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Dalí & Magritte

« A l’occasion des dix ans du Musée Magritte, les Musées royaux des Beaux-Arts ont réuni une centaine d’œuvres qui invitent à la fois à voyager dans l’univers de Salvador Dalí et à creuser le dialogue avec le travail de René Magritte. L’un et l’autre ancrent le surréalisme dans une recherche fondée sur l’exploration de la représentation mimétique. » (Michel Draguet)

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Entrée des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique (au bout de la rue, le Palais de Justice)

Ainsi s’exprime le conservateur des MRBAB dans le Guide du visiteur disponible à l’entrée de l’exposition Dalí & Magritte. Cette brochure d’une trentaine de pages (à télécharger) reprend toutes les étapes du parcours bien conçu autour de points de rapprochement ou d’opposition entre les deux peintres : « œil & avant-garde, portraits & choses, dedans & au-delà… »

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 © Dalí /  © Magritte, Le conquérant, 1926 (Leslee & David Rogath)

A l’entrée, La lunette d’approche de Magritte (1898-1967) introduit avec humour au brouillage logique des surréalistes. Une ligne du temps relate les relations entre Magritte et Dalí : en 1925, Magritte peint à Bruxelles ses premières œuvres surréalistes et Dalí (1904-1989) a sa première exposition personnelle à Barcelone. Ils se rencontrent à Paris en 1929. Invité à Cadaquès, Magritte y peint Le Temps menaçant : il faut entrer dans le cube où une projection s’en inspire, à 360°. En plus du mouvement des nuages dans le ciel, on y verra lentement apparaître puis disparaître les motifs du tableau (resté en Ecosse).

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Expérience immersive 360° à partir du Temps menaçant de Magritte

Chez les deux peintres, l’œil joue un rôle central ; l’un et l’autre sont attachés au rendu réaliste des figures reconnaissables dans leurs toiles, bien que celles-ci ne visent pas à la représentation pure et simple. Magritte cherche à rendre les idées visibles, Dalí peint avec réalisme des visions fantasques. Ses premières toiles comme le Portrait de Maria Carbona révèlent une technique formidable, on verra plus loin un ravissant petit portrait de Gala (1932).

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© Dalí, Portrait de Maria Carbona, 1925 (Musée des Beaux-Arts de Montréal)

Dalí cherche à séduire ; Magritte ne cherche pas à plaire et opte pour l’artifice afin de susciter, par un sentiment d’étrangeté, l’interrogation sur les images. De nombreuses œuvres exposées viennent de musées étrangers (américains surtout) et de collections particulières. On connaît bien La magie noire (1945) du Musée Magritte, où le corps d’une femme (Georgette M.) bleuit au-dessus de la taille sur fond d’azur et de nuages, on s’amuse à la comparer avec La magie noire (1934) d’une collection privée, un autre nu avec une colombe sur l’épaule.

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© Magritte, La magie noire, 1934 (Collection privée)

Le motif du feu, qui apparaît déjà en 1925 dans une toile de Magritte où une maison brûle (tableau dans le tableau Nocturne), est particulièrement spectaculaire dans La découverte du feu, un tuba enflammé qu’on pourrait associer à la crinière en feu d’une tête de cheval (en réalité il fondrait). Dalí, en pleine guerre d’Espagne, s’en est-il inspiré pour ses girafes en feu qui éclairent un dîner dans le désert (dessin au fusain de 1937) ? La girafe apparaît aussi chez Magritte, qui lui fait prendre un bain de cristal (gouache de 1946).

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© Dalí, Dîner dans le désert éclairé par les girafes en feu, 1937, fusain sur papier
(Dalí Museum, St Petersburg, Floride, USA)

Quand l’heure sonnera, ou la rencontre d’une statue et d’une montgolfière, a trouvé place dans une salle sur les « détournements et célébrations ». Les deux surréalistes ont transformé  une petite Vénus de Milo : Magritte lui donne des couleurs, Dalí y ouvre des tiroirs ! Tous deux, comme Arp ou Max Ernst, utilisent des formes biomorphes (Magritte, Le sang du monde) ou molles. Par exemple dans les paysages imaginaires de Dalí : La mémoire de la femme-enfant, L’énigme du désir ou Ma mère, ma mère, ma mère. Dans Les idées de l’acrobate, Magritte relie différentes contorsions avec un fusil et un tuba.

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© Magritte, Le sang du monde, 1927 (Collection privée)

Tout un mur pour le Couple aux têtes pleines de nuages de Dalí : les panneaux reprennent en silhouette les formes du couple dans L’Angélus de Millet, tableau culte de Dalí. La tête de la femme, à gauche de l’homme, s’incline vers lui. Les paysages désertiques avec une table à l’avant-plan sont typiques du peintre espagnol, avec une précision incroyable dans les détails de l’arrière-plan. Il partage avec Magritte le goût de peindre des nuages dans un ciel bleu, de jouer sur intériorité et extériorité, entre autres.

