L’été n’est pas fini / 8
Avant que d’avancer puissamment dans la nuit, avant que de risquer ses avalanches chaudes,
Mesurez l’ampleur en vous d’un hiver précoce et le poids de lumière qu’il faudra lui opposer.
Sachez que le poète n’a d’existence que dans le lieu sans privilège du doute passionné et de la ferveur menacée.
Retournez-vous sept fois dans vos songes avant d’y bâtir un espace, fermez vos yeux sur la parole comme on mouche la bougie pour suivre l’ascension du jour.
Vous élirez pour frontière un vent dissimulé, et ce jaillissement du souffle qui est la faveur des amants couronnés. Vous serez sur la terre d’un poignant exil, vos gestes verdiront, vous glorifierez vos yeux, soit !
Mais chacun de vos pas désormais sera le pas d’un ermite affamé. Dans chacun de vos dons vous craindrez ce froid trembleur et inflexible qui afflige le soir. Chacun de vos regards, comme la dédicace de l’aveugle, sera l’éloge d’un fascinant secret.
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Jean-Pierre Siméon (France)
Les poètes de la Méditerranée, Anthologie, Poésie/Gallimard, Culturesfrance, 2010.