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Belgique - Page 32

  • Aimer d'un regard

    Jacqueline Harpman me réenchante à chaque relecture de La plage d’Ostende (1991) – pour moi, son chef-d’œuvre. Si vous êtes d’humeur mélancolique, ouvrez ce roman tonique, passionné, allègre, il vous remettra d’aplomb. L’histoire d’amour, belle et féroce, d'Emilienne Balthus, une Iseut d’une telle fougue qu’elle vous entraîne dans son sillage. Dans le rôle de Tristan, un homme qui ne se donne tout entier qu’à la peinture, Léopold Wiesbeck. 

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    Spilliaert, Bateau au bassin d'Ostende 

    L’incipit est fameux, l’annonce on ne peut plus directe : à onze ans, lorsque Emilienne voit pour la première fois le jeune peintre de vingt-cinq ans, elle sait, elle décide qu’il lui appartiendra. « C’était le soleil sur l’eau, un diamant dans la lumière, la beauté elle-même qui me regardait sans me voir. Je lus ma vie sur son visage. Il avait les yeux gris comme un lac l’hiver, quand tout est glacé, les cheveux noirs et frisés, et ce teint pâle, cette blancheur laiteuse qui n’appartiennent qu’aux héros choisis par le destin. »

    Mme van Aalter, la protectrice des arts, sait déjà que « le petit Wiesbeck » sera un grand peintre. Elle partage avec la mère d’Emilienne le goût des parures (bijoux, écharpes) et de la conversation mondaine. La petite se tait, écoute, observe, rêve. De retour dans sa chambre, elle s’examine pour la première fois dans un miroir et s’aperçoit, ravie, que ses yeux sont « du même gris tourterelle que ceux de Léopold ».

    Enfant unique et petite fille modèle, Emilienne quitte d’un coup l’enfance. Elle veut tout savoir des couleurs, de la peinture, grandir, apprendre. Elle sait qu’elle est trop jeune, qu’il lui faudra attendre. Alors elle s’exerce à l’hypocrisie, au mensonge, joue la comédie aussi bien à ses parents qu’à sa grand-mère, et habitue Wiesbeck à sa présence silencieuse à son côté – « Tu fais donc de toi le page du peintre ? » observe quelqu’un.

    Lui loue avec deux amis un atelier d’artiste à Molenbeek. Quand ses parents et elle s’y rendent la première fois, Emilienne enregistre « le thé dans des tasses de fine porcelaine », les fauteuils usés, la peinture sur le plancher. Laurette Olivier apparaît, venant du petit appartement annexe, la fillette comprend tout de suite qu’elle est la maîtresse de Wiesbeck. Celui-ci bouge peu, ne parle guère. « Je ne sais quelle intuition me dicta alors que je serais comme lui et que j’aurais un geste rare qui se déploierait largement. »

    Quel défi ! « Il fallait être aimée par un homme qui ne me verrait pas avant des années et pour cela empêcher qu’il fût aveuglé par d’autres femmes. » Après la guerre, ses parents visitent « une grande maison au bord du lac de Genval », quelque chose se passe entre cette maison et Emilienne, contre la tendance de sa mère à trop remplir l’espace, insistera pour « que les grandes pièces claires restassent dénudées, avec des planchers nus bien cirés, des rideaux de voile blanc et des tables de bois sombre. » Ils y passeront les week-ends, « et bientôt c’est là qu’eut lieu la cérémonie du thé. »

    Le premier dimanche où Léopold Wiesbeck y vient, il est séduit : « Je voudrais passer quelques jours ici, dit-il tout à coup à mon père. » La lumière de cette maison l’intéresse et on décide de la lui laisser pour le mois de juillet, qu’Emilienne passe avec ses parents à la mer du Nord.

    Obnubilée par la « captation de Léopold », la jeune fille choisit dorénavant les couleurs et les vêtements qu’elle porte, travaille à être belle, s’exerce à dessiner près du lac de Genval. Après Laurette, il y aura Georgette éprise de Wiesbeck, mais elle aussi passera à l’arrière-plan quand Mme van Aalter, soucieuse de procurer à son protégé une situation favorable, lui trouve une épouse fortunée, Blandine. Emilienne la redoute moins que les autres : « condamnée à attendre jour après jour pendant des années, il me sembla que ce mariage me servirait en mettant Léopold à l’écart des passions. »

    Le premier véritable échange entre Wiesbeck et elle se produit à la mer du Nord, un hiver si froid que la mer a gelé ; comme cela n’arrive qu’une ou deux fois par siècle, tous se rendent à Ostende pour le spectacle. Le peintre est fasciné, refuse de rentrer avec les autres malgré le froid : « La plage était presque blanche sous le faible soleil, le sable et la neige se confondaient » – il lui « faut » ces couleurs. Emilienne se souvient alors d’un droguiste, chez qui ils achètent des tubes de couleur, deux planches à pain, un pinceau. Puis ils retournent à la digue et elle aide le peintre à trouver le mélange de noir et de blanc « pour obtenir la nuance exacte d’un nuage ». Il est surpris de ses conseils judicieux, bientôt il ne pourra plus se passer d’elle.

