Pour commencer l’année en beauté à Bruxelles, rien de tel qu’un tour à la Brafa, au rendez-vous des merveilles des temps anciens et modernes, à profusion. La foire des antiquaires attire de plus en plus de monde à Tour & Taxis : objets de qualité, présentation recherchée, ambiance festive – de quoi s’en mettre plein la vue !
Outre le plaisir d’y retrouver des artistes que j’admire, j’apprécie d’y découvrir une signature que je ne connais pas, comme sur cette marine d’Amédée Marcel-Clément, Le canot s’éloigne (1938) – un peintre breton, m’indique la galeriste (Ary Jan) – ou sur un portrait art nouveau d’Elisabeth Sonrel, Beatrix au laurier d’or. Deux petits Fantin-Latour me retiennent là, tout au début du parcours, dont un merveilleux bouquet de roses.
Amédée Marcel-Clément, Le canot s’éloigne, 1938, huile sur toile, 60 x 92 cm
(Galerie Ary Jan, Paris)
Fantin-Latour, Roses, 1879, huile sur toile, 27,5 x 35,5 cm (Galerie Ary Jan, Paris)
D’un stand à l’autre, on change complètement d’univers. Celui de la Galerie Mathivet, spécialisée dans l’art Déco, présente deux « salons » meublés et décorés d’objets d’art, de belles toiles aborigènes y attirent l’attention. Si j’en avais les moyens, j’acquerrais plutôt cette table basse de Diego Giacometti, avec ses hiboux et ses grenouilles.
Vue partielle du stand (Galerie Mathivet, Paris)
Table basse de Diego Giacometti (Galerie Mathivet, Paris)
Steinitz de Paris offre un décor à l’ancienne de toute beauté : lambris, tissus, meubles, porcelaines de premier choix. Je suis subjuguée par ce Bacchus en terre cuite de Lucas Faydherbe, une figure joviale comme en peignaient les maîtres du XVIIe siècle. Cet artiste malinois a travaillé dans l’atelier de Rubens avant de s’établir dans sa ville natale. Ce buste de sa collection personnelle provient de sa descendance. Quelle expression dans ce visage souriant, quelle souplesse dans le rendu de la chevelure et du drapé !
Lucas Faydherbe, Buste de Bacchus, vers 1645. Terre cuite. H 78 cm (Steinitz, Paris)
L’artiste contemporain invité cette année est le duo des excentriques et inséparables Gilbert & George, avec plusieurs vitraux à leur double effigie. Les superbes décorations florales des allées (photo 1) leur volent la vedette. Des fleurs, on en trouve aussi sur un grand tapis d’Orient suspendu, sur un remarquable collier aux glycines de Philippe Wolfers. Bien sûr, les bouquets peints ne manquent pas : voyez ce Bouquet de branches de cerisier, signé Louis Valtat (vers 1928, galerie Bailly).
Philippe Wolfers, Collier aux glycines, art nouveau, vers 1901-1902
(Epoque Fine Jewels, Kortrijk/Courtrai)
© Louis Valtat, Bouquet de branches de cerisier, vers 1928, 73 x 54 cm (Galerie Ary Jan, Paris)
Chez Francis Maere, on retrouve chaque fois des peintres belges de la fin du XIXe ou du début du XXe. De Spilliaert, présent sur plusieurs stands (beau Parc d’Ostende, à la galerie Jamar), voici un magnifique Arbre en hiver (1919), non loin de Pêcheurs sur le quai d’Anto Carte. De ce peintre que j’aime, mon coup de cœur est Le petit Arlequin présenté à la galerie Lancz – quelle douceur chez cet artiste pour représenter la maternité !
Léon Spilliaert, Arbre en hiver, 1919, fusain et crayon sur papier (Francis Maere, Gand)
© Anto Carte, Le petit Arlequin, vers 1928, huile sur toile, 100 x 80 cm
(Photo Lancz Gallery, Bruxelles)
Oscar de Vos est un autre galeriste belge bien connu de Laethem-Saint-Martin. Il a joliment mis une scène champêtre d’Emile Claus en valeur, au centre du stand : Après la traversée (1899). On y remarque d’abord la vache, puis les canetons, la poule dans un panier près du chemin qui mène au pré. Dans cette composition très réussie, présentée comme une suite à ses Vaches traversant la Lys, la lumière enchante. Chez le même galeriste, on peut voir de grands paysages de Valérius de Saedeleer, des bronzes de Rik Wouters dont une splendide Contemplation, que je vous ai déjà montrée.
