam », sous la roue ailée qui fut le premier symbole des chemins de fer belges, reprend les noms des cheminots morts en 1914-18, et l’autre, un cadeau des Français reconnaissants à la Belgique en 1945, porte une croix de Lorraine. 

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    Dans la salle des pas perdus de la gare de Schaerbeek

    Les objets usuels aussi sont mis à l’honneur : un pèse-personne où on glissait une pièce, et derrière les guichets, d’anciens titres de voyage, un carnet de 5000 km en première classe, des uniformes, képis, tailleurs et calots d’hôtesses… On quitte cette salle, ses guérites et ses banquettes pour sortir sur le quai. Wagon, machine, essieux montrent la voie vers la suite du parcours, dans un nouveau bâtiment immense auquel on accède par l’arrière. 

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    Et là, mes amis, quelle ambiance ! Les locos du temps jadis nous en mettent plein la vue, dans une pénombre savamment éclairée. Sur une carte de Belgique se dessinent les premières lignes de chemin de fer ouvertes en 1835, puis les suivantes, et on verra plus loin, sur une carte d’Europe, comment le chemin de fer a franchi les frontières.  

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    Locomotives à vapeur

    C’est d’abord le temps des locomotives à vapeur, plus loin ce seront les tractions diesel puis électriques – et je pense à mon père qui nous racontait son émerveillement quand son grand-père l’avait emmené dans le poste de pilotage de la locomotive qu’il conduisait. Quel plaisir pour les enfants (et les autres) de monter dans ces fabuleuses machines ! (J’ai visité Train World un mercredi après-midi.) Partout des images d’archives accompagnent le parcours, un écran tactile rappelle les étapes du développement des chemins de fer belges de 1835 (Bruxelles-Malines) à 2015. En 1846, Bruxelles-Paris durait plus de huit heures. 

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    Des plaques de forges, fonderies, ateliers mettent à l’honneur les constructeurs, principalement wallons, exportateurs dans le monde entier – le nom de Cockerill y apparaît souvent. Les locomotives portaient des noms évocateurs (Le Belge, sorti des usines de Seraing), La Flèche, la Pays de Waes (Bruxelles, 1844, 60 km/h)…) avant  d’être numérotées selon leur modèle. La puissante Type 12 « Atlantic » aux énormes roues (Seraing, 1939,  2200 chevaux-vapeur, 140 km/h) est ici la vedette, sauvée in extremis de l’envoi à la ferraille.

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    François Schuiten, scénographe de Train World, près de la Type 12 © SNCB 

    Sous une longue dalle de verre, on découvre une voie de chemin de fer, l’évolution des rails, les traverses, les outils, le ballast. Des panneaux détaillent la construction d’une ligne, les moyens de signalisation. Partout des bouts de films, des lumières, des sons, des objets : le visiteur est immergé dans l’univers du train. La réussite de Train World, c’est de renouveler l’angle de vue à chaque passage dans un autre hall, de surprendre sans cesse. Le parcours va crescendo. 

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    Pour vous donner la mesure – ou la démesure – de ce qui vous attend, sachez qu’un hall contient une maison de fonction restée en place, dans laquelle vous pourrez entrer – décor des années 1950 – et découvrir où ont vécu des familles de cheminots. A côté, l’alarme de la barrière retentit ; une carcasse de voiture écrasée rappelle le danger d’une traversée imprudente. 

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    Photo du chantier autour de la maison de fonction / Source : Ilprovincialecheguardailmondo

    Un wagon de marchandises évoque les sinistres « wagons des déportés » de 1940-45, quand les prisonniers étaient envoyés en Allemagne en troisième classe d’abord, puis enfermés dans ce type de wagon. Gros contraste, évidemment, avec le hall suivant consacré au développement du train de vacances dans la seconde partie du XXe siècle : les affiches vantent les plages belges, les sports d’hiver, toutes les régions d’Europe accessibles en « autorail de luxe (Trans Europ Express) » ou en « train autos-couchettes ». 

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    Décors de première classe, Orient-Express d’Agatha Christie, voiture postale, caisse de crabes à la pesée (bonjour Tintin), malles, le spectacle est sur les quais, dans les voitures, et puis voici en prime deux « suites » royales. Si vous levez les yeux, vous apercevez une travée de l’ancien Pont du Luxembourg à Namur (on y monte par l’escalier ou l’ascenseur). De là, on a vue sur les alentours de la gare de Schaerbeek, sur les trains d’aujourd’hui qui passent, et on regarde d’en haut, médusé, les impressionnantes machines qu’on a contemplées d’en bas. 

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    La mécanique et les ingénieurs sont mis à l’honneur, de George Stephenson, l’inventeur de la locomotive à vapeur, à Arthur Vierendeel, concepteur de nouveaux ponts et viaducs ; l’audioguide (2 €, application gratuite sur smartphone) les présente, et aussi le catalogue illustré, « Des machines et des hommes », qui reprend toutes les étapes du parcours (compter au minimum une heure et demie, dernières entrées à 15h30). Pour terminer, une bonne surprise pour ceux qui veulent tester leur vocation (un simulateur de pilotage) ou comparer les sièges de TGV actuels. Train World : le monde du train n’a pas fini de faire rêver.