    « La plage d’Ostende », la toile éponyme, c’est à Genval que Léopold Wiesbeck la peint plus tard, lors d’un nouveau séjour. Emilienne a quinze ans, elle dénoue sa tresse avant d’entrer dans la chambre d’angle où Léopold a son chevalet : « Je portais une jupe beige pâle et un chandail couleur de perle éteinte : j’avais les couleurs mêmes de son tableau, de son âme, de sa vie. Il me vit. Pour la première fois, il me regarda et me vit. » Léopold vient à elle et toute son existence se joue, c’est ce jour-là qu’elle devient sa maîtresse, en secret. La jeune Emilienne a son amant, Blandine attrape la grippe.

    « Ce n’est pas la vie. C’est le roman en toute liberté. » (J. H.) Lisez La plage d’Ostende pour cette histoire d’amour fou, pour ces couleurs, ces paysages, pour cette héroïne tendue vers un seul but : aimer l’homme qui l’habite. Tout le roman  Du côté d'Ostende y reviendra sous un autre angle quinze ans plus tard  se résume à cela, rythmé, introspectif. Jacqueline Harpman, qui s’est enthousiasmée pour Racine et pour Stendhal à l’adolescence, était aussi psychanalyste. Pourquoi écrire ? « Jouir de la langue. Jouir des mots. J’y tiens. J’adore la langue française, j’ai envie de la servir. Je voudrais être plus modeste mais l’écriture de la langue est au centre de mes préoccupations. » (J. H.)

    « De la race des maîtresses », Emilienne Balthus s’accommodera de l’épouse, se méfiera des rivales, comprendra qu’elle aussi « a besoin » d’un mari, par convenance, et vivra sa vraie vie hors de toute convention. Les obstacles ne manqueront pas, ni les pièges, ni les combats. Longtemps après, Emilienne écrira leur histoire : « Ich Tristan. Du Isolde. » Cynique et magnifique.

     * * *

    Bonne et heureuse année 2013,
    riche de lectures et d’échanges,
    de balades et de culture,
    d’école buissonnière.
    Au plaisir d’y cheminer ensemble.

    Tania

  • Arrière-pensée

    L’exposition d’une collection privée belge au musée d’Ixelles ne se visite pas sans arrière-pensée : Bruxelles a perdu son Musée d’art moderne, fermé depuis février 2011. De nouveaux espaces avaient été aménagés pour les collections du XXe siècle des Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique autour du grand puits de lumière de Roger Bastin en 1984. Pour moi, ce fut un pas décisif qui m’a ouvert les yeux sur l’art moderne. 

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    http://museesansmusee.wordpress.com/musee-sans-musee/

    Des travaux en cours dans ce bâtiment devrait émerger en mai prochain un Musée « Fin de siècle », dans l’esprit du Musée Magritte (ouvert à côté en juin 2009). La fin du XIXe siècle et son foisonnement artistique constituent une période richement représentée dans les collections des MRBAB. On se souvient de la belle exposition « Paris-Bruxelles / Bruxelles-Paris » en 1997 au Grand Palais à Paris puis au Musée des Beaux-Arts de Gand, qui avait montré les enjeux passionnants de cette époque de l’art. 

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    ©  Marie-Françoise Plissart pour MuséesansMusée

    Mais où verrons-nous, quand reverrons-nous les arts plastiques de 1914 à 2012 ? Combien de temps tout un siècle de création va-t-il demeurer dans l’ombre ? Aucun lieu n’a même encore été fixé. Le blog bilingue « Musée sans Musée / Museum zonder museum » suit l’actualité de ce scandale avec vigilance et inquiétude. Les Amis des Musées, les visiteurs bruxellois, belges et étrangers ne cessent de le réclamer : nous voulons revoir les collections publiques du XXe siècle, nous voulons un musée d’art moderne à Bruxelles.