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© Dalí, Couple aux têtes pleines de nuages, 1936
(Museum Boijmans Van Beuningen, Rotterdam)

L’exposition se termine sur des toiles tardives, comme ce Magritte représentant deux jeunes filles qui se promènent en ville, l’une habillée, l’autre nue. A la fin de leur vie, les deux peintres étaient sollicités pour des portraits. Une photographe professionnelle capturait les détails du fascinant portrait d’Enid Haldorn. Dalí a aussi peint Mme Isabel Styler-Tas (Mélancolie), une composition inspirée par Piero della Francesca : l’étonnante combinaison de formes humaines, minérales et végétales y est assez fascinante.

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Affiche à l'entrée de l'exposition (au-dessus de la Diane d'Ossip Zadkine, 1937)

« Flirts surréalistes », titre L’Echo. Bien plus passionnante que je ne l’imaginais, l’exposition Dalí & Magritte réussit à associer ces deux « monstres sacrés » de manière convaincante. Le parcours bien balisé et le petit Guide aident les visiteurs (nombreux) à regarder et à comparer leurs oeuvres. A voir aux Musées royaux des Beaux-Arts jusqu’au 9 février 2020.

Commentaires

  • Quel billet fantastique, si intéressant et bien illustré!
    Réunir ces deux surréalistes (j'ignorais qu'ils étaient proches, se rendaient visite) est une gageure, une idée brillante, et difficile à réaliser sûrement.
    Un coup de cœur pour les girafes:-))
    Comme je ne verrai pas cette exposition, je te dis mille mercis.

  • Merci pour ton enthousiasme, Colo. J'ignorais aussi qu'ils s'étaient rencontrés, d'abord à Paris autour du "Chien andalou" de Bunuel (un extrait impressionnant est montré à l'exposition), puis à Cadaquès.

  • Ton article est extrêmement intéressant Tania ! Passionnant de voir les univers des deux peintres qui s’entremêlent et se répondent.
    Grand Merci pour les liens qui enrichissent encore ton billet. Belle journée !

  • Claudie, je te recommande le Guide du visiteur (en ligne) qui commente certaines œuvres.

  • Magritte, oui, mais Dali je suis imperméable et même un peu hostile, plus que réticente en tout cas. Mais tu mets bien en évidence ce qu'ils ont de commun et qui vaut qu'on les réunisse!

  • L'exposition qui les met côte à côte est très bien conçue, l'extrait programmé pour demain suit ta préférence, que je partage, bien que j'admire certaines œuvres de Dali comme "La tentation de Saint Antoine" (reprise en partie sur l'affiche) et suis éblouie par sa technique.

  • Dali, j'ai vu Cadaquès; je crois qu'au bout d'un moment, on était dans la supercherie; mais certaines œuvres sont intéressantes. Magritte, j'ai vu la belle expo parisienne, j'aime beaucoup, même si cela me semble par moments trop lisse, plat……..En revanche, ton article donne envie de plus y réfléchir. Très intéressant!

  • Il me semble qu'il y a plus d'humour et de poésie chez Magritte, mais je connais mieux son oeuvre que celle de Dali. Heureuse que cette présentation de l'exposition t'ait intéressée.

  • Je t'en souhaite déjà bonne visite.

  • Autant j'aime Magritte (et le musée de Bruxelles qui lui est consacré), autant je déteste Dali. Mais je dois dire que ton article me convainc de l'intérêt de ce rapprochement et me donne envie d'aller visiter cette expo !
    Bonne journée, Tania.

  • Avec la rétrospective Brancusi, ce sont les expositions phares du moment, et il y en a d'autres qui valent la peine en ce moment - à Schaerbeek même (billet à écrire). Bonne journée, Anne, et bon séjour à Bruxelles bientôt ?

  • Finalement, c'est assez logique qu'ils se soient rencontrés. J'avoue une nette préférence pour Magritte, même si je suis séduite par certaines oeuvres de Dali.

  • C'est Miro qui l'a introduit auprès du groupe surréaliste en 1929 à Paris, où il a côtoyé Magritte, entre autres, "dont la peinture le convainc que le surréalisme est possible sans passer par l'automatisme" (Guide du visiteur).

  • Quelle chance tu as d'avoir pu découvrir cette exposition. Réunir ainsi les deux grands représentants du surréalisme, c'est une idée vraiment géniale.
    Et une rétrospective Brancusi (encore un artiste que j'aime beaucoup ! ), vous êtes gâtés !

  • Oui, c'est une période vraiment faste pour les amateurs d'art : d'autres billets d'exposition suivront, les catalogues vont l'emporter sur les romans ;-).

  • Bonjour Tania, je rejoins Colo pour te dire bravo pour les illustrations. Tu donnes très envie d'aller visiter cette expo et merci pour toutes les infos que tu donnes. Je connais un peu Dali mais très peu Magritte. Bonne journée.

  • Merci, Dasola. J'espère que tu pourras y aller et découvrir cette confrontation intéressante entre les deux peintres.

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