Emile Claus, Après la traversée, 1899 (Photo Galerie Oscar De Vos, Sint-Martens-Latem)
Rik Wouters, Contemplation, 1911 (Galerie Oscar De Vos, Sint-Martens-Latem)
Si je m’intéresse surtout aux peintures et aux sculptures, je me suis arrêtée aussi devant bien d’autres objets comme ce petit meuble marqueté, dont je n’ai malheureusement noté ni les références ni l’exposant. La galerie Claude Bernard offre tout son stand à l’orfèvre contemporain Goudji, que j’avais découvert lors d’une édition précédente de la Brafa : animaux, aiguières, plats d’argent sertis de pierres semi-précieuses, son univers est fascinant et intemporel.
Goudji à la Galerie Claude Bernard, Paris
J’ai manqué le corset peint de Frida Kahlo, un grand bouquet de Chagall, une couronne aux épis en bronze doré pour un miroir de Coco Chanel et bien d’autres choses remarquables – l’an prochain, il faudra préparer une fiche ! J’ai bien vu l’épée de Rubens (Fondation Roi Baudouin), une grande encre de Chine de Fabienne Verdier à la Galerie Schifferli qui expose aussi une lumineuse Composition de Geneviève Asse (1968).
© Fabienne Verdier, Champs d’énergie, 2013, encre de Chine sur papier Japon
(Galerie Schifferli, Genève)
Tant à regarder ! Si cela vous tente, le catalogue de la Brafa 2019 peut être feuilleté sur son site, où certains exposants proposent un tour virtuel. La Brafa se visite à Bruxelles jusqu’à dimanche, ce 3 février 2019.
Commentaires
Quelle magnifique variété! Tout cela fleuri et bien présenté semble-t-il.
Mes coups de cœur vont au Petit Arlequin et au secrétaire en marqueterie.
On peut y acheter des œuvres ou c'est type exposition?
Bonne journée Tania.
Oui, la présentation est très soignée, on marche sur une moquette au dessin original conçu à La Cambre chaque année, c'est très luxueux.
On peut acheter à la Brafa, c'est le but de cette foire des antiquaires, et les points rouges étaient déjà nombreux quand je l'ai visitée lundi. Les prix sont à l'avenant de la qualité des objets, tu l'imagines bien. Moi, je n'y vais que pour le plaisir des yeux.
j'espère avoir le temps d'y aller, avant la Monnaie... j'ai hâte et très envie, encore beaucoup plus après ton billet :-)
(fan d'Emile Claus :-))
Bonne visite, j'espère que tu auras le temps d'y flâner un peu.
J'admire toujours " la belle ouvrage", aussi ton article est un régal Tania ! Merci vraiment ! Dommage que Bruxelles soit si loin mais il me reste le catalogue virtuel. J'ai un faible pour la table basse et je suis assez épatée par le rendu du tableau au couchant, avoir osé avec tant de réussite ce vert omniprésent, ...Bravo l'artiste. Admiratrice de Fabienne Verdier et de "Passagère du silence" je n'ai jamais vu un de ses tableaux " en vrai" . Bonne journée et bises.
Merci pour ton enthousiasme, Claudie. Comme toi, j'ai aimé lire Fabienne Verdier, mais c'est sa première oeuvre que je vois "en vrai". Bonne soirée.
J'aime beaucoup la peinture de Louis Valtat mais je pense que le cadre élaboré ne flatte pas l'image
Bonsoir, Jane. Tu peux voir ce bouquet de Valtat sans le cadre ici : http://www.artnet.fr/artistes/louis-valtat/bouquet-de-branches-de-cerisier-a-MhU3mLdGzvmWh_w85E8QoA2
Quelles merveilles. j'aurais eu un faible pour la table basse moi aussi. J'aime beaucoup l'arbre en hiver, mais vous connaissez mon goût excessif pour les arbres :-)
Spilliaert a beaucoup peint les arbres dans ses dernières années, une période moins cotée en général, mais que j'apprécie aussi - pour les arbres, pour la finesse.
