A la fenêtre où sont les jacinthes bleu-Pâques,
Une Année au visage oublié m’apparaît
D’entre l’odeur des bleues jacinthes, et les vagues
Parfums que les printemps disparus arboraient.
C’est l’année où, par les innocentes prairies
Où le bonheur mêlait indolemment leurs jeux,
Les beaux avant-héros et les avant-meurtries
Dansaient avec la Paix sous les pommiers neigeux.
O mil neuf cent quatorze en fleur, ô jeune fille-
Année, avec quel doux désespoir désuet,
Profonde comme une ancienne photographie,
Ton âme entre les bleues jacinthes apparaît…
Marcel Thiry (Plongeantes Proues, 1925)
* * *
Recommencer, naître à nouveau, voilà
ce que disait le Maître, ce que nous
n’avions pas compris. Nous regardions
le ventre de la terre, les nuages, le ciel
et demeurions aveugles, tandis que l’hirondelle
revenait à sa place exacte, reprenait
possession du vent. Et nous, qui de si loin
désirions partir, nous restons sur le seuil
sans savoir où aller, comme prisonniers
d’une route invisible et de la peur de perdre,
en plongeant dans la lumière d’avril,
le goût de l’eau, le parfum des ombres
et le plaisir de toujours remettre à demain…
Guy Goffette, Printemps I (Le pêcheur d’eau, 1995)
* * *
Le second poème, je l’ai ajouté après avoir appris que Guy Goffette avait rejoint le ciel qu’il aimait tant.
A vous qui passez ici,
bonne fête de Pâques !
Tania
Commentaires
c'est précisément celui-là mon préféré des deux
Joyeuses Pâques, chère Tania
Merci, Adrienne, bon lundi !
J'aime beaucoup les deux, un peu nostalgiques, et ces hirondelles qui prennent possession du vent...
Bon dimanche de Pâques, un beso
Un baiser pour toi, Colo, toujours au rendez-vous de la poésie.
Tu m'apprends la disparition de Guy Gofette, je vais rechercher un recueil que j'ai de lui. Il était évoqué cette nuit sur France-Culture. Il y avait une série de rediffusions sur Verlaine, la poésie était à l 'honneur.
"Guy Goffette, il est mort notre prince des poètes gaumais" titrait l'Avenir. Il avait 76 ans.
Bonnes fêtes de Pâques à toi aussi.
Merci, Aifelle.
Pour le plaisir de lire de la poésie, merci.
Mais la nouvelle de la mort de Guy Goffette m'était inconnue: c'est un poète dont j'ai plusieurs recueils. Je ne sais plus comment et grâce à qui je l'avais découvert, mais je l'aime bien.
"Artisan du livre, orfèvre des mots, poète jusqu’au bout des ongles même quand il écrivait en prose, enraciné dans sa Gaume natale et Parisien d’adoption qui avait intégré le comité de lecture de Gallimard, couronné par les plus prestigieux prix littéraires, complice de nombreux auteurs dont il était aussi un fin lecteur, Guy Goffette était un homme multiple autant qu’un écrivain d’une totale cohérence." (Le Soir)
Bonne fête de Pâques à toi ! J'ai aussi préparé des poèmes de Guy Goffette pour mon rendez-vous poétique de mercredi.
Merci de l'annoncer ici, Anne, à mercredi.
Merci pour ce beau partage poétique. Ces deux poèmes sont très beaux mais je préfère le second qui me parle davantage aujourd'hui, et peut-être aussi parce que tu m'apprends que l'auteur de ces mots est mort, une triste disparition dont je l'avoue je n'ai pas encore entendu parler mais la semaine dernière m'a trouvé un peu éloignée des médias, ceci explique cela. Bonne fin de weekend
C'est la floraison de mes jacinthes sauvages qui m'a ramenée au premier. Pour Guy Goffette, voici un lien :
https://le-carnet-et-les-instants.net/2024/03/29/deces-de-guy-goffette/
Tout est magnifiquement dit, merci à ces poètes qui font danser les mots avec tant de talent... Merci à toi de les partager.
Avec plaisir, Brigitte.
Quand l'hirondelle reprend possession du vent... quelle belle définition du printemps ! Merci de me faire découvrir ce poète.
D'autres vers de Goffette en cliquant sur son nom, tu l'auras vu.