  • Arts & artistes

     D'un site à l'autre / 3 

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     © http://mu-inthecity.com/ 

     « Mu in the City est un magazine dédié aux arts visuels. Musées, centres d’art, expositions, galeries, fondations et marché de l’art sont passés en revue chaque jour par une équipe de journalistes et chroniqueurs à l’oeil averti, à la plume acérée et prolixe. Sans oublier des portraits d’artiste et d’autres intervenants du monde culturel. Basé à Bruxelles, Mu in the City couvre la Belgique et de manière ponctuelle les grandes expositions et événements majeurs à l’étranger. »

    « On écrit bien sur ce qu’on aime. J’aime aller admirer des œuvres. Chaque bon artiste ouvre sur notre humanité, notre universalité. Cela me touche à chaque fois. Plus j'en découvre, plus mon appétit pour l’art augmente. Plus je vois des choses, plus je comprends l’art. Et plus je vois de l’art, plus je comprends l’humain. »

    Muriel de Crayencour (Rédactrice en chef, journaliste et plasticienne, elle a créé le webmagazine Mu-inthecity en janvier 2014.) 

  • Traduit de Flandre

    D'un site à l'autre / 1

    Tandis que Mina et Marilyne continuent leur fidèle chronique mensuelle « d’un blog à l’autre », j’ai choisi de vous présenter, durant mes deux semaines de vacances, quelques sites que j’aime consulter. J’espère que l’un ou l’autre sera pour vous une découverte. La description est le plus souvent issue de leur rubrique « A propos ».
    Bonne quinzaine, d’un site à l’autre. Et si vous en avez envie, écrivez ici ce que vous en pensez, j’aurai le plaisir de vous lire à mon retour.

    Site Daardaar.jpg

    © http://daardaar.be/

    « En novembre 2014, notre équipe, constituée de Vincent Laborderie, Joyce Azar et David Charlier, décide de lancer DaarDaar. Nous sommes partis d’un constat étonnant mais réel : il n’existe en Belgique aucun canal d’information permettant d’avoir accès, en français, à ce qui fait débat dans les médias du Nord du pays. L’idée était lancée. L’objectif est de permettre au public francophone de mieux comprendre ce qui occupe les Flamands en lui offrant des traductions quotidiennes des meilleurs articles et éditoriaux de Flandre. »

    (Je précise qu’en néerlandais, « daar » signifie « là, là-bas », ici joliment fusionné avec « dare-dare ».)

     

     

     

     

     

  • Cabinet de verdure

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    « Le jardin de Genval longeait le lac. Dès la première fois, nous avions remarqué une masse de végétation apparemment sauvage : quand le jardinier eût ôté les orties et les ronces, nous vîmes apparaître un petit cabinet de verdure pourvu d’une table et d’un banc de marbre blanc. Au moindre soleil, je m’y retirais pour lire et dessiner. Personne n’a jamais vu ces dessins, car je les jetais aussitôt achevés. C’est que je n’ai pas dessiné par talent ou par goût du dessin, mais pour devenir Léopold dessinant. »

     

    Jacqueline Harpman, La plage d’Ostende

  • Première question

    « Pourquoi suis-je ici ? » demandait-elle
    chaque fois, quatre-vingt-dix ans, les yeux

     

    cernés de rouge depuis que les larmes
    n’y venaient plus. « Pourquoi suis-je ici ? »
    A peine capable de se mettre debout,

     

    l’appétit déclinant. « Pourquoi suis-je ici ? »
    J’avais beau lui expliquer patiemment
    trois fois, quatre fois, que cela faisait déjà

    des années qu’elle ne pouvait plus vivre seule,

     

    ne tenait plus sur ses jambes, elle savait encore

    parfaitement l’année de ma naissance, mais pas

    celle où nous étions, que « bleu outremer » était

    la couleur de la porte d’entrée chez ses

    grands-parents, mais pas le nom de l’infirmière

     

    qui venait la laver et l’habiller tous les jours.

    « Pourquoi suis-je ici ? » Puis avec un choc

    je compris : et si ce n’était pas une question

    d’aujourd’hui mais d’autrefois et là-bas, la première

     

    du catéchisme, celle avec la promesse

    d’un ciel, et je lui répondis : « Pour servir
    Dieu et être heureuse en ce monde

    et dans l’au-delà. » Elle ne me jeta même pas
    un regard : « Tu y crois encore, à ces bêtises ? »

     

    Huub Beurskens

     

    (Hôtel Eden, 2013, traduit du néerlandais par Hans Hoebeke) 

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    Eerste vraag
     

    « Waartoe ben ik eigenlijk hier ? » vroeg ze
    telkens weer, in haar negentigste, rood
     

    Omrande oogjes vanwege het gebrek aan
    traanvocht. « Waartoe ben ik eigenlijk hier ? »
    Amper nog in staat overeind te komen,
     

    weinig eetlust meer. « Waartoe ben ik eigenlijk
    hier ? » Hoe ik ook geduldig probeerde het
    haar uit te leggen, drie, vier keer, dat ze al
    jaar geleden niet meer zelfstandig wonen 
     

    kon, niet goed ter been, mijn geboortejaar
    wist ze feilloos, maar niet dat waarin we
    heden leefden, dat “diepblauw” de kleur
    van de deur van haar grootouderlijk huis

    was geweest, maar niet hoe de verpleegster
     

    heette die haar dagelijks waste en kleedde.
    « Waartoe ben ik eigenlijk hier ? » Tot ik met
    een schok dacht : wie weet is het geen vraag
    van nu, maar een van toen en daar, de eerste
     

    uit haar catechismus, die met de belofte
    van een hemel, en antwoordde: “Om God
    te dienen en daardoor hier en hiernamaals
     

    gelukkig te zijn.” Ze keek me er niet eens
    bij aan : “Dat jij nog gelooft in dat gezemel.”

     

    Huub Beurskens

     

    In Septentrion, n° 1, mars 2014,
    Le dernier cru : poèmes choisis par Jozef Deleu