J'ai vu plusieurs fois des expos de Fabienne Verdier à Paris, je la retrouve avec plaisir ici. Que de magnifiques oeuvres ! C'est le genre de visite qu'il faut préparer si l'on ne veut pas se disperser. Je suis admirative aussi devant le superbe bouquet de branches de cerisier. Je vais aller feuilleter le catalogue.
Bonjour, Aifelle. Tu as parlé de Fabienne Verdier, je m'en souviens.
Il est difficile de bien se préparer à une telle foire, j'avais retenu les stands à ne pas manquer, mais je découvre ensuite dans la presse des objets que j'aurais aimé voir. Trois heures ne suffisent pas, et au bout de trois heures, on commence à moins bien regarder ; il y faudrait plusieurs visites.
J'ai été frappée par l'arbre en hiver, que j'avais l'impression d'avoir vu hier dans mon paysage ... et j'ai vu que c'était de Spilliaert (un artiste que j'aime beaucoup). Dans cette belle série, j'aime aussi F. Verdier (dont, en littérature, je recommande l'entretien avec Charles Juliet). Merci pour cette série et bonne journée.
Merci de me signaler cet entretien, Nikole. Ce matin, l'ambiance est celle de ce Spilliaert : de la neige tombée cette nuit, des arbres nus.
Quelle belle promenade, j'en apprécie particulièrement la variété, je comprends que tu t'y rendes rien que pour le plaisir des yeux ! Cette année, mon mari et moi projetons de nous rendre à la FIAC, Paris à l'automne, ce sera donc balade en art contemporain.
La Brafa se veut "une foire éclectique à taille humaine et conviviale". L'art contemporain y prend place aussi depuis quelques années, heureusement la diversité des époques est préservée ainsi que la variété des objets.
Bonne balade d'automne à la FIAC.
Merci pour ton compte-rendu de la Brafa que j'aimerais découvrir une fois, mais ce ne sera pas encore pour 2019. Ma préférence va au tableau d'Emile Claus dont j'avais beaucoup apprécié la rétrospective à Gand il y a quelques années.
Une belle rétrospective, je m'en souviens. Bon week-end !
C'est formidable cette diversité, je suis en amour avec le collier aux glycines, quelle merveille ! À bientôt Tania. brigitte
Merveilleux, oui. Tu trouveras un meilleur rendu des couleurs et des gros plans sur le site de l'exposant : https://www.brafa.art/gallery/Epoque-Fine-Jewels
Avec quels soins tu a préparé ce compte-rendu! Merci, merci. Une longue promenade pour moi avec cet article. Une foire, c'est vrai. On retrouve quelques noms connus. "Champs d'énergie" est étonnant ! Si l'on me montre l'oeuvre, je ne dirai pas que c'est Fabienne Verdier ! Le couple Gilbert&Georges est souvent à Paris, Frida Kahlo récemment.
Merci à toi de l'apprécier : c'est redoubler le plaisir d'une telle visite que d'en rendre compte. J'ai souvent vu reproduites des calligraphies de Fabienne Verdier, ici c'est autre chose, sa peinture évolue, toujours porteuse du geste, il me semble.
Un chat dans l'arbre en hiver ?
Ha ha, j'ai aussi eu l'œil attiré vers cette excroissance !
J'aime beaucoup ces foires. On y découvre tant d'oeuvres diverses. C'est toujours un grand plaisir d'autant plus que les stands sont souvent ornés de merveilleux bouquets de fleurs. Merci pour cette oeuvre si pleine de force de Fabienne Verdier. De l'énergie en stock pour le reste de la semaine !
Oui, cette variété est stimulante, d'autant plus que dans le cas de la Brafa, ce sont pour la plupart des oeuvres et des objets de grande qualité.
Plein les yeux avec toute cette diversité!
A Bruxelles, c'est l'événement à ne pas manquer au début de l'année, pour les amateurs.