Quand l’homme de lettres dit
qu’il couche quelque chose par écrit
et répète qu’une fois encore
il va jeter une idée sur le papier
qu’il la rejette de sa tête
de sa corbeille à idées
Et puis
comme les chats noirs d’aujourd’hui
et des siècles passés
qu’il ronronne un instant
et s’endorme en rêvant
sur le papier couché
et qu’il entende
l’éclat de rire de la forêt
à qui on demande ses papiers
Oui qu’il entende
les arbres de cette forêt
clignant des feuilles
et déclinant leur pedigree
Jacques Prévert, Arbres (Gallimard, 1976)
Commentaires
J'ai habité un arbre belge. L'eau était gratuite et vivifiante. Notre facteur s'est suicidé quand la commune a été fusionnée avec une big localité. Celle-ci nous a taxés au nombre de robinets... L'arbre a perdu ses racines.
Avant d'arriver à Jacques Prévert, j'ai pensé que ce texte-poème était de Raymond Devos...étrange, non?
L'arbre de la photo est si majestueux, tout en mouvement, superbe!
"C'est l'hiver les arbres sont en bois" Jules Renard
Les arbres font le contraire des humains , quand l'hiver arrive ils se déshabillent !
Et les hommes tous les ans en abattent des millions juste pour en faire de la pâte à papier qui deviendra journaux ,revues,comptes d'apothicaires qui disparaîtront dans les corbeilles de l'oubli déjà beaucoup trop pleines.
Mais on aura beau planter ces feuilles ,jamais un arbre ne pourra repousser !
Seuls les livres ,les carnets d'écoliers et les journaux intimes ont des feuilles persistances .
@ JEA : Mais pas ses racines immatérielles ?
@ Colo : Nous avons fait connaissance en traversant un parc, son geste a répondu au bonjour des passantes. Bonne après-midi, Colo.
@ Gérard : Quant aux blogs sans papier ni encre, confiés à la fée électricité, quelles corbeilles les recueilleront ?
J'espère que le votre ( de blog) Tania durera longtemps . Car il nous est aussi indispensable que le coup de main qu'on donne à un ami , à un voisin . Mais il s'étiolera bien sûr ,tout doucement , en même temps que les corbeilles virtuelles de nos disques durs ( de la feuille) !
Quand à la fée électricité elle a déjà beaucoup à balayer devant sa porte et ne sait plus quoi faire de tous ses poisons radioactifs qui s'entassent dans des bidons scellés au fond de galeries souterraines et qui malheureusement , eux ,ne périront jamais !
Vivent les "sans-papiers" !
@ Gérard : Merci beaucoup, Gérard.