     

  • Cygnes

    J’ai vu des cygnes blancs
    Striés de bleu 
    Couronnés d’or 
    Et des mouettes endeuillées 
    Assises au bord 
    De l’eau claire 

    Rouge-Cloître Cygnes.jpg

    J’ai vu des oiseaux noirs 
    Dont j’ignore le nom 
    Qui volaient lentement 
    Au ras de l’étang 
    Tandis que dans mes yeux 
    Des étoiles brillaient 

    Rouge-Cloître Sur l'eau.jpg 

    Imperceptiblement 
    Je m’endormais 
    Sur l’un des bancs 
    En bois vert du ponton

    Jacques Herman, Cygnes blancs striés de bleu

     

     
  • Prose pour Permeke

    « Il ferait beau voir que la couleur ne suive pas l’altération de la forme. Elle n’y échappe pas. Après avoir resplendi comme jamais aux toiles du siècle précédent, elle semble frappée d’anémie, inspirer du dégoût. Ce sont les teintes de la boue, du crépuscule, de l’hiver, de la misère, du deuil qui l’emportent, et, jetées avec ça, sans soin, sans souci du rendu, comme si le dépit, le désespoir des hommes de ce temps devant un monde en proie au désastre s’étendaient à la peinture. 

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    Constant Permeke, Le pain quotidien, 1950 Collection MuZEE © SABAM 2012 

    Mais l’art est représentation, mise à distance, compréhension, intelligence. Ses faiblesses, son insuffisance, sa pauvreté, sa tristesse, à la différence de celles qu’on éprouve en première instance, dans la vie, sont réfléchies, voulues, hautement élaborées. Elles transfèrent l’expérience dans le plan de l’expression, subliment les affects, les passions douloureuses qui sont notre contribution à l’existence, lorsqu’elle s’assombrit. Et par le fait – c’est la magie artistique –, elles l’allègent, l’éclairent. »

    Pierre Bergounioux, Permeke (extrait) in Prose pour Constant Permeke * 

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    * Cinq écrivains étrangers ont été invités « à se laisser inspirer par une peinture de l’artiste flamand Constant Permeke ». Leurs textes figurent dans le Guide du visiteur et sur les audioguides. Lecture publique le 20 novembre à 20 heures (nocturne). Parcours découverte avec Bozar Studios.

    Deux articles pour compléter : Permeke grandeur nature (Roger Pierre Turine) et Rencontre avec Thierry De Cordier (Guy Duplat)

  • Permeke monumental

    Maître de l’expressionnisme flamand, Constant Permeke (1886-1952) n’a cessé de peindre des paysans, des pêcheurs, des scènes villageoises ou des paysages de sa terre natale. Une large rétrospective lui est consacrée au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, jusqu’au 20 janvier 2013. 

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     Constant Permeke, Buveurs de café © KMSKA, photo LukasArt in Flanders

    Dès le grand hall Horta, des portraits au fusain révèlent l’aspect monumental de ses figures, dans des tons bruns ou bistre, à l’exception d’une sanguine. Le dessin est puissant, la forme occupe tout l’espace.

    En haut des marches, La Grande Marine de 1935 (la plus grande qu’il ait peinte, pour l’exposition universelle à Bruxelles), très sombre, révèle la manière quasi abstraite de Constant Permeke dans ses paysages. « Je ne peins pas ce que je vois, mais ce que je pense avoir vu. » A la fin, on en découvrira d’autres, plus lumineux. Mais ce sont les gens ordinaires qui inspirent avant tout le peintre, il ne se lasse pas de les camper sur la toile ou le papier, assis ou debout, solides – humains. 

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    Constant Permeke, Marietje vue de dos avec châle, 1907 © SABAM 2012

    Le petit guide du visiteur relie Permeke à Emile Claus, à Spilliaert, aux peintres de Laethem-Saint-Martin. Marietje vue de dos avec châle et La fenêtre sont encore impressionnistes : Marie Delaere, ici en clair, sera au premier plan dans l’univers du peintre. Ils auront six enfants dont deux mourront en bas âge, tragédie intime. La fenêtre : un ciel bleu moiré où montent des feuillages, entre des volets, c’est une des rares toiles « luministes » où la couleur pure s’exalte.

    Les œuvres de Permeke ont souvent des couleurs sombres et au début, beaucoup de matière : on devine à peine les formes des Moissonneurs endormis. Les paysans sont en sabots ; Le Porteur, silhouette foncée aux reflets bleus, une lampe à la main, sa charge sur l’épaule, marche devant un paysage au couchant. Voilà des gens du peuple ; un homme assis, un chat sur les genoux, près d’une assiette vide sur la table ; une kermesse ; La voile rouge, un portrait d’homme auquel cette voile sert de fond, à la Spilliaert (il a occupé son ancien atelier à Ostende).

