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art - Page 18

  • Artiste Activiste

    L’affiche est joyeuse, le graphisme très reconnaissable, mais qui était vraiment Keith Haring dont Bozar (Palais des Beaux-Arts de Bruxelles) propose actuellement une large rétrospective ? Vous trouverez « les cinq choses à savoir sur Keith Haring » à la trop courte vie (1958-1990) sur le site.

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    En voici un extrait significatif, que je partage avec vous : « « Un porte-parole d’une société à un moment donné de l’histoire ». Voilà comment Haring définit l’artiste. Avec un langage pictural simple et accessible, il aborde des thèmes difficiles –  le racisme, la guerre nucléaire, le VIH – et les met à la portée de tous. »

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    L’exposition montre les diverses facettes de son engagement (aussi pour la reconnaissance des homosexuels et des LGBT), son parcours de la clandestinité dans le métro de New York au succès dans la sphère artistique ou sur le marché de l’art en passant par le magasin « Pop Shop », avec les mêmes motifs combinés sur des supports divers. Noir sur blanc, noir sur couleur, ou l’inverse. C’est dynamique, quoique répétitif, avec de nombreuses vidéos le montrant à l’œuvre et une longue fresque de quinze mètres de long, La Matrice (ci-dessus).

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    En face de la galerie Ravenstein, du côté de Bozar où on entre à la Cinematek, sur la jolie terrasse installée (temporairement) rue Baron Horta, on retrouve Keith Haring sur la palissade peinte en jaune qui sépare Bozar dun futur siège bancaire à lallure futuriste.

  • Lecture d'un portrait

    Portret van een jonge vrouw (Portrait d’une jeune femme) est un petit livre illustré publié en 2019 par la Fondation Phoebus. Sous ce titre, Leen Kelchtermans, historienne de l’art, raconte l’histoire du tableau éponyme, dû à un maître anversois anonyme, montré cette année à l’Orangerie du château de Moorsel dans le cadre d’une grande exposition sur la dentelle, du Moyen Age à nos jours.

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    Maître anversois anonyme, Portrait d'une jeune femme, 1613,
    huile sur panneau, 107 x 77 cm,
    The Phoebus Foundation, Antwerpen

    La collection Phoebus Focus est dédiée à la recherche de l’histoire cachée derrière une œuvre d’art. C’est ce que fait ici l’essayiste en interrogeant le contexte et tous les détails de ce portrait minutieux. « How to look chic ? » Voilà une question que se posent bien des candidates à l’élégance sur les réseaux sociaux. Nul doute que cette jeune femme, avec ses dentelles et ses bijoux, pouvait y prétendre. Elle maîtrise l’art du paraître au XVIIe siècle.

    « Une jeune femme se tient devant un mur gris foncé et nous regarde, avec un sourire parcimonieux. » (L. K.) Son col délicatement travaillé, ses accessoires coûteux attirent notre attention et aussi ce jeune visage, ces yeux en amande. Sa main droite est posée du bout des doigts sur une table couverte d’un tissu vert. En haut à droite, l’inscription « A°.1613 » indique l’année où le peintre l’a immortalisée. Ni lui ni elle ne sont identifiés.

    La qualité du tableau, la précision dans le rendu de la peau, des vêtements, des bijoux, illustrent l’essor de l’art du portrait flamand à cette époque, un genre prisé par les riches marchands. Leen Kelchtermans interroge tous les aspects de cette représentation : l’apparence, la parure, les accessoires, la pose, le regard. Elle propose une véritable incursion dans le monde du portrait féminin baroque. D’autres portraits de la même époque signés de grands maîtres lui seront comparés, avec leurs ressemblances ou variantes par rapport au Portrait d’une jeune femme.

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    Maître anversois anonyme, Portrait d'une jeune femme, 1613 (détail)

    La fraise ornée de dentelle, « collerette de lingerie finement tuyautée, plissée ou godronnée, souvent fort importante et sur plusieurs rangs, tournant autour du cou qui fut portée par les hommes et les femmes des XVIe et XVIIe siècles » (TLF), entoure le visage d’une façon spectaculaire, de même que les manchettes sur ses poignets. La jeune femme porte en plus un double rang de perles autour du cou, perles qu’on retrouve sur une sorte de diadème et sur la croix qui y est accrochée, ainsi qu’au poignet droit.

    En 1625, Jacob Cats, dit « Vader Cats », zélandais et calviniste, a publié « Houwelick », un traité de bonnes manières : une femme des Pays-Bas du Nord pouvait y lire comment il convenait de se comporter à chaque étape de sa vie, en tant que vierge, célibataire, épouse, mère, veuve. Ce bestseller est riche d’enseignements sur la condition féminine, les règles et les normes de l’époque.

