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Culture - Page 549

  • Dimanche

     L’été n’est pas fini / 4     

    L'été n'est pas fini 2.jpg 

    Je m’assieds au bord de la ville et j’entends
    La rumeur du sang l’érosion de l’argile
    Comme si tout ce mystère n’était rien d’autre que
    La mer
    Devant mon corps assis
    La musique la lumière matérielle
    où tout est en moi où tout m’est donné
    Et rigoureusement refusé. On entend

    L’air. Je m’assieds dans la ville et j'entends 
    La rumeur de ses os et je ne ressens ni peur
    Ni désir si je pensais si je désirais
    Je ne serais pas ici silencieusement assis
    A côté de ce corps où celui que je suis
    dans cette sculpture ici d’homme assis
    Entend la mort la diaspora de la lumière
    Au travail.

    Casimiro de Brito (Portugal)

     

    Les poètes de la Méditerranée, Anthologie, Poésie/Gallimard, Culturesfrance, 2010.

     

  • Laisse tes sandales

     L’été n’est pas fini / 3     

    Dahlia 

    laisse tes sandales
    à l’entrée
    sous l’ombre des arbustes
    l’odeur du santal
    sera le premier signe
    et les lanières dénouées, le second,
    laisse ta tunique
    méticuleusement pliée
    sous ce qui vient immédiatement après
    repose-toi et ne pense qu’à l’autruche
    cours alors à sa manière
    et la poussière qui te brûlera les yeux
    considère-la présence
    de ton goût vif pour les oiseaux

    Ana Paula Inácio (Portugal)

     

    Les poètes de la Méditerranée, Anthologie, Poésie/Gallimard, Culturesfrance, 2010.

     

  • Moi et mon ombre

    L’été n’est pas fini / 2    

    L'été n'est pas fini 1.jpg

    Voici mon ombre –
    Je l’enchante, elle m’enchante
    Elle est ma compagne dans la solitude.
    Elle est sur mes pas.
    Elle partage avec moi la lumière.
    Nous sommes devenus des jumeaux.
    J’ai soif, elle a soif.
    J’ai faim, elle a faim.
    J’avais essayé une petite cellule de prison –
    Elle s’est enfermée avec moi.
    Et quand j’ai pleuré une fois,
    Ses cils ont ombragé mes larmes.
    Elle n’est pas un masque –
    Mon ombre n’est pas un masque
    A celui qui enlèverait mon masque
    Je dirais : N’arrache pas ma chair.
    Ma chair est mon masque.
    Voici mon ombre.
    Me voilà dans mon ombre.
    Elle m’enchante –
    Et je reprends mon chant.
    Je deviens son ombre –
    Depuis qu’elle est devenue mon ombre.
    Ensemble nous tomberons s’il arrivait qu’une Moudia trahisse mon ombre.

    Hassan Najmi (Maroc)

     

    Les poètes de la Méditerranée, Anthologie, Poésie/Gallimard, Culturesfrance, 2010.

     

  • Partir

     L’été n’est pas fini / 1    

    Dahlia

    Nous partons pour nous éloigner du lieu qui nous a vu naître et voir l’autre versant du matin. Nous partons à la recherche de nos naissances improbables. Pour compléter nos alphabets. Pour charger l’adieu de promesses. Pour aller aussi loin que l’horizon, déchirant nos destins, éparpillant leurs pages avant de tomber, quelquefois, sur notre propre histoire dans d’autres livres.

    Issa Makhlouf (Liban)

     

    Les poètes de la Méditerranée, Anthologie, Poésie/Gallimard, Culturesfrance, 2010. 

  • Mes frères

    « Pendant les cinq ans où nous avons travaillé ensemble au tribunal de Vienne, elle et moi, nous avons été de grands juges. 

    Cette phrase m’a alerté, cette phrase et sa façon de la dire. Il y avait une fierté incroyable, quelque chose d’inquiet et de joyeux à la fois. Je reconnaissais cette inquiétude, je reconnais ceux qu’elle habite de dos, dans une foule, dans le noir, ce sont mes frères, mais la joie qui s’y mêlait m’a pris au dépourvu. On sentait que celui qui parlait était un type émotif, anxieux, perpétuellement tendu vers quelque chose qui lui échappait et qu’en même temps ce quelque chose il l’avait, qu’il était établi dans une confiance imprenable. Pas de sérénité, pas de sagesse, pas de maîtrise, mais une façon de s’appuyer sur sa peur et de la déployer, une façon de trembler qui m’a fait trembler moi aussi et comprendre qu’un événement était en train de se produire. » 

    Emmanuel Carrère, D’autres vies que la mienne

    Ensor,Les bons juges,1891

    L’été n’est pas fini, mais sa lumière change.
    Pendant deux semaines, je vous donne à nouveau rendez-vous avec des poètes de la Méditerranée.

    A bientôt.

    Tania