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    Constant Permeke, Femme de pêcheur (détail) – catalogue du Musée des Beaux-Arts d'Anvers

    La guerre de 1914 bouleverse tout : le soldat Permeke est gravement blessé et envoyé en Angleterre pour y être soigné. Il y restera cinq ans (trois enfants y naissent, dont Paul Permeke, peintre lui aussi, comme son père et son grand-père). Rentré en Belgique, Constant Permeke continue à s’inspirer de la vie des pêcheurs – « Des gens magnifiques, je me suis incarné en eux » – comme cette Femme de pêcheur (La jolie fille) en noir, assise sur le quai avec son grand panier devant elle, des bateaux à l’arrière-plan. Il dessine ou peint souvent ses figures sur du papier, qu’il maroufle ensuite sur la toile ou sur du bois dont il aime exploiter les nervures.

    Un chef-d’œuvre de 1922, Sur Permeke : on peut lire ces mots (« Over Permeke ») sur le journal où l’artiste lit un article parlant de lui. Il s’est représenté en famille dans cette grande peinture d’inspiration cubiste. La lampe blanche au-dessus de la table, qui éclaire toute la famille, les tasses blanches où l’on a servi du café et quelques autres blancs donnent une atmosphère particulière à cette scène de la vie domestique traitée de façon géométrique. 

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    Constant Permeke, Sur Permeke, 1922, Collection MuZEE, Oostende © SABAM 2012 

    De nombreux portraits, d’autres scènes de la vie simple à la campagne, et puis Le Cabriolet (1928) : un couple endimanché, lui en costume noir et cravate, elle en noir aussi, une croix sur sa robe, se serre dans un attelage tiré par un cheval de labour, l’élément le plus puissant de l’œuvre – ce cheval brun rouge à la crinière claire vient à notre rencontre sur un sol jaune lumineux. Pour ce dimanche ensoleillé, Permeke abandonne pour une fois les couleurs sombres de la terre. Idem dans La Roulotte, où nous voyons un tzigane et son enfant, de dos, pousser une roulotte jaune en direction d’un village.

    J’ai cherché souvent, je le reconnais, ces toiles où le peintre flamand laisse vibrer d’autres couleurs que celles des Mangeurs de pommes de terre de Van Gogh, qu’il admirait. L’embrassement : le visage presque noir de l’homme – l’art africain fut aussi source d’inspiration pour Permeke – contre le visage rose de la femme, tenue d’une grande main brune, près d’une écharpe d’un vert vif – Permeke n’hésite pas à mettre en valeur, à agrandir les mains et les pieds. Les corps sont massifs, les traits stylisés, le dessin puissant, hommage aux « gens de chez nous, leur âme, leur caractère immuable, leur simplicité. »

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    Constant Permeke, Le cabriolet 1927 Collection privée © SABAM 2012

    Ne manquez pas Léonie, une paysanne dont les contours se détachent sur un fond clair, sa présence est phénoménale, la travailleuse dans toute sa splendeur. « Elle semble sculptée » (guide du visiteur). Progressivement, Permeke a développé un art du portrait où seules les lignes, lépaisseur du trait, suffisent à donner corps au personnage.

    Peintre et dessinateur, il est aussi sculpteur. Son Autoportrait taillé dans le bois est une tête longue comme un tronc d’arbre, qu’on reconnaît çà et là dans ses peintures.  Ses sculptures sont statiques. Le gigantesque Semeur en bronze est figé, au contraire de la toile homonyme, un peu plus loin, où la petite silhouette sombre d’un semeur, le bras s’écartant du corps, suffit à suggérer la vie, l’humble travail du paysan sous un ciel sombre strié par la lumière. 

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    Constant Permeke, Leonie 1929-32 Collection privée
    Photographe: Hugo Maertens, Brugge © SABAM 2012

    Quelques vues du village de Jabbeke, où la dernière maison de Permeke est devenue musée, précèdent les paysages pour lesquels j’avoue ma prédilection : Printemps, des nuages dorés sous une bande de ciel bleu pâle, au-dessus d’un verger ; Dimanche, tout en vert et jaune, végétal. Le peintre place la ligne d’horizon très bas, le ciel se déploie en cinémascope, on se baigne dans la lumière, par tous les temps.

    C’est dans cette voie que s’inscrit un des deux artistes contemporains associés à cette rétrospective. Une petite salle consacrée aux Nus de Marlene Dumas jouxte les Nus féminins de Permeke. Après la grande salle finale et L’adieu (déchirante mort de Marietje, tout près d’un Baiser, petite peinture qui m’a rappelé celui de Brancusi), le parcours se termine avec Thierry De Cordier : de très grands formats entre abstraction et paysage. Sa peinture joue avec la lumière, le peintre y écrit ses commentaires souvent narquois. Rien d’intéressant ni de social qui puisse plaire aux critiques, déclare cet artiste. Vous m’en direz des nouvelles ?