    La mode vestimentaire féminine évoluera lentement au cours du XVIIe siècle, l’influence espagnole, le goût pieux pour le noir et le blanc, les tenues strictes cédant peu à peu la place à plus de souplesse, aux couleurs pastel, avec l’abandon de la fraise pour un décolleté d’une épaule à l’autre, à la française. La jeune femme du portrait porte de très beaux vêtements, avec un contraste marqué de la soie finement brodée en couleurs avec la jupe et le manteau noirs. Ses bijoux témoignent de son rang social : perles, rubis, diamants, couvrant d’oreille maintenant le diadème, chaîne en or travaillée avec pendentif autour de la taille, bagues.

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    Maître anversois anonyme, Portrait d'une jeune femme, 1613 (détail)

    Qui est-elle ? Sans doute une femme mariée. Son attitude légèrement tournée vers la droite indique qu’elle se tenait à gauche de son mari qui, sur le pendant, devait se tourner légèrement vers la gauche, ainsi qu’il convenait pour représenter deux époux, on peut le vérifier sur maints portraits de l’époque. Selon Leen Kelchtermans, la Bible est à origine de ces connotations de la droite et de la gauche, indiquant la supériorité et l’infériorité.

    Sa lecture de ce Portrait est passionnante, approfondie point par point. Elle se termine sur un examen du regard pénétrant, assuré, auquel le peintre a donné vie par de petites touches de blanc. L’œuvre, surtout de « représentation », est riche de renseignements sociologiques. L’artiste, en faisant le portrait de cette jeune femme, l’a représentée dans sa beauté idéale et dans le respect des conventions (édictées par les hommes) liées à son statut d’épouse.

    Dans ce petit livre d’art très bien illustré, quasi une page sur deux montre une reproduction en pleine page ou un gros plan d’une partie du tableau. L’analyse précise et documentée de ce Portrait d’une jeune femme donne envie d’explorer cette collection. Peut-être disposera-t-on un jour d’une traduction française ? Merci à celle qui me l’a mis entre les mains.

    * * *

    P.-S. Après contact avec la Fondation Phoebus, j’ajoute que le livre de Leen Kelchtermans sera traduit en anglais l’an prochain ; la traduction française n’est pas encore prévue. Pour info, la collection Phoebus Focus sera bientôt disponible en librairie et en ligne. (13/12/2019)

  • Trois critères

    collection#1,exposition,bibliotheca wittockiana,2019,collection privée,art,peinture,sculpture,culture« Enfin, je n’ai jamais eu de coup de foudre pour une œuvre, mais des chocs émotionnels avec un contrepoids légèrement supérieur, celui de la raison. C’est ainsi que toute décision d’achat d’une œuvre d’art impliquait que celle-ci réponde à trois critères : être originale, provoquer une émotion, et si possible, être intemporelle. »

    Mot du collectionneur, Collection # 1, Bibliotheca Wittockiana, Woluwe Saint Pierre, 29.05.19 > 15.09.2019

     

    Collection#1©Bibliotheca Wittockiana - Camille DE TAEYE, Sans titre,1984, acrylique sur toile

  • Collection #1

    La Bibliotheca Wittockiana expose jusqu’au 15 septembre une collection d’art privée – le titre Collection # 1 en laisse espérer d’autres. Le collectionneur, qui préfère le terme « assembleur », a gardé son anonymat, mais il a écrit un mot aux visiteurs pour présenter sa passion. Il a voulu que sa famille, son épouse et ses quatre enfants, grandissent « dans le beau, la simplicité et le raffinement en excluant ce qu’on appelle communément le luxe, et ce pour leur apprendre à voir. »

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    Entrée de la Bibliotheca Wittockiana

    Entrons dans l’arène avec Toro, toreador de Miquel Barceló, une belle lithographie originale en noir, à côté d’un collage très coloré. Bref préambule au grand mur couvert de 45 œuvres, dans « la tradition des cabinets de curiosités », selon les commissaires de l’exposition. « Il faut essayer de bien voir ce que l’on regarde », écrit leur « assembleur » qui dit n’avoir « aucun instinct de possession ».  Une telle présentation n’y aide pas. Il faut isoler chaque œuvre, se reporter aux légendes fournies avec un schéma, ou alors laisser l’œil et l’esprit flâner, s’arrêter à ce qui attire et puis s’enquérir d’une signature ou d’un titre.

    Même s’il est petit, Paysage à Fontvieille d’André Marchand, attire l’attention dans son cadre doré, entre un dessin géométrique pour une affiche et une aquarelle aux couleurs solaires de Michel Carrade. Des peintres très connus (Jacques Villon, Asger John, Valerio Adami, Jean Fautrier…) voisinent avec des noms que je ne connais pas, des lithographies avec des gouaches, des dessins avec des eaux-fortes, des huiles…

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    © André Marchand, Paysage à Fontvieille, 1943, huile sur panneau (Collection particulière)

    Noëlle Koning fait chanter les couleurs, dit un article sur cette artiste belge inspirée par le bush australien. Pas de titre pour cette peinture, ni pour celle, pas loin, de Camille de Taeye : ce pourrait être « Des hauts et des bas de soie », un des bons mots proposés sur le site qui lui est consacré. En haut du mur, une eau-forte de Pierre Soulages (années 50), au-dessus d’une gouache de Jacques Germain, un peintre dont la signature revient souvent dans cette collection.

    Sur ce grand mur rouge, j’ai aimé Violoniste et piano de Jean Pougny – j’admire toujours quand un univers s’impose dans un petit format (23,5 x 23,5 cm pour cette huile marouflée sur papier) – et adoré ces Oiseaux volant vers le Sud d’Alex Kosta, acrylique et gouache, où apparaissent encore certains caractères sur le papier imprimé (encollé sur toile). Les photos étant interdites, je ne peux malheureusement pas vous les montrer (les illustrations viennent du musée ou de la Toile).

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    Collection #1 © Proux & Malottaux – Obey, Make art not war, 1970, sérigraphie

    Autre découverte pour moi, les petites sculptures en fer blanc peint de Roland Roure, « comme une jonglerie entre les souvenirs d’enfance, les pages du dictionnaire, et l’art populaire » (galerie Mirabilia), un artiste qui « considère la forme “jouet” comme le poète considère la forme “sonnet”, comme le peintre “la peinture à l’huile”, un moyen d’expression. »

    Beaucoup de lithographies originales dans cette collection et une prédilection pour Picasso – trois affiches de son exposition Poteries Fleurs Parfums à Vallauris en 1948 – qui se manifeste aussi dans les Cahiers d’art exposés dans les vitrines et dans cette eau-forte biffée de ses débuts, Le repas frugal (1904 création, 1913 biffure).

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    © Frans Masereel, Grand-Place, Bruxelles, 1961, gravure sur bois

    Changement d’ambiance dans le coin salon aménagé sur un côté de la salle : les œuvres y sont mises en valeur par le décor plus intime et l’espace entre elles. Une aquarelle de Chadwick où on reconnaît les lignes anguleuses du sculpteur ; une gravure magique de Masereel, Grand-Place, Bruxelles (ci-dessus), où des colombes s’échappent des cages du marché aux fleurs : deux admirables lithographies de Spilliaert ; Lieu complexe d’Albert Bitran. Entre autres.

    A l’opposé, un autre recoin met en valeur une lithographie d’une sculpture en inox intitulée L’anneau, d’Emile Gilioli, présentée juste à côté dans une vitrine. Une belle gouache de Poliakoff, Composition verte et bleue (1960), est accrochée là entre deux fenêtres. Dans la vitrine suivante, une sympathique boîte Art Déco de bonbons Becco et un vase en céramique de la même période signé Susie Cooper, d’un joli vert doux.

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    © Susie Cooper, Vase vert en céramique, vers 1930 (Collection particulière)

    La vue de Notre-Dame de Paris du Bruxellois Piet Volckaert est accrochée un peu haut pour bien la regarder ; une gouache de Dora Maar, dont l’œuvre vient d’être montrée au Centre Pompidou, un peu bas. A nouveau, comme devant le grand mur au début, j’ai pensé aux Salons d’antan où il devait être difficile pour certaines œuvres de s’imposer, vu leur position.

    Même si l’expo se poursuit à l’étage, je termine avec une grande huile inattendue et facétieuse de Lionel Vinche : Chagall rabbin joue le ventriloque avec un évêque romain. Ce Belge autodidacte, faussement naïf, a été exposé ici en 2015. Vous le voyez, il y a un peu de tout dans cette exposition estivale hors des sentiers battus. Si la curiosité vous mène à la Bibliotheca Wittockiana, je vous souhaite un coup de cœur pour l’une ou l’autre œuvre de cette collection particulière. Ou, comme pour moi, d’y découvrir des artistes que Collection # 1 m’a donné envie de mieux connaître.

  • Collectionner

    building a dialogue,exposition,art,peinture,bruxelles,banque nationale de belgique,deutsche bundesbank,art contemporain« Lorsque les banques centrales allemande et belge, respectivement dans les années 1950 et 1970, ont pris la décision de commencer à collectionner des œuvres d’art contemporaines, elles n’avaient aucune intention d’entrer dans un débat esthétique et sociologique sur les rapports entre l’art et la vie. Mais on ne peut nier qu’une collection d’art dans un environnement de travail est bien éloignée de l’idée du white cube. Pour les deux institutions, comme à l’époque pour bien d’autres entreprises que l’on qualifiait de « mécènes », il s’agissait à la fois de démontrer leur engagement en faveur des artistes de leur pays et d’offrir à leurs collaborateurs l’opportunité de se frotter aux créations de leur temps. En retour, les artistes ont pu ainsi toucher un public nouveau et élargi, à l’écart des lieux classiquement dédiés à l’art. »

    Catalogue Building a Dialogue, National Bank of Belgium, Deutsche Bundesbank, Bruxelles, 2019 > 15.9.2019